Journée off pour la jordanienne. Journée posée. Loin du labo, de l’université et des antiquités. Loin du musée et sa dernière rencontre –découverte- des plus étranges. Ça tourne en boucle dans sa tête. Ca tourne en boucle et ça la rend dingue. Comme ce ventre de plus en plus proéminent qui l’empêche de se dépenser comme elle le voudrait. Plus de boxe ou de sport de combat. Aucun contact en réalité. De la natation qu’on lui a conseillé. Du vélo d’intérieur aussi. Elle s’est retenue de demander s’ils l’avaient bien regardé. Ca aurait plus tendance à la stresser qu’à réellement la relaxer. Elle a toujours aimé nager, mais dans l’océan, souvent à contre-courant, pas dans une piscine qui pue le chlore.

Alors pour aujourd’hui, elle avait décidé de se vider la tête autrement. Quelques heures de plus au lit dans la matinée. A profiter d’une grasse matinée dans les bras de Finn. Ils étaient régulièrement en horaires décalés. Lui rentrait quelques avant qu’elle n’ait à se lever pour aller bosser. Mais ce matin, elle avait pu finir sa nuit entre ses bras. Un passage à sa librairie, récupérer quelques bouquins, et la voilà qui flanait dans les rues commerçantes. Ca faisait un moment qu’elle n’avait pas fait une réelle après-midi shopping. Les derniers vêtements qu’elle avait acheté l’avaient été plus par confort et commodité que réelle envie. Elle ne rentrait plus dans ses fringues, et elle avait dû faire un tour dans les rayons maternité pour pouvoir convenablement s’habiller. Mais c’est lorsqu’elle voit la vitrine d’un magasin de bébé qu’elle s’arrête. Oublié les projets de shopping pour elle. Lyra reste fixée sur les petites robes qu’elle aperçoit. Parce que ça y est, ils savent. C’est une fille qu’ils vont avoir. C’est une fille qui grandit dans son ventre déjà bien rond. Une petite fille qu’ils élever avec Finn. Parfois, elle a l’impression de ne pas réaliser. Que la vie à deux, elle va prendre un autre sens. Pas vraiment finie, juste différente. A trois. Va falloir s’adapter. Mais Lyra, elle se rend pas compte que dans trois mois, elle aura un bébé dans ses bras. Si elle s’habitue avec Mattie, qu’elle s’entraine comme elle le peut, elle sait que ça sera différent. Un bébé à plein temps. Fini les grasses matinées. Le palpitant qui s’affole, et légère panique qui la prend face à ce qui l’attend : l’inconnu le plus total. Elle souffle un bon coup, passe la porte de la boutique. S’égare un instant dans les rayons des garçons, aux teintes plus bleutées. Elle se demande un instant si ce bébé sera le seul, ou si elle n’est que la première d’une longue tripotée. Si elle en croit les dires de Finn, la fertilité se transmet plutôt bien dans son côté de la famille. Et elle… son père collectionnait les femmes, et les mômes. Des filles toutes plus caractérielles les uns que les autres. Peut-être bien qu’il y en aura d’autres. Si elle n’est pas franchement prête maintenant, essayant encore de se faire à l’idée du bébé à venir, l’idée la fait sourire.

Un sanglot qui se fait entendre, à peine étouffé. La jordanienne relève la tête, contourne le rayon et aperçoit une brune qu’elle reconnaitrait entre mille, un petit pyjama entre les mains. Sybille Elle n’hésite pas une seconde, accélère le pas avant de ralentir en arrivant à sa hauteur. « Sybille ? » glisse une main empathique dans le creux de son dos, et lorsqu’elle se tourne, elle vient prendre son amie dans ses bras. « Tu vas bien ? C’est pas le moment de craquer. » qu’elle lache, un sourire taquin sur les lèvres. Mais les hormones, Lyra sait ce que c’est. Aucun moyen de savoir quand ça va la prendre, quand ça va lâcher, souvent pour rien. Les émotions qui submergent, sans pouvoir rien y faire. De la crise de larmes de joie à celle d’hystérie totale. « tu devrais l’acheter… j’suis sûr que ton bonhomme sera à croquer là dedans. »

