Do it for Him.

Invité

C'était vraiment effrayant.

Elle se sentait si petite, parmi tout ces gens. Une sorte de petit papillon perdu au milieu d'araignées, un oiseau balayé par la tempête. Vraiment, Swan était terrorisée. Elle, qui fuyait la foule comme la peste, avait pourtant décidé de se prêter au jeu. Amoureuse de l'art, artiste secrète, elle avait décidé, sur un coup de tête magistral et inattendu, de participer à un large concours de dessin, principalement axé sur la flore. La jeune fille, qui aimait tant les fleurs, avait été séduite par cette opportunité de montrer ce qu'elle avait dans le ventre, pour parler familièrement, sans se rendre compte des répercutions que cela aurait. Un projet ambitieux, mais toutefois possible. Aussi, elle s'était inscrite à ce concours, ne croyant pourtant ne pas aller très loin. Des artistes, il y en avait, et pas qu'un peu, surtout lorsque ce concours se déroulerait à l'Arcadia Museum, du début, jusqu'aux nombreuses étapes menant à une finale opposant les deux meilleurs participants.

Les yeux d'un bleu profond de la jeune fille se posèrent sur la foule, sans parvenir à trouver celui qu'elle cherchait. Pancras. Son cuistot préféré, son confident d'un jour, une personne avec laquelle le courant passait bien. Chose qui était plutôt rare ces temps-ci. A vrai dire, ce n'était pas lors de ses soirées à Siren Alley qu'elle allait trouver les gens les plus recommandables. C'était triste, un peu irritant, mais une réalité pure et dure. Aussi, ses rares escapades à L'Uncle Jay's, étaient une véritable bouffée d'air frais. Elle l'aimait bien, ce personnage, qui parvenait à lui ôter quelques sourires maladroits, aussi, s'était-elle confiée à lui, concernant son projet de concours. Avec lui, Swan avait su trouver le courage de se lancer.

Il fallait croire que la bonne étoile de Swan avait joué en sa faveur. Il avait plusieurs étapes avant la prestigieuse finale, étapes que Swan avait passées de justesse, toujours avec son trait caractéristique. Elle était douée, mais se refuser à se le dire, trop modeste, trop mal se concernant. Néanmoins, elle n'avait pu s'empêcher de décrire soigneusement toutes les étapes à Pancras, jugeant, que c'était en partie grâce à lui qu'elle avait pu trouver le courage de se lancer dans le grand bain. La jeune fille avait usé de son rare temps libre, de son imagination, de toutes les ressources possibles dont elle était capable. Couplées à des nuits sans fin, elles avaient épuisées Swan, la poussant presque jusqu'à renoncer. Mais non. Tant que son ami cuistot était là, elle ne lui ferait pas cette déception.

« A cœur vaillant, rien d'impossible. », comme disait toujours sa mère. Vieux souvenir enterré sous des couches d'événements, mais persistant, petite flamme dans la nuit sombre. Swan passa la main dans ses cheveux clairs, un peu gênée. Elle ne le trouvait pas, ce cher Pancras, et cela la stressait... Surtout se sachant finaliste, que la dite finale avait lieu en ce jour, et qu'elle avait envoyé balader très, très loin, tout ses rivaux. Sauf un. Un homme plutôt compétitif, sympathique, aux premiers abords. C'était un passionné, un vrai, il était doué, vaillant, et incroyablement redoutable quand il le voulait. Il était créatif, inventif, un avant-gardiste hors normes. D'ailleurs, il se trouvait non loin, ne cessant d'observer Swan de ses yeux noisette. Elle détourna le regard. Son œuvre, elle y avait mis toute son énergie. Elle avait opté pour une aquarelle, un de ses supports préférés, là où elle se sentait le mieux.

Frissonnante, elle se remémora en silence le thème. La Flore. Vaste, magnifique, et incroyable sujet. Combien de temps avait-elle passé sur son travail, Grimm, son chat, miaulant sur ses genoux ? Elle ne comptait plus les heures. Ce qu'elle attendait, cependant, c'était que l'on annonce le grand gagnant. Le jury, d'après ses recherches, était une véritable brochette d'artistes à la renommée nationale, ou même, connus dans le monde entier. Pour le moment, Swan n'avait pas encore à se présenter à eux, elle venait juste d'arriver dans le musée – après bon nombre de gens. Maladroitement, elle sortit son téléphone, et pianota un message à son cuisinier préféré :

Coucou Pancras,
J'espère que je ne te dérange pas. Tu sais, la dernière fois que l'on s'est vus, je t'avais parlé de ma nomination pour la finale ? Je ne sais plus trop, je t'avoue que je suis vraiment éreintée. Toujours est-il que j'ai été sélectionnée... La finale est aujourd'hui, à l'Arcadia Museum. Si tu es par là, n'hésite pas à passer... Enfin, si tu as envie, je ne te force pas. Gros bisous, et encore merci de ton soutien... C'est beaucoup, pour moi. Vraiment.

