November 25th 2018 - Il avait presque toute la journée à comaté. Clairement, il n'avait pas été très en forme aujourd'hui. Il ne savait pas trop ce qu'il couvrait cette fois-ci. Il optait plutôt pour une grosse angine blanche… À moins que ça ne soit une genre de grippe ? Il détestait clairement son hybris. Son « père » lui avait expliqué un petit peu ce qui pouvait en retourner… Et plus il vieillissait et plus il avait du mal à s'en remettre. Imaginez, passer tous les jours du reste de votre vie malade. De manière permanente, constante et chronique. Mais surtout avec des maladies changeantes. À peine avait-il eu le temps de « s'habituer » à la dernière pathologie, que son organisme était mis à rude épreuve en contractant une nouvelle maladie. La dernière c'était une sinusite, la fois d'avant c'était une crise de goutte et encore avant c'était une colopathie fonctionnelle. C'était épuisant, c'était désespérant.
Mais il avait cette force Kas, cette force de caractère qui, jamais ne le mettait à terre. Et même si aujourd'hui il affichait presque 39,5° Celsius de température corporelle, il essayait malgré tout de garder le sourire. Alors, oui il avait décidé de se préserver toute la journée aujourd'hui. Il était resté bien au chaud dans son lit. Quelques tisanes avec du miel pour essayer d'évacuer les attaques virales et de nombreuses siestes. Cela requinquait n'importe quel homme. Mais il ne pouvait pas rester plus longtemps se prélasser dans sa douce et chaude couchette… Il avait beaucoup de choses à faire ce soir et surtout, il devait retrouver une amie de sa sœur non loin du centre d'Arcadia.
Un léger détour par les quartiers huppés pour récupérer un peu d'argent auprès d'un de ses clients. Ce fils de chien lui devait presque sept mille dollars depuis quelques temps. Kasper avait voulu être compréhensif au départ… Mais si on ne le paye pas au bout de quinze jours, chacun sait à quoi il se risque. Il n'est pas forcément du genre violent. Il est plutôt jovial d'ailleurs. Toujours un sourire, un regard taquin, une voix posée et suave qui donne confiance. Beaucoup se font d'ailleurs berner. Mais il ne faut pas rigoler avec lui. C'est un homme d'affaire. Et comme on le dit souvent, il n'y a pas d'amitiés en affaire. Et lui… Il était très loin d'être ne serait-ce qu'une connaissance.
Quelques os cassés plus tard, il s’était retrouvé dans l’abri bus non loin de l’opéra. Il venait de casser sa magnifique montre, mais l’heure sur laquelle, elle s’était arrêtée, indiquait qu’il était déjà en retard pour la suite de sa soirée et cela l’énervait légèrement. Les phalanges de sa main gauche étaient égratignées et ensanglantée. Son annulaire était sans doute même légèrement cassé. Mais il était habitué. Lorsqu’on était dans sa branche, il fallait ne pas avoir peur de se salir les mains, sinon on ne faisait pas affaire et on pouvait tout de suite changer d’orientation. Et puis de toute manière, sa vie avait commencé avec des os cassés, alors c’était comme une sorte de vieille amie qui revenait te dire bonjour de temps à autres.
Regardant le panneau d’affichage des horaires, il se rendait compte qu’il allait vraiment être en retard à la seconde étape de sa soirée et quelques jurons et phrases toutes faites en espagnoles lui échappait de la bouche. C’était devenu une habitude… Il ne pouvait pas s’en empêcher. Un peu comme de se faire craquer sa nuque ou le bas de son dos. C’était comme une sorte de TOC, de réflexe.
C'est à ce moment précis qu'une jeune demoiselle, qu'il n'avait pas remarqué avant lui parlait. Il ne comprenait pas ce qu'elle venait de dire, mais il supposait que c'était de l'espagnol. L'intonation de sa phrase, le roulement des ‘r'. Mais il remarquait quelque chose d'autres. Quelque chose d'extérieur à l'espagnol. Une sorte d'accent étranger.
« Vous n'êtes pas du coin, je me trompe ? » venait-il de déclarer dans un anglais parfait. Son plus beau sourire venait de réapparaître sur son visage.
« On entend un petit accent. » Il détournait volontairement la conversation. Comment voulez-vous garder la face, lorsque vous baragouinez trois mots d'espagnol, face une jolie demoiselle qui paraît mieux se débrouiller que vous, dans la langue de Pedro Almodóvar. C'était la honte intersidérale.
« Que faites-vous ici, par ce temps si rude ?»Fiche codée par NyxBanana