« Lyra… » Instinct maternel qui s’impose malgré elle, et sans aucun doute, aussi, décuplé par sa grossesse. Mais elle sent Nyx, sa présence et son influence. Elle sent l’amour qu’elle a pour ses enfants et cet instinct de protection viscéral et féroce. Les larmes essuyées, la jordanienne ouvre un peu plus les bras pour y accueillir sa fille divine. Les deux femmes sont pourtant rapidement bloquées par ces ventres devenus trop encombrants. Elle ne peut s’empêcher de rire. Situation cocasse. Mère et fille par un lien divin dont la véritable nature leur échappe encore un peu, mais enceinte en même de par leur nature humaine. « C’est rien, Sybille. T’as le droit tu sais… » de craquer ou d’être émotive. D’être impatiente ou de flipper. Lyra appréhende. Elle a peur de pas être à la hauteur. Elle a peur de ne pas savoir s’y prendre. Et elle a peur de ce qu’elle serait capable de faire pour garder son futur petit bot, en sécurité. Elles se détachent, et Sybille recule légèrement, en regardant un peu plus le petit pyjama. Lyra, spectatrice de la scène, et émue. Parce qu’elle sait qu’elle sera pareille. Elle sait qu’elle va rattraper ces mois où elle n’était que peu enchantée et totalement paumée face à cette nouvelle. Elle sait que peu importe sa peur, tout changera lorsque sa princesse viendra. « Oui je réalise juste, ça me rend émotive. » rire quelques peu nerveux mais compréhensif qui s’échappe des lippes de l’archéologue. « Même avec les mois que je viens de passer. J’suis pas encore sure de réaliser… Pas vraiment. Sauf quand ça tape là-dedans. » qu’elle ajoute, une main sur le ventre. Ceux sont ces fois-là, qu’elle réalise un peu plus que c’est bel et bien un petit être vivant qui se développe dans son corps.

« Tu as trouvé quelque chose à acheter toi ? » elle secoue négativement la tête. « pas encore. Je viens juste d’arriver. » un léger sourire sur les lèvres alors qu’elle hausse les épaules. « j’me suis un peu égarée et je t’ai entendu. » elle avait oublié les fringues, es envies d’achats compulsifs. Il n’y avait plus que Sybille et ses émotions. «  Alors un petit garçon ou une petite fille ? » Le sourire de Lyra se fait proportionnel à celui de son ami, en acquiesçant d’un signe de tête. Ca y est, ils savent, enfin. Ca aussi, ça rend les choses plus concrètes. C’est plus juste un fœtus et un bébé à venir, c’est leur fille qu’ils attendent. « Une petite fille ! » les yeux brillants, le sourire aux lèvres, l’émotion qui monte et un rire nerveux qui la prend encore. « Et ça me fait flipper. Comment j’vais élever une fille… Ici ? » oh elle ne doutait pas un seul instant de l’instinct paternel de finn ou de ses amis, toujours prêts à aider, mais il fallait avouer que l’ambiance en ville n’était pas des plus favorables. « Ou j’vais peut-être juste être… nulle à ça. ou… je sais pas. mais une petite fille. » et que ça va être remuant si elle a caractère de sa mère.

« Oh » Sybille n’est pas seule là dedans. Si Lyra semble encore faire bonne figure, elle n’est pas pour autant tranquille. Elle ne sait pas ce qui l’attend, ne sait pas comment se préparer. Elle a bien tenté de lire quelques bouquins, mais elle s’emmerdait royalement au bout d’un chapitre. Est-ce que toutes les futures mères étaient passées par là ? Tout se trouvait-il dans les manuels ? Ou comme elle, certaines préféraient juste se fier à leur instinct ? Sans parler de cette ville, jamais à l’abri de rien. Des divinités réincarnées, des créatures issues de mythes en tout genre, et dieu sait quoi encore. Pas franchement l’idéal pour mettre au monde un enfant. La seule chose rassurante là dedans était que la jordanienne n’était pas seule. D’autres y étaient passés, et Sybille vivait exactement la même chose qu’elle, avec quelques semaines d’avance.

