AccueilAccueil  tumblr  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  MembresMembres  GroupesGroupes  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
FORUM FERME
Le Deal du moment : -20%
Ecran PC GIGABYTE 28″ LED M28U 4K ( IPS, 1 ms, ...
Voir le deal
399 €

oh my god(s)

 :: abandonnés
Invité
Anonymous
oh my god(s) Empty
oh my god(s) - Sam 12 Mai - 18:13

oh my god(s)
Feliks Murtagh ∞ Pya Vetula


Flashback. 2012.

On – à savoir l’Église, la Bible et Dieu – demandait aux fidèles une croyance aveugle. Ayez la foi était quasiment le non-conseil le plus répandu parmi les bancs de costumes chics et de robes à volants, lorsque la messe sonnait la fin tous les dimanche matins. Votre mari vous trompe ? Il reviendra, ayez la foi. Votre fils préfère donner son corps au fils des Hammer – lèvres, langue et dents comprises – plutôt que son âme à son travail ? Dieu n'oublie pas son troupeau, il le reconduira sur le droit chemin, ayez la foi. Pour faire simple, c'était la formule magique, celle qui vous apportait espoir et réconfort, qui vous prouvait que vous n'étiez pas seul, quelle que soit votre épreuve. Et Pya aimait cette idée, ce repousse-solitude permanent, elle s'y était accrochée avec une ferveur impitoyable au fil du temps. Lorsque ses parents avaient connu une fin tragique, broyés par les eaux acides du lac marécageux dans lequel leur voiture était tombée, après avoir glissé sur une plaque de verglas. Lorsqu'elle avait patiemment attendu à l'orphelinat, observant dans son coin chacune de ses sœurs repartir en serrant dans leurs mains des mains de parents. Lorsque son père adoptif lui avait assuré qu'il valait mieux rester enfermée derrière des vitraux plutôt que d'évoluer à l'extérieur, entre les bombes et les artisans de la terreur. Enfin, lorsqu'il lui avait promis qu'il pourrait arranger les choses, la guérir du sang entre ses cuisses. Aie la foi, Pya, et tout ira en s'arrangeant.

Sauf que, malgré les prières, rien ne s'était arrangé. Les anges étaient restés sourds et les hommes consciemment aveugles. Et les obsessions du Père Avila s'étaient changées en folie terrifiante.

Elle s'était dit que cela ne changerait rien à ses croyances mais la vérité, c'est qu'elle se souvenait tous les jours de ce matin où elle s'était réveillée, le padre au bout de son lit, qui tenait la robe blanche comme une croix à porter. Le matin où Dieu s'était absenté.

Et elle aurait vraiment aimé croire qu'il lui était possible de retrouver cette foi inébranlable, celle qui lui permettait de tout affronter, mais les jours tombaient au fond du sablier et Pya la sentait usée, un brin effilochée. Elle la rapiéçait comme elle pouvait mais ses moyens se révélaient limités. Du moins, jusqu'à aujourd'hui.

Le dénommé Remi Callahan avait pris naissance dans le creux moelleux des rumeurs, grandi au chaud sous les acclamations ténues et les recommandations discrètes, avant de venir s'échouer jusqu'à l'attention de Pya. Pya qui n'y croyait pas, pas tout à fait. Un homme au corps-caoutchouc, aussi malléable que de la pâte, qu'il prenait soin de modeler différemment à chaque nouvelle demande, un homme abstrait, doté de mille identités en une seule, dont le code génétique ne serait qu'une succession de points d'interrogation... Voilà qui ressemblait fort à une fable pour enfant. Pya connaissait l'étrangeté du monde, lui était intimement liée sans qu'elle n'en ait vraiment conscience, mais cette forme de sorcellerie dépassait la logique et criait au blasphème sans qu'aucun mot ne soit prononcé. Elle ne l'accusait pas de mentir, simplement de ne pas être tout à fait honnête. Il devait y avoir subterfuges ou altération de la perception, des sens, et elle n'aurait pas dû perdre de temps avec ce genre de change-peau païen mais le fait est que, du temps, elle en disposait d'un paquet.

Pya passait ses journées à remplir le vide, à combler l'ennui. Lisait des livres rapiécés trouvés sur des marchés aux puces, des manuels d'apprentissage, regardait les films que lui offrait la Calavera, priait avec la régularité d'un métronome et l'assiduité d'un premier de la classe. Se languissait de ce monde qui se dessinait derrière sa fenêtre, avec ses hautes silhouettes sévères et ses éclats de métal que le soleil illuminait comme des vitraux poussiéreux.

Vivre dehors devait être tellement palpitant ; elle savait que son imagination ne se révélerait jamais à la hauteur de ce qui l'attendait. Mais elle ne maîtrisait pas encore assez bien les codes de cette ville pour prétendre s'y aventurer et il lui restait son anglais à perfectionner, une langue rugueuse en bouche, bien moins mélodieuse que l'espagnol si cher à son cœur. En attendant, si elle ne pouvait se rendre dans le monde réel, elle comptait bien en attirer quelques morceaux jusqu'à elle.

Comme s'il avait entendu ses pensées, des coups frappèrent à la porte. C'est lui. Ça ne peut être que lui. Son regard balaya une dernière fois le loft dans lequel on l'avait placée ; la pièce était propre, comme à son habitude, et dans un coin, un bâton d'encens brûlait en silence, éparpillant sa fumée  épaisse jusqu'au plafond. Patchouli. Son préféré. Celui qui l'apaisait, même dans les moments de stress. Tout était parfait. Il n'y avait plus qu'à ouvrir.

