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 Pâris ϟ  Némésis . 

Nuit noire, devenu paysage quotidien pour l'ailée, cachée au reste du monde, le temps de quoi ? Le temps d'acquérir assez de puissance pour ne plus craindre les hommes, la hantise d'être enfermée par des scientifiques la poursuit et le monde encore ferme les yeux sur les événements paranormaux. Ils nient, sans doute, ne réalisent pas qu'ils n'ont jamais disparus ces dieux provenant d'anciens temps pour certains. C'est la nuit qu'elle sort, pour ne pas avoir l'impression d'être un oiseau en cage, elle survole Arcadia dans l'ombre nocturne et quand elle n'en profite pas pour aller voir les quelques et autres qu'il reste de son entourage elle se pose simplement, observe la ville qui lui parait plus animée le jour que la nuit tout en ayant deux fois moins de population dehors. La vie continue malgré tout ce qu'il se passe ces derniers jours et surveiller les quartiers de Little Italy et ses alentours est devenu routine sans qu'elle ne s'en rende réellement compte.

Les frissons se glissent sous la peau, sensation désagréable en présence d'une personne pour qui le mépris restera grand à travers les siècles. Quand les livres et les histoires le faisaient à la fois passer pour une victime d'Aphrodite ou un effronté, l'avis de Némésis est resté tranché sur la question. Et il a observé sa cité brûlée par son orgueil, lui et aphrodite faisaient la paire, tout ça pour finalement voir sa fille balancée comme un pantin, celle là même née de l'horreur par la faut de cette déesse capricieuse et envieuse. Némésis a toujours aimé Hélène, c'est pourquoi elle a souffert de cette guerre également. Les visites s'étaient multipliées à son arrivée à Troie. Les regards ensuite croisés avec Pâris n'avaient rien de chaleureux, mépris, dédain, la déesse exècre sa personne. En lui se trouve ce qu'elle aurait souhaité punir, d'elle même. Mort par la flèche de Philoctète qui en invoquait la vengeance, Némésis a eu le plaisir d'être présente sur ses derniers instants. Là elle s'est tenue, près de lui, elle a été l'une des dernières choses qu'il a vu de ce monde; la messagère de la mort s'est délectée de sa vision tout en regrettant celle-ci par empathie pour sa fille qui, elle le savait, allait vivre un enfer aussitôt qu'il aurait quitté ce monde.

Et le silence qui s'en était suivi avait été effroyable.

Par delà les années, ainsi, Pâris avait été touché du ciel pour voir son être se réincarner. La mort avait été sa sentence, était il pour autant expié de ses péchés ? Cette fois, les dieux ne sont pas là pour le protéger, l'Olympe n'existe pas et personne ne peut retenir la déesse d'agir. Pas même Zeus. Ombre parmi les ombres, évolue sur les pavés humides de la ville, une pourriture de plus dans cette ville ingrate. Et en même temps après avoir vu Hélène et Cassandre, elle aurait dû s'y attendre. L'histoire ne saura se répéter tant qu'elle est ici, l'époque tend déjà à la guerre il ne sera pas celui qui la causera. Il ne sera pas celui qui brisera la vie de Karma, Hélène. Et l'éventualité qu'ils se soient déjà retrouvés la tient en horreur. Elle réagit, presque aussitôt, se lève de son perchoir, les ailes déployées; le rapace près à plonger. Un saut dans le vide, sous le battement puissant de ses plumes noires, Némésis se laisse porter par le courant jusqu'à lui. Ruelle sombre qui lui permettra de rester à couvert du regard du commun des mortels, le visage déformé par la colère de le savoir ici, Némésis lui coupe le chemin et atterri face à lui. « Tu te souviens de moi ?» Sourire meurtrier qui fend largement ses lèvres elle l'empêche de passer et d'une pression sur l'épaule l'oblige à reculer pour ne plus se trouver aussi proche de lui. « Aphrodite ne sera pas là pour te protéger cette fois Pâris.»

