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family portrait | Magda&Lola

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family portrait | Magda&Lola - Sam 23 Fév - 19:20


 


Momma please stop crying, I can't stand the sound


T’as hésité, longuement, t’as pas envie de retourner là-bas. Tu traines des pieds, c’est pas que t’es sans cœur, c’est que tu supportes mal sa vie telle qu’elle l’est, elle est trop loin de ce que t’es. T’as l’impression de faire tâche, d’être moins, t’as plus rien à voir avec elle. Tu t’en es persuadée. Mais c’est ta mère. Immobilisée dans sa cage dorée qui te réclame, c’est son mari, qui a ravalé ses rancœurs et ses à priori pour te contacter. Tu souffles sur la cendre de ta cigarette en marchant, t’es dans le bon quartier, tu le sais, parce que les gens te dévisagent. Regard de haut en bas, sur la capuche qui cache mal ta crinière flamboyante, sur ton jean élimé, déchiré, taché. Tu sais pas ce que tu vas lui dire et ça t’énerve, parce que ta mère elle t’a protégé du mieux qu’elle le pouvait. Tu comprends ça, t’as passé du temps à la détester de t’abandonner avec son porc, mais elle a pas eu le choix, t’es assez grande pour comprendre qu’elle a jamais eu le choix et quand elle l’a eu elle a tout fait pour renouer. Tu lui en veux de pas réussir à abandonner cette idée grotesque qu’un jour vous pourriez être une famille. Comme si vous pouviez renouer les liens, recréer quelque chose.

Tu sais, t’as compris, elle veut se racheter, elle veut ton pardon peut être, elle veut te guérir, te soigner, t’offrir mieux. T’es probablement le dernier remord, la dernière au tableau parfait de sa charmante existence. T’aimerai être heureuse, mais t’es toujours un peu amère. Tu lâches ton mégot et entre avec un soupire dans l’immeuble luxueux de la famille Hussein. T’es pas impressionnée par le luxe, ça t’a toujours laissé froide, tu trouves ça con toutes ces fioritures, tu comprends pas pourquoi les riches aiment autant les miroirs mais t’as un avis certain sur la profonde vanité et vacuité de ce milieu. Dans l’ascenseur une dame guindée pince les lèvres comme pour retenir le flot de désapprobation qui inonde sa gorge. Tu connais bien le chemin, tu t’étais jurée de pas revenir. Pas parce que c’était horrible, simplement parce que c’était pas ta place.  C’est le patriarche qui t’ouvre, il a des cernes mais son regard fatigué s’éclaire d’une colère à peine voilée quand il tombe sur toi. Ca a dû lui coûter de te contacter, il doit vraiment l’aimer. T’as envie de repartir, mais il dit rien, il te laisse passer. La décoration n’a pas beaucoup changé, quelques photos de plus peut être et t’es pas certaine que ce tableau immense était là, mais t’as jamais trop fait attention à la déco, au lieu en lui-même. « Comment elle va ? » Pas bonjour, rien, t’as les bras croisés, t’affrontes le regard sans ciller, maintenant que t’es là, il va falloir communiquer.

C’est pas si grave, ce qu’elle a, un accident, beaucoup de peur, elle aura de la rééducation peut être qu’elle devra avoir une canne. Mais elle t’a réclamé, toi. Il le crache presque ça, t’entends les mots « fille indigne » sans qu’il ne les ait prononcé. Y’a une vibration dans l’air, tu vois la possibilité de te montre odieuse et de quitter les lieux enterrant définitivement toute possibilité de revenir. T’as la tentation mais tu le fais pas, parce que dans la pièce voisine, y’a une voix fatiguée qui t’appelle. Tu t’éloignes, tu roules des yeux pour la forme et tu abaisses ta capuche avant d’entrer. Ce qui te choque c’est pas tant le plâtre, le lit médicalisé, que le blanc qui parsème ses cheveux et les nouvelles rides, elle est plus marquée et t’as la certitude que t’es pas étrangère à ça. Enfin, une pointe de culpabilité. T’as les bras ballants « hey… » Tu sais pas quoi dire, elle tend la main alors t’y vas, y’a tellement d’espoir dans ses yeux, il te fait mal. T’aurais pas du venir.

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family portrait | Magda&Lola - Sam 23 Fév - 20:50



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Like a storm during summer days
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Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

Le monde tourne et tourne encore autour de toi. T’as pas envie d’être là, et en même temps c’est l’endroit où tu as toujours voulu être. Juste là, à tourner sur toi-même, à voir le monde qui bouge par rapport à toi, par rapport à ton mouvement. C’est un peu comme si toi tu bougeais pas, comme si c’était les motions du monde et qu’ils avaient qu’un seul centre, qu’une seule source. Et c’est toi. Magda Hussein, la fille d’un patron d’entreprise. T’habites dans la richesse, t’as un bel avenir tout tracé et même si t’avais pas cet avenir t’as les ballerines, t’as ces soeurs qui sont là pour toi, toujours. T’as tout pour être heureuse et pourtant tout en tournant tu pleures. Les larmes coulent et s’envolent, tes mouvements les font voleter dans l’air comme si elles étaient ce qu’il y avait de plus léger au monde. Et pourtant, sur tes joues et sur ton coeur, elles sont lourdes.

Tu revois ta mère quand elle est rentrée de l’hôpital. Tu lui as rendu visite dès que tu as pu, dès que tu avais du temps libre, et pourtant t’en as pas beaucoup. Mais c’est pas grave, parce que là, c’est pas à propos de toi. C’est à propos de Maman, elle va mal, elle souffre. Elle va marcher, c’est sûr, mais en même temps elle aura probablement besoin d’aide pour ça. Tu peux pas imaginer ça, ta mère avec une canne, interdite de ses jolis talons qu’elle quitte même pas le dimanche. T’as du mal à imaginer juste un truc aussi con que ça, ta mère sur des chaussures plates. Au moins, elle va bien. Elle va avoir du mal à s’y faire, mais elle est là, elle est vivante. Et pourtant… Ouais y a une part de toi qui hurle, une part de toi qui a la rage. Parce que t’as eu beau lui rendre visite, t’as eu beau être avec elle à chaque instant, elle en a rien eu à foutre. Lola. Elle a demandé après Lola. La vraie grande soeur, celle dont t’as pas parlé à grand monde parce qu’après tout, elle est pas là de toute façon. Il y en a toujours eu que pour elle, pourtant y a une part de toi qui espère encore que vous allez avoir un quelque chose, un truc en plus. Mais cet espoir aussi il te fout la rage alors tu pleures et tu tournes.

Et puis tu tombes. Danser ça demande de la concentration, ça demande de savoir ce que tu fais, et t’en as pas la moindre idée, tu vois même rien et t’as plus l’équilibre alors tu tombes. Même pas foutu de faire tes pointes correctement, t’es trop déglingué. Et puis t’entends des bruits, tu sais que ça y est. Elle est arrivée. Papa, il l’a appelée. Tu lui en veux. Tu voulais aller la chercher toi-même. T’espère, ouais. Tu sais pas vraiment pourquoi mais c’est là. Des souvenirs sûrement. D’une chevelure rousse qui vagabondait dans la maison, mal à l’aise face à tout sauf à toi. Avec ton père, ça passait pas. Avec ta mère, ça passait pas. Mais y avait eu un truc dans son sourire, une chaleur dans ton coeur. Et puis elle était partie et c’était finie. Elle avait abandonné Maman, encore.

T’as séché tes larmes, t’as retiré tes pointes et t’as décidé d’aller voir. Tu peux pas t’en empêcher de toute façon. Papa est pas loin de la pièce, comme s’il était prêt à bondir au moindre soucis. Et ça tu comprends pas. Lola, elle est plein de trucs, mais elle a jamais été violente. Pas que tu l’ai vue, en tout cas. Dieu sait ce qu’elle faisait dans la rue. “Papa ? Tu sais que t’es pas obligé de rester là ?” Ton père, il t’a pas entendu arriver mais il est pas surpris que tu sois là. Vous savez tous les deux que quand il s’agit de ta mère, vous êtes de vrais chiens de garde. Prêts à bondir si quelque chose lui arrivait. C’est la tragédie dans l’accident finalement. Vous avez rien pu faire. “Je ne suis pas obligé. Mais je suis là.” T’as pas besoin de comprendre, tu sais qu’il a eu du mal à appeler Lola. C’est quand t’as dis que t’allais y aller, il a perdu les pédales. Il voulait pas que t’ailles là où elle traînait, il trouvait que tu valais mieux que de juste traîner dans la rue, dans tout un tas d’endroit. S’il savait où t’allais parfois la nuit, avec tes amies… “Va dormir. Un mort, ça a une meilleure gueule que toi.” Il ouvre la bouche, tu sors un billet de ta poche. “Oui, oui, je sais. Pas de mot comme ça, direct dans la boite à gros mots. Tu peux aller le mettre en partant te reposer ?” Il sourit un peu, il a pas d’argument et il est trop fatigué pour en chercher. Rapidement, dans le couloir, il y a plus que toi. Tu sais pas trop si vraiment t’as envie de rester, mais tu t’adosses contre le mur. Pas l’intention d’écouter au porte, mais t’y peux rien. Tu tends l’oreille, tu veux savoir. Elle a quoi de si important à dire, Maman, qu’elle puisse dire à Lola mais pas à toi ?