Par bien des aspects, Pya s'apparentait à une fée, une du genre de Peter Pan, car il lui arrivait parfois de se sentir submergée par une situation à un tel point qu'elle n'était plus capable que d'éprouver une seule émotion à la fois – joie, impatience, colère. Aussi, lorsqu'elle tendit le bras pour ouvrir la porte, sa main ne tremblait pas. Gagnée par une assurance extatique, qui avait balayé toute inquiétude – demander à voir l'Omniprésent, le Créateur, restait après tout un pêché d'orgueil, mais elle en ressentirait de la culpabilité plus tard. L'heure était à l'action.

Elle tira le battant vers elle et aperçut pour la première fois depuis un long moment un bout du monde extérieur, un corbeau arraché du ciel et jeté à ses pieds ; à voir si celui-ci serait de mauvais augure ou simple messager de Dieu. Elle l'observa attentivement, les prunelles mordorés glissant sur la silhouette, sur les plis de ses vêtements, sur les minuscules rides que creusaient ses sourires. Au-dessus de son crâne, se dressait une tignasse emmêlée d'un noir de jais, puis venait ensuite une paire d'obsidienne sous un éventail de cils sombres, et une tenue tout aussi bariolée habillait un teint lunaire. Pya le trouva beau, quoiqu'un peu triste.

Elle lui sourit, un sourire enjouée, bien qu'un brin intimidé. « Holà ! M. Callahan ? », demanda-t-elle dans un murmure conspirateur, marqué d'un fort accent cubain. Peu importe combien de fois elle avait essayé de s'en débarrasser, certains tics de langage demeuraient, comme rouler les r. Lorsqu'il lui eut confirmé son identité, elle s'écarta afin de l'inviter à entrer dans son antre. Le secret enrobait cette rencontre comme une écharpe de velours, tout n'était que chuchotis, porte dérobée et orgueil voilé. Personne ne devait savoir qu'il était venu la voir. Mieux. Personne ne doit savoir ce que je lui ai demandé. Même si je n'y crois pas. Personne.

« J'ai entendu dire que vous pouviez... », engagea-t-elle immédiatement, tout en prenant place derrière son comptoir. Mais elle marqua une pause. Elle chercha ses mots, ceux adéquats à la situation, ceux qui entameraient aussitôt les hostilités. Vous métamorphoser. Faire fondre votre peau, votre chair, vos os, pour mieux les ressouder en un autre que vous. Briser les lois de la nature. «... changer. », compléta finalement avec modestie la demoiselle.

Elle jeta un regard au petit tas d'argent qu'elle avait préparé. Sandro, son garde du corps, et Dieu l'en remerciait, avait bien voulu retirer une petite somme de son compte épargne – celui auquel elle avait eu accès à sa majorité. « Je ne sais pas combien... ». Les doigts palpèrent les billets verts, glissèrent dessus, comme si elle prévoyait de les recompter, mais finalement, elle poussa le petit monticule de papier froissés vers l'homme et décida qu'il était temps de se jeter à l'eau. Paupières closes, elle posa ses paumes sur le bois, prit une profonde inspiration qui lui fit tourner la tête, puis quand il fut temps d'expirer, demanda rapidement : « MontrezmoiDieu. ». Il ne peut pas comprendre si tu oublies les pauses entre les mots, idiote.

« J'ai besoin que vous... ». Elle chercha la terminaison pour cette conjugaison mais l'excitation hachait sa concentration et elle finit par abandonner l'idée, l'accent cubain palpitant plus fort que jamais sous les lettres qui roulèrent ensuite de sa bouche : « Devenir Dieu. ». Et elle lui sourit, un sourire simple, enjoué, sans détour, qu'elle lâcha avant de pousser un peu plus l'argent vers lui. Une demande lancée avec la naïveté du Petit Prince, lorsqu'il exigeait si simplement dessine-moi un mouton.

Montre-moi Dieu. Parce qu'ils affirment qu'Il n'est pas l'Unique, qu'il en existe une infinie d'autres, et que je ne peux pas l'admettre. Dessine-moi l'impossible.

Code by Silver Lungs
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Anonymous
oh my god(s) Empty
oh my god(s) - Mar 22 Mai - 13:02

Pya
&
Feliks
i was atheist until i realized i am god.
Si Feliks a l'estomac noué, il n'empêche que le kitsune frétille sous ses côtes, pulsations enthousiasmées par la curiosité, et un peu plus encore : par l'appât du gain. C'est une chose qui ne l'a jamais franchement branché, auparavant. L'argent. Si ce n'était pour se payer de quoi s'anesthésier l'esprit pour une poignée de minutes éphémères. Toutes ses économies sont passées dedans. Rue pour demeure, voûte nocturne au plafond, c'est les poches vides que Feliks s'est retrouvé à déambuler mélancoliquement, maître des plus étroites ruelles, ami des vagabonds. Le maigre pécule amassé durant des semaines à s'improviser marin, à découvrir que les flots devenaient synonymes de nausée au premier quart d'heure passé. La vaisselle des autres récurées, à l'arrière du restaurant de son oncle, et puis, les plateaux renversés, les gestes rendus maladroits par ses pupilles recroquevillées. Il avait de quoi vivre, de manière simple, très simple en réalité, mais de s'en sortir. Quitte à se trouver un logement minuscule, mais un logement quand même. C'est ce que se disaient ses parents, pour se rassurer. Feliks s'en sortira. Mais Feliks ne s'en est pas sorti. Parce qu'il n'a jamais été de ceux qui regardent droit devant eux, dans un but précis, dotés de concentration, de ténacité nécessaires à un travail abouti. Pour le suivre, fallait incliner un peu la nuque à la verticale, laisser le regard grimper quelques mètres au-dessus des étoiles. Esprit paumé dans les méandres de son univers, à croire qu'il ne pouvait que partir aux antipodes de son frère. Âme jumelle destinée à s'élever, lorsque le second demeurait cloué au pavé, à rêver de galaxies insaisissables, résine encrassant ses artères. « Pourquoi tu te fais du mal comme ça ? » Après les reproches, les éclats de voix, c'est tout doucement que la voix de sa mère est venue taquiner la corde sensible, faisant vibrer la douleur au fond de sa poitrine. La dernière fois qu'il l'a vue, dans l'allée du cimetière. Ce qu'elle n'a jamais compris, c'est qu'il ne songeait pas à se faire mal, Feliks. C'était plutôt tout le contraire. Lueur faiblarde dans un monde où il peinait à trouver sa place, assourdissant le mal-être collé à ses tripes depuis sa naissance.
Alors, lorsque son point d'ancrage s'est détaché, disparaissant de la plus cruelle des manières, Feliks n'a pas cherché à remonter à la surface. Tout ce qui lui importait alors, c'était de couler le plus rapidement possible, de laisser les ténèbres l'engloutir une bonne fois pour toute. Veines noyées, éveil forcé, c'était il y a un an et il n'a toujours pas cicatrisé.

