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Ar lan y môr (Lise)

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Ar lan y môr (Lise) - Mar 4 Sep - 21:32




― Beside the sea ―
When moonlight shimmers on the sea
Coral reefs shine like swirling galaxies in your eyes
I surrender myself to the tender waves
I hold my breath and dive into the serenity
I forget that I am drowning
There is beauty all around me
Lise Rowan & Mal Jones


L’air marin est vivifiant, et pourtant je n’arrive pas à respirer. J’ai le souffle coupé par l’appréhension, les entrailles comme des anguilles prêtes à me glisser entre les doigts. Le palpitant en vagues irrégulières, l’écume de la tension de mes sentiments prêts à déferler. Un raz de marée incontrôlable, pourtant la digue émotionnelle tient bon, un calme de façade alors que tout se déchaîne à l’intérieur. C’est ma propre nature, instable et incontrôlable. Pourtant le flux stagne à gros bouillon, prisonnier des entraves de la peur. Mon esprit tempête ses craintes alors que mon cœur essaie de faire remonter à la surface ses épaves d’envies, un courant de pulsions qui ne demande qu’à m’emporter. Je suis un océan de contradictions. J’ai initié tout ceci et pourtant j’aimerai revenir en arrière, jeter l’ancre pour reconsidérer la situation un instant. Je n’ai pas eu le temps de réfléchir à ce qu’il s’est passé entre moi et Lise. À vrai dire c’est presque devenu la dernière de mes préoccupations à cause de la venue de Clemens et de toutes ces choses étranges et implacables qui continuent d’arriver. Pourtant je n’ai pas oublié, le souvenir a suffisamment torturé mes nuits d’insomnies. L’odeur de ses cheveux mouillés, le goût de ses lèvres et de son rouge à lèvres, le contact de sa peau sous mes doigts. C’est incompréhensible, inédit. Je ne sais plus ressentir, ou plutôt, je ne sais plus parler le même langage que ces idées qui me perturbent l’esprit. Je voudrais les ignorer, les repousser dans un coin obscur de ma conscience, mais elles refusent d’être contenues. Cette dualité m’inquiète, comme une impression de garder des secrets contre moi-même. Comme si quelque part je connaissais déjà la réponse mais que j’étais incapable de trouver la clé. Si j’analyse les faits avec honnêteté, je ne peux alors nier être attiré par Lise. Je l’ai toujours été. Mais là où jusqu’ici je me contentais de ses mots écrits, de sa psyché, maintenant c’est aussi son corps et ses gestes qui m’intéressent. Non je ne joue pas, je lui ai dit la vérité. J’avais. J’ai. L’envie de l’approcher plus que de raison, la crainte du contact si paradoxale. Mais c’est mon cœur qui se moque de moi. J’aimerai le jeter à la mer pour me libérer, mais je crois qu’il reviendrait toujours sur le rivage comme une satané bouteille en plastique. L’envie d’aimer ne se recycle pas.

***

Il est neuf heures moins cinq et je suis fébrile. De l’autre côté de la rue j’observe la maison convoitée d’un regard inquiet. J’ai déjà appelé le taxi et je suis tellement nerveux que j’ai dû répéter l’adresse plusieurs fois avant d’être compris. Je ne veux pas prendre le bus, quelque chose au fond de moi à réveillé une vieille notion égoïste; l’envie de n’être qu’ensemble à partager le même moment. L’envie de l’impressionner peut-être aussi, la peur de lui soumettre quelque chose qu’elle n’aimera pas. Le sac pèse sur mon épaule, il commence à faire terriblement chaud pour un mois de Juin mais les gouttes de sueur sur mon front sont aussi causées par mon tempérament. Un heure à réfléchir à comment m’habiller, terrifié à l’idée de trop m’apprêter. Je ne veux pas l’intimider, je ne veux pas qu’elle pense que c’est un date, même si j’ai du mal à appeler cela autrement. Une sortie entre amis ? Un rendez-vous littéraire ? Une balade à la mer ? Tous ces mots sonnent tellement comme des excuses. Alors je préfère arrêter d’y penser.

Ma main tremble légèrement lorsque je frappe à la porte, réalisant la présence de la sonnette sur le côté après coup. J’échappe un soupire avant de déglutir. Je ne suis jamais venu chez elle auparavant, malgré toutes ces années à la connaître. La bibliothèque pour seul microcosme de notre relation. Je suis curieux de voir où elle habite, découvrir l’univers dans lequel elle évolue. Mais je sais que nous devons avancer pas à pas. Alors ça ne sera pas pour cette fois. Et puis il y a cette pensée qui ne m’avait pas effleuré jusqu'ici. Depuis le début j’ai assumé qu’elle était seule. Peut-être une forme d’égocentrisme mal placé, ou à cause de ce que je ressentais en lisant entre ses lignes. Ces mots qui me rappelaient à moi même. Mais j’ai assumé qu’elle n’avait personne d’autre, je l’ai embrassée en ignorant les conséquences. Mais quel imbécile je fais. Et si c’était quelqu’un d’autre qui ouvrait la porte ? Je crois bien que mon cœur s’arrêterait. « Bonjour Lise. » Ma voix est un peu faible. Je souris à la silhouette familière qui vient d’ouvrir le battant, un peu tremblant sur mes jambes. Je baisse immédiatement le visage pour masquer mon soulagement et ma gêne. C’est vraiment étrange de me retrouver sur le pas de sa porte. « Je viens t’arracher à ton foyer pour une aventure. » Que j’ajoute en essayant un ton un peu plus enjoué. Ma main s’apprête à se tendre d’une invitation mais je me souviens de ce qu’elle a signifié dans ses messages. Elle ne veut pas être brusquée. Elle appréhende de me voir. Mon bras retombe le long de mon corps et je m’écarte pour lui libérer le chemin. « Merci d’avoir accepté de… passer du temps avec moi. » J’ai encore failli utiliser le mot ambigu, celui qui a semé plus d’une fois la panique dans mes pensées. Merci d’avoir accepté de sortir avec moi. Ce ne sont que des mots, depuis quand leur sens a-t-il changé ?

***

Malgré la chaleur, la houle est fière sur la cime des arbres. Elle nous balaie le visage de ses bourrasques et me fait presque regretter ma suggestion. Mais maintenant que nous sommes là, il n’y a plus de retour possible. Je jette un œil aux manœuvres de marche arrière du taxi qui s’éloigne. Il nous a laissé de l’autre côté de la baie, sur le versant sauvage que j’ai déjà arpenté avec des amis. La nature est sauvage et magnifique de ce côté de la plage. Le vieux phare surplombe le bord de la falaise. Il a été automatisé il y a quelques années déjà, plus personne n’y habite. Il ne reste plus que le belvédère à son pied, et quelques sentiers de randonnée peu empruntés qui se perdent le long de la falaise. J’aime cet endroit. Un mélange entre tranquillité terrestre et violence de l’océan, comme si le centre du monde se trouvait ici, le cœur du maelström. C’est un endroit parfait pour être hors du monde, voler quelques heures et les posséder pleinement. Ces quelques heures que j’ai envie de passer avec Lise.

Je me tourne doucement vers elle, lui offrant un sourire timide. J’aimerai dire ta da! mais je me sens un peu idiot. Elle est sûrement déjà venue ici. Ou peut-être même déteste-elle l’océan et la houle qui mets sa chevelure rousse en bataille. « J’ai repensé à la dernière fois. Merde, j’ai beaucoup repensé à la dernière fois. Trop de choses se sont passées dernièrement, j’ai la tête en vrac… J’ai besoin de faire le tri. Je viens ici pour ça. » Je n’ose pas la regarder, je sens mon visage s’empourprer. « J’avais envie de partager ça avec toi. La dernière fois j’ai parlé de tout recommencer, et comme on vient tous de la mer, je me disais que… ça nous porterait peut être conseil. » Mon visage se redresse pour chercher le sien, ma main se tend vers elle pour chasser les mèches qui viennent masquer ses traits. Mes doigts l’effleurent à peine avant de se rétracter. « C’est idiot je sais… pour sûr je devais te paraître moins idiot quand j’écrivais mes pensées entre deux lignes de Shakespeare. » Mon regard dévie sur l’étendue de sable presque noir et les bandes de galets entre les racines des pins dont la ligne pousse à même la plage. Je ferme les yeux un instant, respirant à plein poumons. Pourtant je n’ai pas conscience de me noyer.
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Ar lan y môr (Lise) - Mar 25 Sep - 22:44




― Beside the sea ―
When moonlight shimmers on the sea
Coral reefs shine like swirling galaxies in your eyes
I surrender myself to the tender waves
I hold my breath and dive into the serenity
I forget that I am drowning
There is beauty all around me
Lise Rowan & Mal Jones


L'ombre qui s'engage d'un pas peu rassuré dans un chemin escarpé. Elle ne sait pas où elle va Lise, un brouillard épais et particulièrement noir lui brouille la vision, lui empêche d'y voir clair dans son esprit. Elle s'hasarde a vouloir suivre Maldwyn là où il voudrait l'emmener, vers l'inconnu qu'elle appréhendait tant. L'abandon d'un quotidien qu'elle chérit, auquel elle s'accroche désespérément. Irrationnellement. La peur au ventre d'un inconnu qu'elle ne contrôle plus. L’inquiétude de se savoir à découvert, de laisser entrer Mald dans sa réalité. Elle appréciait être celle qu'il s'imaginait entre les pages. L'humaine fragile et forte à la fois, capable d'un partage de ses pensées les plus sombres. Ils se mentaient lorsqu'ils se disaient qu'ils ne se connaissaient pas. S'ils n'avaient jamais partagé l'un avec l'autres le choses les plus simples, ils s'étaient ouvert les portes de leurs secrets et de leurs esprits. Elle aimait à penser Lise, qu'elle lui avait avant tout offert son âme. Malgré le silence et la gêne des gestes nouveaux. Malgré les secrets qu'ils ont chacun préféré garder pour soit, il s'était imposé à elle, égratignant son cœur du grappin qu'il y avait planté. Incapable de s'en défaire, angoissée à l'idée qu'il puisse s'y déloger. S'éloigner et disparaître. Lui qui s'était frayé un chemin jusque dans son esprit, indélébilement. Il lui paraissait aujourd'hui impensable de le mettre de côté. Le rejeter parce qu'elle avait peur n'était pas une raison. Qu'il ait voulu l'effrayer pour qu'elle s'éloigne n'a plus d'importance. Ils étaient autant effrayés l'un comme l'autre. Si elle n'avait fait que cogiter et éviter la bibliothèque ces derniers jours, elle avait au moins compris une chose, le fuir ne la ferait souffrir que d'avantage.

Les pieds tachetés tournent en rond, s'inquiètent et s'impatientent. L'appréhension d'arpenter une nouvelle réalité avec Mald se mêlait avec une impatience toute nouvelle. L'idée de le revoir après des semaines à éviter la bibliothèque la rendait toute chose. Le regret d'avoir cherché à l'éviter qui sinuait doucement dans ses tripes. Quelle idiote. Elle qui aujourd'hui trépignait d'impatience, se noyant dans l'envie irrépressible de se perdre de nouveaux dans la couleur merveilleuse de ses yeux. Tiraillée entre l'angoisse de poser le pied dans un monde étranger et le désir de le faire à ses côtés. Peut-être que le fait de ne pas l'avoir vu, de ne pas s'être échangé de livre depuis un moment avait réveillé quelque chose en elle. Son cœur cessa de battre tandis qu'une main s'écrasa sur la vieille porte en bois. Ses ongles se plantent dans ses paumes alors qu'elle réalise qu'il est là. Elle ne peut plus faire marche arrière. Affronter ses démons et oser était les seules options qu'il lui restait. Bien que délicats, ses pas faisaient grincer le parquet jusqu'à ce que sa main se pose fébrilement sur la poignée de porte. Laquelle s'ouvrait dans une discrétion qui n'appartenait pas à ces vieux murs. Lise se donnait l'impression d'une gamine timide qui se dandinait sur place. "Bonjour Mald" Elle s'étonnait à constater que Mald avait la même réaction qu'elle alors que son regard se fixait sur le bout de ses pieds. Il pouvait bien lui arracher à son foyer quand il voulait songeait-elle en souriant. Il lui semble alors sentir ses joues s'échauffer tandis qu'il s'écartait pour la laisser passer. Elle hésitait un instant, chaussait rapidement une paire de tenis avant de claquer la porte derrière elle. "C'est normal" Lise se rendait compte que les mots sortaient de nouveau avec difficulté, comme si ça n'était pas naturel avec lui et c'est murée dans son silence qu'elle se laisse happer par la voiture qui les attendait. Elle se demanda pourquoi il avait changé d'avis mais s’accommodait de ne pas avoir à partager le trajet avec des inconnus. N'aimant ni le bus, ni la voiture, elle n'avait pourtant pas eu le coeur de dire à Mald qu'elle n'entrait que rarement dans ces engins. Poison pour la nymphe, la difficulté de chaque jour qu'est de vivre en ville ne la pousse que davantage à les détester. Ses yeux se perdaient sur les mains du jeune homme, les détaillant avec discrétion, luttant contre l'envie de s'en saisir. "Ca me faut plaisir de te voir" Sa voix s'étrangle un peu, elle a l'impression de piailler comme un oisillon tant elle ne sait plus où se mettre, tiraillée dans une contradiction persistante. Pourtant elle est tout à fait conscience qu'il lui faut s'abandonner.