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family portrait | Magda&Lola - Sam 23 Fév - 22:17


 


Momma please stop crying, I can't stand the sound

Elle prend ta main un peu précipitamment, comme si elle craignait que t’enfuies. Tu t’assois dans le fauteuil à côté du lit, t’as rien à dire, tu sais pas trop ce que tu fais là, tu te sens maladroite. Tu sens son regard sur tes traits, comme si elle essayait de les imprimer. Tu réalises que tu l’as pas revu depuis que t’es allée sur ce toit. Tu sais qu’elle voit qu’il y a quelque chose de différent, quelque chose qui n’est pas tout à fait toi. « C’est gentil d’être venu » son ton est prudent, mais tu peux pas empêcher un sourire incrédule de se dessiner sur tes lèvres, t’essaies de le ravaler mais un peu tard. Y’a rien de gentil dans cet acte, y’a rien de gentil dans votre relation. Mais tu dis toujours rien, infoutu de formuler une phrase qui ne te conduirait pas à immédiatement quitter la pièce. Ca la blesse tu le sais, tu supportes pas de voir cette tristesse, mais t’y arrives pas. T’as pas de mots doux. « Je suis désolée Lola. J’ai réalisé que je t’avais jamais dit que j’étais désolée. » Tu relèves les yeux vers elle, t’as jamais attendu d’excuse de sa part, t’as même jamais imaginé qu’elle t’en devait. « T’as été toute seule. Longtemps parce que j’ai pas été là. »  Y’a un truc qui se coince dans ta gorge et tu détournes le regard, vers la fenêtre. « T’as pas exactement eu le choix. » Ta voix est rocailleuse, un peu plus que d’habitude. Tu te souviens les flics. « Je t’ai laissé avec lui, j’ai pris beaucoup de mauvaise décision dans ma jeunesse, il a été une des pires ». T’as pas envie d’entendre ça, alors tu te lèves, t’arraches sa main à la tienne. « Ça suffit. » ta voix est sèche ça lui coupe la parole. « T’es pas sur ton lit de mort, je sais pas ce que tu veux, mais j’ai vraiment pas envie d’entendre ça. »  T’enfonces les mains dans les poches de ton sweat parce que tu sais pas quoi en faire. « J’sais pas ce que tu cherches, je t’en veux pas, t’as fait de ton mieux quand t’étais là, tu m’as rendu assez forte pour survivre et …. » Elle se redresse, elle te coupe et dans sa fougue tu retrouves un peu la femme qui fut ta mère « Tait toi Lola ! Tu comprends pas ! » Dans ses yeux embués tu commences à comprendre.

Ce qui lui est insupportable c’est ton indifférence, elle aurait préféré que tu la détestes, que tu lui en veuilles mais c’est pas le cas. T’as juste continué d’exister en dehors d’elle. « T’aurais dû vivre, pas survivre, t’aurais du avoir un toit, des parents aimants, t’aurais du aller… » y’a sa voix qui se brise. Elle fait que ressasser, elle veut te faire réagir, mais t’as fait une croix que toutes ses idées depuis tellement longtemps que tu comprends pas comment elle peut s’y accrocher encore. « J’aurai du rien du tout. T’as une autre fille, qui a eu tout ça elle. T’as réussi, t’es une bonne mère, arrête de vivre dans le passé, tu peux rien pour moi. T’y pouvais rien depuis la prison et t’y peux ri…. » Tu t’énerves mais elle te coupe encore, « Il t’a touchée ? » au début tu comprends pas, puis ça s’éclaire dans ton esprit. Laconiquement tu réponds « Il a essayé. Je me suis barrée » Elle porte la main à ses lèvres, y’a un soulagement coupable dans son regard. Toi tu chasses le souvenir de ce géniteur répugnant, tu te rappelles du son de son nez qui se brise, t'as su que tu devrais courir et vite. T'as plus jamais eu aussi peur. Le silence s'épaissit. Elle a jamais osé poser la question qui la hantait. Quand elle est revenue te chercher et qu’il a dit que t’étais plus là, elle aurait pu le tuer. « Il est mort. » Cette nouvelle te procure un profond et dérangeant sentiment de satisfaction « Bon débarras.
-Je revenais de chez le notaire quand j’ai eu l’accident. Comme il pouvait pas te contacter, il est passé par moi. Il était toujours dans l’appartement. »
Tu hausses les épaules, bien sûr qu’il était toujours là-bas, il a du mourir dans ce foutu canapé.  « Il y a encore tout. Je… tu pourrais aller vider l’appartement ? Je voulais le faire mais je ne peux pas et je veux rien confier à des déménageurs, ils sauront pas ce qu’il faut garder.
-Y’a rien à garder.
-Il y a des photos. Des souvenirs et des bijoux qui ont appartenu à ta grand-mère.
-Il a du les revendre.
-S’il te plait Lola. »
Ce ton, cette supplique, c’est trop pour toi, tu marmonnes une réponse élusive et tu quittes la pièce devenue soudainement étouffante. Elle fait rien pour te retenir. Mais t'as le temps de sortir, la gamine déboule, t’as envie de cracher un truc, mais tu le fais pas. Elle y a jamais été pour rien elle.


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family portrait | Magda&Lola - Sam 23 Fév - 23:37



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Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

Tu sais pas si c’est une bonne chose d’écouter. T’es pas sûre de vouloir savoir, t’as jamais demandé à savoir. Ta mère, elle a voulu te raconter ce qu’il s’était passé, et toi t’as refusé. Si tu acceptais qu’elle te raconte, ça voulait dire que t’allais comprendre, que t’allais changer d’avis sur beaucoup de choses. Et surtout, savoir à quelle vie ta mère continuait encore de s’accrochait, alors même que tu savais qu’elle était naze, sa vie d’avant. Mais y avait Lola, le lien qu’elle ne coupait pas. Et pourquoi elle le ferait ? C’était sa fille après tout. Mais Magda, elle comprend pas comment sa mère peut vivre avec cette dualité. Il y a pas ses filles. Il y a Lola et il y a elle. Deux mondes différents, deux périodes différentes de sa vie. Et elle cherche même pas vraiment à les concilier, plus maintenant. Peut-être que c’est pas possible, peut-être qu’elle a juste pas assez essayé. Qui sait ?

Et pourtant, t’écoutes. T’entends. Ca parle d’un type, tu sais même pas qui c’est, mais tu devines. Tu devines parce que tu sais qu’avant Papa, il y avait quelqu’un d’autre. Un type qui était pas bien, qui faisait des choses pas normales. Ouais t’as pas besoin d’une carte pour comprendre qui est “il”. T’as des souvenirs vagues, de quand tu étais gamine. Ton père se met en colère, ça arrive, comme à tout le monde. Il est pas sanguin, mais quand il s’énerve ça se voit. Et ta mère, elle avait pas l’habitude. Elle reculait, elle avait peur. Toi, tu comprenais pas. Mais t’avais quoi ? Cinq ans, grand max ? C’est un souvenir vague mais aujourd’hui tu t’en souviens et tu comprends.

Et puis Lola te mentionne et ça te serre le coeur, en bien. Elle est en train de dire que toi t’es là, que ta mère elle devrait être là pour toi. Et ça fait du bien. Ca fait du bien parce que c’est ce que t’as toujours voulu entendre, parce que c’est ce que t’as toujours pensé toi-même, dans ton coin. Et elle le dit, elle met les mots dessus. Mais elle en parle pas longtemps, parce que ta mère la coupe. Comme toujours, elle s’en fout. Y a que Lola qui compte. Et la question qu’elle pose, c’est la pire question que t’as pu entendre ta mère poser. “Il t’a touchée ?” Et ça fait mal. Maman sait demander à Lola si il lui est arrivé des malheurs, si quelqu’un lui a fait du mal comme personne devrait jamais faire mal. Lola elle montre aucun signe de rien. Tu le sais. Parce que toi, les signes, tu les connais. T’es sûr que t’en as montré la plupart après la première fois, quand le prof t’a touchée, quand il a fait même plus que ça. Et elle a rien vu. Elle a jamais rien demandé. Si elle avait demandé… Mais nan, t’as tout ravalé, t’as tout enfoui. Tout allait bien.