Alors, c'est le kitsune qui panse les plaies. Efface la douleur sous d'autres préoccupations. Celle de profiter de la détresse pour s'enrichir. Toujours un peu plus. Et pour la première fois, c'est facile. De manière si surprenante que c'en est presque flippant, parfois, lorsqu'il fait les comptes, qu'il redemande à Ezra de calculer à nouveau pour s'assurer qu'il ne s'est pas trompé. Affolant de voir à quel point certains sont prêts à payer en l'échange d'une ou deux heures passées auprès d'un être cher. Parfois, aussi, c'est un peu plus gênant. Lorsqu'il se retrouve presque à jouer les escort sur commande. C'est là que le kitsune se fait le plus présent.

Et d'autres fois, c'est l'inconnu. Un nom, une adresse. Aucune indication sur l'être dont il revêtira les traits. Alors, c'est plus compliqué. Il n'a qu'un an d'entraînement, Feliks, à se transformer sur demande. S'il n'a pas le temps de s'imprégner de la carcasse à copier plusieurs jours à l'avance, la ressemblance est parfois approximative. La durée avec laquelle il tient dans cet autre corps également. C'est toujours un peu plus angoissant, alors, mais il ne refuse pas.« T'y perds rien, au pire, tu leur expliques que c'était un premier contact, que vous fixerez un autre rendez-vous où tu te transformeras, qu'il te faut un peu de temps. Vaut mieux ça qu'une transformation ratée. » Mots sages d'Ezra, suivis lorsque la situation se veut trop complexe. Pas toujours, car il n'est pas vraiment du genre patient. Que l'égo du kitsune veut qu'il essaye, toujours, et qu'il réussisse. C'est avec détermination qu'il a donc pris le chemin le menant à l'adresse obtenue par Ezra, agent improvisé s'étant mise à jouer les intermédiaires. Aucune information supplémentaire qu'un lieu, un nom. Après avoir fait profil bas dans les transports, mis quelques temps à s'orienter dans le dédale des rues de delray hollow, le prétendu Remi est arrivé. L'estomac noué, alignant trois coups contre la porte, il en est presque venu à retenir son souffle dans l'angoisse de la personne sur qui il va tomber. Et ses demandes. Tenir compagnie aux attristés, sous l'apparence des fantasmes, des défunts, c'est toujours un peu délicat, faut l'avouer. Alors, il espère secrètement qu'il ne sera pas question de se rapprocher. Se tenir la main, à la rigueur, se prendre dans les bras. Mais les baisers, le reste ça, il n'y est pas habitué.

La jeune femme qui lui ouvre n'est ni grisonnante, ni repoussante. Il se redresse un peu, Feliks, sort les mains de ses poches, alors qu'un sourire en coin monte à ses lèvres. Le silence est de mise alors qu'elle le détaille. Un instant, il se demande si elle risque d'être déçue par son apparence initiale, basique, inintéressante d'après lui. Lui, en tout cas, n'est pas mécontent. Du tout. Il se demande presque si c'est bien elle qui l'a sollicité, ou si sa mère risque de débarquer d'un instant à l'autre. C'est qu'elle est jeune. Plus que lui. Et jolie. Jolie, ça lui reste bien en tête, mais il se fait violence pour conserver une attitude strictement professionnelle. « Bonjour, Mademoiselle. Effectivement, en personne. Remi Callahan, enchanté de vous rencontrer. » La politesse, c'est nouveau aussi. Il s'y est mis il y a quelques mois, face à la clientèle huppée de ses débuts. C'est toujours légèrement maladroit, comme si ces mots ne trouvaient que difficilement leur place dans sa bouche. Et il entre. Des tas de questions en tête, traits impassibles, alors que son regard se promène sur l'intérieur du loft. Evidemment, l'oeil ne tarde pas à tomber sur l'argent posé sur le comptoir, et il doit se faire violence pour reporter un regard détaché sur la jeune femme. « Vous avez bien entendu. » Un sourire amusé aux lèvres, Feliks finit par se décontracter légèrement, venant remettre machinalement une main dans sa poche, à en oublier ses bonnes manières. « Il vous suffit de demander. C'est aussi simple que ça. » La confiance est importante, pour masquer les doutes qui peuvent l'habiter. S'imposer en magicien, maître de l'impossible, nécessite de se départir de ses airs mal assurés. Du ton hésitant. Face à elle, il ne sait réellement s'il est plus aisé de se détendre qu'avec les autres. Sa requête demeure un mystère, et seules ses propres suppositions peuvent l'aiguiller. Il en est à se demander s'il devra prendre l'apparence d'un de ses parents - en n'en voyant finalement aucun débarquer depuis quelques minutes - lorsqu'elle reprend la parole. L'argent.