Le palpitant s'emballe à l'instant où elle comprend qu'ils se dirigent vers la côte. Animée par un instinct qui la dépasse, l'impatience luit dans son regard alors qu'elle ne peut le détacher du paysage qui s'offre doucement à elle. La nymphe meurt déjà d'envie de s'échapper et de rejoindre les siens. Se perdre dans les profondeurs de l'immensité bleue. L'attention de Lise ne peut se détacher de la violence de l'océan. C'est quand il se déchaîne qu'elle l'aime le plus, qu'elle peut savourer à la fois les vagues qui battent avec ardeur les rochers et la sérénité qui s'offre à elle dans les entrailles de l'océan. Elle se retourne, reporte son attention sur celui qui l'a amené ici. Lise boit ses paroles, désorientée par le phare qu'elle aperçoit derrière lui. Ses jambes manquent de se dérober sous son poids. " C'est une bonne raison pour venir ici" Elle avait fait la même chose. L'océan avait toujours été son repère. Bien avant que la nymphe ne l'accompagne, si à l'époque elle tenait l'océan en horreur, la baie restait son endroit favoris. Quand observer la tempête calme celle qui se déchaîne dans son intérieur. Les mot de Mald se plantaient directement dans le myocarde, le rose lui montait aux joues. Elle se sent fébrile alors que sa main se rapproche de son visage. Son contact aussi court soit-il à le pouvoir de l'électriser de nouveau. Elle se souvient alors de ces gestes qu'il avait eu pour elle. Ce contact qu'il lui avait imposé, qu'elle avait craint, qu'il retient aujourd'hui. La morsure qu'elle s'impose sur la lèvre d'une déception qu'elle ne comprend pas. Elle termine le geste qu'il a amorcé et range ses cheveux du mieux qu'elle peut. Les bourrasques lui fouettent le visage et emmêlent ses cheveux qui s'envolent. "Ce n'est pas idiot" C'est le point de départ de tout être vivant. Mais particulièrement le sien. Elle lui avait parlé de certaines créatures marines. Lui avait déjà glissé entre les doigts un ouvrage sur les mystères de l'océan, ce que l'homme ne sait pas, ce qu'elle a pu côtoyer quelques fois.

Elle perçoit sa cage thoracique se soulever. S'il savait. L'odeur venait chatouiller doucement ses narines. Lise se joignant à lui, se posta à ses côtés, ferma les yeux en soulevant le menton pour mieux inhaler l'air marin. Les embruns caressaient son visage avec une délicatesse toute particulière et sa langue glisse sur ses lèvres, se délectant de l'air salé. "L'océan me porte toujours conseil" Parce qu'il fait partie d'elle désormais mais elle n'avait pas posé le pied sur cette falaise depuis quinze longues années. Et elle n'avait jamais eu l'intention de le faire. Le sort s'acharnait contre elle à vouloir l'enfermer dans les méandres des souvenirs douloureux. Lise s'éloignait de Maldwyn. Le pas hésitant, la démarche fébrile, elle s'avançait doucement en direction du phare sans savoir s'approcher du bord. Quelques mètre l'en séparait encore lorsqu'elle se figea brusquement. Tremblante, les yeux rivés sur le bord de la falaise.  Son coeur s'emballe et elle voudrait faire demi-tour. Mald l'avait emmené au seul endroit de la baie où il ne fallait pas, la probabilité était quasi nulle que de toute la ville il avait choisi celui-ci pour leur première sortie. "Peut-être qu'un jour je pourrai t'amener là haut" soufflait- elle, incapable de détourner le regard, les pieds vissés, perdus dans les herbes sauvages. La famille de son père s'occupait du phare depuis toujours. Elle en avait gardé les clés sans jamais avoir eu le courage d'y retourner après la mort de son père. Elle avait préféré confier son entretient à des amis. Peut-être que Maldwyn lui inspirera le courage nécessaire pour y retourner. "J'aimerai bien partager la vue magnifique qu'on a depuis là avec toi. Il n'y a que quelques privilégiés qui y ont accès." La voix chevrotante jurait presque avec ses paroles qu'elle voulait douce et rassurante. Alors que la tempête se lève dans son cœur et qu'elle sent de nouveau son corps fragile s'écraser et s'enfoncer dans la fureur de l'océan.
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Ar lan y môr (Lise) - Lun 1 Oct - 21:07



Je ferme les yeux parce que ça m’aide à y voir plus clair. Recentrer l’urgence de ces sensations qui m’assaillent pour encore trouver les mots, attribuer le sens. Le calme extérieur pour tromper du chaos intérieur. Tempête invisible, électrostatique qui m’attire irrémédiablement à elle. Comme rejeté à l’océan je reviens toujours échouer sur ce rivage, incessamment poli par cet aller retour entre les tréfonds et surface. C’est ainsi que se définissent la mécanique de mes pensées, ombres et lumières, grisé d’une impossible décision. Toujours sur la tranche, l’entre deux sans impact pour ne pas franchir l’irréversible. Une constante retenue, alors j’éclate comme la houle sur la falaise, je prend l’inévitable mauvais choix et je ne peux qu’observer le résultat. J’ai peur de ce qui se cache sous ce calme, sous l’apparente passivité de mon caractère. J’ai peur de moi-même. Je suis terrifié à l’idée de n’être qu’une gangrène impossible à sectionner, un cancer surprise qui ne se déclare qu’au dernier moment. C’est pour cela que j’ai voulu la faire fuir, principe de précaution. Parce que je tiens à elle, parce que c’était plus facile de contrôler mes démons lorsqu’il ne pouvait l’atteindre au travers des pages de notre relation. Mais laissé à l’occasion ils ont quand même réussis à se faufiler et faire leur office. Si mon frère peut soigner le mal, est-ce que ma malédiction de le créer ? Est-ce que ce qui se cache sous ma peau est aussi hideux que le sang de quelqu’un d’autre sur mes phalanges ? Est-ce que le mal est aussi insidieux qu’un baiser volé ? Je l’ai attirée à moi comme un trou noir fait graviter les étoiles avant de les dévorer. Une destruction massive qui n’attends que de se produire. Mais je ne peux que me laisser aller à compter les météores sur sa peau, il est trop tard pour revenir en arrière. Parce que je veux égoïstement découvrir toutes ces sensations, parce que je veux ressentir la chaleur de son contact avant que le mien ne lui devienne un supplice. Parce que ces atomes crochus que nous partageons ont été suffisant pour causer un second big bang dans mon palpitant.

Mais malgré ces lois de l’attraction, j’essaie de contenir mes gestes à son égard. Je ne veux pas l’effrayer maintenant que je l’ai suppliée de rester. Je ne veux pas ruiner le moment, ne pas l’amener vers ce qui semble la perdre un peu plus. Nous sommes ici en tant qu’amis, la nature qui s’étend face à nous notre terrain de jeu. Mais alors que ma main se cache dans la poche de ma veste, résistant à la tentation d’effleurer ses cheveux, une bourrasque révèle son regard douloureux. L’espace d’un instant je peux voir les signes de panique sur ses traits. Merde, est-ce que je suis déjà allé trop loin ? Est-ce que je l’ai déçue en l’amenant ici ? Je déglutis, baissant le regard vers mes traces de pas dans la terre sableuse. Il y a les siens face aux miens, elle semble si proche et pourtant si distante. Lorsqu’elle parle du phare je relève la tête pour détailler la falaise. La tournure de sa phrase est étrange. Pourquoi parlait elle d’une possibilité lorsque nous pouvons juste y aller maintenant ? Nous avons toute la matinée devant nous, la pente n’était pas trop escarpée jusqu’au phare et le sentier encore visible malgré la négligence de l’entretien. « Un jour ? » Que je demande en souriant, un peu surpris par sa tournure. Je fronce légèrement les sourcils, renversant mon poids sur mon autre jambe pour me tourner vers les hauteurs. Il y a comme un malaise que je ne comprends pas, une rupture dans l’air, un mur invisible qui s’est érigé entre nous dès l’instant où nous sommes sortit du taxi. J’entrouvre les lèvres lorsqu’elle prononcé de nouveaux mots, sa voix un peu faible et brisée. Il y avait une mélancolie que je ne m’expliquait pas, cette même tristesse qui semblait l’habiter ce jour là à la bibliothèque. Je tente de discerner une humeur, une raison potentielle à son visage grimé. Je ne comprends pas. Est-il trop tard pour reculer ? « La vue est déjà magnifique ici… » Mon ton est sérieux, mon regard plongé dans le sien. J’ai parlé sans réfléchir, je ne peux pas laisser le silence s’installer. Mon visage s’empourpre aussitôt, et j’étire un sourire gêné, ma face fuyant vers l’océan. « C’est tes cheveux avec le vent… on dirait que tu mets le feu à l’horizon. » Mais quel imbécile. Il faut vraiment que j’apprenne à tourner ma langue sept fois dans ma bouche. Est-ce que l’écume est trop loin pour que je jette un homme à la mer ? « Ce que je veux dire. » Dérapage contrôlé, j’attrape la bouée de survie au passage. « C’est qu’on peut rester sur la plage… Si tu as le vertige. » Diversion exécutée, changement de sujet en cours. Je me penche pour ramasser un galet, échappant un soupire gêné. « L’océan me rappelle tellement de souvenirs. Je ne sais pas si je t’ai déjà dit que j’ai… » J’hésite un instant, le cœur qui se serre soudainement. « Deux demi sœurs ? » Et un demi frère. Je chasse rapidement ces sombres pensées, ma main se serrant sur le galet. « Une fois ma sœur aîné m’a joué un mauvais tour. Tu sais ces gros coquillages gris en spirale ? Elle en a ramassé un pour me l’offrir pour prétendre faire la paix. Ce que cette garce avait oublié de préciser c’est que ce même coquillage était l’antre d’un énorme bernard l'hermite. Alors crois moi Lise, la chanson de l’océan pour moi c’est le cri d’horreur d’un gamin de huit ans et les pattes courroucées d’un crustacé contre ma joue. » J’échappe un rire léger, me tournant enfin vers elle. Je tends la main pour effleurer son visage, dégageant cette mèche de cheveux derrière son oreille qui m’avait fait hésiter un peu plus tôt. Mes doigts glissent le long de son épaule et de son bras, l’effleurant à peine. J’agrippe sa paume, ma main se mêlant à la sienne non sans appréhension. Je reste silencieux un instant, mon regard allant de ce contact à la falaise. J’ai juste envie de la voir sourire. Je la guide de quelques pas, prenant la direction du rivage et de l’écume blanche de l’océan. « Je suis sûr qu’avec toi cette fois je vais pouvoir éviter les coquillages piégés. » Mes doigts se serrent un peu plus contre les siens, les vagues venant se briser à nos pieds. J’inspire l’air marin à plein poumons. « J’ai juste envie que ce temps passé ensemble soit un souvenir tout aussi indélébile. » Je ferme les yeux parce que je veux y voir plus clair. Mais dans les ténèbres je ne peux qu’apercevoir la couleur de mon âme destructrice.
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Ar lan y môr (Lise) - Sam 20 Oct - 0:39




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Lise Rowan & Mal Jones


Elle ne l'avait pas pensé capable de poser le doigt précisément là où il ne fallait pas. Elle accuse la fatalité de son sort. Vouée à errer dans la spirale vicieuse qu'était devenue sa vie. Incapable de se relever pour panser ses plaies. Béantes depuis quinze ans, à peine séchées, tout juste de quoi soulager les symptômes d'une âme brisée. Amputée de celui qu'elle avait de plus cher, elle porte encore aujourd’hui le fardeau d'une culpabilité tenace.  Il n'avait pas mérité avoir une fille comme elle. Probablement aurait-il eu une meilleure vie s'il n'avait pas accueilli la rousse dans son foyer. C'est son cœur qui se sert et son corps entier qui refuse d'avancer lorsqu'elle se rapproche du flanc de falaise. Ses pieds qui ailleurs s'amuseraient à défier la falaise d'un pas espiègle s'ancrent d'avantage dans la terre. Ses muscles se bandent douloureusement alors qu'elle se rend compte que'après toutes ses années, elle est encore incapable de faire face à son passé. Prisonnière d'un déni sans faille, actrice de sa propre mascarade. Parce que faire semblant de vivre est la seule chose quelle sache faire. Ses pensées n'ont de cesse de se tourner vers les fantômes du passé et le corps immobile, les mais légèrement tremblantes, Lise s'essaye à la diversion. La sincérité de ses mots n'est pas pour autant à  douter. Elle voudrait l’emmener là haut. Même s'il ne se dresse pas beaucoup plus haut que la falaise, l'impression de surplomber l'océan est tout autre. Alors peut-être qu'elle pourrait partager avec Mald ce sentiment d’appartenance à l'océan. "Un jour... " Qu'elle répète après lui, indécise. Consciente de la surprise qu'elle pouvait deviner dans le ton de sa voix. Quand elle saura enfin faire face. Que sa main dans la sienne lui servira d'arme pour affronter ses tourments. Quand sa présence suffira à lui redonner la force qu'elle n' a plus. Lise ne parvient pas à s'épancher d'avantage, lui expliquer les raisons de son mal-être qu'il a sans aucun doute déjà perçu. Son corps pivote sur lui même jusqu'à lui faire face de nouveau, affrontant timidement son regard. C'est adorable cette manière qu'il a de vouloir la détendre, sans même savoir ce qui la tourmente. Elle imagine l’inquiétude qui s'invite doucement chez son ami. Son regard la fuit, les siens s'étonnent de ces quelques mots qui la bousculent. Le réflexe incontrôlé de sa main rangeant ses cheveux alors que son menton se baisse d'embarras. Un sourire étire pourtant doucement ses lèvres alors que quelque chose vient de se rallumer dans son cœur. Il lui semblait qu'il s'affolait un instant de constater la gêne dans le comportement de Maldwyn. La rousse avait bien du mal à comprendre le véritable sens de ses mots mais ne pouvait s'empêcher de prendre ça comme nu compliment un peu détourné. Que dirait-elle alors de la vue magnifique que lui offraient simplement ses yeux lorsqu'ils se plantent dans les sien, d'un bleu si incroyable qu'elle s'y perd indéniablement.

