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tonight I will finish telling my story. (fumi)

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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Lun 15 Avr - 1:22

A l’époque grand-mère lui disait très sérieusement qu’en se concentrant sur la lune, elle pouvait distinguer le visage d’un esprit. C’est son gri-gri que Bran garde à la taille mais elle ne fait ça que par affection, en soi, le fil est une brindille, elle pourrait se briser et rien ne changerait. Bran ne croupirait pas en cadavre dans les eaux sales de la ville par malchance. Et puis qu’en savait-elle des histoires farfelues de l’aînée des trois soeurs Yamamoto? Non mais, qui avait décidé de donner un nez, des yeux et une bouche à des démons? A part hanter les dessous de lit des gosses, ils étaient bons à quoi? Bref, avec ou sans bibelot, Bran ne voyait aucune différence au satellite qui nous surplombait tous et sans doute nous entraînerait dans son éventuelle chute.

Casque sur les oreilles, Bran déroule une flopée de messages, décrypte une conversation lointaine qui ne lui fait plus ni chaud ni froid. Ils n’auront rien inventé de mieux pour mettre le monde en veille, deux minutes déjà qu’elle fixe l’écran, espérant qu’un ange passe ou qu’un miracle se produise mais l’immobilié du vingt-et-unième siècle ne va qu’en renforçant ses angoisses. Elle s’étire. Par moments le sol a l’air de rebondir sous quelques bruits sourds: C’est le restaurant. Bran vit au dessus, et comme beaucoup d’habitudes, elle s’y est faite, ce serait même motif de névrose aujourd’hui que de lui retirer le cliquetis des assiettes, les accents échauffés des clients fidèles. La fin de soirée explique qu’elle ait cherché le silence, mais parfois l’écran n’est pas satisfaisant et elle se tourne vers le grand rectangle qui lui sert de fenêtre.

Une contraction des épaules et le coeur semble lui sauter dans la poitrine quand elle distingue l’ombre d’un chat sur le balcon. « Ah t’es là, toi? »
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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Mar 23 Avr - 18:10



tonight i will finish telling my story
@Bran Yamamoto


En contrebas, la rue se meut comme une rivière. Dans son sillage des courants contraires, chacun suivant un fil invisible ; un tumulte humain dont les pépiements et les cris sont entrecoupés de claquements soudains, de chocs sonores, d'une cacophonie de ville qui lui rappelle, non sans une pointe de nostalgie, le siècle précédent. Pour qui a connu Edo et Meiji, New Kabukicho est une vitrine de souvenirs ambulants –les mêmes flux, le même fourmillement qui d'en-haut efface les visages et les signes visibles de l'époque, les tatouages léchant les cols, les fumées, les lumières, les odeurs. L'ancien Japon sur lequel on aurait versé une culture démultipliée par le temps et les échanges, l'overdose, les excès typiques de cette terre d'accueil piétinée si vite.

Au final, les choses changent peu, vouées à se répéter d'elles-mêmes ; et toute la modernité du vingt-et-unième siècle ne saurait effacer le cycle éternel qui les renvoie, encore et toujours, après un large tour au même point de départ. Devant ce constat intemporel, Fumi laisse échapper un soupir. La nature humaine se répète, et l'ignore bêtement ; elle comme ceux de son espèce, prise dans les mailles d'un filet cristallisé par le temps. Fumi rêve parfois du jour où ses os s'effriteront enfin ; où sa chair se détachera mollement de son squelette, où son corps s'enfoncera dans la terre humide, et s'y dissoudra finalement en poussière -puis plus rien, la fin, le vide, l'absolution dans un silence parfait, total.
Le retour au rien.
Le début du vide.

Un chat feule et bondit de ses briques pour en rejoindre d'autres, hors du chemin de Fumi. Cette dernière porte sur lui ses pupilles noires ; la bête semble avoir un frisson, crache, déguerpit dans le paysage se découpant sur différents tons de gris. Les animaux sentent toujours -et celui-là a dû se prendre un choc, en voyant soupirer ce qui n'est en apparence qu'une petite chatte blanche. Durant plus de deux siècles, sa solution à ces épineux problèmes existentiels est restée la même : se fondre sous la peau d'un autre, se glisser hors de son corps, à défaut de pouvoir glisser hors de soi, définitivement. Son heure viendra bien, un jour ou l'autre.