Il s'approche, Feliks, rompt la distance qui le sépare du comptoir alors qu'il se positionne en face d'elle. « Tout dépend de la requête, et du temps que vous souhaiterez passer en ma compagnie. » Les formulations toutes faites débitées mécaniquement, alors qu'il contemple le petit monticule vert, qu'il ne s'en empare pas immédiatement. Et ça lui fait presque mal dans le ventre, de ne pas les glisser immédiatement dans son portefeuille. Il faut faire plaisir au client. La jouer comme si t'étais content d'être là, que le paiement n'était qu'une formalité. Là encore, c'est la voix d'Ezra qui résonne. Ezra qui a toujours été si réfléchie, si intelligente. Alors, sa main achève sa course dans sa nuque et il ne fait pas le moindre commentaire supplémentaire.
De toute manière, avec ce qu'elle lui sort, il ne parvient à prononcer un mot de plus, sur le coup. Sourcil arqué, incertain face à sa demande, ses lèvres s'entrouvrent sans qu'aucun son n'en sorte. Dieu. Pas mon père, pas ma mère, pas même tel garçon, telle fille. Dieu. Voilà autre chose. Même lorsqu'elle le répète, il met un temps à enregistrer, à comprendre à travers ses grands yeux et son sourire qu'elle est sérieuse. « Dieu. » L'esprit se met à carburer à cent à l'heure. « Vous me demandez de devenir Dieu. » Il faut avouer que Feliks n'a jamais été très féru des préoccupations religieuses. Qu'il a de sérieuses lacunes en la matière. Il n'a pas franchement de souvenir de ses représentations, ni dans la littérature, ni sur internet. Parce que c'est pas franchement le genre de chose qui a pu l'intéresser un jour, en fait. Tout ce qu'il sait, c'est qu'il en a rencontré deux, des prétendus Dieux, depuis qu'il est revenu d'entre les morts. Qu'ils étaient très différents l'un de l'autre, si ce n'était ces auras captivantes, obnubilant le kitsune. C'est ce dernier qui s'exprime, d'ailleurs, lorsque Feliks finit par répondre : « Bien sûr que je peux vous montrer Dieu. Le devenir. C'est dans mes cordes, Mademoiselle. » Et un air assuré, un sourire pour appuyer le tout. Qu'est-ce-que c'est que ce bordel. Peut-être qu'il est tombé dans une secte. Chez une illuminée ? Il s'inquiète légèrement de ses intentions, à la scruter, à ôter sa veste pour faire mine de se préparer. « Peut-être voudriez vous vous asseoir ? Il faut que je me prépare quelques instants. » Il a l'air prévenant, alors que la pression se répand dans ses veines. Merde. Merde. Il a le coeur qui se met à palpiter à cent mille et les mains moites. Il aurait dû lui dire non. Lui rire au nez. Plutôt que de risquer de griller sa réputation en se manquant au passage. Il a envie d'appeler Ezra au secours. Et puis, il y a la fierté. Terrible orgueil surnaturel qui le pousse à s'exécuter.

Il n'a qu'à procéder comme il le fait d'habitude. S'accrocher à une image. Des impressions. Des sensations. Modeler l'apparence dans son crâne, initialement, pour laisser la chair suivre les désirs cérébraux. « Je vais devoir me déshabiller. Il arrive que mon corps exige d'occuper plus de place que ce que mes vêtements ne le permettent. » C'est toujours à ce moment-là qu'il esquisse un petit sourire charmeur, en règle générale, ce qui fait bien rire les clients. Là, pourtant, il a le trait crispé et la lippe qui reste coincée. Il ne sait absolument pas ce que ça va donner. Déboutonnant machinalement sa chemise pour éviter d'en faire sauter les coutures, il vient la déposer sur le dossier d'une chaise, au-dessus de sa veste. Un instant d'hésitation, et c'est la boucle de sa ceinture qui s'ouvre, la braguette qui descend, et son pantalon qu'il ôte. « Simple précaution pour éviter tout désagrément à la hulk. » Brin d'humour lui faisant regagner quelques airs assurés, malgré la situation qui peut toujours sembler déplacée dans les premiers instants.

Le voilà en sous-vêtements, venant se positionner au centre de la pièce aux rideaux tirés. « Cela peut prendre un certain temps. » Par là, il entend quelques dizaines de minutes. Loin de s'imaginer à quel point cela pourra en prendre réellement. Il la regarde quelques secondes supplémentaires, avant de clore ses paupières.
L'aura des dieux qu'il a rencontré. Les découpes de leur apparence. L'attraction irrépressible ressentie à leur égard. La puissance dépassant l'entendement. Les vagues souvenirs d'enfance, lorsque l'on pouvait évoquer un être supérieur. Les prières perdues vers un destinataire inconnu, lors de l'accident de son frère. La fin. Le lourd sommeil déposé par l'héroïne cristallisant ses veines. La mort. Le kitsune. La grandeur. La résurrection. Les cieux. Les images préconçues.
Et ça s'installe. Alors que ses mains viennent attraper son visage, sursaut du coeur alors que les cartilages se modifient, que la charpente est ébranlée et que ses os semblent se déformer sous sa peau. Un grand vide dans l'estomac, appréhension inévitable dès que le changement s'opère, glisse vers l'inconnu, se remodèle. On ne peut pas dire que ça lui fasse mal, à proprement parler. Sensation d'une chute libre interminable, de soubresauts imposés par chaque craquement, chaque déformation. Les images défilent au fond de son crâne, les genoux heurtent le sol alors que la tête se met à tourner. Il aurait probablement dû s'asseoir, lui aussi, à s'imaginer que ça serait rapidement terminé. Le désastre ne fait que commencer, alors que la morsure dévore ses omoplates dénudées. « Ne vous en faîtes pas, ça peut paraître impressionnant, mais c'est normal. » Tonalité changeante dans la voix, s'étranglant à moitié alors que ses mains se décrochent de son visage, ne camouflent plus rien de sa transformation, trop occupées à s'écraser au sol pour mieux soutenir sa carcasse recroquevillée. Parce que de part et d'autre de son échine, ça continue à creuser. A venir délier ses os pour en extraire les prémices de deux ailes.

