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Turning Tables

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Turning Tables - Ven 31 Aoû - 19:51

turning tables

Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

Pourquoi aller à cette réunion d'anciens élèves organisée par l'université ? Pourquoi Lyla voulait y aller déjà ? Ses années fac avaient été les meilleures de sa vie après tout, surtout les premières … Revoir ses anciens camarades, peut-être même d'anciens professeurs aussi, ce n'était normalement pas une mauvaise idée. William ne serait pas présent donc oui, toutes les conditions pour passer une bonne soirée étaient réunies.  Ce sera l'occasion de montrer qu'elle avait enfin réussi, qu'elle était divorcée certes mais pour le meilleur. Personne ne saurait la raison officielle de toutes façons. S'être relevée d'entre les morts était un miracle mais ces gens ne retiendraient que le négatif si elle en parlait, elle en était certaine. Ils la regarderaient différemment, pas comme une femme accomplie. Ils auraient pitié d'elle et ça elle ne voulait pas Delilah. Avocate, femme indépendante, libre, voilà quels allaient être ses points forts, le reste on oublie ! Parce que oui, il ne fallait pas se leurrer, ce genre de réunions étaient surtout une excuse pour voir si les vieux camarades de classe avaient réussi leurs vies ou non, ni plus ni moins. Et pouvoir juger tout ça sans aucune honte bien sûr. Aucune honte et apparemment aucune dignité non plus.

Prête à partir Lyla avait donc échangé son tailleur contre une robe. Pouvant de nouveau s'habiller décemment sans avoir à cacher ses bras où les sales mains de son ex-mari avait laissé tant d'ecchymoses, la jeune femme en profitait. Elle avait retrouvé sa féminité, elle aimait plaire, comme à l'époque. Ne voulant pas faire trop habillée non plus elle ne sortit pas le grand jeu ; des escarpins, un décolleté raisonnable, un long manteau noir et c'était tout. Vouloir trop en faire ne servait à rien à part se faire remarquer et Delilah ne voulait pas attirer l'attention de tout le monde, juste de quelques personnes en particulier. À vrai dire il était un peu la seule raison qu'elle avait de vouloir paraître en forme et bien dans ses baskets. Elle espérait que Maldwyn viendrait, alors qu'elle se doutait qu'il aurait horreur d'être présent à ce genre d’événement. Elle avait hâte mais en même temps cela la désappointait. Pourquoi ? Parce qu'il jouera encore les amnésiques. Au début c'était marrant et supportable mais plus ça allait et moins ça l'était. Lyla ne comprenait pas où Mal voulait en venir à faire semblant de ne pas la connaître alors qu'ils avaient été si proches … Bon sang que c’était frustrant. Elle espérait avoir des réponses ce soir. Avait-il subit un énorme choc sur le crâne qui avait effacé toutes ces années à la fac ? Si c'était le cas ça devait être bien violent étant donné qu'ils avaient également grandi dans le même quartier. Pour réussir à oublier ça aussi il fallait être fort … Les pensées de l'avocate étaient centrées que sur ça. Cette histoire tournait dans sa tête à n'en plus finir, tellement qu'elle faillit devoir payer le taxi dix minutes en plus alors qu'il était stationné à destination. La voilà donc arrivée à l'université d'Arcadia. Un doux frisson parcourra son échine lorsqu'elle contempla les bâtiments un instant après être descendue du taxi. Ça ne semblait pas avoir changé d'un pouce. Elle s'était faite cette remarque aussi lorsqu'elle était revenue pour passer son master. Tant mieux. Comment avait-il pu oublier alors qu'il enseignait ici en plus ?! L'ambiance était la même, il n'y avait qu'à croiser des étudiants pour se rappeler ce que c'était que d'être à leur place. Le dortoir qui plus est, ils avaient partagé le même lieu de vie pendant des années. De nouveau repartit dans ces énervantes élucubrations Lyla secoua la tête avant de se mettre en route pour le gymnase, le lieu clé de la soirée.