Fumi atterrit sans un bruit sur un balcon. De cette maison émane une odeur inidentifiable -probablement car cette odeur est en réalité multiple, un mélange entre les effluves du restaurant japonais, des gyoza à la vapeur, des bouillons de soupe, de la sueur âcre de ses occupants, et le vieux bois sous le contreplaqué du vieil appartement, gorgé d'encens, de poussière, de prières. Ce soir, la maison l'appelle ; ah, t'es là toi ? Fumi lève le museau, observe de ses yeux trop sombres la jeune fille ; son visage est éclairé par l'écran de son portable, pâle, les ombres au mauvais endroit pour faire une bonne impression. On dirait la Mona Lisa à l'envers -sourire inclus, même si Fumi ne détecte chez elle pas l'animosité occasionnelle que sa présence féline engendre. Rarement, car les temps changent ; rarement, car Fumi d'ordinaire préfère aux chats les chiens.

Fumi pour lui répondre pousse un miaulement discret. Sa queue battant souplement l'air, elle s'avance jusqu'à la fenêtre, où elle colle son museau, renifle, sans lâcher du regard la locataire. Avec un peu de chance, ce soir sa curiosité sera satisfaite.


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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Ven 26 Avr - 15:10

D’abord les doigts sur la frange, tentant de la remettre parfaitement en place dans l’objectif de l’appareil photo qui sert de miroir provisoire, Bran se tient près de la fenêtre ouverte. Elle n’est pas craintive quand les êtres vivants ne peuvent pas l’interroger sur ses moindres faits et gestes, tranquille malgré la visite clandestine, elle parle à l’animal sans le regarder, en train d’esquiver les notifications qui remontent sur son engin terrible.

- Non, non je vous connais vous les chats, vous trouvez un joli coin et on vous mange dans la main. Les yeux noirs de Bran roulent pour trouver la bestiole. Pas l’inverse.

Les humains ne sont pas raisonnables, d’ailleurs elle ne devrait pas encourager les appels de la bête mais elle trouve son pelage brillant, ses yeux immenses, dans l’ensemble, leur façon de se tenir est bien plus digne d’intérêt que ne le seront jamais les messages de propulsant sur son téléphone dernière génération.

Elle retourne à son cliquetis, tentant de faire la conversation à ce garçon qui n’a décidément rien à lui dire sinon sa profonde envie de se soulager. Elle ne peut pas lui en vouloir, elle est autant bloquée ici, dans ce cube où remontent quelques saveurs dont elle ne se lassera sans doute pas avec le temps. Ce restaurant est une consolation et le mouvement de la ville aussi, autant que l’invité du soir.

Bran se met à enregistrer un message en appuyant sur le bouton de son application: Non pas ce soir, j’ai la flemme de sortir. Mais quand tu veux. Juste pas ce soir.
La métisse s’enfonça dans la pénombre pour s’étaler sur le futon installé au centre, d’ici elle pouvait distinguer le corps du chat encore perché, les quelques lumières du dehors qui ne laissent personne véritablement dormir. Bran a une main sous la joue, elle fixe un point au hasard. Elle se dit qu’elle peut lui répondre d’un miaulement étouffé, pâle imitation qu’elle enfonce dans un oreiller où elle met la tête.

- T’as rien de mieux à faire, le chat? Je suis sûre que si.
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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Sam 27 Avr - 21:23



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@Bran Yamamoto


La voix s'élève alors que ses yeux restent rivés sur l'écran, marionnette dont les lèvres bougent sans que le reste du corps ne s'anime. Fumi décrit une courbe faussement hésitante, le museau suivant le cadre de la fenêtre ouverte alors qu'elle la longe de son pas discret -ses yeux sombres rivés sur l'inconnue qui parle, relève enfin son regard clair vers le sien. Si Fumi pouvait, elle aurait un rire amusé -la jeune fille l'amuse avec sa lucidité flegmatique, le visage pris dans un masque d'impassible qu'elle ne sait s'il est dû à son portable, à la fatigue de la nuit, à un caractère naturellement tranquille. On peut peut-être voir ses babines s'étirer légèrement, un sourire de chat qu'elle complète en redressant légèrement les oreilles. L'attention de la locataire retombe presque immédiatement. Fumi est quasiment certaine qu'il s'agit-là d'une humaine -ou d'une réincarnation particulièrement nonchalante, peu troublée à la vue d'une Japonaise parfaitement nue sur son balcon.