CODAGE PAR AMIANTE
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Anonymous
oh my god(s) Empty
oh my god(s) - Sam 16 Juin - 13:25

oh my god(s)
Feliks Murtagh ∞ Pya Vetula

(www)

« Il vous suffit de demander. C'est aussi simple que ça. ». Pya aurait probablement pu se mettre à ronronner de plaisir, tant ces deux petites phrases la comblèrent. Elle allait Le voir, elle allait enfin obtenir la réponse à son unique question. Elle savait que Dieu ne lui ferait pas vraiment face, que seul un imposteur se dresserait devant elle, qu'un leurre destiné à adoucir les doutes peuplant son cœur, mais elle éprouvait le besoin de cette confrontation jusqu'aux tréfonds de son être.

Le dénommé Rémi s'approcha et l'excitation de Pya grimpa d'un cran. Elle ne voulait pas croire en son tour de passe-passe mais l'homme semblait si confiant qu'il ne pouvait être un charlatan, n'est-ce pas ? Il n'aurait pu être gagné d'une assurance si tangible s'il avait su qu'il ne proposait que des subterfuges, pas vrai ? En réalité, elle voulait y croire, désespérément, mais elle ne souhaitait pas que le ballon de baudruche gonflé d'espoir, qui grandissait depuis qu'elle avait entendu parler de lui et de ses facultés, explose en un gros crac teinté de déconfiture. Elle n'avait pas envie de s'accrocher à un mirage, qui se dissiperait une fois accroché à ses doigts.

« Tout dépend de la requête, et du temps que vous souhaiterez passer en ma compagnie. », expliqua-t-il en véritable professionnel de la métamorphose. Piégée dans son tourbillon d'impatience, Pya ne remarqua pas que le regard de l'homme ne cessait de retourner explorer le petit monticule de billets verts. Elle réfléchissait, son cerveau turbinait à cent à l'heure, presque au rythme des battements effrénés de son cœur. Non, décida-t-elle de façon définitive, je n'ai pas besoin de beaucoup de temps, à peine cinq minutes. Je dois juste Lui demander pourquoi Il a laissé faire, pourquoi Il a détourné Ses yeux, lorsque je priais si fort que j'aurais pu en perdre la voix. Un sourire reprit possession de ses lèvres et au lieu de lui répondre, elle se contenta simplement de lâcher sa demande, une demande frappée du sceau de l'inconscience et de la naïveté.

« Dieu. », répéta-t-il, oui, Dieu, pensa-t-elle. Pourquoi semblait-il aussi déstabilisé ? Ne lui avait-on jamais réclamé de voir le Créateur, l'Unique ? Comment pouvait-on passer à côté d'une telle chance ? « Vous me demandez de devenir Dieu. ». Elle hocha à nouveau la tête pour confirmer sa requête, sans le lâcher de ses iris mordorés, puis pencha légèrement son visage sur le côté, saisie par une idée déplaisante. Peut-être ne pouvait-il pas accéder à son souhait, peut-être que le Concepteur du monde ne pouvait être reproduit, que cela s'apparentait à un blasphème, une hérésie qu'il ne se pouvait risquer à provoquer. La première flèche de déception la transperça et elle se sentit soudain idiote, avec cet étalage de verdure factice sous ses mains et ses désirs étranges pleins la tête. Elle s'apprêtait à faire marche arrière, lorsqu'il reprit d'une voix plus forte : « Bien sûr que je peux vous montrer Dieu. Le devenir. C'est dans mes cordes, Mademoiselle. ». Le soulagement la terrassa, les traits de son visage se détendirent, et elle lui sourit à nouveau. « Perfecto. », murmura Pya, la poitrine serrée par l'anticipation.

« Peut-être voudriez vous vous asseoir ? Il faut que je me prépare quelques instants. ». Elle acquiesça et prit place sur un tabouret. Elle était prête à patienter une petite éternité s'il lui offrait ce qu'il lui avait promis. « Je vais devoir me déshabiller. Il arrive que mon corps exige d'occuper plus de place que ce que mes vêtements ne le permettent. ». Perchée sur un tabouret, mains posées sur ses genoux, elle acquiesça. « Bien sûr, je vous en prie. ». L'impatience palpitait sous sa peau, cognait contre sa poitrine, et fourmillait jusqu'au bout de ses doigts, mais elle essayait de garder une certaine contenance, de se montrer mesurée. Elle ne voulait pas que Rémi la considère comme une hystérique – ce qu'elle n'était pas. Pya, elle était simplement régie par la passion, poussée par une curiosité dévorante du monde et des autres, elle s'enflammait facilement, retombait toujours durement, mais elle ne criait pas en vain ou ne prêchait pas dans les rues des couplets sur Jésus.