Lise n'a pas le vertige mais ne peut visiblement pas refuser la proposition de s'éloigner un peu de cet endroit bien trop chargé en souvenirs négatifs. Les émotions n'avaient de cesse de la submerger dès lors qu'elle avait compris qu'il s'agissait là de l'endroit exacte où elle s'était offert en sacrifice. Perdue dans un chagrin qui lui semblait si insurmontable, additionné à l'angoisse de ne pas savoir qui elle est. Probablement s'était-elle bien trop accroché à son père, malgré tout ce qu'elle pouvait dire, si bien que sa mort lui avait volé le seul repère identitaire qu'elle n'avait jamais eu. Lise hoche la tête craintivement en se rapprochant doucement de Mald. Ses yeux se perdent un instant sur sa main qui se saisit d'un galet alors qu'elle ne sait plus vraiment où regarder sans avoir l'air d'une gamine perdue. C'était probablement la meilleure chose à faire, s'éloigner du phare. Avant qu'elle ne se laisse submerger par sa noirceur jusqu'à réitérer l'expérience du saut de l'ange. Ironiquement, c'était quelque chose qu'elle faisait assez souvent. Se jeter du haut de la falaise et savourer sa nymphe qui prend le dessus pour l'éloigner de la paroi abrupte qui la briserai en quelques secondes. Son attention se reconcentre sur son ami prêt à lui raconter une histoire, son regard s'interroge. "Non?" Sa voix frêle bute contre un mur invisible pas tout à fait mis à terre encore. Elle se délecte silencieusement de ce moment durant lequel il se dévoile un peu plus à elle. Il lui parle de ses sœurs, de la sournoiserie de l'une à vouloir se moquer de lui un peu. La scène se déploie dans son esprit, il lui semble pouvoir imaginer Maldwyn étant enfant sans trop de difficulté. Son rire lui soulève une commissure et adoucit son regard alors qu'elle voyait le gamin affolé crier à plein poumons. Le cœur un peu trop serré pour laisser échapper un rire, les mots de Maldwyn ne la laissent pas indifférente pour autant. La confidence en appellera une autre, elle en est bien consciente. Le soupçonne de vouloir se dévoiler pour qu'elle en fasse autant, briser de nouveau le mur de silence derrière lequel elle se cache. Il n'y a rien de bien différent entre dévoiler ses angoisses les plus sombres entre quelques lignes et lui exprimer de vive voix son angoisse de se retrouver sur celle falaise précisément. Elle n'en faisait pourtant rien, peu décidée à laisser s'échapper ses démons. Surprise par cette main qui range cette mèche rebelle qui lui barre le visage. Les yeux se ferment, le cœur s'apaise tandis que son contact avait eut tendance à l'affoler jusqu'à là. Sa main se glisse dans la sienne sans qu'elle n'y oppose aucune résistance. Le soulagement inattendu qui s'invite la pousse à serrer sa main dans la sienne. Désespérément accrochée à sa présence. Il aura au moins eut le mérite de la confronter à son passé contrairement à elle. La créature se laisse guider jusqu'au rivage sans mot dire, laissant tomber derrière elle quelques miettes de souffrance. Il l'amène jusqu'au rivage, inconscient du soulagement que pouvait lui apporter la proximité de l'eau. Les yeux fixés sur l'écume à leurs pieds, difficile pour la rousse de lutter contre l'envie de s'y jeter, concentrée sur les doigts de Mald qui serrent les siens. "Pas d'attaque de Bernard l’ermite promis" Un sourire timide s'invite sur ses lèvres. Ses paroles la touchent et la déconcertent. "Moi aussi... Pas besoin de coquillages piégés pour que ça le soit." Puisque tous les moments passés avec lui lui restent en mémoire et ce n'était pas pour rien qu'elle se laissait embarquer dans ce chemin inconnu.

Lise s'éloigne de Mald presque à contre cœur. Juste assez pour se pencher pour se déchausser. Ses pieds rencontrent l'eau froide sans s'en molester. Son corps entier semble s'abreuver de son essentiel et la falaise lui paraît déjà un peu plus loin. D'un geste délicat, ses doigts viennent glisser contre la mais de Mald pour lui en dérober le galet. "C'est le galet de parole?" Le sourire à la fois niais et triste accuse une inspiration profonde. Sa main hésite puis attrape la sienne et ses doigts tout contre les siens lui donnent presque assez de courage. Un silence de quelques secondes, les pieds toujours barbotant. "Les Rowan se sont toujours occupés de l'entretient du phare" Ses yeux osent s'aventurer vers celui-ci non sans appréhension. "Je n'ai pas le vertige mais cette falaise particulièrement me rappelle le père qu'il avait été pour moi" Son cœur se déchire et ses doigts se resserrent autour des siens. Elle se recule du rivage pour le pousser à s'asseoir avec elle. Elle n'avait jamais parlé de la famille qu'elle n'avait pas, du père qui l'avait recueilli. Quelques mots glissé sur un abandon, l'impression de se comprendre  dans une souffrance bien particulière. Mais peut-être avait-il su lire entre les lignes le désespoir qui l'avait poussé à se rendre sur cette même falaise. "Ca fait quinze ans que j'évitais cette falaise et le phare. Peut-être qu'il était temps." Il l'avait décidé pour elle et elle ne pouvait plus rien y changer désormais. "C'était mon lieu préféré avant.. alors ça me fait plaisir quand même que tu l'aimes.. " Parce que se retrouver ici avec lui était sûrement le plus beau cadeau qu'il pouvait lui faire. La rousse se rapprochait un peu plus de lui, posant craintivement sa tête contre son épaule en soupirant d'aise, sa main toujours liée à la sienne. "C'est déjà un souvenir indélébile d'être ici avec toi..."
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Ar lan y môr (Lise) - Sam 20 Oct - 17:26


Sa main dans la mienne me fait garder les pieds sur terre. Je me sens léger malgré tout, prêt à m'élever au gré de la brise marine. Mais sa présence me retiens, m'empêche de m'égarer comme un cerf-volant contre les rochers de cette falaise qu'elle observe avec inquiétude. Je ne peux pas lui demander les raisons, il n'y a aucunes lignes entre lesquelles écrire ce dialogue intime que j'aimerai qu'elle partage avec moi. Depuis quand suis-je devenu si avide, si attentif à la moindre ombre chinoise qu'elle projette par inadvertance ? De mes doigts qui tentent désespérément de se saisir de ces contrastes, fermement enlacés aux siens pour en apprendre le langage. J'ai déjà rompu la promesse que je me suis faite, le serment de ne pas me perdre de nouveau dans ces gestes et ces envies à son égard. Ne pas l’entraîner de mes impulsions, comme le courant entraîne implacablement au large de ces rives connues. Je ne perds pas encore pieds mais je suis pourtant dedans jusqu'au cou, incapable d'agir aussi froidement que l'objectif que je m'étais donné. Tout en moi n'est qu'un grand pas en avant vers elle, un besoin constant de chercher ses sourires et ses regards, comme un chien savant attends récompense pour chacun de ses tours. L'oreille dressée, prêt à recevoir le moindre ordre et servir la moindre demande. Je n'ai pas ressenti cela depuis longtemps, la dévotion à l'égard d'une autre personne, le besoin de bien faire qui tourne à l'obsession. Pourtant si j'avais voulu être la meilleure version de moi-même alors je ne l'aurais jamais recontactée, ne l'aurais jamais invitée à venir ici quand les lieux semblent évoquer en elle plus de noirceur que de lumière. J'en serais resté à ce dérapage, ce moment d'égarement de mes lèvres sur les siennes et toute la tristesse incompréhensible qui s'en est suivie. Peut être est-ce cela qui me motive au final, l'impression que cette flamme rousse est emplie d'une mélancolie constante et contre laquelle je ne puis rien faire. Elle est comme ces peintures académiques dans les musées, figée dans une expression de grâce irréelle derrière leurs paroies de verres protectrices. Leurs coups de pinceau anciens brossent un portrait emplie d'une tristesse infinie. Une galerie d'art au silence religieusement respecté, mais je ne peux qu’entendre les murmures secrets de ces tableaux muets dès que j'ai le dos tourné. Il n'est pas de mystère que j'accepte de garder pour ce qu'il est, je veux savoir, poser mes phalanges sur la douceur du marbre sculpté pour en comprendre les cicatrices dorées. La texture du passé, couche par couche pour révéler la vérité camouflée. Je veux savoir ce que l'univers a pensé lorsqu'il a créé Lise Rowan, je veux dépasser les cordons de sécurité et me rapprocher du cadre pour le décrocher du mur. Je veux comprendre ce qui la fait pleurer pour mieux pouvoir la faire sourire. Et c'est cette insistance de mes pensées dans cette diversion qui m'empêche de vraiment me demander pourquoi. Pourquoi le sourire de Lise m'est aussi addictif.

Un grognement incontrôlable se perd au fond de ma gorge lorsque sa main quitte la mienne pour se déchausser, extirpé de force de la torpeur agréable de ce simple contact. Je rouvre les yeux pour observer l'écume s'écraser contre ses chevilles nues, baissant rapidement le regard vers la pointe de mes chaussures qui s'enfonce à peine dans la soupe granuleuse du sable mouillé. Mes doigts cèdent sans résistance le galet lisse au creux de ma paume, mon attention se portant de nouveau sur son visage. Je lui rends plus timidement ce sourire mitigé qu'elle m'adresse. Si elle savait que je pourrais l'écouter parler de tout et n'importe quoi maintenant que sa voix a remplacé les mots d'encre. Sa main retrouve de nouveau la mienne et je réponds en la serrant encore plus, le bras presque tendu vers elle, le lien entre l'infini de l'océan et le rivage. Lorsqu'elle se révèle enfin je reste interdit, mes prunelles se posant tour à tour sur elle avant de suivre son inquisition vers le phare. Elle serre encore plus sa prise mais je ne lui réponds pas d'intensité de peur de lui faire mal. Je me laisse guider vers le sable, animal enlacé à sa volonté. Je m'assois à ses côtés, silencieux de ses confidences, néanmoins témoins présent. Je n'ai pas besoin de disposer de tous les éléments pour comprendre que la mention de cette figure paternelle est pour elle le noyau d'une tristesse immense. Je repense à ses réactions quelques minutes plus tôt, soudain coupable de lui avoir causé la réminiscence de ces souvenirs douloureux. Même si elle feint la joie et l'appréciation, je peux presque sentir la tempête derrière ses paupières. Le malaise s'installe de nouveau en s'intensifiant maintenant qu'elle niche sa tête au creux de mon épaule, nos mains toujours jointes entre nous, sa chaleur remarquable dans la fraîcheur marine ambiante. Je suis tiraillé entre la gêne et la culpabilité, comme ce jour-là dans la bibliothèque. Mon corps a envie de fuir le contact du sien autant que ma main à envie d'enlacer sa silhouette toute entière. J'essaie de trouver les mots pour faire diversion, répondre à ses confessions. Mais le moment est tellement solennel que je prends peur, mes doigts se détachant des siens alors que mon cœur et ma respiration s'accélère. Il ne faut pas que nous soyons ainsi, pas quand j'essaie encore de ne pas refermer mes bras sur son mystère et le faire mien. Je lutte pour ne pas l'enlacer, coller son corps contre le mien. Une attraction irrésistible autant qu'une répulsion incontrôlable. Je peux sentir son odeur, la proximité me terrifie tout à coups. Mon regard tente de chercher une échappatoire, observant nos traces de pas dans le sable, bientôt effacées par l'écume. J'aperçois tout à coups ce que j'avais ignoré jusqu'ici : une paire de tennis qui commence à être emportée par les flots. « Lise tes chaussures ! » Je m'exclame et ma voix résonne dans mon sillage, un bond réactif de chevalier servant alors que je m'élance à la poursuite des chaussures avidement avalées par ce glouton d'océan. L'eau salée éclabousse sous mes pas précipités, en quelques instants mon pantalon détrempé me pèse alors que la vague essaie de m'échapper avec son butin. De l'eau jusqu'aux genoux et la houle à la taille, je combats l'écume pour lui faire rendre ce qu'elle a prit. Mais la mer ne se laisse pas faire, mes propres chaussures mouillées s'enlisant dans le sable et glissant sur les pierres. Lorsque mes doigts parviennent à se saisir de l'objet de ma quête à la faveur du renflement de l'écume, une autre vague en profite pour m'éclabousser le torse. Je trébuche sur le fond marin, tombant en arrière les fesses sur le sable, le corps à moitié submergé. Un peu sonné, je recule pour échapper à l'eau glacée avant de me redresser, de toute manière trempé de la tête aux pieds. La main fermement serrée sur les lacets des tennis de Lise, je soulève mon butin suspendu comme un pêcheur son étrange poisson. Mon sourire humide est radieux, idiot. Je ris de l'incident à m'en faire mal aux côtes, de nouveau cet enfant de huit ans sur le rivage. Mes vêtements sont lourds, le rictus toujours amusé alors que je me laisse tomber sur le sol après avoir laissé ses chaussures à ses pieds comme une offrande. L'eau glacée m'a revigoré, libéré de mes doutes. Je m'allonge sur la plage, le corps saupoudré de sable et les cheveux collés au visage comme les tentacules d'une méduse échouée. Je goûte le salé sur mes lèvres, échappant un nouveau rire. « Il semblerait que je sois condamné à finir détrempé à chaque fois que je te fréquente. Que va-il advenir de moi, tu m'as jeté un sort. » J'attrape sa main et l'attire vers moi dans l'espoir joueur qu'elle me repousse, moi et la dégoûtante couche de sel, de sable et d'algues sur ma veste. Je l'entoure de mes bras sans serrer, faisant semblant de l'attaquer de mes mains dégoulinantes. Je finis par arrêter de gesticuler, mes bras retombant sur le sol. J'observe le ciel un instant, fermant les yeux en repensant à ses mots de plus tôt. « C'est le problème des souvenirs, ils peuvent être bons comme ils peuvent être mauvais. Et au final on a pas d'autre choix que de les contempler et de les chérir, parce que parfois c'est tout ce qu'il reste. » Je ne sais pas vraiment pourquoi j'ai dit ça, pourquoi maintenant. Je cherche instinctivement son visage pour poser mon front contre le sien. Même allongé ainsi dans le sable, je peux sentir la morsure gelée du vent sur ma peau mouillée, mon corps tremblant imperceptiblement. « Parce que peu importe ce qu'il se passe dans le futur, les souvenirs resteront là, immuables. Personne ne meurt jamais vraiment tant qu'il reste quelqu'un pour se rappeler. » Ma main cherche la sienne et rencontre la forme familière du galet. Je me mets à le serrer au creux de nos mains. Parce qu'une fois le lien créé, il est douloureux de le voir se briser.
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Ar lan y môr (Lise) - Mar 23 Oct - 20:42