Tout les gens de leur promo seraient là, elle l'espérait. Elle avait perdu de vue un peu tout le monde et c'était normal, ayant été à la limite de la séquestration pendant huit ans. Elle serait contente de renouer le contact avec quelques anciens camarades. Il fallait qu'elle se sorte Maldwyn de l'esprit et du cœur surtout car il risquait de le mettre en morceaux, une fois de plus. La jeune femme était toujours tiraillée de la sorte lorsqu'elle risquait de croiser son ancien ami. Ses talons résonnants dans les allées extérieures en direction du gymnase, de la musique pouvait se faire doucement entendre. Le stress la prit un peu à la gorge, quelle sorte de réunion était-ce au juste ? Lorsqu'elle entra elle put s'en rendre compte par elle-même : un petit buffet, des flûtes et gobelets en plastiques, des banderoles marquées aux années des différentes promotions, des projecteurs et la musique, bon sang la musique. Delilah eut l'impression de faire un bon de vingt ans en arrière et de revenir aux bals de promo de son lycée. Damn que c'était kitsch au possible. Cela eut au moins le mérite de lui décrocher un sourire franc et amusé. Ils n'y étaient pas allés de main morte. L'avocate s'approcha alors d'un bureau où deux jeunes étudiantes étaient installées. Elles s'occupaient visiblement d'honorer les participants d'un badge portant le prénom et nom de chacun. Lyla s'annonça alors, doucement et sans aucune prétention : « Delilah Sulwyn. » Ces pauvres élèves étaient certainement là bénévolement. La soirée allait être longue pour elles. Malgré leurs mines blasées elles s'activèrent à noter ces informations sur un badge que l'une d'elle tendit ensuite à la blonde aux échasses. Cette dernière retira alors son manteau et colla le petit badge ridicule sur sa poitrine. Les filles se chargèrent après également de récupérer son manteau. Lyla les remercia et prit le temps de regarder un instant les gens présents sur le parquet, un peu anxieuse, avant de se jeter dans la gueule du loup. Son regard bleu le cherchait inconsciemment.
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Turning Tables - Dim 2 Sep - 3:11




― Turning Tables ―
Dreamers they never learn oh they never learn,
beyond the point of no return.
And it's too late the damage is done,
this goes beyond me, this goes beyond you.
Delilah Sulwyn & Mal Jones

Le présent en marche arrière, je suis irrémédiablement entraîné par le passé. Il est ce qui me définit, ce que je poursuis malgré moi, quitte à aller à contre sens du monde. Jusque dans mes choix les plus anodins, un irrésistible regard au plus que parfait qui me contraint toujours dans les mêmes erreurs. On dit que les professeurs d’histoires, quelque soit leur spécialité, n’arrivent pas à conjuguer au futur. L’impression d’être resté le même dans un moule qui évolue bien trop vite pour moi. Des fantômes d’âges perdus qui me hantent encore l’esprit et m’empêchent d’être vraiment celui que suggère l'apparence de cette carcasse possédée. L’immaturité du voyageur temporel qui se complaît bien trop dans ses souvenirs et en perds les codes de la réalité et les attaches de l’instant courant. Est-ce que je suis sensé être quelqu’un d’autre ? Est-ce que j’ai raté cette grande étape charnière de la vie, celle qui me donnerait vraiment l’impression d’être à ma place ? Être adulte, responsable et fonctionnel. Je crois que quelque chose quelque part n’a pas fonctionné pour sûr. Je marche sur la tête à chaque instant, perdu entre ce qu’il s’est passé ce matin et ce qu’il s’est passé un matin il y a longtemps. Peut-être que le tic tac s’est arrêtée au final et que plus rien n’a de sens pour moi. Tic toc, toqué. J’arpente toujours ces mêmes couloirs, vis toujours avec les mêmes meubles. Même ma garde robe n’a pas vraiment changée. J’ai trouvé la source de la jeunesse éternelle entre les murs de ce temple du savoir. Un fidèle devenu apôtre, mais je porte toujours la même paire de Converse achetée il y a seize ans pour parfaire mon costard. Je suis une fraude à l’horloge implacable, l’esprit immuable à son action. Man child, un être qui ne porte pas le poids des années comme il le faudrait. Pas le genre d’homme que l’on garde plus d’un soir. Pas le type assez stable qui pourrait se fixer, un point dans la chronologie, une date dans le calendrier. Inoubliable oubli, entré dans un fracas aussi grandiose que sa sortie. Une marque laissée, une irrégularité sur les rouages bien huilés. Alors le passé m’aspire de ses regrets et je suis incapable d’aller de l’avant.

