Secret Motion of Things

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Il ne sait plus comment, mais il s’est débrouillé pour faire parvenir un message à Camille. Leur épisode lui semble bien lointain à présent, comme enrobé dans du papier bulle et expédié à l’autre bout du monde. Et pourtant ça fait quoi, moins de six mois, qu’ils se sont croisés dans la petite Italie ? Le temps passe décidément trop vite. C’est ce genre de considération qui lui fait se sentir vieillir.

L’air est froid. Ici il ne neige pas, il pleut. Pas le déluge mais de quoi attraper un rhume, à croire que l’hiver tient à se faire désirer. Alcide remarque que la fréquentation du Thunder Fist est en légère baisse ; un motif qu’il retrouve chaque année. La fin du calendrier inspire la flemme aux adhérents. Il s’en fiche : qu’ils viennent ou non, ils payent leur abonnement plein pot. C’est leur problème.

Il n’y a donc pas grand monde : c’est arrangeant, il n’aime pas la foule. Il n’aime pas non plus les chansons qu’on diffuse dans la salle principale. Du bruit et rien de plus, mais ses employés l’ont convaincu que c’est ce que les jeunes aiment. Alcide est assis dans son bureau ; une fenêtre offre une vue sur le parking. Aucun va-et-vient.

L’après-midi s’apprêter à toucher à sa fin. A cette heure-ci, les employés de la mairie enfilent leurs manteaux et les parents récupèrent leur mioche à la sortie de l'école. Il espère qu’elle n’a pas oublié leur rendez-vous et qu’il ne s’est pas trompé de jour.

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décembre 2018

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Alcide & Camille

Alcide Bellandi. Le nom apparaît sur l’écran quelques secondes avant l’avertissement sonore. Elle est loin de l’avoir oublié, pourtant. C’est son jour de repos, et la nymphe a déjà traversé la moitié du quartier. Le club de boxe n’est plus qu’à quelques mètres, elle peut déjà apercevoir les tôles et les lettres géantes.

Camille est angoissée ; elle sait qu’elle devra faire ses preuves et elle espère que l’homme en sera satisfait.
L’océanide quant à elle est confiante, impatiente de retrouver à la fois l’ami et l’allié, elle compte sans doute s’imposer davantage et profiter du déclin amorcé de son hôte pour occuper toute la place.

L’infirmière pousse la porte, qu’elle peine à retenir, quand un colosse s’approche pour lui venir en aide. Il ricane en détaillant la frêle carcasse ; Camille aurait eu de la peine. La déesse infernale se targue d’un sourire. « Il est toujours temps de s’y mettre, pas vrai ? » Et encore, petite et svelte, il ne l’a pas vue quelques mois en arrière. Aujourd’hui, elle a repris du poids, et ses joues des couleurs. Les cernes et la mine déconfite ont laissé place à des traits séducteurs, à cette fraîcheur nouvelle qui donne l’impression à ses proches de côtoyer une autre femme. Ils n’ont pas vraiment tort. « Faites attention à vous. Ils vont vous écraser ». Le boxeur lui adresse un clin d’oeil et enfin disparaît.

Styx adore les défis. C’est ce qu’on va voir, pense-t-elle en laissant ses affaires à l’accueil. Pas de case “vestiaires” aujourd’hui pour elle, elle s’est déjà changée. Elle ignore si Bellandi veut seulement tester ses dons ou s’il veut s’assurer qu’elle sache aussi se battre s’il lui en vient l’occasion. Silas lui a expliqué, et elle est déjà prête. Quelques cours de défense ne lui feront pas de mal, surtout depuis qu’un fils divin a ramené dans ses valises un chérubin à protéger. C’est qu’en l’espace de quelques mois, elle s’est retrouvée mère - et pas qu’une fois.

La nymphe passe un couloir, et son regard particulier balaie la salle d’entraînement. Les abonnés étaient plus assidus, la dernière fois qu’elle est venue. « Alcide n’est pas là ? » demande-t-elle à l’entrée en revenant sur ses pas. Et à peine la question achevée, le charisme et l’aura du Roi des Olympiens irradient du haut des escaliers. Un bonjour est lancé, accompagné d'un sourire tout aussi rayonnant.

Il doit trouver qu'elle a tellement changé.

