Les muscles tendus, l'attente d'entendre sa voix après des semaines de silence de ta part comme de la sienne, les tonalités en attente qu'il décroche te font grincer des dents. Il décroche enfin. Il n'a pas du regarder qui l'appelait, à une heure pareille seul le réflexe de décrocher se réveille et les yeux sont à peine ouverts. " C'est moi Alejandro, c'est Carmen. ", tu commences le timbre hésitant. AVant de franchement te lancer à l'eau. " Je sais ça fait longtemps je t'ai pas rappelé je.. J'ai mis le feu au Kahuna. " La vérité est toujours plus facile à dire quand on la prononce vite. Personne des équipes de secours ou de la police n'est assez proche pour t'entendre, tous trop occupés avec l'histoire farfelue que tu leur as raconté ou bien absorbés dans leur travail. Quelques flammes se font encore distinguer, il y a surtout beaucoup de fumée et des pompiers lourdement protégés vont et viennent. Le feu ne s'est apparemment pas emparé de la cuisine, mais rien n'est certain encore et il faudra encore quelques jours pour en être sûr. Tu te détournes du spectacle qui fait monter en toi une culpabilité lourde et des larmes silencieuses. " J'ai fait brûler le Kahuna, moi toute seule. Et je sais plus quoi faire là. " La voix moins hésistante, mais teintée d'une douce urgence qui se transformera en hystérie si Alejandro garde le silence plus longtemps.

Le téléphone qui vibre sous l’oreiller, seul endroit où le capitano peut l’entendre quand il est profondément endormi.  Les paupières ont du mal à s’ouvrir, il a envie de ne pas répondre, d’envoyer chier l’imbécile qui l’appelle à cette heure-ci puis se rappelle, que la guerre est à leur porte. Que la mort se hisse lentement sur leur échine.
Téléphone attrapé brutalement, décroché, et ne même pas parler, juste attendre. Et la voix, reconnaissable parmi mille, qui d’un mot, fait bourdonner le myocarde du seconde tant ça fait longtemps qu’il ne l’a pas entendu. Elle lui manque. Elle lui manque vraiment et… Oh madre de dios. « Pardonne ? » qu’il répond, n’étant pas sûr de ce qu’il a entendu. Et puis à nouveau les mots. Le Kahuna, brulé. Toute seule.  Et l’oreille tendue, du capitano qui entend les sirènes de Delray qui bourdonnent. D’un bond il se lève Jan, regarde par la fenêtre et commence à voir le quartier sui s’anime. « Tu es où ? Tu vas bien ? » car il s'inquiète plus pour Carmen que pour le Kahuna Jan. Parce qu’il est con et pas réveillé. Et quand on dort encore, y’a que les émotions qui causent. Que le coeur pour dire la vérité.

C'était une sale soirée et ça s'était soldé par des volutes de fumée qu'on pouvait certainement voir depuis tout Arcadia. La faim justifiait-elle vraiment tous les moyens ? Tu n'en étais toujours pas convaincue. Debout entourée de toute cette action, il te faudrait plus qu'une nuit de sommeil pour récupérer. Et malgré le sentiment de trahison encore profondément ancré, tu savais que sans lui tu ne pourrais probablement pas te remettre des événements. Il t'avait déjà apporté des réponses. Il serait là pour t'en confier d'autres. Et son ton inquiet ne te détrompe pas. Les joues se réchauffent d'un amour que tu sais enterré et non partagé. Il t'avait assuré ressentir et apprécier ta présence mais il ne t'avait jamais vu comme tu le regardais. " Je vais bien je n'ai rien grâce à... " encore une fois tu tais le nom de ton bienfaiteur. Mais également celui qui t'inspire de profonds sentiments contradictoires.  " Je dois sûrement te réveiller mais j'avais besoin de t'entendre avant de rentrer chez moi. C'était une soirée difficile. " Et tu croises bêtement les doigts pour qu'il te propose de venir te chercher.
Les larmes dépassent tes paupières et le besoin de confier en partie ce que tu as fait te submerge.  " Un homme est venu. Puis il s'est fait remettre à sa place alors après il est revenu avec deux autres types. Armés et.. Et je.. Je. J'ai démarré un feu.. Je sais pas ce qu'il m'a pris Alejandro. Je sais pas. " Et tu attends le verdict de son jugement. Tu donnerai tout pour pouvoir examiner la surprise ou la colère sur son visage. Pour autant que tu lui inspires encore quelques sentiments, du moins.