Je ne sais pas ce que je fais là. Moi, cette image presque identique à celle de notre yearbook aux pages jaunis. Ce même mélange de fausse assurance intriqué de maladresse incorrigible. La seule différence c’est quelques rides qui se sont invitées sur mes expressions. C’est ma marche de la honte, le calvaire que je m’inflige à chaque fois que les anciens élèves de notre promotion décident de se réunir. Une tentative vaine de provoquer quelque chose en moi, un mouvement qui pourrait peut être me faire leur ressembler. Eux qui ont tellement changés, qui parlent de leurs enfants qui commencent le collègue l’année prochaine et de leurs jobs sophistiqués. Je me tasse dans leurs ombres, moi l’étudiant devenu prof, celui qui est juste passé de l’autre côté du bureau. Celui qu’on ne peut pas prendre au sérieux dans ce genre de contexte, celui laissé derrière qui donne l’impression de n’être jamais parti et de n’avoir jamais vu le monde. Celui qui ne ramène jamais de plus un sur la liste des invités. Je suis la constante qui les amuses, Maldwyn la tête de bois, Mal le chêne qui a posé ses racines pour ne plus partir. Il sont des oiseaux posés sur mes branches et ils piaillent leur réussite comme le vent dans les feuilles. Ils me chient dessus de leurs vies parfaitement respectables. Et s’ils ne le font pas consciemment pour la plupart, je peux entrapercevoir leurs regards appuyés. Ils ont entendu les rumeurs, comme tout le monde. La vérité est remontée jusqu’à leurs oreilles comme un délicieux triomphe, pour les conforter dans leurs choix et leurs visages tournés vers l’avenir. Mal Jones est un raté, un drogué de première, un rebut de la société. Au jeu du que sont ils devenus, j’ai tiré la mauvaise carte destin.

Mes doigts détaillent nerveusement une énième fois les lettres en relief de l’invitation. Est-ce que j’ai vraiment besoin de m’infliger ça une fois de plus ? Est-ce que je vais supporter prendre part à des conversations croisées qu’il me sera impossible de suivre ? Je tente d'observer mon reflet dans la fenêtre du taxi. Je doute avoir réussi à dompter mes cheveux correctement. Comme à chaque fois que j’essaie de m’apprêter, je me sens gauche et repoussant. Une silhouette difforme et incertaine, la sensation d’être engoncé dans ce costume-cravate trop moulant et strict. Tel le monstre de Frankenstein, j’ai l’éloquence mais pas le physique. Un hybrid terrifiant aux yeux de mes pairs, la demi-réussite d’un homme qui ne se fond pas tout à fait dans la norme. Et j’ai un mauvais pressentiment, quelque chose au fond de moi qui tente de me persuader que cette fois-ci ne sera pas comme toutes les autres. Que je ne pourrais pas prétendre m’éclipser lorsqu’ils seront tous bourrés. Une peur primaire, comme un instinct de survie qui me confirme que tout ceci est une mauvaise idée. Qu’est ce qu’il pourrait arriver de pire ? Que le gymnase soit détruit à coup de télékinésie ? Que tous mes anciens camarades de classe finissent raide morts sous les coups vengeurs d’une entité supérieure ? Je crois que j’ai déjà vu ce film, mais je préfère ne pas y penser. Trop de choses étranges ont commencé à arriver autour de moi. Des choses impossibles à expliquer que je suis devenu malheureusement incapable de réfuter. Et puis il y a Clemens. Et puis il y a Lise. En pleine contradiction du réel, crise d’adolescence de mes certitudes et de mes envies. Quelles circonstances merveilleuses pour un trip down memory lane d’un passé que je préférerai ne pas déterrer ce soir.