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Il débarque et aperçoit Camille. Apprêtée comme il faut pour la séance d'aujourd'hui. Tant mieux. Depuis le passage de la blonde un peu trop curieuse -responsable de sa rencontre avec Camille, tout compte fait-, Alcide évite de trop approcher les vestiaires des femmes. De toute façon, il paraît que ça ne se fait pas.

Elle a l'air bien réveillée. Tant mieux. C'est ça de gagné. Il avance, lui offre un sourire mais pas son bras. Pas besoin de ça. Peut-être plus tard ? J'avais peur que vous ne veniez pas. Il reste sur le vouvoiement. Ça semble plus sage, plus galant. Ça la vieillit, aussi. Est-ce qu'il a vraiment eu peur de son absence ? Non, mais il aurait été sacrément contrarié.

Ce sera par ici, lui indique-t-il. La salle est à quatre mètres sur sa droite. Il lui emboîte le pas et en profite pour fermer la porte derrière eux. Ils n'ont pas besoin de témoins et encore moins de sales curieux. Il se défait de son veston et de sa montre. Ce faisant : Je vous propose de me montrer ce que vous savez faire, me dire ce qu'il faut vous apprendre... Il désigne la salle de sport d'une main distraite. Il y a tout le matos auquel on peut s'attendre. Et en échange, je vous demanderai une petite faveur, si vous êtes encore en forme. Si non, on pourra remettre ça à la prochaine fois. Quand il y met du sien, Alcide peut se montrer extrêmement patient. Aujourd'hui, il préfère ne pas la brusquer. Mais ils devront un jour ou l'autre remettre ça. Ça. Et elle le sait.

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décembre 2018

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Alcide & Camille

Camille se souvient parfaitement de ce que son fils divin lui a laissé entendre ; Bellandi n’est autre qu’un bourreau des coeurs. C’est ainsi qu’elle le voit, encore un peu naïve, bien loin de se douter que l’expression cache une réalité plus triste - morbide à certains égards, ce qui ne manquerait pas de rapprocher l’homme en question et sa propre déité.
Alors à sa première remarque, l’infirmière fronce exagérément les sourcils. « Vous avez l’habitude qu’on vous pose des lapins ? » Elle ose, nature, et pourtant n’en croit rien. Il est de ces mâles un peu trop virils que les femmes s’arrachent, c’est certain.

Culottée mais docile, la divine emprunte le chemin qu’il désigne. Elle a envie d’apprendre. Elle ne le connaît qu’à peine mais leur première entrevue - malgré les circonstances - lui a fait bonne impression. Elle l’apprécie bien qu’en même temps il l’intimide, mais c’est ce qu’elle a toujours recherché chez un homme, comme s’il lui fallait se sentir dominée.
Aussi, elle appréhende. Parce qu’elle ne s’attendait pas à sa première demande. Ca met en jeu la sensation d’être plongée dans le grand bain ; et Camille ne sait pas nager. Ou plutôt, en matière de défense - et de sport tout compte fait, l’infirmière ne sait rien.

Lèvres pincées, elle quitte un instant le regard d’Alcide pour balayer la salle de ses beaux yeux vairons. « Ok... » ; laisse traîner la dernière syllabe, comme pour signaler son malaise. « On va… commencer par un échauffement ? » propose-t-elle en serrant ses deux poings, comme pour se convaincre elle-même.

Elle s’approche de la fosse, et puis, la deuxième remarque pique sa curiosité. « Vous m’intriguez ». Contre un mur de la pièce, elle délaisse un petit sac de sport et enroule ses cheveux au dessus de sa tête. Un élastique fluorescent tient le chignon improvisé.

« Vous ne voulez pas me dire de quoi il s’agit ? » Il n’y a presque personne, alors la blonde s’immobilise dans un coin de la salle et commence à enchaîner les mouvements. D’après ses souvenirs, ce sont ceux qui lui ont été enseignés en cours de sport. Mais ça remonte, maintenant, et l’infirmière finit par avouer ; « Silas m’a dit que vous pourriez m’apprendre à me défendre ». C’est pour ça qu’elle est là, rien de plus. « Et pour être tout à fait honnête, je ne sais pas faire grand chose ». Elle pose une main sur sa hanche et hausse aussitôt les épaules. « Un programme débutant conviendrait parfaitement ».

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