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the deep blue sea (selda)

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the deep blue sea (selda) - Sam 16 Mar - 16:54



the deep blue sea
@Selda Miralles


Il est tôt -trop tôt pour une Arcadia ankylosée, dont on devine la souffrance à l'inactivité inhabituelle. Depuis quelques temps, les mouvements de la métropole semblent ralentis par les dernières vagues, comme des boulets accrochés aux pavés, plombant l'effervescence de la fourmilière humaine. Marlee peut goûter au climat de tension alors qu'elle prend les transports, hors du quartier hispanique où sèche encore le sang des leurs (des autres !), hors d'une ville grise qui depuis l'annonce des autorités se mure et se terre dans ses propres entrailles. Certains se cachent, d'autres se préparent -l'ambiance générale a tourné aigre, on le sent jusqu'à la moelle. Dans le cas de la prophète, on le sent même jusque dans les rêves.

Marlee sent qu'elle n'est pas seule ; elle ne l'a jamais réellement été, mais s'ils étaient sur des ondes différentes, ils se distinguent et s'effleurent désormais nettement, comme si les chamboulements les faisaient entrer en résonance, les attiraient les uns aux autres dans l'urgence. Tout ce qui n'est pas bêtement humain, si une telle chose existe vraiment, est devenu un danger pour l'espèce -et les tout-puissants sont trop inquiétés de leur propre sort / trop affairés à sauver leur propre peau pour s'inquiéter du sort de ce qui n'est ni tout à fait Homme, ni tout à fait Dieu. L'entre-deux comme toujours, se retrouve livré à lui-même.

C'est cette dernière vague qui l'entraîne jusqu'à la baie : une courbe d'écume et de sable parsemée des relents d'Arcadia -déchets plastiques, bois flottant, objets du quotidien, incongrus, échoués là par hasard, parfois même quelques corps jetés jetés, volontairement ou non, plus en amont. Contre le vent, Marlee sort le nez du col de sa veste -elle voit peu l'océan hors des rêves, et l'air marin s'infiltre dans ses poumons, jusque dans sa chair endurcie par l'asphalte et les gaz d'échappement. L'horizon paraît s'étendre à l'infini ; elle s'avance, les muscles fourbus du long voyage hors du centre, sort maintenant les mains des poches, ouvre les paumes au sel, à l'eau et aux éléments -le déjà-vu la saisit sans surprise, l'ébranle des pieds à la tête. Elle a su, en se levant avant l'aube. Sans un doute Marlee a enfilé sa veste, prit le premier train.

La prophète se retourne sur la plage, cligne des yeux en distinguant la silhouette, encore lointaine. Un sourire manquerait de lui ourler les lèvres, si une ridule ne creusait pas encore son front ; elles ne se sont pas vues depuis de longs mois, Selda et elle, et pourtant, pourtant Selda est là, fidèle à l'appel. « La Calavera ne t'a pas encore mangée toute crue ? », souffle-t-elle alors que Miralles est encore une ombre sur les dunes. Filiforme, minuscule, elle s'étire, s'étiole, se rapproche. Sappier attend, impassible, remet les mains dans les poches.


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the deep blue sea (selda) - Dim 24 Mar - 19:31


DON'T THINK, LOOK
(YOU ALREADY KNOW HOW THIS WILL END.)
⋅ ◆ ◈ ⟐ ◈ ◆ ⋅

Cousues au revers de ses paupières, les silhouettes se débattent, ondulent inlassablement, à chaque clignement. Spasmes en coin de cils, dès que la lumière du jour cesse d'éblouir sa rétine. C'est un combat muet, qui ne se joue ni à coup de poing, ni à coup de pied. Pas de lame, pas de balles, tout juste l'âme qui se fragmente un peu plus à chaque seconde de cette lutte implacable. Nature qui se rejette dès qu'elle s'apprête à l'accepter. A ouvrir le crâne pour mieux voir, mieux observer, c'est le déluge qui s'y immisce et la cervelle qui saigne. Tâcher de les attendre, patiemment, à la nuit tombée, invitation glissée à ce putain de troisième oeil qui ne s'ouvre que lorsqu'il le décide. Jamais comme elle le veut, quand elle le veut. Imprévisible, ça l'a frappée sans prévenir, entre deux battements de coeur erratiques, carcasse agitée, à deux doigts de l'asphyxie. Roulement dans les orbites, à lui retourner les yeux dans la pénombre, les ouvrir à l'envers. Sur une mer renversée, de l'eau plein les bronches pour contempler le peuple de la baie. Les corps meurtris, troués, pourriture défilant dans les pupilles à l'agonie.