Alors je colle un rictus sur ma bouche, une tentative de sourire charmeur et décontracté. Je ne sais pas si cela fonctionne mais je parviens à me fondre dans la masse plus facilement que je ne l’aurais espéré. Il faut dire que je suis légèrement en retard, le coup d’envoi de la soirée à déjà été déclaré. J’agraphe mon prénom en toute hâte sur ma veste, longeant les murs qui me séparent du buffet. Je n’ai pas l’intention de boire, je ne bois jamais d’alcool. Mais avoir un verre dans la main j’ai remarqué, me donne une excuse pour rester silencieux et faire semblant de m’occuper les mains et la bouche. Voire me sortir de groupes de conversations gênants à grand renfort d’un besoin de remplir mon verre d’un alcoolisme imaginaire. Alors si je me saisis d’une flûte de champagne gracieusement offerte par un étudiant volontaire au service, c’est pour pouvoir mettre mon plan de survie en action. Mais alors que je me saisis du fin récipient de cristal, mon cœur rate un battement de la silhouette qui se détache des autres par dessus les effluves d'alcool. Et tout à coups j’ai de nouveau dix-neuf ans, et je suis de nouveau terrifié à l’idée de parler à cette fille qui n’a pas conscience de cette ascendance délicate et impériale qu’elle exerce sur son environnement. Autant dire que mes orteils se crispent dans leurs chaussures, ces Converse qu’elle m’avait offert en deuxième année. Ces maudites basket que je porte toujours là, au milieu des mocassins hors de prix des autres convives. Et je me sens con, du haut de mes trente-six ans, à rougir du constat d’un souvenir révolu. À paniquer de sa présence alors qu’un gymnase entier nous sépare encore. Je ne sais pas comment gérer notre historique, comment réparer ce qui ne peut plus l’être. J’ai prétendu ne pas la reconnaître alors que j’ai détaillé toute la familiarité de ses traits et de son corps. Dix ans de vide à combler, alors j’ai été un lâche et j’ai voulu tout recommencer de zéro. Mais je crois qu’elle a croisé mon regard, il est trop tard pour reculer. Il me faut affronter tête haute le résultat de mon propre chaos. Mais comment ignorer l’éléphant dans la pièce maintenant que nous nous trouvons tous les deux à cette soirée, qu’il est écrit noir sur blanc sur le badge que j’arbore que j’ai fait mes classes en même temps qu’elle. Va mentir quand c’est écrit sur ton front. Alors je détache l’intitulé, je touche le fond et je gratte encore, glissant l’objet dans ma poche stratège. Machiavélisme en carton. Deuxième coupe de champagne en main je m’élance. J’ai la dégaine d’un Cowboy prêt à se prendre une balle perdue.

« Bonsoir Delilah. » Ma voix et plus rauque que d’ordinaire, peut-être que j’aurais dû goûter à ce champagne pour soigner mon courage et ma gorge sèche. Au lieu de ça je lui tend un verre. J’ai du mal à me concentrer, l’impression d’avoir les mains moites et que ma chemise me colle aux reins. « Tu… Vous êtes magnifique ce soir. » Un compliment franc, un peu sonné. En vrai j’ose à peine la regarder, histoire qu’elle ne lise pas la panique dans le blanc de mes yeux. « Vous accompagnez quelqu’un ? » Je fais mine d'ignorer son badge qui indique les mêmes dates que les miennes. Le roi de la mauvaise foi et du déni. L’éléphant vient officiellement de se transformer en cachalot.
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Turning Tables - Mer 5 Sep - 16:10

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Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

C'était un peu l'angoisse il fallait l'avouer. Lyla avait l'impression de ne pas avoir évolué d'un pouce depuis qu'elle avait quitté ces gens la dernière fois, il y a de ça des années. Certains seront peut-être surpris de la voir débarquer seule, sans William. Il avait été professeur ici quand même, il avait connu un tas d'élèves. Peut-être se demanderaient-ils où il est passé … La barbe ; leur divorce avait assez traîné en longueur pour que tout le monde soit au courant, ceux qui ne l'étaient pas et poseront des questions seront alors très vite mis au parfum. Pas d'enfants, pas de nouveau prétendant, seule. Ce constat était amer mais malgré cette pointe aigre en bouche la jeune femme pouvait au moins se dire qu'elle avait réussi sa carrière qui ne faisait que commencer. Quelle joie oui. Son assurance retrouvée elle avait ainsi fait son entrée parmi la foule. Il était hors de question qu'elle se mette dans un état minable mais serait ravie de voir la plupart de ces personnes prendre ce chemin, cela lui ferait de nouveaux souvenirs agréables à garder.