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Ils ont eu beau jeu de lui retourner le reproche mais les dieux sont de loin les plus capricieux. Depuis des temps si lointains qu'on aurait pu croire qu'une quelque leçon en serait retirée, ils écument la vie des mortels avec l'impatience d'un rufian que la mer a longtemps retenu loin de la rive et des femmes, puis, l'odieux saccage commis au gré de leurs petites humeurs et sous couvert d'offenses que bien entendu ils ont entièrement fabriquées, ils se repaissent de la pagaille semée, des parricides, des malédictions, du sang versé en vain, et cela sans égard, pas le moindre, pour les vies gaspillées aussi futilement qu'on jette de l'eau dans un torrent. C'est cela, la vérité. C'était cela, Troie.
En somme, ce n'était pas sa faute, ou, du moins, son pouvoir si minime que, n'importe quel choix qu'il eût fait, eut-il été plus juste ou plus sage, plus concerné ou plus héroïque, n'aurait rien changé à la mort de sa précieuse cité. Non, ce n'était la faute ni de Pâris ni d'Hélène, ni d'Achille ni d'Hector, pas plus qu'aucun des Troyens ou des Grecs, car tous ceux-là n'y pouvaient pas davantage qu'une lame de fond se serait jeté à la gorge de la marée. Alors, et même s'il sent que la rencontre sera des plus déplaisantes, autant qu'elle risque de lui être fatal, Alexei est solidement campé sur ses positions, plein d'amertume dans une pogne et d'une détestation tenace dans l'autre.

En première intention, le chien de guerre de la Bratva veut répondre qu'il n'a pas le souvenir de tous les trous-du-cul qui se sont faits un devoir de personnellement le haïr. Sa bravade néanmoins, pour tout ce qu'elle aurait de satisfaisante, aurait le goût de précipiter sa fin. Il refuse de mourir dans une rue crasseuse, sans lumière ni témoin, et, sous la légère impulsion, il recule docilement. Ce n'est pas son heure et, d'ailleurs, il liste avec sincérité ses ennemis d'antan à la suite du répertoire déjà trop fourni du présent. Tout le panthéon grec a de quoi parapher sur plusieurs pages et, d'ailleurs, Pâris par Alexei dirait que cette garce d'Aphrodite aurait droit à la page de garde. S'il a jamais été bénéficié d'une protection, on s'est bien gardé de l'étendre au-dessus de lui. Certes, il y avait Hélène... Et, soudain, il comprend. Peut-être par le fil qui remontait naïvement la chair de ses souvenirs. Peut-être par le feu caractéristique aux pupilles de son adversaire, à la fois nourri de mépris et de rage, entièrement bouffé de vindicte. « Je n'ai pas peur de toi, il avance sans non plus bouger de son piquet. » Ce n'est pas entièrement vrai ; il ne tremble pas ; son cœur bat un rythme de tambour, mais cela tient plutôt du départ à la guerre ; ses phalanges frémissent d'impatience sous le poids du flingue qui bat contre son flanc ; pourtant, un vent glacial se régale de ses tripes, comme de se rappeler qu'on les a jadis aérées, trainantes, livrées au pourrissement sous un soleil de plomb. Ce n'est pas réellement un souvenir, pas du tout, mais la sensation est prégnante. « Qu'est-ce que tu veux ? il ajoute aussitôt pour tenter de la dissoudre. Si c'est me tuer, tente ta chance. » Les paumes se présentent ouvertes, de part et d'autre du bassin. Les pans de sa veste s'entrouvrent spontanément. À gauche, le pistolet. À droite, le couteau. Cette nuit, le torpedo était à la chasse, même si son gibier devait s'avérer moins dangereux. Alexei est prêt, et si pas à vaincre, à répondre. Il ne compte sur l'appui d'aucun dieu, ni grec, ni slave ni nordique. Dans cette vie, il bricole la puissance nécessaire à leur résister. Et sinon... Son orgueil n'est pas prêt à admettre une pareille éventualité et la mort cuisante de Pâris lui excite la mémoire. « Au moins, à une époque, vous faisiez ça sur des champs de bataille. On avait le soleil dans le dos et des spectateurs. » La provocation lui échappe - même si c'est mal connaître Alexei que de croire qu'il a pu céder à son impulsivité plutôt que ruminer son idée et y consentir très froidement. « Encore que, maintenant, vous avez le courage de le faire en personne. »

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 Pâris ϟ  Némésis . 