Cette facilité que Mald pouvait avoir à sortir de leur monde ne faisait que la déconcerter d'avantage à mesure qu'il passaient du temps ensemble. Il avait voulu passer à autre chose, désireux de se libérer des chaînes qu'ils s'étaient eux-même imposés. La force de l'habitude avait poussé Lise à ne rien vouloir changer à leurs routines. Au langage qu'ils avaient su mettre au point et qui n'appartenait qu'à eux. Si elle adorait la présence Maldwyn à ses côtés depuis toutes ces années, cette manière qu'il avait de lui ouvrir son cœur lui paraissait bien trop troublante. Incapable de faire de même, Lise se contentait bien souvent de se terrer dans son silence. Elle ne relève pas, mais elle imprime. Le timbre de sa voix lui hérissant les poils, elle savoure chaque parole et les range aux côtés de celles qu'elle avait pu lire ces trois dernières années pour reconstruire le puzzle. Beaucoup de pièces restent manquantes mais le sentiment de se rapprocher d'avantage de lui l'inquiète autant qu'il la fascine. Il avait voulu écrire une nouvelle histoire, s'éloigner de ce langage dans lequel Lise s'était enfermée au point de craindre la moindre mutation. Angoissée à l'idée que de trop gros changements lui fassent perdre ce à quoi elle tient le plus. Angoissée à l'idée que s'éloigner des sentiers battus et s'aventurer vers l'inconnu détruise la relation qu'ils avaient pu construire. Incapable de savoir aujourd’hui s'ils sont tous les deux en train de composer une belle histoire ou s'ils courent simplement à leur perte. La crainte de gâcher l'amitié qu'ils avaient déjà construit dans une poésie intime reste tenace. Maldwyn savait pourtant contourner ses peurs avec une habileté qu'elle ne saisissait pas, abattant ses barrières les unes après les autres. Confortée dans cette expédition par sa simple présence qui se révèle être d'un réconfort étonnant. Alors elle le suit Lise, l'engloutit peut-être de toutes ses angoisses, se refermant face à toutes ces contradictions qui l’assaillent. Elle s'inquiète de le décevoir, ne pas être à la hauteur des attentes qu'il avait fondé dans cette réécriture. Elle avait voulu faire des efforts aujourd'hui, lui prouver qu'elle était prête à le suivre où il voulait l'amener, construire un nouveau monde sur les fondements du leur. Mais la fatalité avait fait qu'ils n'était pas en terrain neutre et Lise ne faisait que s'enliser d'avantage dans sa torpeur, incapable de tenir les promesses qu'elle s'était faite à elle même.

Son corps se crispe tandis que ses doigts effleurent son visage pour ranger ses cheveux derrière son oreille. La main qui glisse le long de son bras jusqu'à se saisir de la sienne. Le geste lui arrache un frisson mais son contact l'apaise, une vague de soulagement qui l'envahi en quelques secondes. Un geste qu'il avait déjà eu et sa peau qui effleure la sienne la rappelle combien elle avait besoin d'un peu de contact humain. Trop longtemps enfermée dans la mascarade de la femme épanouie secrètement solitaire et malheureuse. Sa main s'accroche à la sienne dans une symbolique qui semble vouloir se répéter. La manière dont elle s'était saisie de la sienne à la bibliothèque de peur qu'il ne lui file entre les doigts. La façon dont il l'avait attirée jusqu'à cette allée poussiéreuse de peur qu'elle ne le suive pas.  Elle le suit Lise jusqu'au rivage. Elle le suivra, où il voudra bien l'emmener. Enfin consciente de leurs ressemblances, des raisons pour lesquelles ils sont comme ils sont aujourd'hui. Deux gamins accrochés désespérément l'un à l'autre, incapable de se lâcher la main du haut de leur trentaine. Elle l'avait lâchée juste le temps de se déchausser pour goûter à la consolation que pouvait lui apporter l'eau salée qui s'imissait sournoisement dans sa peau. Les doigts de Mald capturés de nouveau dans les siens, la rousse s'ouvre à la confidence à son tour. Concède de mettre au sol de nouvelles barrières, désireuse de suivre ses pas. Lise laisse Maldwyn entrer dans ce passé qu'elle se tue à cacher. S'il pense être une mauvaise personne parce qu'il a sa part de noirceur, Lise l'est tout autant que lui. Noyée dans une tristesse sans fond, submergée par un océan dont elle n'a jamais su s'extirper, c'est un poids qu'elle porte autant qu'il porte le sien. Il reste silencieux malgré ses confidences, et étrangement, ça l'apaise d'avantage. Sa tête vient se nicher contre son épaule alors que le silence réconfortant la borde, éloignant doucement la détresse qu'elle avait pu ressentir à la vue du phare et de sa falaise.

Son attention désormais concentrée sur sa main qui n'a pas quittée la sienne et le rythme de sa respiration se brise subitement. Sa main à quittée la sienne au moment même où sa respiration s'était accélérée. Lise cache au mieux son affolement soudain, se redresse doucement, contrariée par ce qui a bien pu lui traverser l'esprit à ce moment là. Elle n'a pas le temps de réagir que déjà Mald se lève brusquement en direction du rivage. Elle reste interdite quelques secondes, incapable de réagir, coincée dans une torpeur d'incompréhension. N'était-ce pas ce qu'il voulait? Qu'elle s'ouvre un peu à son tour, lui explique les raisons de son tourment. Lise pensait le rassurer quand au visage paniqué qu'elle n'avait pas pu lui cacher. Lui prouver qu'il ne s'agissait pas de lui... qu'il ne pouvait pas savoir. Ce n'est que quand, dans sa vision perdue dans ses pensées, la silhouette de Mald tombe à la renverse qu'elle se rend compte de ce qu'il est en train de se passer. "Mald!" Elle s'élance à sa poursuite, coupable d'être restée figée sur sa silhouette gesticulant dans le flou de ses pensées sans se rendre compte qu'ils s'était jeté à l'eau. Il se redresse quand elle arrive à son niveau, les jambes battant l'eau pour s'approcher de lui. "Mais qu'est-ce que tu fais?" Il brandit fièrement ses tennis retirée à l’océan, fier comme un paon, particulièrement victorieux. Elle sourit tout de même face au spectacle du sauvetage et d'un Maldwyn qu'elle n'avait jamais vu rire à gorge déployée. La scène l'attendrit, son rire est communicatif, elle rit à son tour en reprenant sa position initiale sur le sable, emplie d'une joie particulièrement agréable. Il s'allonge à ses côtés et ses mots la font sourire. S'il savait. Il était loin d'avoir tord même si évidement ces moments devraient être évités, il semblerait qu'il lui soit inévitable de le guider vers ce qu'elle lui cache. Dans leur euphorie, elle se laisse emporter lorsqu'il l'attire vers lui, rie de bon cœur à son attaque malgré la gêne de leurs corps bien trop près. "Peut-être.. T'es tout trempé maintenant" Qu'elle constate un poil désemparée. S'il s'en amusait, ça l'inquiétait plus qu'autre chose. Ils avaient beau être en juin, l'eau restait froide et l'océan était de ses jours agités.

Lise amorçait un geste vers lui tandis qu'il avait les yeux fermés mais avorté par les paroles de Mald qui la coupait dans son élan. Le ton devenait soudainement bien plus sérieux et son regard s'assombrit un instant. Il aurait pu rester silencieux sur le sujet, ça ne l'aurait pas dérangée, mais ses mots lui mettaient pourtant du baume au cœur. Son front se pose sur le sien et son estomac devient douloureux. Ses yeux plantés dans l'azur sans fin des siens la perdent presque totalement. Elle n'écoute plus que d'une oreille le reste de ses mots. Ils raisonnent à ses oreilles comme un pansement à son cœur qui lui semble soudain moins douloureux. Troublée par la justesse de ses mots, Lise reste silencieuse un moment, hoche simplement la tête, perdue dans l'immensité des yeux toujours aussi proches des siens. Ses doigts cèdent le galet à Mald, elle déglutit avant de poser la paume de sa main sur sa joue puis décolle les mèches de cheveux trempés de son visage du bout des doigts. L'odeur du sel l’enivre soudainement, elle se mord la lèvre dans un geste un peu suspendu alors que sa main parcoure le reste de son visage, son autre joue, la ligne de son nez, absorbant discrètement la couche d'humidité lui recouvrant le visage dans le pretexte de replacer ses cheveux. Elle sentait que la proximité de leurs corps faisait qu'elle absorbait une partie de son humidité bien malgré elle. Ses doigts s'attardent sur ses lèvres salées qu'elle s'étonne à vouloir goûter. Leurs visages s'éloignent dans un raclement de gorge. Lise se redresse à genoux et se met à fouiller dans son sac pour cacher sa gêne et son visage qu'elle sentait brûlant de s'être attardé sur ses lèvres. Dans tous les cas il fallait qu'elle s'éloigne pour qu'il ne sèche pas en une durée record. Dans son sac, deux objets s'imposent à elle par leur taille, le livre et .. "Ton pull !" Son visage radieux se tournait brusquement vers Mald, plutôt fière de ne pas l'avoir oublié. Le ciel est peu couvert mais le vent finira par le frigorifier s'il ne se sèche pas. "Enlève ta veste et ton haut " Lise lui tend son pull sec et chaud, le troquant doucement contre le galet qu'il avait dans la main. "Ca ira mieux avec ça" Le regard se fait fuyant, concentrée sur ses propres gestes qui extirpent doucement le livre de son sac. Elle le pose sur ses cuisses tandis qu'elle s’assoit jambes contre sable pour qu'il ne remarque pas qu'elles sont complètement sèches. Son regard se perd pourtant bien malgré elle sur les gestes de Mald avant qu'elle ne lui tende le livre pour faire diversion. "Ca aussi c'est pour toi.." Nerveuse, elle se met à triturer le galet entre ses doigts et débarrasser ses bras du sable dont ils étaient tous les deux recouverts. "Tu.." Elle s'avance et s'appuie sur son poing enserrant le galet alors que son autre main se tend vers Mald, jusqu'à ses cheveux qu'elle peigne du bout des doigts pour lui débarrasser du sable qui s'y était logé lorsqu'ils étaient allongés. "Tu aurais pu laisser les tennis à la mer tu sais.."
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Ar lan y môr (Lise) - Sam 10 Nov - 23:12


On dit qu'il suffit d'un grain de sable pour tout faire dérailler. Un battement d'ailes, de cils, un regard pour faire souffler le vent dans une autre direction. Alors ainsi à la merci sauvage de la plage je ne peux que plier face aux conséquences de cet effet papillon, cette tornade qui m'entraîne irrémédiablement vers elle. Combien d’actions à réactions nous attendent maintenant que je suis recouvert de cette couche de discorde, tremblant plus que le froid, au moindre de ses gestes à mon égard. Graines de malice imbriquées dans la mécanique de mes pensées, l'océan fait naître en moi une déferlante de sensations incontrôlables, la peur en tête de proue par dessus la coque submersible qui maintient encore à flot le bonheur de partager ces quelques moments. A ce titre c'est peut être Lise l'océan, ces vagues d'une douceur infinie qui viennent s'échouer contre mon corps frigorifié. Je ferme les yeux au contact de sa main contre ma joue, échappant un souffle alors qu'elle entreprend de décoller délicatement les mèches sablonneuses de mon front. Le regard bien vite happé dans les profondeurs du sien, étudiant studieux de sa bienveillance. Elle s'inquiétait pour moi, un sentiment qui ne m'était pas inconnu mais dont je ne voudrais pas m'habituer. Je ne veux pas uniquement devenir source d'ennui, être la cause de cette ligne qui fronce légèrement son front. Je me cause bien assez de problèmes tout seul sans en plus l'y entraîner à ma suite. Mes doigts s'enfoncent dans le sable pour trouver l'équilibre alors que les muscles de mes jambes s'étirent un peu plus comme pour m'emmener loin de la torture de sa peau explorant la mienne. J'ai envie de lui dire d'arrêter de me faire du mal ainsi, poignardé sans vergogne à coup de bonté. Mais mes mots ne passent pas mes lèvres gelées, scellées par le contact de ses doigts. La supplique se perd sur mes paupières, mes yeux évitant les siens jusqu'à ce que cet étrange instant se brise de notre fuite consensuelle. Je me racle la gorge non sans un goût de sel et me détourne, me redressant en position assise au contraste de l'air contre mon corps réchauffé de ses caresses. Une sorcière qui m'empêchait de finir en iceberg, la calotte glaciaire protectrice qui fonds mais elle n'en a rien à faire de dévaster l'écosystème de mon cœur. Une mauvaise idée qu'elle était bonne, d'avoir voulu passer plus de temps ensemble, seuls. Mon regard se perd sur l'horizon trouble, la ligne irrégulière de la houle qui bouillonne d'impatience. Je frotte mes mains pleines de sable l'une contre l'autre, la ténacité revêche de la matière au creux de mes phalanges encore humides. Je nettoie aussi le galet de parole comme elle l'a appelé, le faisant tourner entre mes doigts. Mais à présent je suis muet, incapable de briller de mes mots parce que j'ai trop peur de la blesser. Parce que si cette pierre polie signifie une complète honnêteté alors j'ai quelques non-dits à rattraper. A commencer par tout ce qu'il s'est passé d'étrange dernièrement et la rencontre impromptue avec mon demi frère.

Mes épaules qui se voûtent pour protester contre le froid et le poids de l'existence, le bruit de Lise à mes côtés pour seul réconfort. C'était simple et c'était tout ce que je voulais, tout ce que je pouvais espérer. Si seulement j'avais la force d'être quelqu'un d'autre je pourrais balayer mes craintes du plat de la main, l'enlacer sans accepter de la voir s'échapper. Était-ce égoïste de vouloir maintenant troquer le verbe pour le contact ? Je n'aurais pas cru vouloir replonger dans le silence, pas après avoir forcé notre amitié hors du mutisme de quelques lignes calligraphiées. Mais aujourd'hui je me contenterai volontiers de sa chaleur qui me rends aussi apaisé qu'amer. Pourtant je sursaute doucement de sa voix excitée de sa trouvaille, rougissant d'une pudeur farouche lorsque s'en suit l'ordre inattendu de me dévêtir. « Quoi…?! Non…! » Que je proteste en vain comme un enfant, une bourrasque de vent accentuant mes tremblements comme pour me rappeler à l'ordre de raison alors qu'elle me fourre mon pull entre les mains. Elle subtilise le galet, ce n'est plus à mon tour de parler, plus le droit de refuser ni me révolter. Je déglutis, mes yeux se posant timidement sur elle comme dans l'attente qu'elle se détourne poliment. C'est ridicule, surtout à mon âge, et j'aurais du mal à prétendre être prude après lui avoir goulument volé un baiser à la bibliothèque. Cette satané bibliothèque. Je secoue la tête non sans échapper un grognement à peine perceptible, essayant de ne pas me concentrer sur sa présence. C'est plus fort que moi, je ne suis pas à l'aise avec ma propre nudité. Je retire ma veste au tweed bientôt ruiné par le sel, me débattant avec ma chemise qui me colle aux muscles comme une grosse méduse échouée; bien vite roulée en une boule gorgée d'eau que je tente d'essorer avec force non sans un soupire avant de l'abandonner dans le sable. Mis à vif, offrande à la brise marine mais c'est plus à ses regards que j'ai peur d'être une proie. Il n'y a aucune arrière pensée à cet instant, mais je ne me suis pas senti aussi vulnérable depuis bien longtemps. Car je ne peux pas cacher ma fragilité, les démons qui dansent à l'abri des regards. Ma peau est couverte de bleus, certains sont des vestiges de ma rencontre avec Clemens, comme l'imperceptible marque encore légèrement visible sur mon sternum là où il a enfoncé sa lame pour me tuer. D'autres sont les témoins de ma maladresse, les restes de ma soirée avec Sinead et de ma mauvaise coordination motrice induite par l'alcool et la bêtise. Et puis il y a les dessins de l'addiction qu'elle connaît déjà, les veines abîmées au creux de mes bras. Je me hâte bien vite de cacher tous ces secrets, enfilant maladroitement mon pull dont la matière rugueuse est inconfortable à même ma chair. Mes prunelles croisent les siennes, vibrantes de peur. Est ce qu'elle me regardait ? Je n'ai pas le temps d'ouvrir la bouche pour maugréer comme un effarouché qu'elle me place un nouvel objet entre les mains. Mon visage se baisse pour le détailler. Un livre. Je reste silencieux en glissant mon index sur le lettrage soigné et ancien de la couverture sans oser l'ouvrir. Je connais déjà la valeur de l'ouvrage entre mes mains. Je relève le visage abasourdi, je ne peux pas accepter un tel cadeau beaucoup trop précieux. Surtout pas avec mes sales pattes pleines de sel corrosif. J'ai un sursaut de panique, cherchant quoi faire avec le livre comme s'il s'était soudain transformé en serpent venimeux dont il fallait impérativement se débarrasser. Je regarde autour de moi, cherchant mon sac des yeux pour l'y fourrer en toute hâte, hors de danger. J'échappe un soupire de soulagement non sans une certaine honte de ma réaction, mais la main de Lise se glissant de nouveau dans mes cheveux m'immobilise instantanément et m'arrache un souffle rauque. Elle a trouvé comment me dompter et maintenant elle en abuse. J'évite à tout prix son regard, pesant chacun de ses mots. « Non. » Que je réponds fermement non sans une pointe de fierté puérile avant de laisser le silence s'installer. C'était sûrement idiot d'avoir voulu combattre les éléments pour une paire de tennis au prix de tomber malade, mais je n'avais aucun regret pour mon geste. Les paupières closes, à la fois sensible et terrifié de sa présence. Ma main trouve sa sienne contre mon visage, mes doigts emprisonnant bien vite les siens. Un sourire imperceptible point sur mes lèvres. Et je me retrouve de nouveau entre ces volumes poussiéreux de la bibliothèque.

Ma main plaque la sienne contre le sable, mon corps surplombant doucement le sien. Je la domine non sans un rire léger, cherchant le galet avant de plaquer sa deuxième main au dessus de sa tête avec une maladresse involontaire. « Je pouvais pas laisser l'océan gagner encore une fois ! » Que j'avoue d'une voix emplie de malice, mon regard toujours fuyant. « Hors de question d'offrir de l'hébergement gratuit pour une famille de bernard l'ermite pendant que je suis obligé de te porter sur mon dos jusqu'à chez toi parce que tu n'as plus de chaussures. » Mon ton est catégorique, secouant la tête avec une innocence enfantine. « Alors non Lise, je ne te laisserai ni toi, ni tes tennis à l'océan… » A l'océan, et à personne d'autre. Mon sérieux revient, étrangement brutal. Le contraste me trouble et mes yeux qui s'étaient plongés dans les siens viennent échouer avec mon front contre sa poitrine. « Je ne te laisserai pas… » Que j'insiste sans trop savoir pourquoi, plus un mantra à moi-même je crois qu'à son intention. Mes doigts se serrent un peu plus sur les siens, j'essaie d'ignorer les battements de son coeur si proche, la cacophonie du mien est elle assourdissante. Le galet s'enfonce dans ma paume comme ces mots qui me brûlent la gorge. Je peux parler si je le souhaite, je n'ai plus besoin de mentir. « Je… » J'échappe à peine une syllabe. Merde, j'arrive même plus à m'exprimer. La proximité de son corps me perturbe et je finis par décoller mon visage de sa poitrine. J'aimerai fuir mais mes mains sont fermement ancrées aux siennes. Je n'ai pas d'autre choix que de la regarder et sentir mon cœur s'accélérer. Mes yeux se posent sur ses lèvres. Est-ce que je dois demander la permission quand j'en meurs d'envie ? Est-ce que c'est possible de lui dire de fuir alors qu'elle est à ma merci ? « Tu te souviens… quand je t'ai dis de me fuir… » Ma voix n'est presque qu'un murmure qui se mêle au vent alors que mon visage s'approche du sien.  « Je crois que je me trompais… » L'une de mes mains se détache de la sienne pour venir se poser contre sa joue. « C'est moi qui devait te fuir avant de le regretter… » Parce qu'elle m'interdit toute maîtrise, parce qu'elle s'est emparée de ma raison et de mes pensées. Parce qu'elle est une drogue beaucoup plus dure que tout ce qui s'injecte ou se renifle. Mes lèvres se posent doucement sur sa gorge avant de glisser sur l'une de ses clavicule. Elle a le goût de la mer, le goût d'une nature incontrôlable. Mes avants bras se posent contre le sable, encerclant sa tête alors que je croise une nouvelle fois son regard. « Mais je suis fatigué de fuir et passer une vie à le déplorer… » Un dernier murmure avant que ma bouche ne se plaque contre la sienne avec ardeur, abandonnant la douceur, il n'y a plus que l'urgence. Un grain de sable qui peut tout faire dérailler, logé au creux de mon cœur il ordonne à mon esprit d'abandonner toute peur. Peut être que si je n'avais pas répondu à ces mots dans ce livre nous n'en serions pas là. Peut être que si j'avais laissé la mer emporter ses chaussures nous n'en serions pas là. Peut être que si j'avais résisté à mes pulsions nous n'en serions pas là. Mais dans la hiérarchie des créateurs d'apocalypse, je suis le papillon avec les ailes les plus meurtrières qui soit.
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Ar lan y môr (Lise) - Jeu 29 Nov - 22:22


Ils sont un monde de contradictions, se heurtant l’un l’autre à leurs propres défauts. Finalement bien plus similaires qu’elle n’aurait pu jamais l’imaginer. Alors elle trace ce lien qu’ils tissent ensemble et s’y enroule avec volupté. Abaissant ses dernières défenses pour l’inviter à s’y enrouler à son tour. Elle commençait à comprendre dans ce nouveau monde des gestes, que ceux-ci ne correspondaient pas toujours à ses mots. Il voulait la fuir, lui ordonnait de fuir alors que son corps et ses agissements tout entiers la faisait prisonnière de son emprise. Quant à Lise, elle se complaisait dans le déni total de la nature de ces gestes. Elle avait chassé l’angoisse, surmonté la mise à mal de leur monde de mots gribouillés entre les pages. Faute de savoir où est sa place dans cette nouvelle mascarade, habituée à jouer des rôles, elle ne parvient pas à comprendre la place qu’elle doit avoir aux côtés de Maldwyn. Lise est passée maître dans l’art de la sélection mémorielle. Un tri de tous les instants reléguant en arrière ce dont elle ne souhaite pas s’encombrer outre mesure. Un besoin pourtant viscéral de comprendre, peser chaque geste, chaque mot. Une analyse perpétuelle de l’autre dans une quête de compréhension et de contrôle. Douce ironie pour celle qui n’a jamais rien su maitriser, laissant sa vie lui glisser entre les doigts dans un flot incontrôlable. Sa vie toute entière n’est qu’une succession d’échecs, un manque de contrôle irrévocable. Un scenario qui se répète, Mald qui lui glisse entre les doigts sans qu’elle ne puisse maitriser la teneur de leur relation. Elle n’est pas dupe et loin d’être idiote, elle a simplement fait le choix de reléguer certaines informations au second plan. Ce vieux mécanisme de défense qui s’empare d’elle. La peur aux tripes d’affronter l’inconnu, elle s’enferme délibérément avec ses propres démons. Seule responsable de sa chute vers le fond, la néréide se laisse engloutir toute entière jusqu’à ce que la réalité ne finisse par la rattraper. La tête dans le sable, elle ne sait que faire semblant, coincée dans le refus d’affronter ce qui la dérange. Incapable de faire face à ses propres démons, elle ne pèse pas le poids face au bleu azur qui la happe toute entière. Bien malgré lui, Mald l’avais prise au piège, confrontée à ses propres peurs, malmenée  et noyée dans un raz de marée de contradiction. Se débattre n’avait amené rien de bon, ne faisait que le faire douter d’avantage et ajouter un cadenas de plus à la cage qu’il essayait d’ouvrir. Il lui fallait passer par là pour le suivre de son pas timide et mal assuré. Puisqu’il ne restait rien de leur monde, puisqu’il l’avait mis à terre, il lui fallait alors mettre à terre ses défenses pour l’atteindre réellement.

Mais elle est fatiguée de lutter Lise, et déjà la plupart de ses défenses n’ont pas tenu le choc d’un Maldwyn désireux d’en avoir plus. Peut-être que c’est ce qu’elle veut, elle aussi, que c’est pour cette raison qu’il abat ses barrières avec une facilité plus que déconcertante.  Il lui était difficile de résister à ce contact qui foutait le feu à son corps pourtant habité d’une eau glaciale. Elle pouvait presque imaginer le nuage de vapeur s’échapper de ses doigts qui parcouraient son visage dans une innocence mal dissimulée. Son cœur menace de s’échapper de sa poitrine tandis qu’elle ose s’attarder, le détailler en silence, glisser ses doigts sur chaque parcelle de son visage dans une conscience à peine refoulée. Il l’avait provoquée, attiré à lui dans un geste humoristique, une bien piètre justification au désir d’être simplement proche d’elle. Je veux être proche de toi. Elle n’oublie rien malgré cette sélection minutieuse qu’elle s’efforce de faire. Ca lui reste en mémoire malgré tout, jusqu’à ce que l’équation se résolve presque d’elle-même. C’est avec une satisfaction bien particulière que Lise se délecte de ce contact rapproché. L’impression d’être privilégiée l’envahi toute entière alors qu’elle profite de ce moment rare où il ne semble pas pétrifié de ses gestes envers lui. Mais elle se retire bien vite, brusquement envahie par la gêne d’avoir posé son regard là où elle n’aurait pas dû. Elle se demande s’il a remarqué et ses joues lui brûlent alors qu’elle fouille dans son sac à la recherche d’autre chose sur lequel se concentrer afin de refouler ses émois. Elle se pince les lèvres, se perd complètement. Elle ne sait plus où elle en est, l’autruche commence doucement à sortir la tête du sable. Il lui faut affronter la situation, cesser de vivre dans le déni qu’une normalité anormale. Fausse persuasion animée par une fuite perpétuelle mais incomplète. Parce qu’elle est incapable de le fuir comme il lui a demandé, incapable de se cacher éternellement comme son cerveau le lui ordonne. Son cœur semble s’allumer d’un brasier tout à fait nouveau et elle en perd ses moyens. Coincée dans un éternelle replay, une fuite de la vérité, mais une fuite vers l’avant. Vers lui.

La rousse lui avait glissé entre les mains son pull avec une fierté non dissimulé, un éclair de génie des plus propices. S’il avait fait naître le feu entre ses doigts, son visage était gelé et l’inquiétude de le savoir trempé une seconde fois lui tordait l’estomac. La crainte d’apercevoir certains stigmates se réveillait tout aussi violemment alors que la réalité lui revenait en pleine figure. Une autre scène s’imprime sur sa rétine alors que ses yeux détaillent discrètement le torse et les bras de Mald. Son cœur se serre et son regard se détourne aussitôt après avoir aperçu les tissus meurtris sous l’épiderme glacé. Ses yeux s’étaient perdus vers une zone à accès restreint et elle préféra feindre plutôt que mal réagir. Puisqu’elle ne savait pas comment réagir encore une fois alors qu’elle constatait son désespoir. C’est le livre qu’elle lui donnait à la hâte, pour l’empêcher de réagir, le laisser persuader que son regard était concentré sur le contenu de son sac et non sur les traces d’une souffrance dont elle ne mesure probablement pas l’immensité. L’inquiétude est pourtant bien là, le regard est fuyant, contrarié, parasité d’interrogations. Au-delà de l’addiction qu’elle comprend bien malgré elle, elle se demande si les hématomes ne sont que les résultats de sa maladresse qu’elle avait déjà constaté un bon nombre de fois, où s’il s’était ait violenté. Son cœur s’étrangla à cette perspective et elle manqua d’air. Sa respiration se fit brusquement plus difficile, légèrement plus bruyante. Le galet faisait les frais d’une torture involontaire de ses doigts paniqués avant de débarrasser un part un les grains de sables qui s’ajoutaient à ses tâches rousses le long de ses bras. L’aimant l’attire de nouveau, l’urgence d’un réconfort qu’il n’a peut-être pas besoin, qu’elle ne saurait justifier, mais qu’elle a grandement besoin. Besoin de lui prouver qu’elle est là, bien qu’il s’agisse là probablement d’un désespoir personnel. Ses doigts viennent retrouver les mèches de Mald qu’elle avait vaguement recoiffé pour les défaire de ces grains de sable envahissant. Elle a l’impression qu’ils n’ont rien à faire là. Élément perturbateur qu’elle tente de déloger dans un toc presque inquiétant. Sa négative résonne et lise se fige avec stupeur. Son geste reste en suspens alors que son regard mort d’inquiétude mal dissimulé est capturé par le sien. Il attrape sa main, la faisant glisser contre sa joue et lui enlève alors tout capacité de parole.

Son corps se rapproche du sien jusqu’à la faire basculer. Elle a le souffle coupé lorsque, de sa position dominante il plaque leurs mains liées au-dessus de sa tête. Le geste maladroit pourrait la faire sourire mais il lui est bien difficile de ne pas y voir une position un peu trop sensuelle pour leurs timidités respectives. Le rouge lui monte aux joues à une vitesse vertigineuse alors que son corps tout entier reste figé à cet assaut soudain. Ses paroles restent malicieuses mais le geste n’est pas joueur. L’intention n’est plus celle qu’il avait eût quelques minutes plus tôt tandis qu’il l’attirait vers lui avec un air taquin. Ses lèvres s’étirent dans un sourire timide à l’imagine de rentrer sur le dos de Mald mais si fane bien brutalement. Son cœur qu’elle peine pourtant à calmer venait de faire un bon dans sa poitrine presqu’aussi violemment que le changement de ton qui venait de s’opérer. Je ne te laisserai pas à l’océan. Elle eut un mouvement de recul contraint par le sol dans son dos, le corps qui se crispe à l’intonation de ces quelques mots qui la pétrifient. Est-ce que ces mots avaient le sens qu’elle y lisait ? Se doutait-il de quelque chose ? Le front de Mald vient s’échouer sur sa poitrine comme elle avait pu le faire déjà quelques fois en signe de reddition. Son cœur s’emballe à tel point qu’il en devient douloureux et ses yeux resté fixés dans le vide se gorgent d’eau. Ses paupières papillonnent pour chasser les picotements naissants alors que Maldwyn répète ses mots. Les muscles pétrifiés ne parviennent pas à se détendre même lorsqu’il se redresse, gardant encore ses mains prisonnières. Il n’avait pas pris la peine de détruire les chaînes qui entouraient sa cage, il s’était simplement contenté de se glisser à l’intérieur afin de couler avec elle. Ses yeux ne quittent pas ses mouvements comme une preuve de force pour cacher son désarroi. Elle le fixe alors que son corps entier reste figé dans une proximité qui l’électrise chaque fois un peu plus. Le toucher délicat de sa main sur sa joue la confronte à la réalité, elle ne peut plus faire semblant de ne pas comprendre. S’enfoncer dans le déni et se persuader qu’il n’y a rien d’anormal à tout ça. L’étrangeté intrinsèque de leur relation n’excuse pas tout, et cette fois elle ne peut balayer les paroles qui la gênent d’un revers de main. Elles s’impriment d’autant plus dans son esprit, se mêlant aux mots qu’il avait pu avoir à la bibliothèque et qu’elle n’avait volontairement pas relevé. C’est son corps tout entier qui s’approche du sien et le brasier qui se rallume. Ses lèvres se posent sur sa peau, embrassent sa gorge et son cœur se consume. S’il est destiné à finir trempé avec elle, elle de son côté, est plutôt destinée à s’assécher à force d’émois. Les doigts renforcent leur étreinte avec une violence trop peu maîtriséess. Elle se surprend à venir chercher ses lèvres quand elles s’approchent des siennes. Les questions s’effacent au profit de l’instant présent.  Les angoissent laissent place à l’envie. Il y a de ça quelques mois, elle se contentait d’attendre sa venue avec la boule au ventre. Aujourd’hui, elle attendait ses lèvres sur les siennes avec un désir mal refoulé, savourait le goût salé dont elles étaient imprégnées et se délectait de la profondeur et du lâcher prise de leur échange. Une de ses mains se libéra de son entrave pour glisser ses doigts à l’arrière de son crâne l’attirant d’avantage à elle. Son corps se collait au sien, avide de se perdre dans ses bras.

La voilà qui se noyait complètement, perdue entre l’impératif du contact imposé auquel avait pris goût et le besoin de se tenir éloignée. Alors ça se déclenche dans son esprit, ce mécanisme défensif de fuir la réalité, elle prend conscience que tout ça n’avait pas de logique. Le contact se brise brutalement. "Non.." Le ton qui voulait agressif ressemble plutôt à un miaulement de chaton. Le plat de sa main se pose sur son torse pulsant sous les battements de son cœur pour le repousser de sa main tremblante. "Tu ne peux pas faire ça.. " Un souffle s'échappe d'entre ses lèvres. "On ne peut pas faire ça.. " Son poing enserre son pull dans une réminiscence répétitive. Elle voulait pouvoir être qui est-elle avec lui, comme elle avait pu l'être entre les lignes. Lise s'était sentie entière parce qu'elle n'avait pas à lui expliquer les conséquences de sa possession sur son quotidien. La situation était bien différente maintenant qu'il se tenait au-dessus d'elle à deux pas de l'océan qui battait avec rage sur la falaise et qu'elle mourrait d'envie de s'y jeter. De l'y emmener avec elle, même, et le faire entrer dans la magie de son univers. Si elle s'efforçait jusqu'à aujourd'hui de renier cette partie de son être, elle avait l'impression que leurs similitudes l’amènerait à accepter sa nymphe après quinze ans de cohabitation forcée. Pouvait-elle avoir l’arrogance de croire qu’elle pourrait l’accompagner dans l’acceptation de soi ? Peut-être que main dans la main ils pouvaient être ceux qu’ils se montraient aux travers de leurs écrits. Mais il lui était impossible de se jeter à l’eau. Elle est créature, monstre aux yeux des divins autant qu’aux mortels, un mutant qui n’a sa place nulle part. Le réconfort de ses bras lui parait si attrayant, réconfortant et chaleureux qu’elle y perdrait la raison. Elle ne pouvait accepter ni la douceur de ses gestes ni le regard qu’il posait sur elle tant qu’elle ne pouvait être honnête avec lui. Lise se dresse sur ses mains afin de glisser en arrière pour fuir la domination de Mald et s’éloigner de ce corps-corps qui lui as permis de voler l’humidité des vêtements de Mald. Elle se saisit fébrilement de son avant-bras,  déglutit en soulevant doucement sa manche le long de son bras avant de faire glisser ses doigts sur la couleur violacée au creux de son bras. Un stylo qui s’extirpe de sa poche pour venir poser sa pointe sur  sa peau. Fuis Elle le sonde de ses yeux rougis par des larmes réprimées. "Tu ferais mieux de me laisser finalement, c'est mieux comme ça Maldwyn." Elle est mauvaise pour lui et elle le sait, quelqu’un qui a voulu mettre fin à sa vie ne guéri jamais réellement… Peut-être qu’il avait raison, qu’il était mieux pour lui de fuir, peut-être leur fallait-il ne plus se voir pour ne pas risquer de se noyer ensemble. La noirceur appelle la noirceur et les contradictions les habitant sont tenaces.
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Ar lan y môr (Lise) - Jeu 6 Déc - 23:00

Le cœur qui affleure, effleure dans un abandon complet qui ne m'est pas familier. Les sens retenus à l'affût et pourtant mollement bercés par le reflux de ces vagues d'envies que je ne peux réprimer. Elle a le goût de l'eau, de ces lèvres si promptes à vouloir filer entre les miennes. L'iode sur le bout de la langue, une saveur neutralisante et pourtant addictive. Je suis en apnée, plongé dans ces méandres incertains dont elle me maintient sauf par ce bouche à bouche vitalisant. La tête enfin à la surface, sertie d’idées et de désirs; une couronne de ruine fièrement portée. Cette partie de moi que je pensais depuis longtemps perdue, cette capacité à être aimé et vouloir quelque chose et surtout quelqu'un. Je veux Lise comme on désire sa rédemption, comme l'on cherche la main pour signer la promesse que tout ira pour le mieux. Je la veux d'une manière que mes pensées seules ne peuvent plus satisfaire, que les non-dits et la proximité spirituelle ne peuvent plus soutenir. Ma main qui se joint à la sienne est le début de bien plus. Deux objets presque non-identifiés qui entrent en collision, peut être que la frustration a eut raison de moi. Qu'à force de ne pouvoir l'approcher dans son essence j'ai finis par la vouloir toute entière. Posséder physiquement le réceptacle de tous ces secrets bien gardés qu'il ne m'est pas permi de connaître. Je ne peux rejeter cette idée maintenant, cette sensation honteuse d'être maintenu dans l'ignorance d'une vérité dont elle veut me préserver. Mais je suis bien trop effrayé de la perdre pour oser faire voler en éclat un monde de plus. Il y a des omissions, des énigmes de sphinx et des zones d'ombres chez elle. Peut-être que ce sont tous ces mystères qui m'ont attiré par delà l'honnêteté calligraphiées sur le papier. Mais je ne suis qu'un homme enfant incapable de vivre sans réponses à mes questions. Sans savoir, sans comprendre. Pourquoi est-ce que j'ai l'impression de ressentir ce mur invisible entre nous ? Cette cage de verre qui m'empêche de vraiment approcher Lise Rowan. Alors aujourd'hui si je ne puis la rejoindre, j'aimerai au moins pouvoir la faire voler en éclats.