Alors qu'elle pensait s'approcher du buffet Lyla fut apostrophée joyeusement par deux jeunes femmes. Elles l'avaient reconnue, d'anciennes camarades de promos qui avaient tendance à plus faire la fête qu'étudier si sa mémoire était bonne. Un grand sourire gêné s'empara alors des lèvres rouges de l'avocate et elles commencèrent ainsi a rattraper le temps perdu. Cette petite discussion banale lui permit de se décontracter un peu, d'être plus à l'aise. L'une venait d'avoir son premier enfant, l'autre d'acheter une maison avec son conjoint. L'originalité … Elles s'attendaient ainsi à avoir le même genre de nouvelles de la part de Lyla mais non, cette dernière se contenta de leur parler du cabinet d'avocat dans lequel elle travaillait. Ça allait être comme ça tout le long de cette soirée ? Damn. Malheureusement elle ne pouvait discuter que de cela, débaucher de nouveaux clients n'était absolument pas dans ses intentions mais pourquoi pas après tout. Après plusieurs minutes le groupe de jeunes femmes finit par se séparer, ayant chacune d'autre chats a fouetter. Elles avaient mentionné un tel puis un autre, qui soit-disant seraient contents de revoir la Sulwyn. Delilah garda alors ces noms en tête au cas où elle les croise. Mais elle perdit malheureusement la notion de l'espace et du temps lorsque ses yeux aperçurent des cheveux en bataille qu'elle connaissait bien. Son cœur s'arrêta de battre une fraction de seconde. Était-ce vraiment lui qu'elle avait cru distinguer ? Elle ne pouvait pas se permettre de perdre contenance ainsi. La jeune femme ferma les yeux quelques secondes, faisant abstraction de tout pour se reconcentrer correctement et ne pas se laisser distraire par des silhouettes ou des fantômes de sa propre imagination. Pourtant son cœur espérait que ce soit vrai, qu'il soit présent. Ou avait-il aussi oublié qu'il avait étudié dans cette même université dans laquelle il enseignait maintenant ? Il semblait en être bien capable oui. C'était difficile de ne pas penser à lui, de plus en plus difficile.

Lyla marchait au milieu de ses cœurs qui se retrouvaient, partageaient sans honte, s'étaient aimés, amusés tous ensembles. Des connaissances, des potes, des camarades, des coups d'un soir, des amis. Elle ne semblait pas trouver son compte là dedans. Elle aurait aimé pouvoir échanger avec les autres, faire comme eux mais la jeune femme était irrémédiablement ailleurs. C'est lorsqu'elle croisa finalement son regard bleu qu'elle atterrit sur terre parmi les vivants. Enfin cette soirée gagna une certaine valeur à ses yeux. Les pas de l'avocate étaient légers, elle s'approchait de lui, comme un bout de ferraille attiré par un aimant. Elle avait perdu tout l'intérêt qu'il lui portait autrefois alors oui, le parallèle avec la ferraille lui allait comme un gant. Mal avait toujours été important pour elle, lorsqu'elle était marié même juste un ami comme Maldwyn lui aurait sans doute évité de vivre toutes ces choses horribles, peut-être aurait-elle pu en parler avec lui et mettre fin à son calvaire bien plus tôt. Mais non, il avait coupé les ponts, ne voulait plus la voir, pas même comme une amie … Que restait-il de tout ça à présent alors ? À cette soirée ? De simples connaissances, nouvelles puisqu'il s'entêtait à ne pas vouloir se rappeler ou faire semblant. Alors qu'ils se rapprochaient Lyla remarqua l'absence de badge à la poitrine du professeur. « Bonsoir Delilah. » Son timbre de voix, il l'avait hanté pendant des nuits après qu'il l'ait abandonnée. Elle l'entendait au plus sombre de la nuit, souvent dans ses moments de torpeur intense, cette voix la rassurait. La jeune femme mit un petit temps avant de réaliser complètement ce qu'il se passait. Elle avait l'impression de tout imaginer, d'être dans un rêve tellement elle avait attendu ça. L’avocate saisit alors délicatement le verre que lui tendait le professeur puis sourit simplement en guise de remerciement. Cette plénitude qui l'envahissait corps et âme de se retrouver devant celui auquel elle aurait tout donné fut un temps. Mal était certainement la personne qui lui ressemblait le plus parmi toute cette assemblée. Pas mal de leurs amis de l'époque avaient conscience de leur passif commun. Il ne pourrait sans doute ainsi pas jouer à son jeu pendant très longtemps. « Tu… Vous êtes magnifique ce soir. » Cette hésitation … Devoir tout réapprendre l'un de l'autre, c'était compliqué apparemment. Ils ne se voyaient peut-être pas assez souvent pour que le tutoiement lui paraisse naturel, pourtant jamais il ne l'avait vouvoyé avant. Ils s'étaient connus jeunes, ils n'avaient pas eu besoin. C'était étrange de se retrouver ici, adulte. Ils avaient passés le stade des convenances, grand Dieu ils avaient partagé le même lit ! Rageant, il n'y avait pas d'autres mots. Lyla rapprocha alors son verre de ses lèvres tout en ne lâchant pas des yeux Maldwyn. Elle trempa sa bouche dans le liquide doré aux bulles fines. « Merci. » Dit-elle d'une voix douce, pas gênée pour un sous par ce compliment mais agréablement surprise qu'il soit parvenu à lui dire cela en face. Alors que le champagne parcourait sa gorge, ses pupilles se baladèrent sur le corps de Mal, s'arrêtèrent au niveau de ses chaussures. Ses neurones se turent d'un coup, son cerveau se calma. Là, elle était là sa chance.