T’entends à peine que Lola, elle a su en réchapper. T’entends à peine parce que tout ce à quoi tu penses, c’est que toutes les deux, vous avez pas grand chose en commun. Vous êtes aussi différentes qu’on peut l’être, mais apparemment il y a ça. Quelqu’un a essayé de s’en prendre à vous. Avec ou sans succès, c’est pas ça l’important. Ce qui importe c’est que ça a été tenté. Et d’un coup t’es en rogne. T’as envie de tuer ce type, le mec qui s’en est pris à Lola, celui que tu devines être son père mais en fait ça peut très bien être le boulanger. T’as envie de mettre les ballerinas sur le coup, parce que c’est exactement le genre de type que vous cherchez, le genre de merde contre laquelle vous vous battez. Mais y a pas besoin. Mort. Ta mère lâche ça et c’est sans appel. Le reste, c’est que des banalités et tu te calmes, et en même temps tu t’énerves encore plus.

Les banalités, t’en échange tout le temps avec ta mère. Mais pas ce genre de banalité. Ce que toi tu as avec elle, ça a pas ce lien, ce goût d’un passé commun dont on parlerait, ce deuil commun que vous avez à faire. Elles ont eu des épreuves toutes les deux, et elles le reconnaissent et en parlent. Toi, tu dis jamais rien à ta mère. Ta faute, parce que tu as jamais voulu t’ouvrir. Sa faute, parce qu’elle t’a jamais encouragé à lui parler. Le dialogue, il s’est brisé avant même qu’il ai commencé. Et tu veux pas qu’elle ai ça avec quelqu’un d’autre. Ouais, au final tu crèves de jalousie, y a tous ces sentiments qui tourbillonnent dans ta tête. T’es pas bien. T’as l’impression du vas hurler, ou gerber, ou même les deux. A la place, t’ouvre la porte d’un coup.

“Maman…”
Et tu sais pas quoi dire. Tu regardes Lola et t’es bloqué. “Oh… T’es pas toute seule.” Et c’est sincère. T’as tellement été aveuglée que pendant un instant, t’avais oublié que ta soeur était là. Pour toi, ta mère elle était seule, t’allais enfin tout mettre à plat. Mais comme d’habitude, c’est pas le cas. Le flot de parole, il reste bloqué dans ta gorge, alors tu le ravales et tu dis juste quelques mots. “Papa voulait savoir si tu voulais un petit truc à boire… un truc que les médicaments permettent, bien sûr.” Sa mère, elle a encore un verre d’eau à côté d’elle. Clairement, elle a pas soif. Mais son père, il est au petits soins depuis l’accident, alors ça va pas paraître suspect. Tu regardes Lola. Elle te ressemble en rien, sauf les yeux. Le même bleu, le bleu de leur mère. Pendant un instant, tu la fixes, tu sais pas quoi dire. “Qu’est-ce que tu fais là ?” C’est pas agressif, c’est juste une question. Quelque part, tu te demandes vraiment. Pourquoi elle revient, après toutes ces années, après avoir bien fait comprendre qu’elle voulait plus revenir ? On est mieux sans elle, tu penses. Mais qu’est-ce qu’il y a un vide, aussi, quand elle est pas là.



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family portrait | Magda&Lola - Dim 24 Fév - 9:59


 


Momma please stop crying, I can't stand the sound

Elle a le regard intense la gamine. Y’a un truc chez elle que t’avais pas perçu avant, ça te frappe, ça titille cette partie de toi qui n’est pas vraiment toi, mais tu veux pas creuser. C’est pas le moment, t’as déjà l’impression de trop t’imposer dans son existence. Tu te demandes si elle a entendu votre conversation, mais elle a vraiment l’air de débarquer, d’être désarçonnée par ta présence.  Votre mère lui répond gentiment mais fermement qu’elle n’a besoin de rien. Un ton travaillé qu’elle n’emploie jamais avec toi et qui te rappelle que tu la connais pas cette mère et que tu la connaîtras jamais. Et puis elle s’adresse à toi, mais tu sais pas trop ce que tu fais là, rassurer votre mère est une réponse probablement trop cruellement honnête. « Régler les formalités pour la mort de… » t’hésites sur le mot et t’échanges malgré toi un regard avec ta mère, t’as pas envie de donner de trace d’une quelconque complicité mais vous êtes toutes les deux embarrassées à l’idée de donner un statut à ce type. « …mon géniteur. » T’as toujours aucune envie de retourner dans cet appartement que t’as fuis, pour fouiller à la recherche de babioles probablement disparues ou revendues. Mais elle, elle s’accroche à ce qui s’est passé dans cet appart, elle s’agrippe à toi, à ce qui vous lie, à ce qui fait que vous étiez vous. Soudées dans la tempête. T’as jamais vraiment quitté la tempête, t’as appris à planer sur les courants violents.

Dans ta poche tes doigts sont refermés sur un fin portefeuilles. Un vieux truc que t’as emporté avec toi quand t’as fugué et que t’as jamais abandonné. C’était son portefeuille à elle, c’était un poids rassurant, une présence quand t’as fuis. Et quand machin est venu te trouver pour te parler de l’accident, t’y as pensé, à lui rendre, elle qui s’est plaint de trop nombreuses fois de pas avoir de photo et toi qui a systématiquement refusé les tentatives de portrait de famille qu’elle a émis. Tu ferais tâche dans la déco. T’as conservé ton petit trésor, secrètement. Sans lui dire, comme si t’avais jamais été certaine que cette femme-là, soit bien ta mère.

Il t’a suivi un peu partout, parfois rangé dans une pochette en plastique quand t’as été en désintoxe. A contre-cœur, tu l’extirpes de ta poche, l’expression figée comme pour empêcher toute trace d’émotivité. Tu l’ouvres pour en sortir un sachet contenant quelques petits buvards. Rappelle immédiat de ce que t’es. T’aurais voulu qu’elle rentre pas, Magda, elle a pas besoin de voir ça, elle a pas besoin de te voir. Tu fourres le sachet dans la poche arrière de ton jean, geste rapide et désintéressé, tu refermes le portefeuille. Vestige d’un temps lointain. Ta mère émet un son de surprise, un petit soufflement. Elle l’a reconnu, elle en oublie sur le moment ses inquiétudes, ce qu’elle voulait dire sur ta consommation de drogue, les propositions de rester et toutes les choses qui t’auraient poussées vers la sortie. Tu le lances à la gamine, parce que t’as pas le courage de lui donner toi, parce que tu crains qu’elle se lance dans une séance de souvenirs biaisés et parce que t’as l’impression cruelle qu’elle est entrée pour essayer d’exister. « Y’a quelques photos ». Tu t’adresses à elle, si elle veut regarder, tu l’inclues puisque votre mère le fait pas. Des grands parents inconnus, une fleur séchée, de vieux tickets de caisses, une photo d’école de toi, petite et sceptique et une photo de vous deux hilares, provenant d’un photomaton. Assise sur ses genoux, ta mère aujourd’hui grande dame portait un bombers aux bandes orange et les cheveux d’un rouge vif.  Tu l’as plus ouvert depuis longtemps ce portefeuille, mais la photo tu l’as regardé à t’en user les yeux. Réconfort facile quand t’espérais encore qu’elle t’aiderait. Quand t’avais besoin de te rappeler que t’étais pas seule.