Les doigts impriment les tempes d'une pression féroce. Flashs qui se débattent au-dessus des cernes, Arcadia se traverse à l'aube, les muscles encore endoloris, les bâillements en coin de babine. Selda resserre les pans de sa veste autour de ses os, n'apaise en rien les frissons qui déroulent inlassablement la ligne de son échine. Nausée collée aux entrailles, elle peine à émerger cette fois, des embruns plein les narines avant même d'atteindre sa destination. Rare qu'elle ait peur, y'a rien de tel qu'une vision de merde pour la chambouler. D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, y'en a pas eu souvent, d'une telle intensité. Et à chaque pas qui l'en rapproche, c'est l'impression de replonger, tête la première, pour y suffoquer, à nouveau. Canevas de charogne remontant, encore, et encore, et encore, vers elle, vers la surface. Elle étouffe avant même de la voir. Invitée mystère, certitude de l'y apercevoir. Et ça aussi, ça brutalise le peu de raison qui demeure à la sortie de cette transe onirique. Marlee. Deux syllabes qui en disent tant, qui en disent trop. Nulle part, et pourtant partout à la fois. Jusqu'à parasiter les rêves, de ceux qui se partagent depuis des années, et des années, sans que la Miralles n'ait jamais compris de quelle manière l'en éloigner. Peut-être n'a-t'elle jamais vraiment cherché, quand s'endormir donnait lieu à leurs rencontres, bien après que le contact ait été rompu. Un certain temps qu'elle ne l'a pas vue. A croire que malgré tout, le temps n'a entièrement eu raison de la rancune tenace de la Miralles - ou des relents d'une blessure adolescente. Pourtant, la sicaria a beau être bornée, depuis que ses yeux se sont écarquillés sur ses draps emmêlés, trempés de sueurs, dans la demi-obscurité, c'est tout ce qui a été en mesure de la rassurer. Une douche froide, enfiler ses vêtements en conjurant le vertige toujours ancré à ses tempes, et filer. Filer jusqu'à la baie. Filer jusqu'à Marlee. « T'étais qu'une ombre, tu sais ? » Tout ce qu'elle articule, en descendant dans sa direction, le coeur alerte et les mains fourrées dans les poches, à se donner une contenance malgré sa gueule déphasée. Et se planter devant elle, notion de distance évasive quand les méninges se sont à de trop nombreuses reprises connectées. Tanguer légèrement, et extirper une main, la poser sur le bras de Marlee pour tâcher de se focaliser. Pas forcément envie de la toucher, pas du tout, en réalité, alors dès que ça se recentre, elle la lâche, et précise : « Moi qui faiblis, ou tu l'as sentie, aussi ? » Et elle précise pas, parce que tout traverse ses pupilles, celles qui s'accrochent à celles de Marlee, avec plus d'intensité que ce vague geste pour s'arracher au tournis. L'eau, partout, dans les poumons, l'horreur, la terreur, la mort, la mort derrière les côtes, dans les veines, battant jusqu'au fond des tympans.
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the deep blue sea (selda) - Mer 27 Mar - 17:58