Mais ça ne calmait que partiellement ses angoisses. Toujours cette même peur de ne pas être à la hauteur. Elle s’était toujours démenée pour tout, mais s’être mère était quelque chose qu’il fallait naturellement avoir dans les gênes ? Si elle avait tout le reste, mais pas ça ? Et plus les semaines passaient plus ça semblait être sa plus grande peur : ne pas être capable de s’occuper de sa propre fille. Pire encore, si celle-ci le lui reprochait des années plus tard. Le contact de son amie l’apaise un bref instant, et elle tente d’afficher un sourire qui se veut rassurant. « On va s'aider d'accord ? Je pourrais garder ta petite et l'emmener à l'école si tu en as besoin, on pourra les inscrire dans la même école » Elle peut pas s’empêcher de rire, amusée par les plans de Sybille. « t’as pensé à tout ? » le sourire s’agrandit, les angoisses s’effacent encore un peu plus. « On pourra faire ça. Puis je crois que j’irais aussi embêter Alfi. J’veux le voir avec un bébé dans le bras. » qu’elle finit par avouer en riant. « Mais on s’entraidera, c’est certain. » un instant, elle laisse sa tête reposée sur l’épaule de la brune, les rôles inversés. La mère divine, l’enveloppe charnelle enceinte… qui demande de l’aider à sa propre fille. Un vrai bordel dans lequel Lyra se perdait parfois. Elle passe alors son bras autour des épaules de Sybille lorsqu’elle lui avoue flipper. « J’imagine qu’on ne doit pas être les seules. J’espère. » On se débrouillera, qu’elle pense. Puis elles sont entourées, non ? Augustin, Finn, Saturno, Alfi, Liam, Nerissa, Zelda… Et sans doute bien d’autres. Pas certain que tout ce petit monde soit franchement à l’aise avec un nouveau-né dans les bras, mais ils auront du monde autour d’elles, elle n’en doute pas un instant. Quant à ses propres parents, elle se demande encore comment ce sera. « Ce sera plus facile à deux, il faut qu'on se soutienne ! » « Evite juste de me donner tous les détails de l’accouchement, hein. » qu’elle lache en rigolant, se reculant légèrement. Elle acquiesce alors d’un signe de tête. « Andrea. J’aime bien. Doux et pourtant… y’a du caractère. » sourire en coin sur les lippes de la future maman, qui s’imagine déjà avoir une fille à son image. « T’en penses quoi ? Tu crois qu'elle aimera ?»

Avoir Sybille avec elle, traversant les mêmes épreuves, les mêmes galères, les mêmes joies et doutes, ça lui fait du bien. Et surtout, ça la rassure. Elle ne pouvait pas espérer qu’avoir une de ses plus proches amies pour ça. Il y avait de grandes chances pour que la grecque connaisse les joies –et le reste- de l’accouchement avant elle. Et si elle voulait savoir à quoi s’attendre, elle ne souhaitait pas en avoir tous les détails. Elle avait déjà entendu beaucoup trop de choses. Et maintenant qu’Andrea était à un stade aussi avancé… la faire sortir d’ici l’effrayait sérieusement. Plus elle voyait son ventre grossir plus elle se demandait comment ça allait se passer. Mais tout ça, elle y pensera le jour J. Elle stressera bien assez. Pas besoin d’angoisser aussi vite. « J’espère. J’’aime bien, vraiment. » il y avait bien Nysa. Ou Leah. Mais d’une certaine manière, elle trouvait Andrea bien plus affirmé.  « Allez essayons de trouver quelque chose pour la petite Andrea alors ! » bras dessus bras dessous, les deux amies se dirigent vers le rayon fille. Elle laisse son regard vagabonder sur tous les body, tous les vêtements pour nouveaux-nés.
« Ça, pour la fille de la nuit » le sourire de lyra s’agrandit à ses mots, et plus encore en voyant le petit body. « Est-ce que d’une quelconque manière, ça fait de toi sa sœur ? » elle a sourire amusé sur les lèvres, à taquiner sur ces liens auxquelles elle essaie encore de s’habituer. Nemesis est la fille de Nyx, mais pour le moment, la jordanienne n’en a aucun souvenir, et parfois, elle se demande si quelque chose changera lorsque ce sera le cas. Elle prend le body entre ses mains et l’admire. « Ca lui ira comme un gant. Et je ne manquerai pas de lui dire qui l’a choisi pour elle. Big sis sybille ou tati sybille ? » qu’elle demande en rigolant, en parcourant le reste du rayon. Beaucoup de rose. Couleur qu’elle ne peut que rarement supporter. Plus encore lorsque c’est pour ce clivage fille/garçon. Jamais elle ne forcera sa fille à mettre du rose, du pastel, du mauve ou des fringues avec des petites fleurs et des cœurs. Elle s’habillera comme elle le souhaitera. Et peut-être même qu’elle souhaiterait que sa couleur prédominante soit le bleu nuit. Ou le bleu tout court. «  Tu aimes ? Ça lui irait bien je trouve ! Il ne faut juste pas qu'elle devienne la déesse du soleil, on serait hors sujet.» elle se met à rire lyra, en imaginant sa fille ainsi. Pourtant, c’était une question qu’elle s’était déjà posé. Elle se sentirait quelque peu impuissante et inutile dans la découverte de ses dons si elle se retrouvait avec quelque chose de… lumineux. Le soleil, la lumière, l’amour, les plantes… « Complètement. Et… j’aimerais bien qu’elle soit… enfin, de notre panthéon. » une peur irrépressible d’imaginer les celtes vouloir mettre la main sur sa fille sans qu’elle ait son mot à dire. « Je sais pas, je crois que je serais… rassurée. Toi pour Benjamin, au moins t’as pas ce problème. » rire nerveux qui s’échappe de ses lèvres. Avec deux parents du panthéon grec, il n’y avait aucun doute sur son appartenance dans quelques années.