Tu sais pas trop pourquoi tu lui as pas donné avant. Tu as continué à te le trimballer, de squat en squat. Sans doute parce que t’attendais encore cette femme, celle aux cheveux vifs qui te protégeait et que t’as pas reconnu celle qui t’as retrouvé. « Tu l’as gardé ? » Elle est émue, elle ré-espère d'un coup qu'il existe encore quelque chose qui te ramènerait à elle. Elle fait des gestes pour que Magda s’approche, lui donne, elle veut voir. « C’est le seul truc que j’ai pensé à prendre quand je suis partie. » Y’avait un peu d’argent mais la carte de crédit a rapidement cessé de fonctionner. Tu l’as gardé quand même, c’était un lien. Ce lien, tu lui rends. T’en veux plus. Tu veux juste te barrer, prendre un buvard avec Thea, mettre de la musique trop fort, oublier ce moment, te concentrer sur vous. Elle va bien, elle est entourée, faut qu’elle te lâche. La voir s’accrocher comme ça est irritant, y’aura pas de brunch du dimanche matin, pas de séance shopping. Tu lui dirais bien, mais y’a Magda, alors tu te tais, t’attends juste l’ouverture qui te permettras de quitter la pièce sans créer trop d’émoi.
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family portrait | Magda&Lola - Dim 24 Fév - 12:39



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Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

T’as l’impression d’être une intruse, mais au fond tu l’as toujours été. C’est l’impression que tu as, même si ça t’arrives pas à te l’avouer. Tu ressens les émotions, tu ressens la jalousie, mais mettre un nom dessus tu sais pas faire. Et tu vois ta mère, son expression qui change, tu sais que t’as vraiment interrompu quelque chose. Et que ça lui plaît pas. Tu l’as jamais vue réagir comme ça quand on interrompit ce qu’elle faisait avec toi, du peu qu’elle faisait quoi que ce soit de toute façon. C’est le genre de mère qui vient aux spectacles de danses et aux remises des diplômes, mais y a jamais eu cette complicité de vraiment faire des choses ensemble. Un peu, au début, quand tu étais petite. Et puis elle avait dû penser que ça y est, tu étais assez grande. Tu te demandais si elle avait pas arrêté à l’âge où elle avait perdu Lola. Comme si elle voulait pas faire avec la seconde ce qu’elle avait pas pu faire avec la deuxième.

Mais Lola, elle te ment pas. Pas vraiment. Elle te dit pas tout, mais elle te ment pas et ça, ça te plaît bien. Tu préfères qu’on soit franche avec toi. T’es constamment sur le point de t’effondrer, mais t’es pas une petite chose fragile à prendre avec des pincettes. Parce que façon, les pincettes, ça brise beaucoup plus facilement que si on les utilise pas. “Oh. Toutes mes condoléances.” C’est pas sincère pour un sous. Tu ressens rien pour ce type, à part une rage passagère suite à la discussion entendue. Tu t’en fous de pas paraître sincère, et t’es sûre que personne ici en a quelque chose à foutre que tu le sois. Géniteur. Le mot est violent, mais il est clair. Y a rien à garder. “Si jamais il y a besoin d’aide pour bouger des trucs…” Tu sais même pas pourquoi tu proposes ça. La curiosité, peut-être, qui te dévore les entrailles maintenant que la porte vers le passé a été entrouverte. T’as jamais été comme ça pour rien, mais là c’est pas pareil. C’est la famille, malgré toutes les cassures. Ca change les choses, sûrement.

Et puis sans trop comprendre pourquoi, Lola te file un portefeuille. Le sien ? Tu sais pas trop. Est-ce qu’elle est du genre à donner son portefeuille à n’importe qui ? Probablement pas, parce que sinon elle aurait pas survécu longtemps dans la rue. Tu l’ouvres, quand elle mentionne les photos, parce que clairement c’est ce qu’elle te propose de faire. Et même si ça l’est pas, tu t’en fous un peu. Tu trouves des trucs qui te parlent pas, d’autres un peu plus. La photo d’école, tu reconnais un peu, parce que t’as presque la même. Vous vous ressemblez pas, mais vous avez le même sourire de circonstance, celui que tu fais quand t’as pas envie de sourire mais qu’il y a une photo à prendre alors tu te forces. Un truc qui vient de votre mère, parce que votre mère aussi elle a ce sourire crispé parfois. Et puis le photomaton. Quand t’étais petite, tu voulais toujours y aller. Les gosses adorent ça. Et ta mère voulait pas. Vous aviez un appareil photo, vous aviez pas besoin de payer pour une pauvre cabine. Pourtant à une époque elle l’a fait. Peut-être par manque d’appareil, mais ça crée un vide en toi.

Tu remets tout dedans, c’est un truc que tu sais pas si tu veux voir plus longtemps. Et le portefeuille tu le tends à ta mère, c’est clairement elle qui est censée l’avoir. Lola a juste voulu être gentille. Comme t’étais petite en fait. Odieuse avec ton père, indifférente avec ta mère, mais gentille avec toi. “Garde-le, Lola. S’il te plaît.” C’est juste un vieux portefeuille rapiécé, qui sent le vieux mais solide quand même. La qualité des vieux objets qui le maintient encore. Ta mère, elle en a quatre des comme ça. Tous neufs, tous de bien meilleure qualité. Mais tu sais qu’elle refuse pas parce qu’il est moche ou démodé. “Maman, Lola veut que tu l’ai.” Ou peut-être qu’elle lui donne juste parce que c’est de circonstance. Une offrande à une blessée, un voeu de bon rétablissement enrobé de cuir craquelé. “Ou si personne en veut, je le jette et c’est réglé, on en parle plus !” C’est méchant, tu sais que ça compte pour l’une comme pour l’autre, mais t’en as marre de l’ambiance qui règne, des regards qui s’échangent sans que tu puisses rien déchiffrer. Tu l’envoies sur le lit, prendra qui en voudra. Tu veux plus toucher ce truc, ce symbole d’une vie à laquelle tu n’appartiens pas. Il y a eu un avant toi, et ça t’arrive pas à vraiment l’imaginer, même avec ta soeur à coté, même avec les photos. Parce que t’as pas envie d’imaginer. Egoïstement, tu veux que la vie de ta mère tourne autour de la tienne, parce que pour toi une mère c’est ça. Et si un jour t’as des enfants… Ouais. A qui tu veux faire croire ça ? Tu sais bien que la pensée d’en avoir, t’arrives pas à la supporter. Tu te contentes de regarder l'une puis l'autre. T'arrives pas à croire que t'ai autant envie d'en apprendre plus, alors que chaque fois que t'as ça en face de toi, t'arrives pas à le supporter.



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family portrait | Magda&Lola - Dim 24 Fév - 17:00


 


Momma please stop crying, I can't stand the sound

Elle te propose de l’aide, tu relèves pas, elle a pas envie, c’est de la politesse. Un geste de la main pour lui dire de laisser tomber. Ca serait tellement étrange de la voir dans ce décor, poupée parfaite dans l’appartement défraichit, décrépit. Elle regarde le vestige, tu sais pas lire sur son visage, t’essaies pas vraiment, parce que t’as toujours cette bizarre impression quand tu la regardes. Et t’as pas envie de savoir, t’as pas non plus envie qu’elle sache. Ta mère parle, nouvelle demande, nouvelle supplique, ça t’énerve, t’en veux plus de ce truc, t’en as plus besoin, c’est elle qui s’accroche à ça, pas toi. C’est elle. Ça monte tout de suite avec elle, la crispation, tu sens les muscles de ton dos se nouer. Tu sais pas faire semblant que tu supportes ça. Tu supportes pas qu’elle s’accroche comme ça. T’es sa culpabilité matérialisée, à peine une personne. Elle s’excuse tout le temps, chaque fois, elle veut te donner tellement et tu veux rien. « tu l’as entendu, balance-le si tu le veux pas. » Tu fais même pas mine de le récupérer, au contraire tu fais un pas vers la sortie, c’est le bon moment. « Attend ! » Ta nuque est raide « S’il te plait. » t’as envie de hurler, d’être cruelle, t’as envie de partir avant de céder au pire. T’es sure que c’est aussi douloureux pour elle que pour toi, alors pourquoi elle continue de se l’imposer. Tu te tournes quand même « Magda il y a une enveloppe sur la commode, tu veux bien la donner à ta sœur. » Tes yeux roulent. « C’est la lettre du notaire et les clés de l’appartement »  Elle insiste, elle insiste vraiment. Tu pourras toujours passer les clés à des squatteurs qui ont besoin d’un endroit. Tu sais qu’elle te lâchera pas avec ça, pas sans se battre et t’es usée d’avance.

Elle a ouvert le portefeuille et extirpée la petite photo, y’a que des regrets dans son regard, peut être un peu de tendresse mais toujours noyé par cette foutue culpabilité. Tu tolères pas de la voir s’ériger en martyr, mère éplorée, coupable. « Ca suffit. » Les mots t’échappes, sifflants « J'suis en vie. Il a jamais pu me toucher. J’ai connu des moments durs mais j’ai survécu. Toujours. Parce que tu sais quoi, tu m’as fait forte, alors arrête de te comporter comme si j’étais fragile, parce que j’le suis pas putain. J’sais me défendre, j’sais même attaquer quand il le faut. » Elle dit rien, elle te croit pas, ça percute pas chez elle que t’es plus une gamine. « J’bosse quand je peux. » Faire des extras dans un bar, de temps à autre, quand t’arrives pas trop déchirées, quand tu cognes pas les clients pour une  remarque stupide. « J’ai un toit » Pour le moment en tout cas, au rythme ou vous brûlez votre thune, la situation est loin d’être aussi stable que le suggère cette affirmation. « Et je le partage avec un type que j’aime et qui m’aime. » C’est un peu près le seul truc qui te semble d’une véracité totale, votre lien à Thea et toi. « Arrête de te flageller, arrête de regarder tout ce que je suis comme un immense échec dont t’es la seule responsable. Tu m’emmerdes avec tes airs de martyrs ! » La bouche un peu entrouverte, elle a la même expression que si tu l’avais giflé. T’allais partir sur ça, ton enveloppe dans la main et le cœur un peu plus léger pour être honnête. Mais t’entends des pas rapides et c’est sans grande surprise que le patriarche fait irruption. Bien sûr, toute la famille est aux aguets quand t’es là, il t’agrippe par le col. S’il te fout à la porte ça sera ça de gagner. Mais qu’il lève la main et tu l’éclates. Et puis ça t’oppresse qu’on entre dans ton espace vitale comme ça, qu’on t’attrape, ça glatit, ça braille en toi.