La galloise ne pensa pas un seul instant qu'il n'était pas bien âpreté ou ridicule, elle le trouvait mignon au contraire, ça avait toujours été le cas. Mais là, à ce moment précis, cette paire de Converses fit ressurgir tout un tas de souvenirs. Cela la bouleversa un peu. « Vous accompagnez quelqu’un ? » Cette question la sortie de son complotisme interne. Elle cligna les paupières puis releva son regard emplie de gentillesse sur cet homme qui lui mentait éhontément. Ses sourcils légèrement froncés elle répondit avec un rictus avant de ravaler une petite gorgée de champagne : « Oh que non. » Cela ne la dérangeait pas à vrai dire … Elle aurait eu à faire les présentations à chaque fois, c'était ça d'évité. Alors elle sourit, amusée par cette réponse. « Comme l'indique si bien mon badge je participe de mon plein gré. Et surtout parce que j'ai été étudiante ici, fut un temps. » Annonça-t-elle en faisant appel à son humour pince sans rire qui avait toujours fait grincer des dents William. Elle jeta ensuite un coup d’œil circulaire au gymnase qui les accueillait. Que de réminiscences. Et encore ce n'était sans doute pas le lieu dans lequel Lyla s'était rendue le plus durant ses études. Oh qu'elle avait envie de lancer les hostilités tout de suite, d'arrêter de tourner autour du pot et de faire semblant. De lui dire que c'était également son cas, merde. Delilah se mit alors à fixer l'absence d'étiquette à la poitrine de Mal. De sa main qui portait son verre elle pointa l'air de rien la veste vierge de l'enseignant. « Et vous ? Parce que vous êtes professeur vous avez été exempte de badge ? Ce n'est pas très juste tout ça. » Fit-elle remarquer innocemment en secouant la tête d'un air désapprobateur. Faussement. Elle ne voulait pas le mettre au pieds du mur mais en même temps elle voulait la vérité, le pourquoi de cette comédie grotesque. Toujours tiraillée Lyla, entre sa douceur et ses droits. Parce que oui, elle avait droit d'utiliser leur souvenirs partagés. Il avait préféré les oublier soit, ce n'était pas son cas. Il était trop jeune pour pouvoir prétendre venir à la rencontre d'anciens élèves. Alors qu'elle serait son excuse pour participer à cette soirée ? « D'anciens camarades à voir ? Comme moi par exemple. » Lança-t-elle tel un pavé dans la marre avec un grand sourire. Comme moi, une de vos anciennes camarades ? ou bien comme moi, là pour voir d'anciens camarades ? Cela lui rappelait son travail, elle plaidait clairement pour sa cause, jouant avec les mots. Le dossier était épais certes mais elle y arriverait, parce qu'elle était douée pour ça. Le champagne aidait aussi un peu il faut dire. Cela l'occupait, elle n'aimait pas particulièrement son goût mais il était frais. Elle en avait presque oublié l'ambiance bal de promo de ces retrouvailles.
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Turning Tables - Mar 11 Sep - 22:58