Les boutons se défirent de leur prison de tissu sous les doigts habiles de l'homme et les pans de sa chemise s'écartèrent. Aucun homme ne s'était jamais retrouvé à demi-nu sous ses prunelles chastes, même pas le padre, qui s'était toujours contentée de la regarder, elle. Alors, Pya observa attentivement l'effeuillage, ne sachant pas s'il lui en tiendrait rigueur ou non. Les yeux glissèrent sur le torse, étendue de peau pâle, puis s'aventurèrent jusqu'à ses bras, marqués de muscles fins, puis jusqu'à ses jambes, coiffées de poils noirs. C'était une vision agréable, elle ne pouvait pas le nier, et le rouge lui monta aux joues. « Simple précaution pour éviter tout désagrément à la hulk. ». Elle força un sourire sur ses lèvres – elle comprenait la référence, grâce aux films que la Calavera lui fournissait – puis détourna les yeux pour ne pas se faire surprendre en pleine étude, que certains auraient pu nommer voyeurisme. La curiosité était définitivement un vilain défaut.

Lorsqu'il eut terminé de se dévêtir, il se plaça au centre tout en la prévenant. « Cela peut prendre un certain temps. ». Elle s'en doutait ; le divin ne pouvait s'atteindre en quelques secondes. De plus, si l'homme parvenait réellement à modeler sa chair, une telle métamorphose devait requérir de l'énergie, de la force et du temps. Elle ne s'attendait pas ce que Rémi Callahan devienne Dieu d'un claquement de doigt. Et le fait est qu'elle aurait pu attendre des années pour assister à une telle apparition.

Elle n'eut pas à attendre plus de cinq minutes pour observer les premiers signes de changement. Des craquements épouvantables résonnèrent bientôt, alors que le corps de Rémi semblait se disloquer par endroit. Sa peau, ses os, rien ne fondait ; tout n'était qu'une succession incessante de fractures, de claquements, comme s'il explosait de l'intérieur, ravagé par un tremblement de chair. En réalité, toute l'opération paraissait surplombée par un voile de douleur qu'elle n'appréciait pas. Elle se pencha en avant, les doigts recroquevillés comme des serres sur ses genoux. « Est-ce que ça va ? », demanda-t-elle, inquiète. Peut-être que ce n'était pas normal, qu'il rencontrait un problème. Son visage disparut derrière ses paumes et brutalement, ses jambes cédèrent sous son poids. Ses genoux claquèrent avec force sur le parquet et Pya sauta immédiatement de son tabouret. Elle se saisit d'une des petites bouteilles de jus d'orange qu'elle avait sorti pour son invité et se précipita vers lui.

« Ne vous en faîtes pas, ça peut paraître impressionnant, mais c'est normal. », essaya de la rassurer l'homme d'une voix déformée. Pourtant, l'instant d'après, il s'effondrait, paumes écrasées contre le sol pour se retenir de tomber ou de basculer, la carcasse agitée de soubresauts, la peau traversée d'ondulations. Elle s'agenouilla à ses côtés, une main posée sur son épaule, légère, bienveillante, et fronça les sourcils. « Vraiment ? Ça n'a pas l'air normal... ». Sous ses doigts, sa peau brûlait. Oh mon Dieu, ne le laissez pas mourir pour mon blasphème. « Je peux... est-ce que je peux aider ? », demanda-t-elle à nouveau dans un souffle soucieux. Elle posa la bouteille d'oranges pressées à côté de lui et ses yeux balayèrent le corps recroquevillé de l'homme. Ça empire. Comment pouvait-elle aider ?

Ses prunelles agitées se figèrent soudain. Qu'est-ce que... Ses doigts glissèrent sur la peau, jusqu'à rencontrer les fines aspérités qui avaient attiré son attention. Là, coincées entre ses omoplates, deux fines lignes bossues formaient un V inversé. Elle s'approcha davantage, le nez penché au-dessus de son dos, le regard attentif. La peau se fissurait, se déchirait. Et pour être honnête, elle ne savait de quel sentiment – la fascination ou l'horreur – l'emportait réellement dans le creux chaud de son cœur.

CRAC.

Une matière blanche transperça la chair. De l'os, comprit Pya. Déstabilisée, elle retira sa main en reculant et bascula sur les fesses. Alors, sous ses yeux grand écarquillés, une structure osseuse gigantesque et recouverte de plumes opalines se dressa par-dessus la silhouette ramassée de Rémi Callahan. «  Ángel... », murmura-t-elle du bout des lèvres. Par automatisme, elle se signa la poitrine, mais une poignée de secondes plus tard, elle se souvenait. Ce n'est pas réel. Le change-peau. Ma demande. Dieu. Elle se redressa légèrement puis s'approcha de nouveau, tendit un bras hésitant, le cœur battant, avant d'effleurer avec douceur une des plumes. Cela semblait pourtant si réel. Elle retira son bras, sourcils froncés, avant de se relever d'une impulsion brutale. Les ailes, étendues sur près de deux mètres, s'apparentaient à des merveilles de la nature, Pya ne pouvait le nier. Elles aimantaient son regard, l'emplissaient d'incrédulité subjuguée, mais elles ne remplissaient pas leur part du contrat. Dieu ne possédait pas d'ailes, pas selon la Bible, ni selon son padre. Soit Rémi lui avait menti, soit il s'était trompé.

Un brin étourdie, elle s'accrocha à son plan de travail, et secoua la tête. « Recommencez. », exigea-t-elle d'une voix douce, percée par la déception. « Dieu n'a pas d'ailes. ».