« Big Sis j'aime bien, même si elle va sans doute trouver ça bizarre !! » elle se met à rire, lyra, en s’imaginant devoir expliquer ça à sa fille. Sa sœur sans vraiment l’être. Némésis, fille divine, dont l’essence même du lien lui échappe encore. « On peut en rester à tatie. » qu’elle ajoute, un sourire amusé sur les lippes. « comme tu préfères honnêtement. » mais aucun doute que la future mère s’en amusera. Parce que plus le temps passe, plus Sybille lui semble être comme un membre à part entière de sa famille. C’est un peu flou, un peu étrange à définir, plus encore sans souvenirs de ses vies passées et ce lien si particulier, mais bel et bien ce qu’elle ressent. Un peu plus fort chaque jour. Et ça lui plairait vraiment qu’andrea soit du panthéon grec, bien qu’elle se sente tout aussi coupable vis-à-vis de finn. Elle se dit que lui aussi aimerait sans doute voir sa famille rejoindre son propre panthéon. Et c’est peut-être pour ce genre de choses qu’alcide l’avait mise en garde. Mais elle se sentirait moins perdue. Elle saurait qu’elle avait des gens sur qui compter pour l’aider, comprendre.. S’y retrouver. « Quoi qu'il en soit, elle sera aidée par le panthéon Grec si elle a besoin pour ses dons, moi aussi je m'assurerai d'être là pour vous si vous avez besoin. » un bref instant, la tête de la jordanienne se repose contre l’épaule de son ami. « Je sais. Et tu sais que c’est réciproque pour ton fils. Peu importe ce dont t’as besoin. » Et elle avait hâte de le rencontrer ce petit bout. Hâte de fondre devant sa bouille. Si elle ne connaissait pas Augustin très bien, il était difficile de ne pas reconnaitre son physique agréable. Bien au contraire. Le genre d’homme à qui vieillir sied à merveille. Et sybille... Y’avait qu’à la regarder. Des cheveux ébène, des yeux clairs à s’en damner. Un sourire bien plus chaleureux que la déesse féroce qu’elle abritait. Quoiqu’elle en pense et qu’elle en dise, Lyra considérait son amie comme une personne lumineuse.  

Main rassurante qui se pose sur son épaule alors qu’elle se redresse. Elle apprécie sincèrement d’avoir Sybille à ses côtés. Pour ça, et tout le reste. Elle sait qu’en cas de pépin, elle sera là. « D'ailleurs est ce que toi aussi tu...Tu te souviens ? » elle tourne subitement la tête, ne se souvient que trop bien de sa conversation avec luca. Malheureusement –ou pas- lyra n’avait toujours pas expérimenté ça. Alors elle secoue doucement la tête en signe de négation. « J'ai retrouvé la mémoire. » elle soupire lyra, en se demandant ce qui est le mieux. « Pas moi. Pas encore. » est-ce que tout est bon à prendre ? Ou vaut-il mieux rester dans l’ignorance ? Cela changeait-il sa vision du monde ? Des autres ? « Ça te dirait qu'on en parle ? Ailleurs ? » « volontiers. » elle attrape sybille part le bras, direction le début des rayons, les vêtements en main pour aller à la caisse et sortir de là.