the deep blue sea
@Selda Miralles


Voir Selda en dehors d'elle, alors qu'il y a deux heures elles partageaient le même regard l'empêche de se tenir aussi droite qu'elle le voudrait. C'est toujours un mélange d'émotions confuses au sortir d'un rêve, d'autant plus lorsqu'il a été partagé, vécu, cette fois littéralement avalé (des litres et des litres d'eau salée) par une autre âme -et quelle autre. A chaque fois qu'elle la voit, à des heures, avant, désormais à des mois, des années d'intervalle, Marlee subit une déferlante d'images, de flashs, de sensations liés aux souvenirs des mondes physique et onirique ; à tel point qu'elle confond parfois les deux, doute qu'elles l'aient vécu ensemble. Est-ce le rêve de l'une ou de l'autre ? Est-ce un rêve universel, ouvert sur le monde, où elles ont plongé toutes les deux, liées par ce fil invisible depuis leurs seize ans ? Quelle différence entre les songes et l'océan qui s'ouvre maintenant devant elles ? Marlee croit entendre la voix rocailleuse de la sicaria avant même qu'elles ne s'alpaguent, dialogue muet qui tire un sourire bref à l'Américaine. Du regard elle la suit, tanguant imperceptiblement au rythme des vagues, jusqu'à ce qu'elle respire le bruit de ses pas, sente le sable s'enfoncer sous son souffle -Selda en chair et en os, présente jusque dans le physique, les cernes violettes, orbites creux sous ses sourcils froncés.

Sa paume est froide, imprimant le geste dans la chair pourtant couverte de Marlee. Comme brûlé par lui Miralles reprend main et équilibre, les traits plus durs lui semble-t-il. Selda n'a jamais aimé ni les signes de faiblesse, ni que son corps ne la trahisse. Les mots ressemblent à des grognements dans sa barbe d'ourse mal léchée, mutilés par ce qui la ronge encore -elle le lit dans ses yeux noirs. Marlee se rend compte qu'elle doit avoir le même air, les traits tirés d'une fatigue latente, exacerbée par le roulis nocturne de leur traversée tragique. Ni l'une ni l'autre ne doit avoir dormi sur ses deux oreilles depuis que le tumulte agite Arcadia -Sicaria ou simple femme de ménage, leur lot est le même. Les yeux de Marlee répondent pour elle, les pupilles dans celles de Selda ; elle hoche la tête, une vague ridule inquiète se dessinant sur son front, et ajoute, confirmant toutes leurs peurs : « Elle arrive. » Elle est là dans l'arête des vagues, s'affûtant au vent du large ; la mort, l'infortune, la destinée qu'elles ont vue funestes dans leurs rêves. « Rassure-toi, tu n'es pas encore folle. Ou alors on l'est à deux. » Un sourire sans joie étire ses lèvres, lueur complice à la lumière obscure du jour. Marlee soutient encore son regard, le baisse, retirant de sa poche un paquet de cigarettes. « Tu n'as pas l'air en forme. » Elles auront tout le loisir de discuter de ce qui arrive ; Marlee qui plus est, s'est peut-être langui de la revoir.


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the deep blue sea (selda) - Jeu 28 Mar - 21:36


DON'T THINK, LOOK
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⋅ ◆ ◈ ⟐ ◈ ◆ ⋅
Il y a des choses qu'elle n'a certainement pas besoin de dire, d'admettre. A jouer avec la vie, en couper le fil de ses lames acérées, décocher la mort en songeant la maîtriser, la tueuse ne devrait pas trembler. Ce genre de rêve, pourtant, la prend aux tripes et éviscère tout ce qu'il y a de plus secrètement gardé. Terreurs éveillées par l'incontrôlable qui hante sa chambre dès que les prunelles s'ensommeillent. Idée presque saugrenue de cesser la lutte contre elle-même, d'admettre que ces instants de clairvoyance assassine la constituent entièrement. Cloisonner, chaque parcelle, elle l'a fait. Pendant près de vingt années. Museler tant bien que mal les intuitions, rejeter les images. Savoir Marlee à proximité, à la longue, ça a aidé. Un peu plus encore cette nuit, rassurée par cette chaleur devinée aux alentours, dans l'atmosphère cristallisant leur prophétie. Maigre réconfort pour la Miralles, que de se savoir accompagnée dans son naufrage - leur naufrage. Couler avec Marlee, et se laisser engloutir, sans résistance. Pas tout à fait les nerfs pour ça, encore, seulement quelques semaines qu'elle s'échine à être plus docile à l'intérieur de son propre crâne.