Elle n'a rien. Le coeur qui se calme, les yeux qui clignotent en voyant la longue colonne de feu qui part du Kahuna au fond du quartier mexicain. Les mots de Carmen qui continuent, le prénom de murmuré et enfin le cerveau qui se réveille alors que les sirènes s'entendant dans tout Delray. Avec tout le bordel qu'il y a en ce moment, la Calavera va penser à une attaque. Surtout avec ce qu'ils ont fait, surtout avec le sang qui a déjà coulé de chaque côté d'Arcadia."... tu as cramé le Kahuna. Pas une question mais une affirmation soufflée. Il doit prevenir les autres, que ce n'est pas une attaque, maintenant, il doit leur dire, il doit.... "les mecs sont morts ? ou ils peuvent témoigner contre toi ? Pragmatique, alors que le téléphone est tenu entre l'épaule et l'oreille, Alejandro enfilant rapidement un jean.

L'affirmation d'Alejandro donne une dimension réelle aux événements. Il ne demande pas pourquoi il ne demande pas comment. Il s'en tient à ce que tu lui dis et pose pourtant des questions auxquelles Torben avait pris soin d'avoir une solution. " Ils ne diront plus rien à personne. Plus jamais.  " Les sanglots qui secouent ta cage thoracique te forcent à faire une pause.  " Ils sont morts tous les trois. Ils venaient juste braquer la caisse. Je crois pas qu'ils le méritaient.. De finir comme ça. " Rien ne sert de clamer ton innocence auprès du latino, tu n'y crois pas toi même. " Je vais pas te retenir plus longtemps. J'ai une sale tête et je sens la chair cramée. C'est affreux. "

Il entend les sanglots rattrapés au dernier moment, la lippe mordillée, sachant pertinemment que Carmen a plus à s'inquiéter de la famille d'Alejandro que des flics. Putà de mierda qu'il a envie de hurler. Il peut pas la laisser comme ça, pas après ce qu'il lui a fait, pas avec ce qu'il ressent pour elle... Pas avec cette idée stupide et cette bague planquée dans le tiroir. "Tu es où exactement ? Tu bouges pas, je viens te chercher" Glock attrapé d'une main, foutue dans le dos, Jan est à seulement quelque minutes en courant de l'incendie, clairement, il va y être vite. "Si quelqu'un vient te poser des questions, flic, inconnus ou n'importe qui, tu dis que tu es avec Flores."Porte claquée, même pas fermée à clé, personne n'ose venir cambrioler le second de la mafia mexicaine. " "Tu m'entends Carmen ? Tu es avec Flores." et avancer dans la rue alors que déjà tu sens l'odeur du cramé emplir des poumons et la colère, tambouriner dans ton coeur.

Tu te demandes bien ce que le nom de famille d'Alejandro aura comme effet magique sur les policiers ou quiconque dans la rue. C'est que, si concentrée sur lui, tu n'avais jamais prêté attention aux coups d'oeil lancés par les habitants du quartier hispannique. Oui, tu savais que les gens le connaissaient. Mais sa réputation n'avait jamais été jusqu'à tes oreilles. Peut-être qu'elle aurait dû. Ça t'aurait évité un malentendu de taille. " Je voulais pas te déranger. " Le soulagement qui attise les pleurs, ceux-ci devenant difficiles à maîtriser. " Merci Alejandro. Merci. " L'adrénaline disparue, le besoin de s'asseoir est pesant. Tu regardes autour de toi et te poses sur un banc assez éloigné de l'incendie pour ne pas souffrir de la fumée. " Tu veux bien rester au téléphone avec moi ? Le temps que tu arrives ? Tu sais j'ai presque cru que ma tenue de service allait brûler. Elle m'aurait pas manqué en tous cas. Ce tissu horriblement chaud.. " Les sanglots se mêlant au rire, le choc et la fatigue te faisant papilloner des yeux et déliant ta langue.