Petit café confortable et chaleureux qu’elles rejoignent en quelques minutes de marche, sacs à la main. Installées, les boissons commandées et lyra inspire profondément, ne sachant pas par où commencer ses questions. Elle en avait tellement. Tellement de doutes aussi. Et de peurs. « Tu te souviens de tout ? enfin c’est des flashs ? C’est clair ? » passe les mains sur son ventre en réfléchissant à ce qu’elle voulait vraiment savoir, ce que ça impliquait pour… plus tard. Il y avait beaucoup de personnes de qui elle était plus ou moins proche, mais dont sa déesse était encore plus liée. Et parfois, elle ignorait encore à quel point. A commencer par tous les enfants divins de Nyx. Sa proximité avec némesis faisait aucun doute. Ou même Hypnos à en croire les mythes. Mais les autres ? Elle avait une influence certaine, mais ça ne voulait pas forcément dire que l’entente était au beau fixe. Il y avait moros, Hécate… Et elle se demandait de ce qu’il en était de Liam. Elle savait que c’était Erèbe. Elle connaissait aussi les mythes. Est-ce que ça changerait quoique ce soit entre eux ? « est-ce que… ça change quelque chose pour toi ? dans tes relations avec les gens que tu connais ? »

« C'est clair, parfaitement clair. Je me souviens de ma première existence, les autres et jusqu'à celle-ci. » le coude appuyé sur la table, le menton dans la paume, elle tente d’assimiler ce que ça implique. Elle ne sait pas ce que ça lui fera, et elle ne sait pas comment le gérer. En réalité, ça lui fait peur. Elle n’a aucun indice de qui était la réincarnation de Nyx avant elle. Une personne sympathique ou une psychopathe… C’est du cinquante-cinquante. Elle a peur de ce qu’elle pourrait découvrir. Peu de ne pas gérer des souvenirs auxquels elle ne comprendrait rien. Et ce que ça amènerait aussi de la joie et de la peine ? Ou des souvenirs seulement, sans émotion ?

Les boissons fumantes devant elles, Lyra attrape les siennes, se réchauffe un peu les mains, en pleine réflexion avec elle-même. Si tout ça l’angoissait quelque peu, une part d’elle-même avait hâte que ça arrive. Hâte d’être plus proche de Nyx de mieux la comprendre. Comprendre ce qu’elle avait vécu et ce par quoi elle était passée. Plus les années passaient, plus elle sentait sa puissance, mais plus encore, elle s’en sentait proche. Elle sentait maintenant qu’elle avait besoin de ses souvenirs, tout en les craignant. « Un peu... Me concernant, c'est sa haine qu'elle me retransmet et j'en viens à haïr ceux qu'elle hait, j'en fais une affaire personnelle parce que nous sommes la même personne. Mais c'est comme se réveiller après un coma, je ne suis pas certaine que ce soit la manière la plus saine de faire face à ces nouveaux problèmes. J'ai eu beaucoup de mal à m'en détacher. » une gorgée de son thé aux fruits rouges et elle repose la tasse pour attraper la main de Sybille. Légère pression sur celle-ci pour lui faire comprendre qu’elle est là pour elle. Elle ne sait pas exactement ce qu’elle ressent, et ne le saura que le jour où ça lui arrivera, mais elle est là pour elle. Et d’une  certaine manière, elle sent qu’il en est de même pour Nyx. « Accepte les. C’est nouveau, ça chamboule forcément. Mais accepte les. Et gère ça petit à petit, pas tout en même temps. » « C'est quasi impossible en fait, ses envies de vengeance son trop ancrées dans ma peau. » Elle était prête à parier que c’était loin d’être comme gérer une envie de chocolat ou de sucré. La main libre qui caresse son propre ventre, elle soupire, son autre main toujours dans celle de sa fille divine. « mais est-ce que ça change ta perception.. des gens ? De ceux que tu connais ? Par exemple… toi et moi, j’me doute que c’est pas le cas, je ressens plutôt le contraire. Mais y’a rien qui nous garantissait que Nyx et Nemesis s’entendaient. Alors que nous deux, on s’entend très bien. Tu vois ce que je veux dire ? est-ce que ça change… tes relations ? » lyra pense principalement à ceux dont elle est le plus proche. Elle se doute que le jour où elle se souviendra, c’est sans doute avec Liam que ça changera le plus de choses. Elle ne sait pas encore dans quel sens. Peut-être avec d’autres aussi. Les relations de Nyx avec les autres divinités sont plutôt obscures, à part pour quelques exceptions. « Et j’suis sure que tu peux t’imposer toi aussi. Même si elle fait partie de toi. » un sourire qui se veut rassurant, presque réconfortant.