Les pupilles finissent par se décrocher, parce que c'est difficile de la regarder trop longtemps, après ce genre d'instant. Ou de regarder qui que ce soit. Seule présence qu'elle tolère, allant jusqu'à la rechercher, soulagement égoïste de la trouver. Et puis, Selda, ça fait des années qu'elle ne soutient plus son regard avec tant d'ardeur. Plus aisé de regarder ailleurs. De lui refuser parfois la lecture si facile de ses prunelles restées trop expressives à son égard. Pas dans ses cordes, de revenir sur la rancoeur, de refaire un pas après s'être laissée disparaître de leur tableau. Leur joli tableau. De cette époque où elle ne voyait pas tout en nuances de gris, palette adolescente jetant ci et là ses émotions en désordre, bien plus étoffée qu'à l'âge adulte, désabusé. Couleurs qui se sont fanées et ne resurgissent jamais tant que dans ce monde chimérique, où elles règnent à deux. Celui sans lequel, probablement, Selda n'aurait carrément plus posé ses yeux dans les siens. Jamais. Réapprendre à le faire, petit à petit, ça a demandé du temps. Pudeur de la voir qui s'estompe, depuis que les rêves sont devenus récurrents. Plus la même surprise, sauf quand ça prend de telles proportions. « C'est sûrement ça, alors. » Murmure porté par le vent, ton qui faiblit dans la bourrasque, les cheveux qui volent et tracent des lignes à l'horizon, zèbrent le ciel grisâtre d'éclairs noirs. Il lui semble presque le voir s'ouvrir, ténèbres filasses descendant lentement jusqu'à la mer. Hypnotisée par le spectacle que lui offre l'esprit encore troublé, elle retient son souffle sans le remarquer, appréhendant la collision avec la mer, l'instant où la pénombre en éclatera la surface pour les noyer.

La voix de Marlee tend ses muscles dans la naissance d'un sursaut. Les longs cils battent en direction du paquet de cigarette, celui que Selda vient lui dérober sans en demander la permission. Pas la première, ni la dernière fois. Bien que quand elle a les nerfs qu'elle s'y perd. Poumons tâchant de rester désencrassés pour ne rien perdre en endurance, sur le terrain. « Merci, c'est flatteur. » Et sourire en coin, sarcasme aux lèvres, clope coincée entre les doigts. « T'as du feu ? » La seconde cigarette, elle vient la glisser aux lippes de Marlee, geste anodin et qui lui semble pourtant s'arracher à un passé lointain. Faire mine de la lui offrir, avant de lui tendre à nouveau le paquet. C'est presque trop délicat, dans le décor qui peine à retrouver ses allures habituelles. Pas qu'elle y vienne souvent, mais dans sa mémoire, le sol était plus stable, les lignes moins ondulantes. « J'essaye de m'y faire. » Elle le confesse, à Marlee, à l'air marin qui joue avec leurs cheveux et à la plage déserte. « Faut croire qu'après tant de temps à n'pas en vouloir, c'est le retour de flamme. » Elle le sait, Marlee, Selda en est certaine. Premier témoin du mal-être, du combat muet livré dans sa propre tête. « Alors, j'fatigue un peu. » Un peu. Beaucoup. Beaucoup trop. « T'es pas fatiguée, toi ? Quand ça revient sans cesse, comme ça ? » Et ça l'intéresse, sincèrement, malgré la défensive qui se devine dans le ton toujours trop brusque. « J'pensais que ce serait plus facile, en les acceptant, mais je crois que c'est pire. »
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the deep blue sea (selda) - Mar 9 Avr - 14:08