T’as pas peur de lui, t’es pas impressionnée non plus. T’as même pas d’avis sur lui, il est bon avec ta mère, pour le reste, il a l’air d’un riche connard futile. Tu vois dans son regard tout ce qu’il a envie de te dire mais qu’il retient, tu vois qu’il a envie de te virer, de te dire de plus jamais revenir. « Tu vas faire quoi ? » Tu le provoques, tu t’en fous, t’as jamais voulu être problème entre ta mère et lui, mais tu sais que tu dois l’être, qu’elle t’a foutu entre eux. Ils croient chacun détenir la vérité sur toi, y’en a aucun des deux qui l’a. Tu le repousses, t’as de la force, t’as de la force depuis que t’as cet oiseau en toi. Tu le repousses avec une facilité vexante, pas trop fort, tu veux pas qu’il tombe, pas devant la gamine, pas devant ta mère.
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family portrait | Magda&Lola - Dim 24 Fév - 17:44



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Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

Tu t’attendais pas à ce que Lola soit d’accord pour jeter le truc. Tu pensais que c’était aussi important pour elle que pour votre mère, parce que si ça ne l’était pas elle l’aurait déjà jeté elle-même. Alors tu comprends pas trop, t’as l’impression que la personne juste là tu l’avais comprise mais en fait non, elle t’échappe, insaisissable. Ta mère, elle est plus facile à cerner, et t’es pas surprise quand elle demande que tu donnes une lettre à ta soeur. Tu sais pas trop pourquoi tu le fais d’ailleurs, mais comme un automate tu obéis et tu vas la prendre avant de lui tendre. Elle la prend, et ensuite elle en fait ce qu’elle veut. C’est pas ton problème à toi. Mais ta mère veut qu’elle ai l’enveloppe alors voilà, comme ça on est débarrassées de la corvée.

Mais ça énerve Lola plus qu’autre chose, le ton monte et tu sais pas quoi dire. Tu sais pas quoi dire parce qu’au final, tout ce que tu vois c’est une jeune femme qui a une vie qui lui convient, qui arrive à vivre et qui a un chez elle, des gens qui comptent pour elle. T’es habituée au luxe, mais si il devait y avait un minimum à la vie, tu la placerais là. Juste à ce que Lola avait. Et au final, peut-être qu’on vivait mieux comme ça. Ouais, Lola elle vivait dans la rue, elle avait des recommandations pas fréquentables. C’était un fait connu ça, Magda avait grandi en le sachant, elle avait même vu certains de ces gens dans son appartement. Mais comme elle disait, le type qui avait tenté quelque chose contre elle, il avait jamais réussi. Ca changeait rien du côté du type, réussite ou échec. Mais ça changeait tout du côté de Lola. Elle avait su faire un truc que Magda avait pas su faire. Pire, elle avait su faire deux trucs aussi. Gagner sa force. Et gagner son indépendance. Magda aussi, maintenant, elle était forte. Elle avait ces visions des gens, ce sentiment de savoir où frapper, où attaquer. Elle pourrait se défendre. Mais l’indépendance…

Son père déboule alors, elle pensait qu’il dormait mais en fait il était revenu. Elle aurait dû rester dans le couloir, l’arrêter quand elle l’aurait vu venir, mais elle peut que lâcher un glapissement, un son qui n’existe pas réellement mais si on tend l’oreille, si on écoute bien, on entend un petit “Lola” à l’intérieur. Elle sait pas pourquoi elle a peur, son père il frappe pas il fait juste peur. Peut-être que c’est pour son père qu’elle a peur en fait, elle sait pas. Mais elle est soulagée quand Lola le repousse juste, qu’il la lâche en reculant. “Sors d’ici. Je t’ai appelée parce que je pensais que ta mère irait mieux, pas pour que tu empires tout. Encore.” Le dernier mot est froid, il est là pour faire mal. Et la phrase fausse. Il savait depuis le début que ça allait jamais faire de bien à sa femme. Il voulait juste pas que toi qui le pensais, tu ailles te foutre dans les quartiers mal famés. Tu secoues la tête, t’attrapes le bras de ta soeur. “Tu sais très bien pourquoi tu as appelé Lola, Papa.” Et puis tu pars et tu l’entraînes avec toi. Tu sais pas vraiment pourquoi, sûrement que tu as besoin de parler et que là tout de suite, y a qu’elle pour ça. Mais quelques secondes après vous êtes dans ta chambre. T’ouvre la fenêtre, la baie vitrée qu’il faudrait plutôt dire, et tu te retrouves sur la balcon.

T’as les larmes aux yeux. Tellement que tu vois à peine Lola, tu vois à peine ta chambre plein d’affiches de spectacles de danse et de films d’auteurs à la con que t’aimes que parce que ça donne l’air pédant. Mais t’as pas besoin de voir à travers tes larmes pour trouver le paquet de clope que tu gardes là. Fumer c’est mal pour un sportif, mais la plupart des danseurs le font. Parce que les profs, souvent c’est des cons. Et toi, t’as eu le roi. T’allumes ta clope un peu à l’aveugle, limite si tu te brûles pas les doigts. “T’en veux une ?” Si elle fume, elle a pas besoin de toi pour lui en donner. C’est le genre qui doit tout avoir sur elle parce que c’est facile et pratique comme ça. Pendant un moment, t’es juste là à fumer et pleurer, même pas un sanglot et même pas un reniflement. Juste tu pleures, comme si c’était ton état naturel d’être comme ça. Tu finis par essayer de te sécher les yeux, et puis tu vas chercher les yeux. Prunelles bleues, tel un reflet dans le miroir. “Comment tu fais ?” Tu précises pas quoi. Ca te semble évident. Ca l’est peut-être pas pour Lola, mais pour toi y a rien d’autre à comprendre.



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family portrait | Magda&Lola - Dim 24 Fév - 23:56


 


Momma please stop crying, I can't stand the sound

Tu le jauges, avec sa petite phrase millimétrée, l’intonation placée ou il faut. Ça glisse sur toi. T’as jamais demandé à venir, mais ta nouvelle provocation meurt dans ta gorge quand Magda pose la main sur ton bras. Elle remballe son père, tu sais pas vraiment à quoi elle fait référence, mais le vieux moufte pas. Tu la laisses t’entrainer, à la fois reconnaissante et frustrée de ne pas l’avoir tout mouché. Le plus important c’est que tu sors. T’imaginais qu’elle allait te raccompagner dehors mais elle bifurque vers sa chambre. Tu crois pas y avoir jamais mis les pieds, c’est une chambre très propre, soigneusement décorée, beaucoup de danse, des affiches de cinéma, t’as jamais eu de chambre comme ça toi, même enfant. Tu regardes avec un peu de curiosité ce que c’est que d’avoir son espace, mais tu t’y arrêtes pas vraiment, Magda, elle ouvre sa baie vitrée et tu retrouves avec bonheur les hauteurs et l’air frais. Tu sens la tension diminuer dans tes épaules. Elle te propose une clope et tu la prends, farfouillant à la recherche de ton briquet.

Tu tires une taffe et tu t’étonnes un peu qu’elle fume, elle, avec son aura de perfection. Elle en a peut-être eu assez de ça. T’as remarqué qu’elle pleurait et tu dis rien. C’est pas de l’indifférence, ça fait du bien de pleurer, ça sert rien de dire qu’il faut pas le faire. Tu t’accoudes sur la rambarde, la vue est jolie, tu souffles la fumée et tourne légèrement la tête quand tu sens le regard de Magda se poser sur toi. Vous avez les mêmes yeux. « Elle est vaste ta question. » T’as un demi sourire, pas vraiment moqueur, tu comprends ce qu’elle veut dire, tu comprends que c’est dur pour elle, pauvre petite fille riche et tu le penses sans cynisme. « J’ai arrêté de m’inquiéter pour les choses sur lesquelles j’ai aucune emprise. » La vérité c’est que quand t’as plus rien, t’as pas à t’inquiéter de perdre quelque chose. Quand t’as plus que toi, y’a quelque chose d’extrêmement satisfaisant à arriver à cette constatation, quelque chose de terrifiant aussi.