« Alcide par exemple. Je suis arrivée à Arcadia en ressentant de la colère envers lui sans réellement savoir pourquoi, à cause de Némésis. J'ai compris en récupérant mes souvenirs que c'est après Zeus qu'elle en a ; par extension ce qu'il se passe ces derniers temps et les accusations contre lui, Némésis voudrait qu'il reste en prison, que justice soit faite. » elle sert un peu plus les mains de son amie en essayant de comprendre ce que ça signifie réellement. Ce que ça pourrait signifier pour elle, pour chacun de ses relations. Elle n’a pour le moment aucune haine irrationnelle envers qui que ce soit. De l’indifférence, des envies étranges à vouloir taquiner, comme alcide. Et c’est avec plusieurs recherches qu’elle a finalement compris pourquoi. Ce que représente Nyx pour Zeus, ce qu’elle inspire et ce qu’il peut craindre d’elle. Tout ça, ils le ressentent, même sans souvenir. Comme un sentiment étrange, là, juste sous la peau et dans au fond des tripes. Sybille continue son récit, toujours Alcide et Zeus en guise d’exemple, et surtout, ce qu’il lui fait ressentir, ce que Némésis provoque et ne peut refouler. « Je ne sais pas si cela répond à ta question, j'ai l'impression que oui, ça change la perception que l'on a des autres » elle hausse les épaules, en se demandant ce qui l’attendra à son tour. « mais c’est pas toi qui l’a foutu en prison. Et s’ils ont des preuves, il y restera. J’ai rien contre lui. A vrai, malgré tout son passif avec Saturno, je crois qu’il m’amuse. Il m’agace aussi… Mais je m’en accommode. Pour ce qui est de sa culpabilité… J’en sais rien. J’aurais tendance à dire que oui. Et dans ce cas là, il est où il doit être. » ca pouvait bien paraitre hypocrite. Lyra n’était pas blanche, pas innocente non plus. Elle aussi avait quelques morts à son actif. Mais tuer sa femme… A ses yeux, c’était un tout autre niveau. Ce n’était pas les affaires, ce n’était impersonnel. C’état même tout le contraire. C’était le genre de crimes qui ne devait pas rester impuni à ses yeux. Une morale et une conscience, bien subjective qu’était celle de la jordanienne. « J’espère que ça ne changera pas trop pour moi… Je suis pas sûre de pouvoir gérer mes hormones, un bébé et un quelconque changement d’humeur à cause de Nyx. » qu’elle lache, en riant un peu nerveusement. Non, définitivement, elle avait d’autres chats à fouetter. Elle n’était déjà pas certaine de réussir à gérer son rôle de mère, alors elle n’avait pas envie que nyx vienne mettre le bordel, d’une manière ou d’une autre dans sa vie. Elle n’avait pas envie de voir les choses s’empirer ou complètement dégringoler.
« tu ne penses pas réussir à arriver à un équilibre ? J’peux pas dire que j’sens pas Nyx. De plus en plus… mais c’est hors de question qu’elle régisse ma vie. Du 50-50, sans problème. Mais elle ne prendra pas complètement le dessus. » et elle espérait fortement que les mois suivants ne changeront pas drastiquement. Elle espère qu’elle pourra continuer à tenir ce discours à sa fille divine. Elle tient à sa vie humaine, ses relations, ses banalités. Elle ne tient pas à ce que tout soit régit par son côté divin. Elle ne peut se détacher de Nyx, elle ne le voudrait pas. Mais elle tient à rester elle-même, autant que possible. « Peut-être que ce n’est qu’une période d’adaptation ? » elle l’espérait sincèrement. Si elle ressent parfaitement l’attrait de la mère pour sa famille, elle tient aussi à sybille comme une amie, pour ce qu’elle est, humainement. Et si laisser de la place à Némésis la fait se sentir plus entière, qu’il en soit ainsi. Mais elle ne tient pas à la voir disparaitre.