the deep blue sea
@Selda Miralles


Selda tangue encore, détourne les yeux et les raccroche à elle, coupe le contact pour mieux l'effleurer à nouveau -dix ans plus tôt c'était la même histoire, autre contexte, autres sourires, autre pétillement malicieux au fond du regard. Marlee soupçonne que ce soit encore le cas dix ans plus tard. Si elles ne perdent pas le fil qui les relie derrière leurs paupières closes -si la sicaria ne fait pas d'excès de zèle et vit encore assez longtemps pour qu'elles se cherchent, se retrouvent, s'apprivoisent enfin peut-être. Miralles la distrait momentanément de ses inquiétudes, qu'elle découvre omniprésentes, tambourinant au rythme de son cœur même quand elle n'est pas là ; sans gêne, comme d'habitude. Certaines choses ne changent pas, et la constance du culot de Selda maintient le sourire à ses lèvres, lui envoyant un coup d'oeil alors qu'elle sort de ses poches un briquet bon marché. Elle n'aura pas le temps de lui souligner la familiarité : contre sa bouche, le filtre de la cigarette dérobée puis offerte, une seconde des pupilles sombres de Selda. Marlee la prend entre ses doigts, fait craquer l'étincelle juste sous celle de Selda : un chassé-croisé de cigarettes, d'attentions et de regards déviés, comme deux louves veillant sur les blessures l'une de l'autre sans jamais franchir cette dernière familiarité.

La confession vient, honnête, alors qu'un premier volute de fumée s'échappe de la cigarette de Marlee. Le vent lui mord maintenant les oreilles et les doigts, condamnés à l'affronter le temps de leurs retrouvailles ; les yeux rivés sur Selda et sa voix sombre se gonflent de larmes de sel. Cette histoire, elle a l'impression de l'avoir déjà entendue -dans les cercles des Anciennes, dans sa propre existence, aux heures noires, dans la bouche de Selda déjà, au détour d'un de leurs rêves. Selda lutte contre l'évidence depuis une éternité. Comme tant d'autres -mais d'autres moins vifs, moins observateurs, moins affûtés que Miralles et ses coups d'oeil aiguisés, sa silhouette nerveuse, prête à bondir à chaque sursaut de l'inconnu. Quand elles se sont vues pour la première fois, Selda lui a paru si forte et implacable, l'incarnation parfaite des filles imprenables de Delray. Qu'elle courbe l'échine devant les rêves, Marlee ne l'aurait jamais imaginé, à l'époque.

Elle écoute, tangue en silence, les mots de Selda s'infiltrent en elle comme la marée qui grimpe, sur la plage. Selda parle, grogne, s'agace -lui plante sa colère nerveuse, d'apparence, dans des questionnements pourtant sincères. Hantée, la Miralles, cherchant les mêmes réponses que Marlee des années plus tôt -encore maintenant, quand elle s'égare. Surtout maintenant se surprend-elle à penser parfois, et elle tire sur sa cigarette, opposant à la latine un regard cerné qui en dit long. Marlee se tait pour la laisser parler jusqu'au bout, se sortir du torse ce qui la ronge, Marlee suppose seule dans son coin. Puis elle répond enfin, une fois la dernière carte abattue, d'une voix douce, roulant sur la vague qui s'écrase et se dissout dans la baie immense : « Tu dois avoir des centaines de rêves, de flashs, de pressentiments, d'impressions accumulées en toi, autour de toi... Des années à endiguer la vague, c'est normal que maintenant, ce soit le raz-de-marée. » Marlee la regarde du coin de l'oeil, prend une pause le temps qu'il faut ; une demi-seconde, avant de reprendre : « T'es certaine ? De les accepter, totalement. » Elle expire la fumée, leur laisse un répit -que Selda s'interroge, pas assez longtemps pour qu'elle plante ses crocs en guise de représailles. « Des fois y' a une barrière, une sorte de dernier rempart, qui empêche la digue de céder. Comme un mécanisme de défense, invisible à l'oeil et aux sens, construit en toi sans que tu le saches, par un dernier sursaut de conscience, ou dans ton cas, de la tête de mule de Mexicaine qui refuse de se laisser aller jusqu'au bout. » Elle achève d'un ton tranquille, contrastant avec la bousculade dans les mots, laisse la sicaria revoir, décortiquer avec elle l'avalanche angoissante de ces derniers mois.