Profitant de ce corps souple, Fumi sans attendre la permission franchit le cadre et saute à l'intérieur. Les odeurs multiples de la maison l'assaillent, remontant par le sol, depuis les effluves du restaurant, jusque dans les murs qui l'entourent désormais -la poussière, le vécu, le refait, le contreplaqué ; la renarde les renifle, puis revient au futon disposé au centre de la pièce. Immobile, elle observe l'humaine -si elle avait été parée de Baba, elle aurait pu lui mettre une claque sur le mollet, écraser sa jeunesse apathique de ses vieux os énergiques. Puis Fumi sans plus de procès reprend sa marche silencieuse, évoluant d'un pas discret mais sûr de lui ; sa petite tête féline pointe vers la porte ouverte, donnant sur un couloir sombre où Fumi, de ses sens de chatte, distingue nettement le petit autel -l'encens, le cadre, la clochette.

Elle dépasse son hôte et s'aventure dans la maison qui lui est offerte.


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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Dim 28 Avr - 14:06

Là où s’accroche Bran, les bouts de ciel nocturnes eux s’attardent, elle y pose les yeux, vaguement attentive aux réponses de son interlocuteur à distance, les draps en protection provisoire, trop légers pour la garder en dehors. C’est fou ce qu’elle se sent mieux quand elle ne voit pas sa tête contrariée entre deux gorgées de saké, bien consciente qu’il sera bouillant aux joues et au nez la minute qui suivra si elle le laissait mettre les pieds chez les Yamamoto.
Il la mitraille de smileys et Bran roule avant de se redresser. Elle a décroché le téléphone entre temps.

- Le chat!
Quoi?

On peut entendre à l’autre bout du combiné la conquête qui chahute mais la demoiselle maussade balance son smartphone et se précipite sur ses pieds à deux doigts de la chute sur le parquet ciré. Après avoir passé la porte remontent des bribes de conversations entre les cuisines et le match à la télévision au rez de chaussée. Autant de parasites qui laissent se précipiter les membres de Bran dans les entrailles de la maison, un couinement imperceptible sous ses mèches ordonnées, deux billes pleines roulant à droite et à gauche pour trouver l’animal embarqué dans sa propre aventure.

Bran n’est pas naïve, ce n’est pas en se taisant qu’elle surprendra la bestiole déjà enfoncée dans les couloirs, mais elle suit vainement, elle n’a que ce fil à tirer ce soir, le reste est vite moins attrayant, le chat et son petit bond furtif l’attirent et quand elle trouve le poil tout blanc de l’intrus, la jeune Yamamoto se contracte de tous les côtés avant de lâcher un court soupir. Accroupie elle détache le bijou de jade accroché à son jean et le secoue devant le museau du matou.
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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Dim 28 Avr - 20:33



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@Bran Yamamoto


Un éclat de voix retentit, à leur étage ; l'humaine aux grands yeux a dû être relancée, d'une façon ou d'une autre, par son téléphone. C'est bien jeune, pour être si lasse de tout ; l'ancien sur la photo de l'autel, à plus des trois-quarts de l'existence, avait l'air plus vif que sa descendance. Certainement plus heureux, irait-elle jusqu'à se dire, si Fumi jugeait encore du bonheur des autres. Le temps lui a appris que rien, pas même le malheur, ne se détache réellement de son contraire -lui a appris également que l'intérêt pour l'autre se devait d'avoir ses limites. Ta curiosité te perdra ; dans les estampes qui se veulent authentiques, le pinceau grossier et propre aux imitateurs, Fumi entend sa voix, la prédiction qui à l'époque, lui avait tiré un sourire agacé. Elle était encore jeune, elle aussi.