Code by Silver Lungs
Revenir en haut Aller en bas
Invité
Anonymous
oh my god(s) Empty
oh my god(s) - Mer 25 Juil - 23:22

Pya
&
Feliks
i was atheist until i realized i am god.
Cette requête-là, il ne l'oubliera pas. Elle décroche la palme des demandes les plus loufoques qu'on ait pu lui formuler à ce jour. C'est qu'il n'a pas encore beaucoup d'expérience en la matière, le réalisant brutalement aujourd'hui, lui qui songeait gagner en confiance à mesure que les clients se succédaient. La vérité, c'est certainement que le reste parait d'un banal déconcertant en comparaison. Ami perdu de vue, fils décédé, époux envolé dans d'autres bras, fantasme d'une vie. Nul. Prévisible. Dans la liste encore bien courte de ses transformations, le plus étonnant a semblé être les métamorphoses les plus complètes, quand l'être demandé était de sexe féminin. Bon, et puis, bien avant ça, c'est un truc qu'il a expérimenté seul, même s'il ne l'a jamais reconnu devant Ezra. De se rendre compte que ouais, il pouvait se parer d'une paire de seins, et les regarder. Digne d'un adolescent découvrant la vie, Feliks avait découvert ce que c'était, d'être une femme - physiquement, du moins. Et il ne s'y est toujours pas fait, le garçon. A se dire que c'était le truc le plus fou qu'il ait fait de toute sa vie.

Raté. Et à mesure que son coeur palpite de l'excitation débridant le kitsune, c'est le défi qu'il relève sans se dérober. Rien n'est impossible. Mourir et se réveiller, c'était impossible. Pourtant, il est revenu. Distendre les limites de sa réalité pour modeler son corps à sa guise, sa voix, son odeur, à la force de son esprit : digne d'un film de science-fiction que son cadet affectionnait. En ayant repoussé une à une ses certitudes, Feliks n'a aucune raison de douter de ses capacités. Et quelque part, sa simple transformation relève d'une prouesse divine. D'un miracle - pour sa petite existence merdique élevée à de bien plus hauts niveaux. Il se le répète, comme un mantra. T'en es capable. Notion découverte à la fusion de l'esprit roublard et de l'être épuisé. Tu peux devenir ce que tu veux. N'importe quoi. Il capte d'un regard l'attention appuyée de la demoiselle sur le torse qu'il dénude, puis les cuisses. L'information se range dans un recoin de sa mémoire sans qu'il ne relève davantage, soumis à la pression de ne pas se manquer. Feliks l'observe un instant, assise sagement du haut de son tabouret, qui attend. Et malgré sa silhouette immobile, ses lèvres closes, la ferveur de son impatience n'a rien de celle de ses précédents clients. Jamais encore le Murtagh n'a été soumis à de tels espoirs, glissant dans les prunelles, presque palpables. Et s'il tâche de conserver des allures sereines, il doit arracher son attention de sa jolie hôte pour que le doute ne s'immisce pas davantage dans son crâne.

Lorsque ça commence, c'est toujours étrange. Comme de s'endormir un peu trop rapidement, sursaut brusquant les côtes et affolant le battant dans un vertige. Je suis en train de disparaître. C'est ce qu'il s'est dit, la première fois, un an plus tôt. J'étais juste mort, mais maintenant je me désintègre. Les mains parcourant ses traits, comme aujourd'hui, il cherchait à l'époque à les rattraper. A ramasser les morceaux de son visage qui se désagrégeaient sous ses doigts. Sûrement l'expérience la plus traumatisante de son existence toute entière. Pire que le premier rail. Qu'un flash d'héroïne. Lui qui tirait à l'époque la moindre sensation de la came qu'il s'enfilait sans relâche. A côté de la première fois, c'était rien. Même l'overdose, c'était rien. Mourir avait été plus facile que de se transformer pour la première fois.
Mais depuis, Feliks a compris. Qu'non, c'est pas sa punition pour s'être comporté comme un p'tit con inconscient, égocentré sur ces problèmes qu'il se créait tout seul, depuis des années. Se transformer, c'est ce qu'il fait de mieux. Peut-être même plus encore que de jouer du piano. Pourtant, ça fait mal, ça donne l'impression de ne jamais s'arrêter. De ne plus pouvoir revenir en arrière. C'est un peut tout ça qui lui revient dès qu'il s'extirpe du corps de Feliks, chrysalide piétinée sous ses genoux qui s'écrasent au sol. « Ou-oui. » Il pourrait être plus convainquant. La tenir à distance. Il essaye, de quelques paroles qui se veulent rassurantes. Feliks sait ce que ça fait, depuis le temps, de se transformer. Que c'est pas pire que la mort, même si c'est sacrément bizarre, que ça donne juste l'impression d'être sur le point de gerber, d'avoir de la fièvre, de tourner de l'oeil, et de délirer en même temps.