Du bout du pouce, elle caresse le dos de la main de sybille, toujours jointe à la sienne. Elle espère que ses mots l’auront apaisé. Ca ne la rassure pas vraiment, mais tant pis, elle verra bien en temps et en heure. Son amie a raison, ça diffère sans doute pour chacun… en fonction du caractère, de la divinité… tellement de variables à prendre en compte. Rien ne peut lui assurer la façon dont ça va se passer. « surement. On verra. Puis je serai pas seule. » qu’elle lache en souriant.

Le lien entre Sybille et Lyra était indéniable, se renforçant un peu plus chaque jour. Mais celui entre Nyx et Nemesis l’était encore plus. La jordanienne n’en comprenait sans doute pas encore toutes les nuances et subtilités, mais il était fort, et s’était forgé au fil des siècles, à un point qu’elle ne pouvait imaginer. Sa main dans celle de sa fille divine, elle tente de s’expliquer au mieux, de choisir les bons mots pour être le plus exact. Mais tout cela est encore bien flou pour elle. Chaque cas était différent, et même si elle avait une idée de ce par quoi passait son amie, elle ne pouvait être parfaitement sûre. Ils n’avaient pas de manuel. C’était au cas par cas, chacun de sa petite expérience à devoir s’accommoder de sa propre divinité. Pas bien évident pour s’aider les uns et les autres. « L'équilibre, je l'avais trouvé.» un sourire compréhensif se dessine sur ses lèvres, comprenait que cet équilibre ne tient plus qu’à un fil. Etat précaire, menacé d’être chamboulé. « Je compte sur mon fils pour le retrouver, ça me fixera.» « Pour ça aussi t’auras besoin d’adaptation, mais tu verras, je suis sûr qu’il contrebalancera tout le reste. Et occupera sans aucun doute une bonne partie de ton temps. » le sourire se faisait plus rassurant. Si elle n’avait aucune expérience en matière d’enfants ou de ce que ça prenait de devoir en élever un, elle savait au moins une chose : ça prenait du temps. Enormément de temps. Et qu’elle le veuille ou non, ça sera bien lui sa priorité, et elle est persuadée que Sybille trouvera la force de mettre Nemesis un peu de côté.

« Bien sûr que non tu ne seras pas seule.» Un sourire qui veut dire merci, malgré ses doutes et ses craintes. Elle sait qu’elle sera entourée, mais elle a peur de perdre pied. De pas s’en sortir, d’échouer dans son rôle de mère. D’échouer à tout gérer. Sa carrière, la seconde, un peu plus illégale, ses activités mafieuses, sa loyauté tiraillée, son couple… Trop de choses pour une seule personne, et pourtant, elle a toujours été du genre à avoir du mal à gérer qu’une chose à la fois plutôt qu’une multitude. De ces gens un peu trop actifs qui se concentrent mieux en faisant plusieurs tâches en même temps. « Je veux être la première au courant, quand ça arrivera, que l'on parle de nos souvenirs communs.» « promis, tu seras la première au courant. » Ca aurait pu être Luca, mais depuis qu’il s’est envolé, elle se dit qu’elle lui parlera de ça plus tard, à un autre moment.

« Je me demande si on va acquérir de nouveaux dons, quelle sera la prochaine étape...Un choix à faire peut être ? » « Oula, aucune idée… » elle soupire avant de rire légèrement et secouer la tête. « J’aimerais éviter. En ce qui me concerne j’ai appris assez de décisions pour les cinq ans à venir » elle se met çà rire un peu plus. Le moins que l’on pusse dire, c’est que ça n’avait pas été une année de tout repos, loin de là. Et elle aimerait que ça ralentisse un peu. Que ça soit un peu plus stable, un peu plus paisible, dans certains aspects de sa vie, même si elle est bien consciente qu’à faire partie d’une mafia, ça ne se calmera pas de ce côté-là. Et que même pour le reste, ça sera bien relatif.