Sa main sur ma nuque m'arrache plus d'ardeur, mes doigts qui s'enfoncent un peu plus dans le sable cherchent un refuge de raison. Mais toute logique m'a quitté l'instant où elle m'a gratifié d'une réponse sans mots, de l'acceptation de ce que nous sommes en train de devenir. Sa chaleur qui se rapproche un peu plus, son souffle qui se mêle au mien. Je me sens complété, en sécurité de son corps acceptant d'être à la merci du mien. Je n'ai plus peur de ses réactions, plus froid de l'air marin qui semble protester mes actions en s'abattant sur mes épaules. Nichée au creux de mes bras, un moment qui ne dure pas pourtant. Un instant qui vole en éclats alors que sa main se pose contre les battements irréguliers qui me soulèvent la poitrine, ses doigts qui me repoussent avec une fragilité qui me fends pourtant le cœur. Je rouvre les paupières, encore épris de cette torpeur langoureuse. Il me faut quelques secondes pour réagir, la tension dans mes veines pulse pourtant l'urgence. Je ne peux répondre autrement que par la crainte et l'incompréhension, mon corps s'échappant de la domination du sien en pesant la mesure de ses mots. Elle me repousse un peu plus fort, le ton de sa voix sonne comme une supplique, vient cogner contre les fondations de cette libido intempestive qui transpirait encore. Les mains qui quittent sa proximité pour venir se recroqueviller contre mes cuisses, pénitentes de leurs affections. Mise à genoux, mon regard ne cherche même plus le sien. Mon premier instinct est de m'excuser. Lui demander de me pardonner pour nous avoir menés là où nous ne pensions pas aller encore une fois. Comme à la bibliothèque ce jour-là, j'abandonne aussitôt mes sentiments à ses pieds. Je refoule mes pensées à son égard, mes propres besoins au profit des siens. L'impression malaisante de lui avoir forcé la main, d'être un monstre impétueux et égoïste. La bouche qui s'entrouvre pour articuler des excuses mais les syllabes restent muettes. Les épaules qui s'affaissent, la silhouette qui se fait tout à coup moins imposante. Un pauvre sourire que je veux rassurant mais dont je ne peux réprimer la tristesse. J'essaie de les forcer mais les mots ne sortent pas. Alors je reste silencieux, ses doigts agrippés à mon pull dans ce dernier lien qui finit lui aussi par se briser. Elle me fuit physiquement, et quelque chose commence à gangrener au creux de mon estomac. Elle me refuse sans me donner de raison, encore une fois. Des affirmations qui me semblent vide de sens et d'impératifs. On ne peut pas faire ça. Pourquoi ne le ferait-on pas ? Je connais mes raisons, les contres indications à me fréquenter. Mais les siennes ? Je la sens relever ma manche, la pointe du stylo contre ma peau me rappelle la désagréable impression d'une aiguille, un souvenir pourtant familier. Je dégage mon bras, l'encre bavant la brusquerie sur l'épiderme, la manche rapidement rabaissée d'un geste. « Non. » Que je finis par lâcher après ces sourdes minutes. « Non. » Que je répète encore une fois. Étalé à nu, une honnêteté qui lui est entièrement dévouée. Je refuse de céder sans en avoir décidé les raisons. Sans connaître qui je viens de concéder à jamais.

La frustration s'étend, agite chaque parcelle de mon corps. Là où l'injustice est palpable, je finis par poser de nouveau mon regard sur elle.  « Tu as dit que j'étais cruel de faire ça… » J'évoque ses mots dans les allées de la bibliothèque. « Je t'ai montré qui j'étais, les démons qui rampent sous ma peau… » J'échappe un souffle las, pliant ma carcasse avec peine pour me relever. Mon regard la suit pourtant à terre. « Je t'ai dit de me fuir en t'en donnant de bonnes raisons. Je t'ai laissé décortiquer chaque secret, dévoiler et explorer chaque parcelle cachée. » Je dépoussière doucement mon pull, faisant pleuvoir une pluie de grains de sable. Un nouveau sourire brisé cache le malaise de mes lèvres, le tremblement de mes doigts qui accrochent une maille abîmée. « Et tu me demande de te laisser… de te fuir et de t'oublier… » Mes yeux se plantent de nouveaux dans les siens, ma main qui se tends vers elle pour l'aider à se relever. « Mais tu ne m'as pas montré ce qu'il se passerait si je persiste. Je devrais te fuir oui, je l'ai avoué volontiers. » Je l'attire vers moi, l'aide à se relever sans que ma main ne languisse dans la sienne. Un espace entre nous, un gouffre dans lequel l'air marin se faufile. Si proches et pourtant si éloignés, de corps et de cœurs. Je me penche légèrement vers elle. Il suffirait seulement d'un pas. « Alors donne moi une seule raison valable. Je te l'ai dit, je n'ai pas envie de te laisser. » Mes doigts s'approchent de sa joue puis se ravisent rapidement. « Fais moi peur Lise Rowan, fais moi fuir. Dis moi qui tu es vraiment et seulement alors je respecterai tes mots. Alors seulement je ferais un choix. » Les pieds fermement ancrés dans le sable, les mains qui se glissent dans mes poches et un presque air de défi à son égard. J'essaie de tenir, ne pas faire un pas vers elle, ne pas lui donner l'occasion d'en faire deux en arrière. Ne pas la laisser m'échapper alors qu'il est temps qu'elle aussi se laisse appréhender comme un livre ouvert. Mais je suis trop faible. Dans un souffle mes bras enlacent ses épaules et je la serre contre moi. « Tu es cruelle de ne pas me laisser entrer. Je suis incapable de rester là sans rien faire à supporter cet air sur ton visage. S'il te plaît Lise aide moi à le faire disparaître. » Les mots sont bien vite happés par les vagues, les battements de mon cœur ne sont que des murmures au sien.
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Ar lan y môr (Lise) - Jeu 27 Déc - 1:08


Si Maldwyn était parvenu à faire son chemin jusqu’à elle, Lise ne parvenait pas à s’abandonner complètement. La force d’une habitude à se contraindre à moitié et de s’enfermer dans une cage d’où elle se sentait invulnérable. Elle n’avait prévu rien de tout ça, les probabilités pour qu’il souhaite briser ses barrières lui paraissaient pourtant nulles. Aucun signe avant-coureur n’avait annoncé le cataclysme qui se produisait dans son esprit. Parce qu’elle était loin d’imaginer franchir les limites tacites qu’ils avaient fixées de leurs encres. Sa présence était le meilleur de ses soutiens tandis que son absence grignotait son cœur avec une violence qu’elle ne connaissait pas. Un sentiment dont elle avait appris à se protéger à se blinder contre le manque d’une personne chère. Chaque jour le rapprochait un peu plus de ces barreaux entre lesquels elle se cache du monde extérieur. C’est quand elle acceptait d’en sortir un bras pour l’effleurer du bout du doigt qu’elle reconsidérait la situation. Imaginait parfois abattre ses défenses pour faire un pas vers lui. Mais elle tenait bien trop à ces mots qu’ils échangeaient par intermittence. La magie qui se dégageait de leur amitié lui était bien plus précieuse pour courir le risque de tout gâcher. Elle avait pensé qu’il ne se rendait pas compte de cette magie, du pouvoir qu’ils avaient eu entre les mains avant qu’il ne pose ses lèvres sur les siennes et la prenne en otage toute entière. Lise lui en avait voulu d’avoir franchi ce pas sans que rien ne semble les conduire sur ce chemin. Et pourtant aujourd’hui, elle se languissait de la douceur de ses mains lui hérissant l’épiderme et de la chaleur de ses lèvres. La notion des priorités qu’elle s’était imposée s’était évanouie, au profit d’un laissé aller qui lui ressemble bien peu. Ces reproches idiots s’évanouissent pourtant sur ses lèvres. Perdue dans un corps à corps avec celui qui jusqu’à présence n’était fait que de papier, c’est d’un revers de main qu’elle balaie ce comportement distant qu’elle avait pu avoir. La fascination qu’elle éprouvait pour son intellect s’additionnait d’un désir brulant. Ses mains l’attirent à lui parce que c’est son corps tout entier qui le réclame. Faisant voler en éclat ses doutes le temps d’un instant. L’instant d’une magie tout différente et pourtant, elle n’était qu’une mutation. L’intensité de leurs échanges  épistolaires revisités transparaissait dans l’ardeur de leurs gestes. Envolées les contraintes lorsqu’au creux de ses bras c’est un sentiment d’humanité qui la submerge. Elle ne pensait plus pouvoir ressentir avec une telle précision la ferveur de ce sentiment. C’était ce qu’elle avait toujours cherché à travers lui, l’humanité et la douceur de son innocence. Sa langue contre la sienne l’électrise autant qu’elle lui ouvre les yeux et devient le point final à l’ardeur de son corps qui cherchait le sien. Elle rompt le contact pour la seconde fois et pourtant c’est son cœur entier qui se déchire alors qu’une négative franchit ses lèvres.

Elle le repousse avec une douleur inouïe. Le geste à contrecœur d’une main contre le myocarde. Il semble battre à tout rompre, à l’unisson avec le sien, et pourtant il lui faut stopper cette chute libre avant qu’ils ne franchissent le point de non-retour. La crainte de se voir piégée dans la peau de celle qu’elle n’est pas. Ou du moins qu’en partie. Puisqu’il tenait à être proche d’elle, il lui fallait au moins être honnête avec lui. Pour autant, ce n’était pas quelque chose qu’elle voulait se permettre comme un caprice à assouvir. Aussi cher qu’il était à son cœur elle se refusait d’entacher la candeur qui lui servait d’aura. Maldwyn reste figé à son geste, les yeux emplis d’une incompréhension qu’elle regrette. Elle saisit les mots qui restent coincés comme s’il ne savait pas exactement quoi lui dire. Ses lèvres esquissent un sourire qui lui déchire tout autant le cœur et c’est avec une difficulté sans nom qu’elle se retire de son emprise. De sa posture prostrée elle ne voit pourtant que l’emprise qu’il pouvoir avoir sur elle. Dans la tristesse de l’azur de ses yeux s’était la beauté de son âme qu’elle ne parvenait pas à mettre de côté. Il lui avait intimé de fuir, et maintenant c’était elle qui le faisait de la pointe de son stylo qu’elle faisait glisser avec délicatesse sur son avant-bras. Ses doigts l’effleurent avant que son regard n’ose affronter le sien et la réaction ne se fait pas attendre. Il balaie d’un revers de main sa demain comme il arrachait une page qui ne lui plaisait pas. Son regard se baisse, abattue, à la recherche d’une autre carte à jouer. Sa voix raisonnant de nouveaux réveille son cœur qu’elle s’efforçait d’étouffer. Il s’agite pourtant de satisfaction. Sa mâchoire se serre tandis qu’elle réprime la douleur d’un cœur suppliant.  Lise se prostre dans son silence, s’écrase tandis que les mots de Maldwyn lui semblent criants de vérité. Elle qui s’était contenté de lui dire qu’il fallait qu’il accepte qu’elle ne lui dise rien. Dans un égoïsme pourtant aux antipodes de sa nature même, elle refusait de lui dire quoi que ce soit. Elle savait pourtant, peut-être mieux que quiconque qu’il était loin d’être idiot et qu’il avait bien saisit l’ampleur du mystère qu’elle s’efforçait d’enterrer en sa présence. C’est pour cette même raison Maldwyn, que tu dois partir. Parce qu’elle ne dira rien de ce secret qu’elle a su camoufler des années durant, entretenant l’égoïsme et la malhonnêteté qu’elle n’assumait absolument pas. Elle saisit sa main pour se relever alors que ses yeux lui hurlent un oui peu assuré. Vas-t’en. Il maintient la distance alors qu’elle voudrait achever cet instant au plus vite. Peut-être qu’un adieu violent leur éviterait à tous les deux la douleur des non-dits d’un jeu de cache-cache imposé et subit. Ses trains se parent d’une inquiétude tenace alors qu’il lui demande ne serait-ce qu’une bonne raison. Mais c’est sur les prochains mots que son esprit s’arrête. Et le schéma se répète, il lui avait demandé de fuir par peur alors que son cœur lui criait de rester. Elle applique la même règle, et pourtant elle ne veut pas que cette main qui s’approche de sa joue s’éloigne de nouveau. Mald avorte son geste dans un air de défis. Fais-moi peur. Il avait voulu lui faire peur et pourtant elle était restée, désireuse de voir au-delà de sa noirceur, parce qu’elle avait vu la lumière dans ses mots. La rousse reste interdite, l’esprit volé par les yeux qui lui font face, à la recherche d’une manière édulcorée de lui dire ‘’je suis un monstre’’. Mais les sourcils froncés ne trouvent rien à dire de sensé face à la bataille qui se livrait dans son esprit. Ses lèvres ses pincent jusqu’à la morsure. « Mald… » Elle le supplie d’abréger ses souffrances. Peut-être que si elle oubliait tout ça tout irait mieux. Peut-être que son cœur ne serait pas réduit en pièce à l’idée de le voir lui tourner le dos pour de bon. Pourtant ce sont ses bras qui l’enlacent et le visage de Lise qui s’enfoui avec réconfort dans le pull de son ami.  « Tu disais qu’on était les même et je te disais que je ne l’étais plus maintenant que tu pouvais m’appréhender comme ça. » La voix empreinte de tristesse tente de paraître neutre. « Je ne peux pas te laisser m’emprisonner dans tes bras sans être honnête avec toi.. » Lise s’éloigne doucement de son réconfort pour  affronter du mieux qu’elle pouvait le regard qu’il posait sur elle et c’est un soupir de reddition qui s’échappe. Ses mains se posent de part et d’autre de son visage avant qu’elle ne pose délicatement ses lèvres sur les siennes comme s’il s’agissait de la dernière fois. Elle savoure la douceur de ce contact qu’elle peine à rompre. « Tu veux une raison de me fuir, je te donnerai la seule et l’unique. »