Pourtant, là, même lui sait qu'il y a un truc qui merde. Il sent la demoiselle qui s'agite, qui s'approche, voit ses genoux se poser devant lui alors qu'il garde la tête baissée. En général, il ne se donne pas en spectacle comme ça. Et puis, ça ne craque pas de manière aussi sonore. Il a chaud. Il sent une goutte de sueur qui perle sur son front, traînée incandescente sur sa tempe qui finit par s'écraser entre ses deux mains.
Lorsqu'un contact inattendu se loge sur son épaule, l'échine frémit, troublée dans le processus, nerfs perturbés par l'information qui se répand de manière erratique. Glaçon sur sa chair malmenée. Paume apaisant furtivement la carcasse déconnante. Pourtant, pas de retour en arrière. Le renard pousse à travers le squelette, façonne sans merci, laissant l'homme hagard, condamné à subir. Le grognement déchire sa gorge alors qu'il a envie de lui dire que non, non elle ne peut rien faire. C'est assez inaudible, alors que les mâchoires se décrispent pour articuler. « Normal. C'est normal. Rien à faire. Attendre. » Il se le dit plus pour lui-même que pour elle, à vrai dire. Il a l'impression que tout se court-circuite à l'intérieur. Le contrôle lui file entre les doigts et la métamorphose continue à s'opérer. Et ça gratte. C'est insupportable. Dans le dos, là où la caresse glacée se dirige. Et ça semble durer une éternité. Feliks en a perdu la notion du temps, en même temps que son visage qui ne ressemble plus à personne. La force qui propulse ses os à travers le derme le condamne à se ressaisir. Le contact se rompt entre eux, et il la voit s'éloigner du coin de l'oeil, tache trouble de son champ de vision. A quoi j'ressemble. Qu'est-ce-que je suis. Lamentations internes alors que la naissance des ailes se veut insoutenable. Bordel.

Il ne sait pas, au juste, combien de temps il reste là, recroquevillé par terre. En slip, un poids considérable sur le dos, là sont ses seuls repères. Etrangement, il la sent qui effleure ses plumes, et ça le chatouille entre les poumons.Mes plumes. Il a peur. Comme la première fois, ou peut-être pire. Un petit coup d'oeil au-dessus de son épaule et c'est la panique qui s'engouffre en son poitrail. « Non mais merde, putain. » Jurons qui lui échappent alors que ses bras tentent en vain d'attraper les excroissances volumineuses qui se balancent au-dessus de lui. Ses membres s'emmêlent. Comme s'il ne savait plus se relever. Et puis, alors qu'un pied se pose au sol, que les jambes soulèvent ce nouveau poids considérable, le second glisse sur la bouteille de jus d'orange renversée. Exclamation arrachée à ses lèvres, titubant, dos courbé en arrière, il a l'impression de traîner derrière lui le corps d'un autre. « Recommencer ?! » Qu'il suffoque, dardant son regard sur elle en pivotant dans sa direction. Inévitablement, les ailes suivent le mouvement, passant à une dizaine de centimètre d'elle, renversant au passage à peu près tout ce qui se trouve sur le plan de travail, billets compris. Et l'oeil ne peut s'empêcher de s'y braquer. L'homme fait violence au kitsune pour ne pas simplement se jeter sur l'argent qui se promène à ses pieds. « Me-merde. Attention à vous. » La main rattrapant sa chute en s'écrasant à l'angle d'un mur, les informations se bousculent. Un, des ailes. Des ailes, comme un oiseau, du genre dopé aux stéroïdes. Deux, c'est lourd, ça bouleverse son centre de gravité, et il ne tient pas debout. Trois, ce bordel ne se contrôle pas. Quatre, revenir en arrière devient urgent.

Cinq, la cliente n'est pas satisfaite. La cliente affirme qu'il n'est pas Dieu.
Et ça, c'est ce qui se met à tracasser l'égo, la fierté du renard qui ne tarde à braquer ses prunelles brûlantes vers elle. « Vous êtes en train d'me dire quoi, au juste ? » Tant pis pour la bienséance et les airs cérémonieux. Le naturel revient au galop alors que la pluie de billets verts ne demande qu'à gagner la poche de son pantalon, soigneusement déposé un peu plus loin. « Vous l'avez déjà vu ? » Il tente un pas en avant, pour appuyer ses dires, mais ça virevolte lourdement derrière lui et le plaque au mur dans un crissement froissé. « Il vous est déjà apparu ? » Feliks s'est su athée dès les premières messes pour faire plaisir à la grand-mère. Jusqu'à ce que lui-même ne ressuscite. Que les dieux ne lui apparaissent, parfois, de manière bien tangible. La jeune femme a pourtant l'air si déçue qu'il ne peut abandonner son jeu, persuadé de devoir la convaincre pour récupérer son dû. Et puis, il est un peu vexé, aussi. Après plusieurs minutes à traîner cette apparence, son exploit tend à raviver sa confiance. « Qu'est-ce-qui vous dit qu'Il n'a pas d'ailes, au juste ? » C'est vrai, quoi. Il a l'air assez offusqué, à retourner la situation à son avantage, tentant d'introduire le doute chez elle. « J'vous l'ai dit, tout est possible. Je ne m'étais jamais risqué à une telle requête, et je m'y suis soumis, pour vous. Et vous osez me dire que je ne suis pas la représentation la plus fidèle de Dieu ? » Séquence dramatique, le ton s'élève, le suspens s'installe. « Ce genre de transformation, c'est banal, d'après vous ? C'est facile ? » Autant tenter le tout pour le tout, et il s'avance, un pas, deux, trois, dans sa direction. « N'ais-je pas été conçu dans le seul but de Lui ressembler ? De porter Son vrai visage sur Terre ? Vous devriez vous sentir submergée de joie, d'avoir été choisie pour Le voir, tout comme je le suis de pouvoir Lui ressembler. » Il s'enlise dans ses conneries, porté par la malice salvatrice du renard. Pourtant, il faut que les ailes s'emmêlent. Pivotent sans son accord. Et ça le sort brutalement de sa litanie, Feliks, quand le cri du coeur finit par sortir.  « Putain, aidez-moi avec ces machins, attrapez les, j'sais pas, j'vais défoncer votre appart ! »

CODAGE PAR AMIANTE
Revenir en haut Aller en bas
oh my god(s) -

Revenir en haut Aller en bas

oh my god(s)

 :: abandonnés
 Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Sauter vers: