Les affres de la médisance, échos d’un accent des terres froides qui parvient jusqu’à ses oreilles résolument trop ouvertes en ce milieu de nuit déjà bien entamé. Il a quitté les rideaux de velours du red lantern pour temporairement se perdre dans les méandres de la boisson alcoolisé, de cet ambré même auquel il ne peut décemment résister. La bière n’a pourtant rien à envier à la vodka glacée de cet Est éloigné. Bien plus américain qu’il n’est réellement russe, Maksim erre néanmoins sans une seule once de honte entre les tables malfamées. La fraîcheur des lieux ne le dérange guère et c’est au bar qu’il vient finalement trouver son compte, n’adressant que quelques rapides salutations courtoises à des membres connus de la sacro-sainte bratva. Le Russe est de rigueur le plus souvent ici, alors il ne compte pas faire déshonneur à la règle et use des brefs mots qu’il connait. Cette langue, il ne l’apprécie qu’à moitié car elle n’est là qu’un souvenir de ce qui n’est plus aujourd’hui. Sa mère, sans être cent pour cent originaire de Russie, savait le parler bien mieux qu’il ne le peut. Fesses négligemment posée sur le haut tabouret, les doigts entourent la bouteille de bière qui apparaît dans son champ de vision, billets d’ores et déjà tendu vers celui qui n’a eu de cesse de tuer des gens devant lui. « Sven. » qu’il lâche en guise de salutation dans son plus parfait et naturel accent américain. Un rictus vient étirer la commissure de ses lèvres tandis que ces dernières se posent au goulot pour boire une bonne gorgée salvatrice. De temps à autre, il n’y a rien de plus appréciable que cela… Enfin… Assez souvent plutôt, bien qu’il ne soit pas alcoolique. La main gauche gantée de cuir noir, il observe le barman d’un œil amusé. « J’espère que tu n’assassineras personne devant moi ce soir. ». A cette heure de la nuit, la majeure partie des clients sont membres eux-mêmes du gang, il n’y a donc aucun risque de heurter une quelconque âme sensible, et de toute manière, Maksim n’y accorde que peu d’importance. S’il est un protecteur, il est aussi un membre à part entière de la bratva qui a ses défauts. Il n’est pas un saint.
Les mots sont une boutade, légère pique qu’il envoie à son attention car chaque fois qu’ils se sont croisés, le blondinet était toujours là au mauvais moment. Toujours là pour voir le sang se répandre, et autant dire que la toute dernière fois que c’était arrivé, il n’a que nullement apprécié la chose. Tuer quelqu’un au sein du red lantern, qu’il y ait ou non l’accord de Brynhild, il ne l’appréciait pas. Non pas parce qu’il pensait au bien être des clients, non, mais bel et bien parce qu’il pensait à toutes ces charmeuses et tous ces charmeurs de corps avant tout le reste. Or… Avoir un accro de la gâchette et torpedo en prime dans les basques n’était pas forcément sans danger pour elles et pour eux. Ce qu’il a tendance à ne pas dévoiler, Maksim, c’est cette singulière crise de panique que le jeune homme a été capable de faire peu de temps après son crime, alors que le blond franchissait tout juste le seuil de la porte pour voir le corps s’effondrer contre la boiserie. Se remémorant l’évènement, un sourire plus grand apparaît à ses traits alors qu’il commande déjà sa deuxième bière. « Je pense que je vais prendre une pinte, s’il te plait. ». Sinon Sven risquait fort de péter un plomb face à la descente mémorable du Fraser. Lorsqu’il revient à nouveau avec son précieux liquide ambré, le billet vert tombe une seconde fois et les doigts viennent s’enrouler autour du poignet du barman. Lentement, il se penche en avant tout sourire, bien résolu à emmerder quelqu’un ce soir, puis murmure à son oreille. « Alors… On s’est remis de sa petite crise de peur de l’autre fois ? ». La langue passe sur sa lèvre inférieure et il recule, lâchant son poignet pour attraper le paquet de cigarette traînant dans la poche de son jean sombre. Le briquet claque bientôt et la nicotine emplit l’air autour de lui. Qu’on ait ou non le droit de fumer dans l’enceinte du Kremlin, Maks n’en a cure. Il tend à faire ce qu’il veut, quand il le veut et presque où il le veut. « T’veux une clope ? » qu’il demande ensuite innocemment, comme s’il n’avait rien dit d’agaçant ou même énervant.
La salle était propre, rangée et Sven avait laissé son colocataire s’occuper de ranger la partie bar. Les boissons étaient donc alignées en évidence pour les clients et les quelques cacahouètes et autres nourriture étaient sur le côté, prêt à être servit également. Après l’ouverture, chacun s’était affairé. Son colocataire dans la salle vu qu’il était barman. Sven lui était derrière le bar, servait et nettoyant si certains faisaient tomber du liquide sur le bois du comptoir. Torchon jeté sur son épaule, il remarqua quelques visages familiers tout au long de la soirée. Mais ce fut plus tard, qu’il remarqua une personne en particulier. Prenant une bouteille de la boisson préférée de son nouveau client, il vint déposer devant lui le récipient et attrapa le billet que ce dernier lui tendait.
Maksim.
Hochant la tête, il se tourna pour mettre le billet dans la caisse et ferma cette dernière à clé. Certains avaient déjà tentés de venir voler quand il avait le dos tourné. Ce qu’ils ne savaient pas, c’était que Sven avait des yeux dans le dos. Pas pour de vrai, mais il connaissait assez le bar pour savoir quand quelqu’un passait derrière le comptoir. Après tout il y bossait depuis un peu plus de six ans désormais. Entendant les propos du blond, le suédois haussa un sourcil en le fixant.
Ca te manquerait si je ne le faisais pas et pour une fois ça ne serait pas à toi de faire le ménage.
Il se souvenait encore de la tête et des exclamations de son interlocuteur quand ce dernier avait trouvé Sven face à un homme qui avait perdu une bonne partie de son sang. Oui, le barman avait eu son boulot à faire, mais non il n’irait pas nettoyer. Ramassant quelques bouteilles vides qu’il mit dans le carton qu’il aurait à vider à la fermeture, il hocha la tête aux paroles du plus jeune. Ce dernier avait une sacrée descente, mais ça n’était pas Sven qui allait s’en plaindre. Maksim payait ses consommations, donc pour le barman c’était parfait. Allant préparer la pinte de monsieur, le brun regarda la salle pour vérifier qu’il n’y avait pas de souci. Parfois, même ceux de la bratva pouvaient en venir aux mains après un verre de trop. Oui, ils faisaient partie d’un grand gang, mais ça ne voulait pas dire qu’ils étaient tous intelligents sobres, alors imaginez imbibés d’alcool. Faisant l’échange entre la boisson et l’argent, Sven retourna mettre le tout dans la caisse. Enfin c’était ce qu’il comptait faire, car le blond semblait vouloir lui parler. Attentif, le barbu fronça les sourcils à cette remarque et serra les dents. Si ça ne tenait qu’à lui, il aurait déjà plaqué Maksim au bar, la tête collée au bois pour lui faire comprendre que ce genre de remarque n’était pas les bienvenues. Le fixant s’allumer une cigarette, Sven alla ranger cette fois-ci le billet avant de revenir vers le blond pour lui prendre la cigarette des lèvres et la laisser s’éteindre et couler dans sa bière.
On ne fume pas ici.
C’était petit et clairement ça ne l’empêcherait pas de s’en allumer une seconde, mais sur le coup ça lui avait fait du bien. Bon peut-être que Igor n’apprécierait pas qu’il gaspille la bière ainsi, mais Sven avait agi sur un coup de tête.
Trois fois. Ils semblent avoir brisé le cycle. Trois fois que Maksim se retrouve à assister à un meurtre de la part du blond en face de lui, planté là juste derrière le bar. Non pas que le meurtre en soi le dérange, il ne sait que trop bien le travail qui appartient à cette section de membres du gang. Il a lui-même ses petits larcins et son background. Non, ce qui l’avait surtout agacé est… Comme Sven le souligne derechef, le vulgaire fait de devoir nettoyer ou que l’acte ne mette en danger les charmeuses de beauté. Il pourrait presque dire les siennes puisqu’elles sont sa responsabilité et qu’il ne saurait les laisser tomber. En réponse à ses mots toutefois, Fraser sourit, buvant sa première bière quasiment cul sec avant de finalement réclamer une pinte. Cela prendrait plus de temps pour la boire, sûrement plus que son geste de venir attraper une cigarette et l’allumer aussitôt entre ses lèvres. Innocemment, il va jusqu’à en proposer une à son vis-à-vis mais le barman ne parait pas ravi de l’idée suite à sa remarque taquine. Soit, haussant les épaules et ignorant qu’il a blessé l’égo du torpedo, il se contente de ranger son briquet pour mieux tirer sur le bâton et souffler la nicotine dans les airs distraitement. Du moins jusqu’à ce que la paluche ne vienne attraper sa précieuse d’entre ses lippes pour mieux la faire couler dans le fond de sa pinte ambrée. Immédiatement, Maks se fige, l’air interdit et qui se ferme de seconde en seconde, à mesure que la cigarette dorénavant éteinte vient souiller de ses cendres le fameux liquide alcoolisé. Quel gâchis. Pour les deux. Ce bougre d’enfoiré d’idiot. Lentement, les yeux vairons se relève pour venir toiser le visage de Sven. Il le fusille silencieusement du regard, d’un air si glacial que Rae, elle, saurait combien il ne faut pas le contrarier quand c’est comme ça. On ne fume pas ici. « Ah ouais ? » qu’il répond du tac-o-tac sans se soucier de la bienséance, colère grinçante dans ses entrailles avec la somptueuse envie de faire mal. Il ne déteste pas le barman du Kremlin, bien au contraire, et ce, même malgré leurs rencontres fortuites. Néanmoins, blondinet doit bien admettre que sur ce coup il a la patience qui sombre et se consume tel le calme avant la tempête. On ne touche pas aux bières, et encore moins à ses cigarettes.
L’impulsivité s’éveille comme un volcan en fusion. Ceux se trouvant à l’extérieur pourraient même annoncer que les nuages s’épaississent dans la nuit malgré l’absence de grondement. Un orage se prépare que diront certains passants innocents. Là, focalisé au-dessus du bar à cette heure tardive de la nuit. Mais la foudre ne viendra pas, pas pour l’instant, car Maksim se contient. Tu veux une bière sans cigarette à l’intérieur ? Les billes étranges lancent des éclairs invisibles, s’il avait pu tuer d’un simple regard, Sven serait probablement déjà mort en passe de l’être. Au lieu de ça, ce sont les doigts qui se mettent à crépiter et en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, le blond s’est déjà saisi des cheveux de son compatriote pour mieux venir écraser violemment sa tête sur son précieux comptoir, juste assez pour qu’il se cogne, prise aussitôt lâchée. Rien qu’un méchant coup à la tempe. Celle-ci est venue rencontrer la boiserie astiquée, mais s’il y a plaie ou non, ça, Maksim ne peut pas le dire et n’en a strictement rien à foutre. Frapper semble l’avoir soulagé un tantinet.
« Oui. S’il te plait. » qu’il prononce en poussant le vice plus loin, jusqu’à la marque de politesse quand la seule envie dont il dispose à cet instant est de se saisir d’une nouvelle cigarette, juste histoire de l’emmerder. « Tu as gâché de la bière. Et ma clope. On ne gaspille pas ce genre de choses, Sven. ». Pour peu l’on pourrait presque croire que le jeune homme est en deuil et en a mal aux tripes.
Les affres de la médisance, échos d’un accent des terres froides qui parvient jusqu’à ses oreilles résolument trop ouvertes en ce milieu de nuit déjà bien entamé. Il a quitté les rideaux de velours du red lantern pour temporairement se perdre dans les méandres de la boisson alcoolisé, de cet ambré même auquel il ne peut décemment résister. La bière n’a pourtant rien à envier à la vodka glacée de cet Est éloigné. Bien plus américain qu’il n’est réellement russe, Maksim erre néanmoins sans une seule once de honte entre les tables malfamées. La fraîcheur des lieux ne le dérange guère et c’est au bar qu’il vient finalement trouver son compte, n’adressant que quelques rapides salutations courtoises à des membres connus de la sacro-sainte bratva. Le Russe est de rigueur le plus souvent ici, alors il ne compte pas faire déshonneur à la règle et use des brefs mots qu’il connait. Cette langue, il ne l’apprécie qu’à moitié car elle n’est là qu’un souvenir de ce qui n’est plus aujourd’hui. Sa mère, sans être cent pour cent originaire de Russie, savait le parler bien mieux qu’il ne le peut. Fesses négligemment posée sur le haut tabouret, les doigts entourent la bouteille de bière qui apparaît dans son champ de vision, billets d’ores et déjà tendu vers celui qui n’a eu de cesse de tuer des gens devant lui. « Sven. » qu’il lâche en guise de salutation dans son plus parfait et naturel accent américain. Un rictus vient étirer la commissure de ses lèvres tandis que ces dernières se posent au goulot pour boire une bonne gorgée salvatrice. De temps à autre, il n’y a rien de plus appréciable que cela… Enfin… Assez souvent plutôt, bien qu’il ne soit pas alcoolique. La main gauche gantée de cuir noir, il observe le barman d’un œil amusé. « J’espère que tu n’assassineras personne devant moi ce soir. ». A cette heure de la nuit, la majeure partie des clients sont membres eux-mêmes du gang, il n’y a donc aucun risque de heurter une quelconque âme sensible, et de toute manière, Maksim n’y accorde que peu d’importance. S’il est un protecteur, il est aussi un membre à part entière de la bratva qui a ses défauts. Il n’est pas un saint.