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the deep blue sea (selda) - Lun 27 Mai - 20:38


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⋅ ◆ ◈ ⟐ ◈ ◆ ⋅
Entrave en fond de gorge, il fallait peut-être attendre cet instant précis pour que les mots se décident à sortir. Vérité à peine effleurée, déni ancré jusqu'au fond des méninges barricadées. Elle le dit, comme elle le ressent, Selda. Après avoir épuisé chaque chemin sans en trouver l'issue, c'est l'épuisement qui la gagne sans merci. Fatigue des années à se croire suffisamment forte pour braver les bourrasques, avancer dans ce combat nocturne dont nul n'avait conscience hormis elle. Mais difficile, encore plus, de plonger au coeur de la tempête, à s'imaginer courageuse d'enfin se glisser dans les limbes prophétiques. Sans retenue. Armes déposées avant de sombrer, oublier l'âme guerrière pour subir l'assaut sans protester. Lourdes les épaules, à traîner son pesant de rêves inexpliqués. Et ne plus savoir que faire, de quelle manière se comporter. L'incendie s'anime dans les bronches à mesure qu'elle inhale, contraste entre les lèvres gelées qui achèvent de se sceller. Appréhension en fond de prunelles, celle qui ne transparaît que doucement dans la noirceur, à décrocher son regard par pudeur. Il n'y a pourtant rien de rassurant, à s'intéresser aux alentours, capter des fragments de paysage redessinés comme chaotiques. Alors, à mesure que Marlee répond, c'est vers elle que se dégage le regard, à se défaire de toutes ces impressions. Celles qui menacent d'engloutir la raison, de lui faire douter de son éveil, de la réalité qui les lie à chaque seconde passée sur cette plage. Et sûrement que le véritable courage, ce serait de le dire, enfin. Qu'elle s'est jamais sentie aussi seule qu'au fil de ces heures à errer dans son propre crâne. Et que ça la terrorise. Miralles solitaire, Miralles difficilement sociable, depuis qu'elle tue plus qu'elle ne vit. N'empêche que ça la ronge, dans l'appréhension crépusculaire. De se perdre dans les méandres de ces vérités ne connaissant guère de temporalité, et de ne savoir qu'en faire. Tout réprimer au petit jour pour ne pas se laisser distraire, se laisser démasquer. Secret primant en terme de sécurité, personne ou presque ne le sait.

Personne ne le sait, comme Marlee le sait. Personne n'y assistera, jamais qu'elle se dit, elle s'en est assurée. A ravaler le sentiment hantant ses côtes pour s'allonger sans compagnie, ne plus s'égarer auprès de quiconque dans son lit, ou celui d'un autre. Sûrement que ça meurtrit, aussi, malgré les airs qu'elle arbore et le sourcil qui se fronce. Elle aimerait rétorquer, mais se contente de grogner en venant d'un geste vif éloigner les mèches folles qui dévorent son champ de vision. « Comment je le saurais, si c'est invisible. » Pas pour rien que tête de mule lui sied si bien, à jouer les fausses ingénues sous couvert d'un ton acide. « Tu veux dire qu'il y a une méthode particulière, pour qu'cette chose percute qu'elle peut me déglinguer l'esprit sans retenue ? Différent du je m'endors, je m'en prends plein la gueule, j'me réveille ? Faut m'expliquer, j'ai pas eu d'enseignement à ce sujet. » A se demander s'il lui est encore physiquement possible de parler sans se parer de ses airs d'agressive. Cette chose, cette chose qui est là, sans qu'elle ne sache pourquoi, a sans doute une certaine part de responsabilité. Et la détacher de ce qu'elle est, en faire une entité à part entière, plus aisée à mépriser, n'aide pas non plus, en réalité. Elle finit pourtant par la boucler, à finir sa cigarette en silence, sans cesser de l'observer. Jeu de regard qui cherche l'ascendant, revient sur ses pas, prétexte que non, elle n'est pas prête à sombrer. La sicaria n'y est pas habituée, à s'expliquer, à s'imaginer réprimer sa fierté en laissant apparaître la faille qui s'est dessinée. Faiblesses à camoufler, pour ne pas se laisser atteindre, n'empêche que ça la bouffe quand même, d'une manière ou d'une autre. Sûrement pour ça, qu'au bout de quelques minutes à sentir le malaise lui grignoter l'estomac, la langue se délie à nouveau. « Je la sens quand elle s'éveille. J'ai appris à ne plus me débattre. » Pas rien, pour la fille qui n'a eu de cesse de le faire depuis toute petite. Un effort démesuré, ne plus se battre quand elle s'amène, cette ombre qui naît dans un recoin et gagne en importance. Qui lui ressemble. Qui lui ressemble bien trop, avant que tout ne la submerge. Et elle en frissonne, Selda, jure en espagnol en frottant ses bras pour finir par les croiser, une fois le mégot éjecté sur le côté. « Peut-être sa manière de se venger après des années passées enchaînée dans un coin. » Et en ricaner, de l'oracle qu'elle ne parvient qu'à dissocier de ce qu'elle est, depuis toujours. Là sans doute, le dernier rempart, le dernier accès de férocité. « Mierda. Seule fois d'ma vie que j'ai écouté la mère, avec ses conneries de ne pas regarder les visions. J'aurais mieux fait de lui dire d'aller se faire foutre bien plus tôt. » Silence. Dernières visions encore trop présentes, trop douloureuses. « J'les supporte plus. » Et laisser les dernières paroles, au timbre adolescent, être emportées par le vent.
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the deep blue sea (selda) - Mar 11 Juin - 18:51