Ses mains viennent chercher les siennes pour l’amener plus proche du rivage tandis qu’elle avance à reculons, son regard ne quittant pas le sien. Il lui fallait l’affronter, lire l’effroi dans ses yeux pour cesser de se tourmenter de leurs échanges. « Alors voilà qui est Lise Rowan. » Sa voix se brise pourtant d’appréhension. « Voilà ce qu’elle cherche à te cacher » Lise lâche les mains de Mald sitôt que l’écume s’écrase sur ses pieds alors qu’elle continue à reculer. Elle n’appréhende pas la violence des vagues qui se déchaînent dans son dos et sent et se délecte du mouvement de chacune d’elle. Les yeux se ferment en quête d’une concentration alors qu’elle lève les bras à l’horizontale de part et d’autre de sa taille. La néréide reprend le dessus aussitôt que son corps s’enfonce dans l’eau à mesure qu’elle s’éloigne du rivage. Contraindre l’océan à se calmer autour d’elle lui demande une quantité d’énergie déraisonnable et pourtant, ses yeux cherchent de nouveau celui de Maldwyn. Son cœur espère malgré tout y lire une certaine compréhension, peut-être une fascination. La rousse plie les jambes pour immerger la moitié de son visage de sorte à ne laisser dépasser que ses yeux. Les branchies griffent le cou de la néréide, lui permettant de respirer immergée. Et c’est sur cette image qu’elle compte pour le voir tourner les talons face à un spectacle qu’il se n’expliquerait pas. Mais déjà elle se relève pour revenir vers le rivage habitée de la fureur de l'océan, voilà qui elle est vraiment. Une vague qui s'approche et se retire, prête à détruire à tout moment.
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Ar lan y môr (Lise) - Dim 30 Déc - 16:13


Le ciel de ses yeux s'assombrit mais je n'y prête pas attention. L'orage menace d'éclater en dedans mais je n'ai pas senti l'électricité dans l'air, l'accumulation statique sur sa peau qui se confonds dans ses frissons. Je suis aveugle, les mains en visière au coin des yeux, des œillères de son contact qui m'intoxique le cerveau. Si j'étais monté en haut du phare j'aurais peut être vu les prémices de cette tempête inévitable se profiler à l’horizon. Si j'avais insisté plus tôt pour savoir, si j'avais creusé sans relâche à la recherche de ces secrets qu'elle sait disséminer entre ses mots, alors j'aurais pu la comprendre. J'aurais été préparé à ce qui allait se produire et nous changer à jamais. J'aurais été capable de réagir comme elle aimerait que je réagisse et épargner de plus amples dégâts. Elle me reprochait de détruire un monde, mais mes lèvres sur les siennes n'étaient rien comparé à la dévastation apportée par la vérité. Sa vérité, qui elle est vraiment. Ce qu'elle est vraiment. J'aurais pu me contenter de son mensonge, prétendre, une chose que je sais pourtant si bien faire. Continuer de feindre cette perfection que Clemens me reproche sans cesse. Jamais rien de nouveau sous le soleil mais il est maintenant bien pâle en comparaison des cheveux de Lise. Il n'irradie pas autant que la déflagration de la bombe qu'elle m'a planté dans le cœur. I am become death, the destroyer of worlds disait Oppenheimer en observant la fin d'une ère. Mais l'instrument de destruction entre les mains de Lise est bien plus insidieux que l'arme ultime. Pas de guerre ni de diplomatie, que des mots pour annoncer l'assaut. Je ne crois que ce que je vois, la mémoire de cet après-midi dans mon bureau qui m'est revenu une fois de plus et cette jeune femme qui prétendait être une nymphe. Je commence à me dire que ce n'était pas seulement une lubie, pas uniquement des mots pour défier ma croyance. Accepter de croire n'est pas l'acte le plus complexe qui soit. C'est vivre avec aucune autre alternative que la réalité qui est le plus éprouvant.

***


Je la préfère tout contre moi. Là où je sais qu'elle ne pourra plus me fuir. Là où mon pull éponge ses larmes, protégée des vents et des vagues par ma silhouette enveloppant la sienne. La sensation que rien ne peut nous atteindre, mais la conscience que cela ne durera qu'un temps. Une fantaisie d'été, l'excipit d'un livre que nous avons fini d'écrire. La forteresse de mes bras n'est pas une cage immuable, mes muscles ne sont plus assez sûrs pour contenir cet univers qui essaie de s'étendre hors de contrôle. Alors je la préfère contre moi, même si cela pourrait être la dernière fois. J'ai refusé de réfléchir à cela, essayer de poser des mots sur les conséquences de ces chemins divergents que nous avons choisi d'emprunter. Elle a raison, nous ne sommes plus les mêmes. Le mutisme et la distance respectée dans les allées de la bibliothèque ont été remplacés par des mots et des gestes intimes. Je ne peux pas ignorer les battements erratiques contre mes tempes, la satisfaction égoïste de sa peau contre la mienne. Je ne peux qu'être honnête avec moi-même et ce sentiment d'attirance qui me ramène toujours à elle. Pas de l'amour, pas vraiment. Ma tristesse aimantée à la sienne dans un réconfort mutuel, un attachement pourtant plus qu'amical. Panser des plaies ouvertes en flirtant à cœur contre cœur et corps contre corps. Et en ouvrir d'autres, plus profondes. L'honnêteté qui blesse, mais l'entaille est nécessaire pour avancer. La catharsis des secrets, se sentir plus léger de ses choix lorsqu'on en connaît les tenants et aboutissants. Au fil de cet échange je commence à reculer mentalement, inévitablement. Parce que cette décision aura des conséquences irréparables. Parce que je ne veux pas la perdre pour quelque raison que ce soit. Parce que je commence à redouter sa propension à me faire peur comme je lui ai demandé. Parce qu'au fond de moi je sais qu'elle est aussi terrifiée de ses lèvres sur les mienne que je le suis. « Lise je…» Mes mains s'agrippent aux siennes qui viennent se poser contre mon visage, mes yeux se ferment un instant à la caresse familière de sa bouche. J'échappe un souffle alors qu'elle me guide plus près du rivage. Je ne comprends pas le geste, mes sourcils se fronçant légèrement, mes pas maladroits à sa suite comme si eux savaient déjà ce qui nous attend. Je commence à m'inquiéter, alarmé par la douleur et la peur que je lis dans ses yeux. « Lise ? » Je prononce une nouvelle fois son prénom comme on tâtonne dans le noir en recherche de lumière. Comme on essaie de se rassurer sur la réalité tangible. Mes doigts essaient de rattraper les siens qui s'échappent déjà mais ses mots me clouent sur place. L'effet d'un dénouement, d'une déferlante d'eau en plein visage pour réveiller le dormeur. Mais c'est contre elle que les vagues se brisent. Sa silhouette peu dérangée par le gargouillis de l'écume, la houle qui cherche à l'abattre. Ses yeux restent ancrés dans les miens, une force hypnotique qui m'empêche de réagir tout de suite. Immobile face au spectacle qui se dévoile. Le ciel s'est assombri, où alors ce n'est que l'urgence qui me voile le regard. « Lise qu'est ce que tu fais ? Revient, c'est dangereux ! » C'est lorsqu'elle se retrouve avec de l’eau jusqu'à la taille que les mots s'échappent finalement de mes lèvres en rafale. Des pas précipités vers l'océan, je me hâte vers elle pour la rattraper. Qu'essaie-elle de me dire ? Que veux-elle me monter en se mettant en danger ainsi ? « Lise ! » J'essaie de la suivre mais la fureur de l'océan semble essayer de me barrer la route. Je suis terrifié lorsqu'elle s'agenouille dans le bouillon, disparaissant presque entièrement de ma vue. Réflexe humain, je me détourne pour courir vers mon sac et en arracher mon portable. Revenant vite dans l'autre sens, je tape le numéro des gardes côtes de mes doigts tremblants. Je n'ai pas le temps de m'étonner de m'en être souvenu, porté par l'urgence. Je la cherche du regard, terrifié à l'idée de l'avoir perdue de vue. Chaque seconde est précieuse dans ce genre de situation. J'essaie de nouveau de me jeter à sa suite mais l'océan me garde définitivement à distance. Une voix féminine réponds enfin à l'autre bout du fil, pourtant mon bras retombe le long de mon corps. Elle se mets à sortir des flots lentement, aucunement perturbée par la situation. Ses yeux trouvent de nouveau les miens, pourtant je ne cours pas vers elle. Quelque chose m'a transformé en statue de sel. Mon souffle c'est accéléré, un cœur emballé par l'adrénaline. Et quelque chose d'autre. Je glisse le téléphone dans ma poche arrière, c'est d'abord la colère qui a raison de moi. « Ne refais jamais ça ! » Que je lui crie, claquant comme le vent, un ton rude qu'elle n'a jamais entendu de ma part. Je lui en veux de m'avoir fait croire qu'elle était en danger, de m'avoir mis dans un état pareil. Elle n'a pas besoin de feindre le suicide pour me prouver quoi que ce soit. L'une de mes mains se tend pour agripper son poignet avec l'intention de l'attirer de nouveau contre moi. Pourtant j'avorte le geste, ma main tenant fermement son bras en suspens avec maladresse. Mon regard s'est fixé sur son cou, un frisson qui me remonte le long de l'échine et m'arrache un sursaut de stupeur. Mes lèvres s'entrouvrent légèrement, mon autre main s'approchant de son visage avant de suivre mon inquisition vers sa gorge. Mes doigts se posent délicatement contre les fines lignes, les volants de peau encore humide et palpitantes de vie. Des branchies. Mes entrailles ont un mouvement de recul là où mes pieds restent immobiles. Mes doigts continuent leur investigation de chaque côté de son cou, dessinant les attributs aquatiques avant qu'ils ne finissent par disparaître. L'humidité augmente sur mon visage, des larmes infusées de sentiments confus; des sanglots teintés de colère, de peur et d'étrange soulagement. Tout à un relent de confusion, je suis prêt à perdre pied à chaque instant. « Toi aussi… » Que je finis par dire en brisant ce terrible silence. Toi aussi tu n'es pas « normale ». Les mots sont rudes dans ma tête, une impression de trahison contre nos échanges de plus tôt et pourtant je ne sais pas comment le définir autrement. Je n'ai pas la connaissance pour réagir à ce genre de situation. Je ne suis qu'un pauvre idiot innocent de toutes ces choses. D'abord Clemens, puis Lise. Combien de choses extraordinaires me tournent autour et dont je n’ai aucune conscience ? Une punition pour avoir arrêté de fuir, une épreuve pour avoir espéré. « Je suis désolé… » Parce que je ne peux pas te regarder en face, parce que je ne peux pas accepter, pas encore. Je l'embrasse sur le front, un contact spectral. « Je… » Qu'il y a t-il à dire vraiment. « Je te remercie d'avoir été honnête. » Que je parviens à articuler d'une voix blanche. Mes yeux ne peuvent s'empêcher de se poser là où ses branchies ont disparues. « Je suis désolé Lise… » Je peine à trouver mes mots, effaçant rageusement mes larmes sur un revers de manche. J'observe les mailles de mon pull un instant avant de le retirer et le passer sur ses épaules. Je ne pense pas que ça soit nécessaire, mais c'est une faible contribution, un tentative de réconfort idiote pour contrer ce que je m'apprête à dire. « Je ne peux pas. » Les mots se brisent comme la course d'une déferlante contre un rocher. « Je ne peux pas faire face. » Rendre honnêteté pour honnêteté. Parce qu'il n'y a rien d'autre à faire. Je ne peux pas te faire face. Mes doigts effleure à peine son cou avant de disparaître. Mes pas sont à reculons avant d'être un bond en avant. Fuite douce amère, je récupère ma veste et mon sac avant de disparaître entre les arbres. Fuir ce que je ne comprends pas, mais surtout fuir celui que je suis aujourd'hui, est encore incapable d'aimer. Ce n'est pas moi c'est toi. Ce n'est pas toi c'est moi. C'est toi et moi.

Ce que l'on laisse sur le rivage, l'océan finira toujours par reprendre.

Fin du rp.

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