T’as jamais trop supporté le climat familial, t’as jamais accepté qu’on attende quoique ce soit de toi. Et même encore aujourd’hui, ta mère s’obstine à attendre quelque chose, un mieux, un mieux raccord avec son idée du mieux. Un mieux avec un salaire régulier, un toit, elle veut des lendemains qui chantent, toi tu veux qu’on te foute la paix. « Je suis la pire personne pour les conseils mais je t’en donne un quand même, t’en fais ce que tu veux. Arrête de t’inquiéter de ce que tes parents pensent, t’existes en dehors d’eux, en dehors de ce qu’ils veulent pour toi. Demande toi ce que tu veux toi et fais le. T’as les moyens et t’es plus forte que ce que tu le crois. On est tous beaucoup plus fort qu’on le pense. » Tu le sais, t’es certaine de ça.

Tu laisses tomber une cendre dans le vide. T’es vraiment pas la meilleure pour les conseils, t’en as jamais donner à personne il faut dire, et t’as rapidement appris à prodigieusement ignorer ceux qu’on te prodiguait. « C’était toi, n’est-ce pas ? » Tu réagis seulement à cet instant. « … c’était toi qui a voulu que je vienne. » C’est pas lui, t’en es certaine ça, y’avait qu’une profonde désapprobation dans son regard au moment où t’es rentrée. Tu l’as vu s’escrimer à faire le mieux pour obtenir l’approbation de papa, de maman qui de toute façon n’attendaient pas moins que le mieux. « Pourquoi ? » T’es pas agressive, t’es interloquée, t’as bien senti qu’elle voyait de la compétition, là ou il n’y avait que les névroses d’une mère. Alors tu comprends pas très bien pourquoi elle a cédé aux caprices. Il était pas assez grave son accident pour que le monde s’arrête de tourner pour Magda. Et puis elle avait pas l’air de savoir la raison de son empressement à te revoir. Alors tu comprends pas très bien ce que tu fais là, à part provoquer une autre crise diplomatique, à part confirmer au patriarche quelle plaie, quelle fléau, quelle bonne à rien tu es.


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family portrait | Magda&Lola - Lun 25 Fév - 10:54



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Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

Tu sais pas si tu t’attends vraiment à une réponse, en fait. T’as posé la question un peu comme ça, parce qu’il y a un truc qui s’est réveillé en toi et que t’as l’impression que peut-être que Lola elle saura aider. Lola, elle respire pas la sauvagerie et pourtant. Sa masse de cheveux roux, son style de vie, tout ça t’inspire des sentiments que toi tu ressens au fond. Elle vit à la dure, elle a bien dû avoir des moments où elle devait puiser dans l’instinct le plus animal qu’on ai, l’instinct du guerrier, l’instinct du survivant. T’as l’impression que t’es tout le temps dans cet instinct, qu’il peut arriver n’importe quoi et tu partiras au quart de tour. Les visions aident pas, ou plutôt si elles aident mais pas les bonnes choses. Rien que sur Lola. Si elle venait à s’en prendre à toi, tu sais où frapper pour te défendre. Tu vois les endroits où elle en mourrait, d’autres qui sont les endroits où faire mal est plus facile. T’as pas envie de l’attaquer, mais ton corps, tes yeux surtout, ils sont prêts à tout. T’as pas envie de voir ça alors t’attrapes tes lunettes de soleil dans un coin de ta chambre et tu te les fous sur le nez. Tu t’assois, le dos contre le balcon. Et tu réfléchis.

Tu réfléchis parce que ce qu’elle te dis, au fond de toi tu le sais déjà. T’y as déjà réfléchi parce que ce que tu veux, ce que tu veux vraiment c’est pas des choses très correctes. Tu veux la justice à tout prix. Tu veux prendre les armes pour faire tomber ceux qui corrompent, ceux qui attaquent, ceux qui prennent sans qu’on les y autorise. Tu veux voir leur sang couler et penser que c’est bien fait pour eux, que c’est tout ce qu’ils méritent. Et tu le fais tout ça. Tu le fais le soir, la nuit, avec tes copines qui veulent les mêmes choses que toi. Mais quelque part, ça suffit pas. T’as envie qu’il y ai plus que le soir, que vous alliez plus au fond des choses. T’as envie de faire que ça. Mais c’est pas possible ça, c’est pas quelque chose qu’il faut faire, qu’il faut penser.

Et puis elle comprend. Elle comprend que ton père, il s’en fout d’elle et que si ça tenait qu’à lui, elle serait restée dans son appart miteux avec ses copains clodos. Les mots du père, pas les tiens. Mais t’avais voulu qu’elle vienne quand même. Votre mère avait eu un accident, pas un accident grave mais un accident tout de même. Ca méritait que l’ainée vienne, c’était ce t’avais dit toi-même. T’inspires un grande bouffée, tu comprends la surprise de Lola parce que tu la partages un peu. Tu sais pas vraiment quoi lui dire alors tu lui dis rien. Tu réponds un peu à côté de la plaque. “T’as jamais eu cette impression… De…” Tu sais pas trop mettre les mots dessus, t’as jamais été douée pour partager tes sentiments. T’as jamais été trop habituée à le faire, faut dire. “D’être sur le point d’exploser. Est-ce que tu as déjà eu l’impression que t’étais qu’un grain de sable minuscule perdue dans la tempête ? Que quoi que tu fasses, tu es insignifiante, tu feras rien avancer et tu resteras toujours là, à faire du surplace ?” La clope est déjà fini, tu l’as aspirée comme jamais t’as aspiré une clope et elle est déjà au bout de sa vie. Tu l’écrases contre le sol du balcon. La femme de ménage sait que tu fumes de toute façon, pas besoin de s’inquiéter d’être discrète. C’est pas ton inquiétude de toute façon. “Est-ce que t’as déjà eu l’impression que t’étais pas maîtresse de ton propre corps, que tu pouvais que regarder ce que le monde veut bien en faire ?”

Les souvenirs douloureux remontent à la surface. T’as rien fait pour arrêter ce qu’il t’arrivait. T’en as pas parlé, t’as essayé sans succès de te débattre, mais au final t’as laissé faire. Comme tu laisses faire la vie. Comme si t’étais destinée à juste être la victime des hommes et du destin. Ton poing se serre, violemment, tes jointures en deviennent blanches. Tu décides d’être honnêtes finalement, de répondre quand même à la question. Elle mérite au moins ça. “Je voulais que tu viennes pour secouer les choses. Je voulais que tu viennes parce que je savais que ça allait mal se passer. Je voulais que tu sois la fille qui se casse encore alors que moi je suis là, moi je suis fidèle au poste. Qu’elle me voit enfin pour… Magda. Pas pour Lola 2 la revanche.” Tu secoues un peu la tête avant de la lever vers elle. Vos yeux peuvent pas se rencontrer avec les lunettes, une barrière érigée un peu plus entre vous deux. “Voilà. C’était pas pour toi et c’était pas pour elle. T’as le droit de me détester pour ça.” Parce que toi, tu te détestes pas pour ça, mais clairement tu t’en veux de penser comme ça. T’as changé, depuis la mort de ton prof, depuis la mort symbolique de ton passé de victime. T’as décidé d’enterrer la petite connasse égoïste. Mais elle est encore là. Tapie. Prête à ressurgir à la moindre faille. Et des failles, t’en as tellement.



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family portrait | Magda&Lola - Jeu 28 Fév - 8:49


 


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Elle a besoin de parler, peut être pas à forcément à toi mais elle a besoin de parler. Elle cherche à mettre des mots, tu la connais pas assez bien pour l’aider, mais y’a une ombre dans derrière ses phrases y’a les ombres de tout ce qu’elle dit pas, elles planent inquiétantes et hostiles. Cette part là et nouvelle chez elle. Peut être pas si nouvelle, tu ne l’as pas vu depuis longtemps, mais c’est pas quelque chose que tu percevais avant. Y’a un tas de chose que tu percevais pas avant qui proviennent d’elle. Elle est adulte désormais, plus vraiment une gamine même si tu continues à l’appeler comme ça en toi même. C’est pas que ça.