La petite chatte a poussé sa curiosité jusqu'au bout ; elle découvre, à la suite de chambres étroites, une pièce qui lui semble plus encombrée que les autres. L'étage est semblable à celui qu'elle occupe, au-dessus de son studio ; un miroir de son capharnaüm, les dorures, l'éventail, l'humaine et sa famille en plus. Peut-être est-ce pour cela, que Fumi s'y sent à l'aise. Tranquille, elle se laisse aller contre l'encadrement de la porte, reniflant le bazar découvert ; puis tourne la tête quand les pas de l'humaine se rapprochent dangereusement.

Cette fois, Fumi est la cible fixe de son regard courroucé. Sans savoir si elle s'est décidée à sortir le parasite, ou si elle est simplement agacée de s'être levée de son futon, Fumi l'observe, immobile, la tête tournée vers son hôte comme attendant de voir ce qu'elle s'apprête à faire. Un autre sourire menace de se dessiner sur ses babines ; accroupie, elle agite un petit bijou. Du jade, du vrai ; Fumi après un bref examen en détache ses pupilles noires, les reporte, sans bouger le reste de sa fourrure, sur le visage exposé de l'inconnue.

Elle est jolie comme un coeur ; Fumi en passerait presque une patte maternelle sur sa joue ronde, gonflée d'un soupir latent -et aussi probablement des nouilles dont la renarde a vu les bols vides dans un recoin de sa chambre. Fumi, statique durant une longue seconde, les yeux rivés dans les siens, détourne finalement le regard ; elle frôle ses jambes et file, le coussinet assuré, jusqu'à la chambre que l'humaine vient de quitter.

La couverture du futon est traître sous ses pattes ; Fumi les lève haut pour ne pas s'y prendre, et, insensible au culot dont elle fait preuve, s'assoit tout contre l'oreiller, enroule sa queue autour d'elle, coule son regard noir sur la porte -attendant la propriétaire.


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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Mar 30 Avr - 15:18

Tout l’a assommée aujourd’hui, des vaines tentatives de sa tante de se lever de son lit aux discussions au dessus des préparations de nouilles à l’étage d’en-dessous. Ils étaient obligés de se parler très fort, la communication perdue, leur accent butait contre un mur, rebondissait sur les casseroles, Bran faisait écran avec son téléphone mais elle n’échappait pas aux brusques mouvements de leurs yeux nocturnes qui à force se remplissaient sans doute de la pollution d’Arcadia. S’ils s’effondraient entre deux livraisons, qu’un des scooters explosait au niveau du pot d’échappement en plein dans la nuit, ça ne la surprendrait pas. On entendrait le boum soudain et le sursaut réveillerait quelques uns des aînés, plus grincheux les uns que les autres, ils descendraient manger les raviolis tièdes de la soirée et retourneraient à leur compte à rebours. Car dieu seul savait comment leurs nerfs tenaient encore et ils l’avaient dédaigné.
Ce chat dont les pas s’enfonçaient sans accroc dans le brouahaha gardait l’oeil de Bran alerte, elle s’attendait à une tape sur l’épaule, à entendre geindre dans la distance mais les Yamamoto semblèrent enterrés dès lors qu’elle suivit l’animal, ils disparurent. En apparence.  

- Tu vas où?

Elle murmurait, comme une petite au milieu d’une risière muette, Bran allait oublier de se relever et se prendre les genoux en croix, tomber de tout son long sur le parquet qu’elle distinguait à peine, heureusement elle se redressait. Il faut croire que les bibelots de la vieille japonaise grincheuse préférée de Brenda luisaient un minimum dans la bourbe de la maison Yamamoto.

On la perd le temps qu’elle réponde à un message, les ‘tap tap tap’ de son clavier sont un catalyseur pour son cerveau, elle est moins concentrée sur ce qu’elle écrit que sur ce quelle pense, résultat Bran envoie un vide de sens:

Ça va pas le faire, tu m’as saoulée à plus. Le tutoiement particulièrement désinvolte, ses mèches trop longues fouettant l’épaule sur laquelle elle rabat les épaisses fourches d’eurasienne que lui a laissé son père en seul héritage la sortent du rectangle hypnotisant.
Elle trouve le chat, pas encore volatilisé, pas non plus sorti par la fenêtre ce qui l’interloque, Bran glisse sur le futon et reste à bonne distance, comme craignant de le voir bondir.