Les merci de Carmen qui touchent un peu trop le coeur et la tête. Il lui a fait mal Jan, en lui avouant qu'il n'aimait pas les femmes, mais les adorait. Il lui a avoué trop de choses et pas assez, il a... Fait trop de choses mais pas assez." Oui, je reste là, j'serais toujours là Carmen."et continuer de marcher rapidement, quelques voisins connus, la main du capitano qui se lève pour saluer et leur montrer qu'ils devaient rentrer chez eux." Et cette tenue t'allait bien. j'ai jamais rien vu qui t'allait pas de toute façon... Attend deux secondes." Alejandro qui recule le téléphone de la bouche, apercevant Luis qui trottine dans la rue. "Luis ! Dis aux gars de pas bouger, c'est pas eux."  et reprendre la conversation avec Carmen, approchant du Kahuna rapidement et de l'odeur du feu et de l'essence. " Parle moi Carmen, ça a été sinon ? La journée ? Mis a part.... ça ? et se frapper intérieurement de sa propre stupidité. est e que ça va Carmen, après avoir été agressé ?

Les paroles d'Alejandro, qui résonnent comme une promesse, te font un instant oublier le présent et te ramènent à cette soirée, chez lui. Tu aimerais lui dire que tu es désolée d'être partie comme une voleuse en claquant la porte. Mais ce serait lui mentir : aucune autre alternative s'était présentée, il avait fallu que tu t'en ailles. Encore un merci, chuchoté en réponse à l'assurance qu'il serait toujours avec toi. Et un rire nerveux qui s'envole. " Arrête, ça ne va à personne ce machin. " Tu savais que tu avais fait le bon choix : entendre sa voix, son souffle rythmé indiquant son pas pressé, ses flatteries polies détendaient tes muscles crispés. " La journée était bien oui.. J'ai beaucoup couru en fait. Je me suis mis au jogging et j'aime pas encore mais on dit qu'il faut y aller au moins dix fois et après ça ira mieux. " Tu suspends un instant ta récapitulation de la journée et ose demander. " Tu es avec quelqu'un ? Beaucoup de gens sont réveillés pour voir le Kahuna brûler ? " La curiosité te brûle les lèvres, vient se loger dans ton esprit fatigué pour le faire fonctionner de nouveau à haut régime. " Tu parles de qui quand tu dis eux ? " Tu l'as nettement perçu cette insistance, le ton qui change sur le mot, qui sous-entend lui-même un sous-entendu.

Luis envoyé prévenir, mais Jan, il sait que ça ne suffira pas, qu’il doit très vite envoyé un sms aux gradés et à Joaquin. Madre de dios, Joaquin va hurler s’il sait que Carmen est en cause…Les pensées qui fulminent dans la tête du capitano alors que le pas accélèrent et que la fumée augmente.  « faudra qu’on aille courir ensemble, ce serait sympa… » plus que d’imaginer la colère de la Calavera suite au cramage du kahuna. Et puis les mots de Carmen, la curiosité dans sa voix. Jan qui ralentit un peu, main sur l’épaule d’une mammà qui regarde le feu détruire le Kahuna. C’est pire que ce qu’il pensait le capitano.  «Rentrez chez vous Anita, on s’en occupe…j’t’expliquerais Carmen. Je suis devant, mais… » et la chercher des yeux mais ne pas la voir. Trop de curieux, d’habitants de Delray qui s’inquiètent et déjà tes têtes connues, soldados et sicarios.   «Lève le bras que je te repère ! »

Tu ne t'offusques pas du repoussement de l'explication que tu attendais, suspendue à ses lèvres. S'il ne te disait rien cela voulait certainement supposer qu'il n'y avait pas de quoi s'alarmer. Enfin, pas plus que si tu avais foutu le feu à trois hommes morts et à ton lieu de travail. Tu peux entendre les sirènes faire écho au creux de ton oreille, informant qu'Alejandro ne devait pas être loin. " Je suis un peu en retrait, près du coin de la rue principale. " Tu lèves le bras tout en sautant pour tenter de repérer le latino, qui a du te voir puisqu'il passe les barrières de sécurité en se détachant de la foule. Un officier fait mine de s'interposer mais se ravise lorsqu'il semble le reconnaître. Brève salutation, il se pousse pour laisser passer l'homme qui arrive d'un pas décidé vers toi. L'appel terminé, tu t'élances vers lui pour échouer dans l'étau de ses bras. Et le monde disparaît pour quelques secondes.