Et puis elle avoue que c’est elle, que c’était un acte égoïste mais tu la penses trop dure avec elle-même. Votre mère n’est pas facile. Tu t’en veux un peu à ce moment, c’est parce que tu la repousses qu’elle se comporte comme ça avec Magda. C’est ton comportement qui affecte, en partie, leurs rapports. Pas complètement, parce que tu sais que ta mère est bornée, bloquée, incapable d’admettre qu’elle a failli, incapable d’entendre que tu as grandi sans elle. Du mieux que tu le pouvais, aussi bien que possible étant donné les circonstances. Elle aurait souhaité que tu sois là à son retour, bien enfoncée dans une routine glauque avec ton père de laquelle elle aurait pu te sauver. Mais t’étais pas là et il n’y avait de signe de toi nulle part. Chaque instant de bonheur entaché par l’incertitude induite par ton absence. Tu t’es sauvée toute seule. Et elle semble vouloir te ramener constamment au passé, reprendre votre relation là où elle s’est interrompue et toi, toi tu veux juste avancer, oublier. « Pourquoi je te détesterai ? Maman a tord de s’obstiner avec moi, elle le réalisera un jour. » C’est un acharnement avec lequel tu n’as aucune patience. « Et puis j’ai pas de temps à perdre avec la haine. » Ça prend trop d’énergie de détester.

Y’a ton reflet dans les vitres de ses lunettes de soleil à la mode. T’as pas besoin de voir ses yeux pour ressentir son trouble. « J’ai vécu dans la rue, j’y vis encore parfois, c’est une lutte permanente. J’ai appris à me battre contre le monde sur la base de soupçon seulement. » T’as été trop jeune face à des gens trop âgés trop battu par la vie, t’as fait ce qu’il fallait pour t’en sortir en te protégeant comme tu le pouvais. T’as appris aussi à te laisser porter, la drogue aide, à confondre la misère et la liberté, à survivre. Mais c’est probablement pas un conseil à donner. « Et qu’est ce que le monde en a fait de ton corps ? » D’une pichenette, tu balances ton mégot par dessus le balcon, la question est peut être brutale, mais sa formulation, la peine et la douleur qui en irradie la réclame. T’es pas de celles qui vont ignorer parce que c’est plus facile. Tu comprends à peine pourquoi elle t’en parle à toi. Probablement, parce que même si vous partagez un matrimoine génétique, vous n’avez rien en commun.

Ni dans les traits, ni dans le caractère. T’as jamais été impressionnée par ses airs de princesse, par le luxe parfois ostentatoire duquel elle se paraît. Ça a jamais été une compétition pour toi, quand bien même tu savais qu’elle en avait construite une, mais autant se battre contre le vent. Y’a rien qu’elle puisse faire contre les obsessions maternelles. Peut-être qu’elle aussi un jour, elle abandonnera peut-être alors seulement sa mère réalisera le gâchis invraisemblable qu’elle a provoqué. Il est plus probable qu’elle continue de se murer dans ses regrets, à regarder un passé alternatif qui n’aura jamais lieu. Peut-être qu’un jour tu céderas et que tu auras la force d’accepter, de supporter l’affection débordante et les souvenirs tronqués d’un passé à deux : ta mère et toi. En attendant cela t’épuise, car ce duo mère-fille est entachée par la violence et les abus, te protéger et ne pas oser fuir, altruisme aliénée d’une femme maltraitée et cadenassée par la violence morale et physique d’un être stupide. Tu sais pas, si son mari prend la pleine mesure de tout ça et c’est pas à toi de l’expliquer à Magda. Pourquoi t’en veux pas non plus à ta mère et pourquoi elle devrait pas lui en vouloir. Parce que la vérité c’est que vous avez toutes les deux droit de colère contre cette femme et que vous ne le prenez pas.

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family portrait | Magda&Lola - Sam 9 Mar - 8:53



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Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

T’as une soeur géniale. Y a une part de toi qui le pense, enfouie tout au fond de ton être. Elle cherche pas à trop savoir, c’est pas une fouine. Mais elle en a pas non plus rien à foutre. Elle sait qu’au fond ça t’importe de parler, même si elle doit se demander pourquoi tu lui dis tout ça à elle. Tu l’as jamais dis à tes parents. Pour certains trucs, tu les as jamais dis aux ballerinas non plus. T’es restée enfermée sur toi-même, incapable de faire sortir les mots pour tes proches. Mais t’as pas non plus été capable de dire quoi que ce soit au psy. T’en vois un, évidemment, tes parents sont assez riches pour pas y réfléchir à deux fois. Un petit coup de blues ? Ca part chez le psy. Magda on la veut heureuse et on a les moyens de régler ses soucis psychologiques. Pensent-ils. Mais t’as jamais rien dit de tout tes calvaires, tu parles toujours de petits trucs à la con. Tu le connais pas ce mec. Lola… C’est différent. C’est la proche que tu connais le moins. C’est l’inconnue que tu connais le mieux. Elle se trouve juste au bond endroit sur le spectre de l’indifférence pour que tu arrives à t’ouvrir.

Mais elle t’apaise pas, pas vraiment. Elle refuse de te détester, mais t’as envie qu’elle te déteste. Peut-être parce que t’en as marre de te détester toi-même, et celles qui pouvaient pas te voir sont aujourd’hui tes soeurs. Y a peut-être une logique à ce que t’espères que ta soeur puisse pas te voir. “Tu le penses vraiment ? Qu’elle devrait te laisser tomber ? Si t’avais des enfants, tu accepterais de les laisser tomber ?” Mais tu sais que c’est pas ce genre de question qui va amener une vraie réponse. Lola c’est clairement le genre à ne pas avoir d’enfant, à ne pas en vouloir non plus, à s’en foutre un peu de rentrer dans cette norme. Tu te poses même pas la question de savoir si elle en a. Pour toi c’est évident que c’est pas le cas. “Ou même pas les enfants, juste… Il doit y avoir une personne au moins, que tu verrais comme ta famille. Qui compte plus que tout, plus que toi-même. Même sans être liées par le sang, juste un pacte silencieux qui vous lie à jamais, vous enchaîne l’un à l’autre…” T’as les ballerines. Lola, elle doit avoir quelqu’un. T’en es presque certaine, et t’es presque sûre de l’avoir rencontré un jour, mais tu dis rien parce que tu connais pas sa vie. T’as vu quand même les gens avec qui elle trainait, et t’as vu une personne. Qui revenait pas plus, mais qui dégageait un truc différent quand Lola était là. “Est-ce que cette personne-là, tu la laisserais derrière, sans continuer encore et encore à te battre ?”

T’as ignoré la question sur ton corps, t’as préféré parler de Lola d’un coup. Faiblesse. Fuite. T’as jamais su continuer ce genre de discussion. Avec les ballerines pourtant, ça sort tout seul. Vous en parlez pas souvent, mais vous savez en parler. Parce que vous savez que vous êtes toutes les mêmes, une collection de poupées brisées qui se recollent les morceaux entre elles. T’as envie de le dire, t’as envie de tout raconter. Mais ça veut pas sortir. Alors pour une fois tu forces, un peu. Tu dis pas les mots. Ceux qui importent. Tu les as jamais dis, t’es jamais sortie vraiment de ta phase de déni. “Le monde… il a tout fait. Tout ce qu’on peut imaginer. Certaines choses qu’on peut pas, aussi.” C’est une façon comme une autre de le dire. Mais t’as une conviction aussi. Une envie, qui grandit chaque jour, de faire le bien, de faire la justice. D’empêcher que ça se reproduise. “Mais c’est fini. J’ai appris à m’en défendre un peu. D’une certaine façon.” Tu la regardes par dessus tes lunettes, tout de suite ses poings faibles se montrent comme s’ils étaient des faisseaux de lumière. “Mais je veux plus que me protéger toi. Je veux faire comme tu fais, différemment. Protéger les gens du putain de monde.”



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family portrait | Magda&Lola - Dim 10 Mar - 9:07


 


Momma please stop crying, I can't stand the sound

Elle cherche des réponses, mais elle t’écoute pas vraiment, parce qu’elle peut pas entendre encore. Elle veut juste que tu lui en veuilles. Quand elle reprend la parole, un peu incrédule, sa question sonne faux, tu hausses à peine un sourcil. Les enfants t’y as jamais pensé, c’est pas une chose que tu désires. Pas une préoccupation, pas une volonté. Pas non plus une décision mûrement réfléchit, il est pas politique ton choix. T’en veux juste pas. T’embarrasser de ça, embarrasser le monde d’un autre être. Elle se rend bien compte que son exemple n’a pas d’échos, alors elle en cherche un autre. Et il fait mouche l’autre. Parce qu’il est vague, parce que sans doute, pendant le court temps ou tu as vécu ici, elle l’a aperçu, cet autre. Parce que ce pacte silencieux dont elle parle il fait échos. Y’a immédiatement un prénom qui flotte dans ton esprit. Et puis t’y as pensé, qu’est ce que t’aurais fait s’il était parti quand t’étais en prison ? Qu’est ce que t’aurais fait ? Seule. Elle a du se sentir comme ça ta mère : seule. Est ce que comme ta mère t’aurais cherché ? Tu te serais accrochée. T’aurais eu mal. Tellement mal. Ça t’a rongé dans ta cage, la solitude, imaginer qu’il puisse disparaître, imaginer recommencer seule.