- Ah d’accord. T’écoutes vraiment rien.
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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Ven 10 Mai - 19:16



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@Bran Yamamoto


Les pas de l'humaine paraissent plus feutrés, plus mesurés qu'avant ; comme si elle se calait sur les siens, touches de couleur invisibles sur les lames de bois ancien. C'est rare, qu'on la suive sans poser de questions (de vraies questions, pas celles qu'elle souffle à mi-voix, en se parlant à elle, en parlant aux esprits qui les suivent de l'autre côté du miroir), sans tenter de lui administrer des caresses, en l'observant de grands yeux curieux -comme si l'enfant (c'en est une, en dépit de ses faux airs d'adulte) pouvait la voir, tout du moins sentir que ce chat là, avec ses manières, n'était pas banal.

Elles se regardent, assises sur le futon. Le parfum de la jeune fille, le vrai, sous les accents acides d'un gel douche industriel, d'une eau de toilette à la mode, du vernis qui lui colle aux doigts, est partout sur l'oreiller contre lequel Fumi a élégamment posé ses fesses. De sa vue féline, elle devine plus qu'elle ne distingue réellement la teinte rose de ses lèvres alors qu'elle lui parle -une remontrance sans en être vraiment une. Le fait est clair, entre elles, comme flottant dans l'air du soir ; elles se jaugent, s'observent, maintenant qu'elle lui a donné le droit de rester, ne serait-ce qu'encore un peu, en choisissant de ne pas la chasser depuis la fenêtre.

Fumi garde son silence, ne s'embarrasse pas des clignements d'yeux tranquilles des chats véritables. Fumi fixe l'humaine comme si elles étaient de la même espèce -deux humaines, deux renardes, deux adulescentes au quart de leur vie seulement. La détaille de sa taille réduite, où les pupilles rondes de l'Asiatique lui semblent immenses, sous les paupières lourdes, appuyées là par la fatigue, la lassitude, le dialogue stérile qui fait vibrer son portable depuis que Fumi est entrée là.

A nouveau, le téléphone se rappelle à elles, faisant trembler le futon sous les coussinets de Fumi. Cette dernière y jette un regard, comme pour l'inviter à y répondre. L'icône du message précède quelques lettres, un rond jaune, dont Fumi ne voit pas la logique de ses deux rétines félines.


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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Dim 12 Mai - 23:52

En fond, des chamailleries, dans un bruit sourd contre les murs faibles de la bâtisse. Les silhouettes cabossées de ses tantes, oncles et celles des habitués qui se désespèrent de leurs cheveux argent croisés ébène s’approcheront toujours plus de l’enfance que Bran, qui semble se figer face aux personnes de son âge. Elle tend le bras pour attraper le téléphone, plusieurs bulles sautant sur l’écran et autant de raisons de passer pour absente, Bran déverrouille le bidule pour le mettre hors-ligne.

Elle aussi parfois est hors-ligne, indisponible, incapable de trouver son souffle dans cet échange interminable; il en a des choses à dire mais elle non pas du tout, c’est fou cette propension qu’ont les gens à être un jour muets, l’autre bavards mais c’est tout ce qui les rend normaux. Bran s’écrase sur le matelas. Pour seule lumière, l’affichage de veille de l’ordinateur, de petites méduses bleu néon en train de se cogner aux quatre coins du moniteur.

Bran lève les mains vers le plafond et distingue la forme noircie de ses membres pendant qu’elle fait danser ses doigts dans le vide. La présence de l’animal ne la fait pas tiquer plus que ça, bien qu’elle soit tentée de venir à son contour dans la nuit et de tendre une main pour voler une caresse ou deux. Elles sont l’air de se lire, de peser le poids d’un regard. C’est passager et Bran abandonne la tentative, un chat ira où il veut, un chat est plus libre qu’elle ne le sera jamais.

Où iras-tu ensuite?

