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Kicks ϟ - Dim 12 Mai - 17:29



Kicks

C’était peut-être pas une bonne idée. Trop tard pour revenir en arrière. Engluée dans la foule du bar, elle se sent bien incapable d’en trouver la sortie. Perdue pour perdue, autant aller jusqu’au fond de l’affaire. Alors elle reste assise là, une bière sous le nez – toujours pas entamée, c’est du sérieux cette affaire, pas là pour picoler – pendant qu’un vieil irlandais lui raconte de long en large sa vie palpitante. Les minutes filent, trop vite, ou peut-être trop lentement, un certain temps déjà qu’elle a commencé ses recherches sur les docks, avant de se rabattre sur un des pubs du coin, avec l’intuition de pouvoir y trouver des informations utiles. La distillerie n’est pas bien loin, les détails croustillants ne sont pas si difficiles à trouver, l’alcool délie quelques langues et elle s’abreuve, les yeux pleins de curiosité, hoche la tête d’un air entendu avec pour seule volonté d’en apprendre plus. Mais malgré tous ces questionnements, elle sent une certaine retenue, les gens préfèrent ne rien dire, l’envoyer bouler, lui servir quelques pieux mensonges ou ne lui accorder qu’une semi-vérité. Les visages se ferment lorsque le nom d’Éamonn McNamara est prononcé.

Le seul à être tant soit peu bavard lui tient la manche pour lui raconter tout ce qu’il sait, ou ne sait pas. Elle sent qu’il fabule, que l’alcool lui est monté à la tête. Les paroles n’ont aucun sens et un soupir lui échappe. Pure perte de temps. « Ecoutez, c’est gentil de m’avoir offert une bière, mais gardez-la. Faut que je… » Alors qu’elle se relève, prête à prendre congé, un corps la bouscule et elle chancèle, s’écrase contre le mur, un poivrot s’adresse à elle, la dévisage, scrute le minois et les affaires. « Eh, p’tiote, t’es pas un peu jeune pour traîner par ici ? » Le ton serait presque amical, mais les yeux ne mentent pas. Le regard glacial se fait presque menaçant, il n’y a pas une once de sympathie au fond de ces prunelles-là. Les sourcils se froncent, l’incompréhension flatte l’esprit. Elle fait un peu tâche, Bedelia, dans ce genre d’endroit, jeune étudiante esseulée, au milieu des dockers et autres buveurs. Pas le premier endroit où un parent aimerait voir sa fille traîner. Mais elle doutait que son père n’y voit quelque chose à redire, alors qu’ils s’enivraient à un comptoir similaire, si ce n’est qu’il avait pour image de fond les montagnes du Colorado plutôt que les docks d’Arcadia. Il s’inquièterait surtout de la savoir seule et s’assurerait qu’elle conserve son arme sur elle. Au cas où.

La main finit par l’enserrer, les doigts broient presque son épaule et il lui souffle son haleine alcoolisée à la gueule. « Qu’est-ce que tu lui veux, hein, à McNamara ? » Un peu hébétée, elle se fait secouer comme un prunier, les yeux écarquillés. « Je… Vous le connaissez ? Est-ce que… » La gosse saute presque l’occasion d’en savoir plus. Si son interlocuteur consentait à la lâcher, peut-être même qu’elle parviendrait à en savoir un peu plus, à l’amener à parler. Coup d’œil à la table abandonné, mais la bière qui lui était initialement destinée à terminée dans le gosier de l’autre soûlard. Ce n’est pas avec cette choppe-là qu’elle amadouera l’homme à la poigne solide. « Je rigole pas ! » qu’il éructe, et elle le sent un peu vacillant sur ses jambes. « Je sais pas ce que tu lui veux, mais sûrement pas du bien. Alors lui cherche pas des ennuis, ok ? Sinon… Sinon… » Ça sent le roussi. Première pensée à un peu près raisonnable qui effleure son esprit depuis le début de la soirée. Le réflexe est de se dégager, du mieux possible. S’il n’avait pas été aussi saoul, elle n’aurait sûrement rien pu faire, au vu de la carrure du gus. Mais cette fois-ci, quelques mouvements adroits suffisent à la faire passer sous son bras, et, pas folle, elle se carapate sans demander son reste.

Petite et vive, elle se fond vite dans le reste de la foule amassée près du comptoir, fée perdue parmi les géants, jette quelques coups d’œil par-dessus son épaule, inquiète de revoir le poivrot surgir une nouvelle fois, pas bien rassurée par les menaces et son épaule encore douloureuse. Serait peut-être plus sage de rentrer, maintenant. Déçue de sa pêche infructueuse, elle préférerait continuer, grapiller quelques informations en plus. Ce n’est sûrement pas Ozymandias et ses mensonges qui lui permettront de connaître le fin mot de l’histoire. La frustration demeure, qu’on ne lui dise rien, que personne n’ose prononcer quelques paroles pour assouvir sa curiosité. Et après, Ozzy se demande pourquoi il m’intimide, l’autre oncle. C’était bien ça, pourtant, qui l’avait faite se tourner en premier vers Ozymandias, plutôt que vers Éamonn. Mal à l’aise avec l’idée de se confronter au tableau de Picasso, elle préfère mille fois observer de loin, en apprendre un peu plus et envoyer son logeur au casse-pipe plutôt que d’y aller elle-même. Parce que ces silences et ces regards détournés cachent quelque chose. Et la gamine frissonne, plus très sûre d’être à l’aise ici, avec la nette impression d’être observée de partout et d’être en territoire ennemi.
(c) DΛNDELION
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