Mais il était là. Il est là, toujours, avec ce surnom stupide qui te fait sourire, même quand il le prononce avec toute la gravité de l’univers. La vérité, c’est que t’aurais eu trop d’orgueil pour t’accrocher, t’aurais souffert dans ton coin, t’aurais pallié avec les paradis artificiels et les présences. Non, la vérité, c’est que tu conçois pas qu’il parte, qu’il disparaisse, tu le conçois pas, parce que ce vous avez est trop spécial, est trop unique. T’en aurais crevé qu’il soit aussi froid que tu l’es avec ta mère. Mais c’est pas pareil, c’est pas pour te rassurer, c’est juste pas pareil. Tu secoues la tête et tes boucles s’agitent. « Ca n’a rien à voir. Maman, elle culpabilise, elle veut se racheter mais elle pourra jamais. Faut qu’elle l’accepte, qu’elle fasse la paix avec ça, elle veut que ça soit moi qui l’aide à faire la paix mais j’ai pas ce pouvoir, je serai toujours la somme de ces décisions passées » C’est trop pour toi son martyr. Tu seras jamais martyr, parce qu’aucun de vous deux n’a de responsabilité sur l’autre. « Si ta relation avec une personne devient une lutte, c’est qu’il y a un problème. J’ai quelqu’un d’important. Tu le sais.  On se réfugie, on se tient chaud, on s’rappelle qu’on est vivant, qu’ça vaut le coup parfois, d’être là, on combat simplement pour que le reste du monde nous foute la paix. On prend l’air quand on en a besoin, mais on s’retrouve toujours, on s’raccroche.  » T’es pas sure que ça soit bien clair, t’es pas sure que votre lien il soit bien clair pour quiconque, on dit beaucoup de chose sur vous, y’en a peu qui soient vraies.

C’est quelque chose de beau, parce que c’est aussi simple que d’être là entrelacé à regarder les couleurs jaillir et vous envelopper, un rire, vous vous accrochez, regard un peu fou, voir le monde autrement, repousser les démons. Le monde, il a agressé Magda, t’entrevois le pire, y’en a plein des choses que le monde a pas le droit de faire. Mais elle se dresse, elle rayonne un peu quand elle serre les poings qu’elle dit qu’elle peut se défendre maintenant. « Ça semble être une très lourde responsabilité » Elle te touche cette gamine, plus qu’elle doit le penser, plus que tu le laisses paraître derrière ta carapace de nonchalance affectée. Tu poses, sans vraiment y réfléchir ta main sur un poing serré. Y’a un truc fort qu’il y avait pas avant, tu sens s’agiter en toi l’oiseau, mais tu choisis de l’ignorer, tu veux pas savoir. « Le monde est pas toujours un ennemi, même si ça semble difficile à croire » Y’a un truc brisé chez elle, une colère plus douloureuse, tu veux pas poser plus de question, tu t’en sens pas le droit. Encore moins lui dire de s’ouvrir au monde, t’es mal placé pour dire ça, toi même tu le repousses, toujours, à quelques rares exceptions. T’es même pas sure d’avoir le droit de mettre un pluriel là. « T’as quelqu’un, toi, qui t’aides à combattre ? » Tu veux être sure, qu’elle est pas toute seule dans sa lutte, elle peut t’envoyer chier mais, t’aimerais bien savoir. T’es plus sœur que tu l’avouerais. Tu te sens pas indifférente, tu prétends même pas le paraître. « T’as quelqu’un qui te protège ? » Y’a rien de pire que la solitude, rien de pire que ça. Tu comprends pas comment ils voient pas, ses parents, qu’elle a mal, tu peux presque le sentir dans son poing serré et dans les félures de sa voix quand elle parle de ce monde.
© Frimelda, sur une proposition de © Blork
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family portrait | Magda&Lola - Lun 18 Mar - 18:49



Family Portrait

Like a storm during summer days
We meet always against the odds

 
Lola Kułokowska  ϟ  Magda L. Hussein

C’est la première fois que quelque chose que Lola te dit résonne autant en toi. Vous êtes si différents et pourtant, en ce instant, vous êtes les mêmes. Deux gamines perdues, abandonnée par la vie et la famille, et vous avez quelqu’un pour vous aider à relever la tête. Un quelqu’un singulier pour elle. Un quelqu’un pluriel pour toi. La gosse des rues sans attaches et la gosse de riche qui veut tous les regards. Unies dans un vécu différent mais qui résonne l’un contre l’autre dans une harmonie inattendue. Tu te demandes un instant si t’as autre chose qui vous lie peut-être. T’as jamais cherché à savoir. T’as toujours assumé que oui. Puis t’avais rencontré Lola et là t’avais toujours assumé que non. Jugement rapide, sans chercher. T’étais une peste qui voulait rien comprendre à l’époque. Tu l’étais encore un peu aujourd’hui. Moins, du moins t’espérais. Tu voulais pas te racheter, mais tu voulais changer.

T’as un petit sourire malgré toi, quand elle finit son discours sur ce lien si unique, si particulier. Tu t’es reconnue, oui. T’as reconnu d’autres qui sont comme toi. Tu peux pas empêcher ce sourire de naître sur tes lèvres, même si elle parle clairement de couper les espoirs de votre mère, quelque part de la rendre malheureuse et faire le choix de la rendre malheureuse parce que c’est peut-être mieux aussi. Mais c’est pas la partie sur elle qui t’intéresse. Pour une fois dans ta vie, ta mère tu t’en fous. Et elle te pose la question en retour. Tu sais qu’elle a quelqu’un, tu l’as deviné ou tu t’es souvenu, tu sais pas trop. Mais elle, elle en sait rien. Elle veut savoir, ou alors elle te fait la conversation parce qu’elle est polie. Dans tout les cas tu t’en fous. Toi, tu veux en parler. T’en as parlé à personne alors que tu voudrais le hurler sur tous les toits, cette merveille que la vie t’a offerte. “Oui. J’ai quelqu’un. Plusieurs quelqu’un.” Vous êtes sept en te comptant, et tu les aimes toutes autant les unes que les autres. Y a peut-être une ou deux préférences, mais tout ce que vous avez reste fort. “C’est comme si plus rien d’autre ne comptait. Il y a nous, et ouais y a les autres, mais c’est comme s’ils n’étaient pas là. Et on est fortes. Comme si on était imbattable, immortelles. Comme si d’un coup on pouvait écraser le monde sous nos talons.” Lola avait parlé d’amour, Magda parle de bataille. La fraternité, c’est pas la même chose pour l’une et l’autre. Mais y a quand même ce sentiment de sécurité, le sentiment qu’il y a quelqu’un qui compte vraiment.

Magda se lève. Elle en peut plus de rester assise, alors elle se lève et elle s’étire. Quand elle fait ça, elle reste sur ses pointes. Réflexe de danseuse. Elle pue la danse dans tout son être, dans sa démarche comme son attitude parfois. “Le monde est pas toujours un ennemi, t’as raison. Mais il l’est souvent. Trop souvent. Et faut changer ça.” Refaire le monde c’est pas ton boulot, mais c’est la voix que t’as choisi de suivre malgré tout. Marre de voir la façon dont il tourne, t’as envie d’inverser sa course. Régler les soucis d’un claquement de doigt, ou d’un poing dans la gueule. “J’ai pas besoin qu’on me protège.” C’est faux. T’es fragile au fond. Tellement fragile que tu sais plus voir correctement, que tu sais plus regarder le reste des danseuses sans perdre l’équilibre. La plupart du temps maintenant, tu danses les yeux fermés et les larmes sur les joues. Tu sais pas ce qu’il t’arrive. T’as une force nouvelle, mais elle est venue avec une faiblesse sans nom. “Mais ouais. Elles me protégent. Et je les protège. Plus personne ne nous fera jamais rien.” Y a comme un danger dans ta voix. Presque une menace. Lola fera rien, tu le sais, mais elle fait pas partie du groupe et tout ce qui fait pas partie du groupe peut s'en prendre au groupe.



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