Il se tient là et soudain il se souvient. Elle n'a pas besoin de dire son nom, il sait qui voulait sa peau, qui ne pouvait obtenir justice par les caprices de ces Olympiens qui ne pensaient qu'à leurs distractions. Aphrodite n'est pas ici, désormais les dieux n'ont que faire de ce qui les a liés au peuple Grec, ils sont devenus comme les humains, nombrilistes, puisqu'ils sont nés à nouveau dans la peau d'humains. Certains en profitent pour trouver un nouveau sens à leur vie, d'autres ressassent dans les souvenirs emmêlés, la vie d'antan les erreurs et les ennemis que l'ont voudrait éviter. Pâris se souvient de Némésis, parce qu'elle est la mère d'Hélène, parce qu'elle est venue suffisamment de fois pour lui mettre dans l'esprit les images de ce qui serait sa mort une fois que justice serait faite. Elle n'éprouve pas de satisfaction de l'avoir trouvé ni même de le menacer. C'est une épine dans le pied dont elle voudrait se débarrasser. Et lui, oh lui, il déclare ne pas avoir peur d'elle.

Les commissures de ses lèvres s'étirent, demi sourire pour des déclarations qu'elle entendu qu'à cette époque là. Car autrefois Némésis était crainte, l'invoquer portait malheur et ils sont quelques uns à Troie à en avoir supporté les conséquences, Pâris notamment, victime de la vengeance même si elle n'est pas celle qui a porté le coup de grâce. C'était une leçon à tirer pour lui, pour les dieux aussi et Némésis a regardé le visage d'Aphrodite se décomposer sur le cadavre de son protégé. Les récits qui entouraient la déesse de la vengeance sont tombés dans l'oubli et même les héros par les années séparant ce qu'ils ont connu à aujourd'hui arrivent à gonfler le torse en déclarant qu'ils n'ont pas peur ; Narcisse dirait de même et tous les autres sans le moindre doute ; peut être même que Prométhée à oublié les coups de fouet qu'elle lui a donné devant les Olympiens. Némésis est loin d'être à sa pleine puissance de ces instants où elle rendait visite à Pâris pour le mettre en garde du malheur qui allait s'abattre sur lui - nombre vengeurs contre sa personne, la roue du destin a fini par tourner en sa défaveur. Et il se tient là à vouloir se défendre contre elle. Le tuer elle le pourrait, elle le voudrait, mais elle veut être certaine qu'il n'est pas lié à Hélène dans ce monde là tout comme elle n'est pas certaine de pouvoir lui faire face sans se tuer elle-même. L'amour qu'elle a pour sa fille est sa seule rédemption. Elle ne bouge pas, les pans de la veste ouverte de Pâris, il lui montre qu'il est armé. Il peut la tuer, son corps est encore humain, son âme prend possession de ce dernier petit à petit, visant à en être seule maîtresse pour enfin arriver à obtenir les pleins pouvoirs de son héritage divin.

Némésis se souvient de ces larges champs de bataille qu'il évoque, de ces hommes qui durant des jours frappaient le fer et revenaient en sang. Toujours plus épuisés, mais toujours dans le ventre la rage de vaincre. L'honneur plus que tout comptait, et il n'y avait pas plus beau que mourir l'arme à la main. Aujourd'hui cela n'existe plus, le monde moderne est tourné vers plus matérialiste et plus couard aussi. Pâris prétendrait il ne pas avoir changé ? Il se tient là, menaçant et la verbe assurée qu'il lui fera du mal si elle ose le provoquer en duel, tel le grand guerrier qu'il a été. Son seul défaut avait été d'être égoïste ou d'avoir été manipulé par Aphrodite. « Je n'ai pas besoin de te rappeler comment a fini ta cité parce que tu n'as pas su écouter les avertissements. » Elle crache le venin entre ses lèvres, quitte à lui remettre le nez dans le sang qu'il a fait couler, le sang qui a tâché les rues pavés de la merveilleuse Troie. « Tu as été puni pour tes excès et Ménélas a obtenu vengeance. » Qui la veut l'obtient, maintenant qu'il est de retour dans ce monde, elle lui imposera d'apprendre de ses erreurs s'il ne le fait pas de lui-même. « Reste loin d'Hélène ou c'est moi qui cherchera vengeance. Elle a bien assez souffert par ta faute, tu lui dois une vie et je vais m'en assurer. » Hélène n'aura pas son mot à dire, Némésis refuse de la voir a nouveau condamnée à douter d'elle-même et à souffrir du mépris du regard des autres sur elle qui était si belle et pleine de bonté, pleine d'amour.

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