Bran cache ses mains sous ses joues et elle y coince quelques cheveux maladroitement. Sur le côté ses poumons sont comme écrasés, elle s’efforce de chercher de l’air.

- T’as remarqué, comme tout le monde pense pas à respirer, c’est dingue non? C’est comme si on vivait tout à coup en apnée?
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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Ven 24 Mai - 21:02



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@Bran Yamamoto


Fumi s'est étendue contre l'oreiller, ses quatre pattes étendues formant un arc-de-cercle, enrobant à distance l'inconnue qui parle, le ventre contre terre ; cette dernière parle, parle encore, sa voix basse emplissant l'air de la nuit. Une toux lointaine s'élève, une des oreilles de Fumi pivote dans sa direction, sans chercher à interrompre le récit de la rencontre. Comme elle a l'air de se sentir seule ; comme tous ces autres, à l'heure où la communication n'a jamais été aussi aisée, si facile -un paradoxe que Fumi, avec ses lettres manuscrites et sa vieille machine à écrire, ne comprend que trop bien. La jeune fille l'a dit elle-même : l'être humain n'a plus l'espace, qu'il s'agisse de respirer ou d'évoluer seul, loin des autres, l'impossibilité d'embarquer vers une île en solitaire. Il y aura toujours un pont, toujours une voix, toujours une lumière de l'autre côté du rivage ; Fumi observe celle qui luit dans les yeux noirs de la métisse, son souffle discret contre les draps froissés du futon. Elle croit voir une cerne plus marquée que l'autre, comme une trace de coup ancienne -mais dans l'obscurité et les murmures, rien n'est certain.

Les minutes s'étiolent, se fondent entre elles ; et la ligne du temps forme une boucle, dont Fumi s'extirpe sans savoir quelle distance elles ont parcouru, bercée par la voix de l'Asiatique, les odeurs mêlées de cette maison immigrée elle aussi. Les mots se sont tus ; les yeux clos, sa compagne du soir a la respiration régulière de ceux baignant dans le sommeil. La photographe s'étire, se redresse ; elle la considère un instant, prise entre deux feux contraires, et baisse finalement le museau, allant apposer sur la joue de la jeune fille la douceur de son coussinet. Une pression pour la sortir, quelques secondes à peine, de sa somnolence et la marquer de son empreinte ; sans attendre, elle regagne la fenêtre, où elle bondit souplement, son profil félin se découpant sur l'extérieur.

Elle attend de voir si la jeune fille se réveillera, avant de filer de nouveau sur les toits.


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tonight I will finish telling my story. (fumi) - Mer 29 Mai - 21:06

Voilà, ce n’est qu’un nid d’artifices mais c’est le sien. Les vieilles dorures sur les portes en témoignent, elle ne connait pas le nom des personnages sur les estampes, elle ne cherchera sûrement pas à savoir. Dehors les ampoules des lampadaires font des points de repère trompeurs aux insectes qui se stoppent en dessous et viennent se brûler pattes et ailes. Bran ignore le bruit du quartier à la longue, les sifflements des sirènes ne sont qu’une berceuse de plus dans Arcadia, les corps trapus se dessinent et sont à la fois les mêmes et de totals étrangers sous la lumière blafarde du restaurant de famille. Elle retrouvera d’ailleurs certains de ces visages en rêve sans pouvoir identifier pour autant les sentiments accrochés aux traits clients, des imposteurs. Elle aussi est une imposture.

Embarquée dans le sommeil, elle en oublie le chat. Il est si anodin dans le contour urbain. Si Bran cela dit n’aurait pas été assommée par ses routines, elle l’aurait encore observé, elle se serait risquée à imaginer l’adopter. Dans ces bouts de vivants qui n’ont pas grand chose à dire sinon deux grands yeux, une tête douce et des contemplations réciproques, elle trouvait un minimum de repos.

C’est sans doute pour cela que Bran est endormie dans la boîte à chaussures à laquelle ressemble sa maison. Elle ne sait combien de temps en encore ce sera son chez elle, en revanche, demain, elle ira sans doute, le blouson sur l’épaule s’échapper dans les sillons de la cité, là où plus personne ne passe sauf elle et on se demandera qui des deux est un chat.
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