the deep blue sea
@Selda Miralles


La langue de Selda claque comme un fouet, aiguisant les mots qu'elle lance, comme des armes, à Marlee et au monde entier. Le vent pourrait souffler trop fort que la Mexicaine l'invectiverait de la même manière ; elle planterait les crocs dans tout ce qui passe, si on la laissait faire. L'observant en silence, Marlee écoute, et pince le coin de ses lèvres pour ne pas laisser y fleurir un début de rire ; animal blessé, elle pourrait le prendre comme de la moquerie. Comme si Marlee tournait en ridicule les doutes qui la dévorent, qu'elle confie là sur le rivage, à son acolyte. Simplement, Miralles la fait rire depuis leur première rencontre, de ses vannes grossières à ses bougonnements de mule ; l'entendre à nouveau mordre dans ses conseils avec sa verve naturelle lui avait manqué et ravive avec une fraîcheur tendre les souvenirs relégués à un coin de sa mémoire.

Sans un mot, elles s'écoutent, leurs regards s'amarrant à l'autre au détour d'un coup d'oeil, tirant sur leurs cigarettes en miroir ; le rythme est identique, les gestes décalés -lentement, elles calquent, sans s'accorder réellement encore. Meurtrie par le retour de flamme, Selda rue ; dépouillée de son énergie par les derniers événements, Marlee peine à suivre. Il leur faudra du temps, c'est un fait, pour retrouver cet équilibre qu'elles ont connu.

Selda souffle, de la même voix butée, jette son mégot en crachant le mal qui lui reste sur les poumons. La chamane, un pas en arrière, prend le temps de consumer sa première cigarette du jour ; la première en compagnie de Miralles, qui revête plus d'importance que les fumettes dérobées en bas de son immeuble. Cette cigarette-là, alors qu'elle se fane lentement entre ses doigts, prend même des atours de rituel ; le début du reste, les maux enfouis qu'elles exhalent dans l'air, la fumée qui s'enroule à la brise avant de s'y fondre, et enfin, disparaître. « Laisse ta mère où elle est. C'est pas elle qui accouche de tes rêves, si ? » Les sourcils de Marlee se lissent, tirent sur le coin de sa bouche ; l'ourlet de son sourire disparaît quand elle détourne la tête, jetant son mégot plus loin sur le sable.
Avant de se sourire, elles ont a sortir Selda de ce cocon dont elle s'est retrouvée prisonnière ; avant qu'elle n'étouffe, avalée par les voix, les vagues, les souffles qui risquent de s'abattre encore.