Oh, la honte... Elle était gênée. C'était – beaucoup – plus facile pour elle de parler via à l'écriture, mais elle ne pouvait s'empêcher de se trouver niaise et bête. Rangeant son portable, elle resserra son manteau autour d'elle – frileuse, entre autres, peut être avec un peu de stress, aussi. Néanmoins, elle garda contenance. Ce jour était décisif, le genre de journée qui vous prend aux tripes et vous remue l'estomac... Un jour à la fois merveilleux et parfaitement détestable. Elle avait envie de partir en courant, mais restée figée, créature étrange auprès des passants autour d'elle. La salle n'était pas encore ouverte, cette fameuse salle où seraient affichés son tableau... Et celui de l'homme qui continuait à la fixer d'un air presque agressif. Swan se sentait mal à l'aise. Elle hésita à faire demi tour, une nouvelle fois... Mais sa volonté semblait plus forte. Elle préféra alors se terrer loin de son rival, dans un coin où personne ne la remarquerait...

Ou presque.

**Pancras Gysin**

Le djinn, confiné dans le bistrot du coin, passait son temps à perdre son argent. A jouer à ces jeux de grattage qui faisaient miroiter gains mirobolants. Jamais il ne gagnait, mais persistait cependant. Jusqu’à ce que son portefeuille commence à tirer la gueule. Il allait d’ailleurs s’acheter d’autres tickets, lorsque son portable - posé sur le comptoir - vibra. Il le consulta, tout en dégustant un café serré. Manqua s'étouffer, avalant sa goulée de travers, en découvrant le contenu du sms.

… Pas qu’il avait zappé, mais presque. A vrai dire, il ne pensait pas que ce rendez-vous arriverait aussi vite. Et pourtant, aujourd’hui était le jour J. Swann, sa pote artiste, concourrait en finale. Et lui, maudit con, faisait le pied de grue dans un bar, en compagnie de quelques vieux qui empestaient la naphtaline.

Rapidos, il renvoya à Dwight un message naze et très succinct, rédigé n'importe comment ; [ Tkt ejsui sur l rout ] et remballa son merdier. Il décampa du repaire de poivrots, gagna la rue et son trafic dense. Distingua un taxi, arrêté le long du trottoir ; Une dame d’un certain âge s’apprêtait à grimper dans le véhicule. Elle ne parvînt jamais à bord ; « Dégage la vieille ! » Effronté agrippa mamie par son bras, l’éloigna de l’automobile dans laquelle il s’engouffra. « L’arcadia museum ! » Brailla t-il, à l’attention du chauffeur, un black aux cheveux grisonnants, qui semblait aussi vif qu’un paresseux sous anxiolytiques. « J’te donne un p’tit supplément si tu m’la fais à la Fast and furious ! » Encouragea t-il, présentant quelques billets chiffonnés sous le pif du conducteur. « Mec, je ne te promets rien, t’as pas choisi la bonne heure. » Souffla le vieux, pas très convaincu, en démarrant titine.

C’était à prévoir, Gy’ était tombé sur le pire taxi-driver qui soit. Du genre archi-nul. Pan’, sur la banquette arrière, rongeait son frein - Ou plutôt ses ongles - tant il s’impatientait d’arriver à bon port. A tel point que, lorsque les murs du musée s’esquissèrent au loin, il balança les billets sur le tableau de bord, puis s’extirpa de la caisse. Il entama un super sprint de fumeur invétéré jusqu’au bâtiment.

C’est en trombe qu’il débarqua dans le hall de l’édifice, tout débraillé, le souffle court et complexe. Les quidams présents lui lançèrent des oeillades interloquées. Pan' s’en carrait royal - Déjà, agates perses cherchaient la tignasse blonde parmi la foule. C’est à l’écart des autres, qu’il la repéra. Sans gêne,il se fraya passage à travers le public entassé, poussant bidoches sans vergogne. « Pardon… ‘Scusez… C’t’une urgence... » Jusqu’à arriver auprès de Dwight ; « Yo Swann’ ! Tout s'passe comme tu veux ? … Prête pour la “grande finale” ?! » Demanda t-il, filou, en lui donnant un léger coup de coude.