En revenant à elle, c'est de face qu'elle lui lance son regard, jaugeant un instant la lueur sombre qui vrille, vive, au fond des yeux noirs. « Passe chez moi ce soir. » Marlee enfonce ses mains froides dans ses poches. « Il n'est pas trop tard pour apprendre -même quand on a une tête de bourrique comme la tienne. »


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the deep blue sea (selda) - Lun 24 Juin - 15:27


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⋅ ◆ ◈ ⟐ ◈ ◆ ⋅
Rassemblées jusque dans leurs errances nocturnes, les bourrasques battent les silhouettes qui se font face. Et à certains instants, Selda se le demande, si elle ne rêverait pas encore. De cette plaie lacunaire décousant ses silences, laissant la blessure s'exposer à ciel ouvert, suinter en abondance. De ces paroles qu'elle accepte de laisser s'échapper, entre deux lippes entêtées, définitivement crispées sur les vérités qui la dévorent. Presque à douter de leur réalité, celle qui se rejoint au matin et semble parfois plus instable que les rêves qui se partagent. Aujourd'hui, en particulier. Peut-être parce que l'absence heurte plus qu'elle ne l'aurait pensé, que s'appréhender physiquement demande une patience dont le sommeil l'exempte, d'ordinaire. Composer avec les caractères, les humeurs qui doivent se tolérer pour éviter que le venin n'abonde à nouveau dans les veines de la sicaria. Pas facile, Selda. Moins encore lorsqu'elle a mal dormi. Marlee le sait, sans doute, parce qu'elle l'a connue. Quand tout commençait. Qu'elle la connaît. Même si ce détail, Miralles l'omet, souvent, ou le souhaiterait. Toujours troublée à l'idée qu'un regard puisse la deviner, déceler le désarroi sous la carne endurcie par les années.

Mégots s'éteignent et se perdent dans le sable grisâtre. Plus de nuée opaque pour dissimuler les non-dits qui se tissent, dans l'ombre d'un sourire en coin, fugace, répondant à celui de Marlee. Rare à pouvoir évoquer sa mère, quand bien même Selda tend la perche la première. « A s'demander si elle a accouché de quoique ce soit, dans sa vie. » Réplique abrupte, témoin du ressentiment toujours présent, parce que rien ne s'est arrangé depuis la dernière fois qu'elles ont pu évoquer le sujet. Au moins une constance depuis l'adolescence, en cela, Selda non plus n'a pas changé. Rancune amère qui ne faiblit guère, ou qu'à moitié. Là n'est pas le sujet, en réalité, juste détour essayant vaguement de retarder l'échéance. Celle qui lacère la langue et dévoile la faiblesse, à éveiller le dégoût dès qu'elle se prononce. Miralles ne supporte plus, elle qui semble tout encaisser. C'est dit, et elle ne se sent pas plus légère. Pas avant que Marlee ne la considère, échange de regards ancrant la sicaria dans un calme éphémère. Depuis combien d'années, n'est-elle pas passée chez elle ? Ne l'a-t'elle pas elle-même accueillie dans sa tanière. Sourcil se fronce légèrement, doute qui l'assaille à considérer le pour et le contre. Sous le joug de ses impulsions, un peu plus encore lorsque l'orage gronde entre les tempes, pas le temps de dresser un tableau mental et de s'attarder sur le sujet. Trop empressée, comme d'habitude, Selda fonce, et ne réfléchira qu'après. « On n'aura qu'à dire qu'après ça, on sera quittes, vu tout ce que je t'ai appris à l'époque. » Elle ne sait pas de quelle manière ça devrait sortir. Tout se mélange, parce qu'elle aurait pu plaisanter davantage au sujet de ces heures à lui enseigner l'espagnol, l'entraîner dans les ruelles de Delray en gueulant des jurons à qui voulait les entendre. La vérité, c'est sûrement que Marlee lui en a déjà tout autant appris. Se laisser aller, se lier d'amitié, sentir le coeur s'emballer pour la première fois et puis foncer, même si c'était pour s'y méprendre, pour se blesser. P'tetre bien qu'elle lui enseigne encore, au gré de leurs songes, à lâcher prise sur la rancune et pardonner. Haussement d'épaule se contentant de dégager tout ce qui lui reste en travers de la gorge, la brune laisse lentement le silence retomber, les prunelles murmurer. A ce soir, Marlee. A cette nuit.
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