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Delilah Sulwyn & Mal Jones

Tout s’efface et il ne reste plus rien. Ce qui a compté un jour n’est même plus commémoré dans les esprits. Plus de souvenir languissant, plus d’appel à la mémoire pour en redessiner les contours. C’est ça, le vrai sens du passé. La seule manière de le conjuguer est par l’oubli, lorsqu’il ne laisse plus de traces dans les regards et dans les mots. Je mentirais si je disais que je n’ai pas essayé de l’oublier. Que je n’ai pas cherché à effacer le tableau de notre historique sans semer de poussière de craie, de poussière d’elle. Delilah. Je reviens toujours à elle comme un enfant suit ses miettes de pain. Comme une idée, une sensation que je ne peux trépaner de ma tête. J’aimerai extraire le mal, lobotomiser mon âme encore trop frêle de ces émois. Mais me taper le crâne contre les murs ne suffirait pas à la faire disparaître. Elle cogne comme un trauma non résolu et c’est l’hémorragie cérébrale. L’hémorragie des sentiments enfouis dans cette tombe anonyme où j’ai fais le deuil de nous. Je ne suis pas prêt à faire face à ces émotions mort-vivantes, à cette affection âgée. Était-ce si naïf de vouloir que tout ceci repose en paix ? Vouloir un nouveau départ, bâtir de nouvelles fondations sans nous soucier du cimetière sous nos pieds. Loin des yeux, à l’amnésie de mon cœur, mais elle hante encore ma rétine. Et si je peux la semer dans les méandres brumeux de mon esprit drogué, j’ai le réveil du réel en toute brutalité. Ces choses qui auraient pu être, y croire encore sans en accepter les conséquences. Vouloir faire du neuf avec du vieux, mais les murs qui contiennent l’éléphant dans la pièce sont trop bancals. Elle devrait le savoir pourtant, que Maldwyn Jones est un lâche passé, présent et futur.

La première fois que j’ai perdu la raison, c’était à cause d’elle. A cause de sa diligence, la facilité avec laquelle elle savait m’appréhender. Si j’admets avoir au moins une fois cru, alors dieu était une femme. Dieu était Lyla à mes yeux. Oh j’avais déjà aimé, j’avais déjà suffisamment l’expérience de ne pas tomber dans le piège de la première. Nous ne sommes mêmes pas sortit officiellement ensemble, n’avons jamais prononcé les mots fatidiques apte à fixer cette relation. Mais comme toute entente qui découle d’abord d’affection amicale, les limites avaient tellement été brouillées que nous étions devenus sans vraiment penser être. Est-ce qu’on pouvait encore appeler ça de l’amitié quand nous partagions le même lit pour autre chose que dormir ? Lorsqu’on ne démentait pas, ne corrigeait pas ceux qui nous confondaient en couple ? Combien de personnes ici se souviendront de nous ainsi, à tort ? Comment démentir avoir été plus proche que de raison lorsque la douleur de la séparation se mesure à la force nucléaire de l’attachement brisé ? Une fission de l’atome, un hématome sur le palpitant qui ne guérira jamais des mots que j’ai prononcés. J’ai pas besoin de toi, autant arrêter là. Je peux plus continuer, Delilah. On ne devrait pas rester ensemble. L’amour est une brûlure chimique, il brûle sans flamme et ronge tout sur son passage. L’amour, ou la peur ? Je me suis perdu dans ces définitions. Un mensonge pour l’éloigner, scinder le noyau en deux individualités. Mais c’est à moi-même que j’ai menti le premier. Parce que quand je l’ai enfin faite fuir je voulais juste la rattraper. Parce que quand le hasard m'a donné une seconde chance je n’ai pas su saisir sans devoir tout recommencer.

Et ce deuxième mensonge est prêt à imploser maintenant que nous sommes tous les deux en ces lieux. Maintenant qu’elle me fixe avec cette désinvolture pondérée, cet intérêt réfréné qui cache ce regard que je sais apte à me transpercer. Sa réponse ne se fait pas attendre et je me maudis de ne pas avoir réfléchis avant de parler. Bien sûr qu’elle allait pointer du doigt ce que je ne veux pas aborder avec une question pareille. Bien sûr que je savais qu’elle avait été étudiante ici, bien avant la fin de son master. Mais j’étais soulagé malgré-moi de sa confirmation. Elle était venue seule. Il n’y aurait personne pour la prendre par le bras et mettre un terme à notre conversation. Personne pour l’entraîner loin de moi sans que je n’ai la force de la retenir. « Oui, c’est évident. Bien entendu. » Que je murmure à moitié. Je joue volontiers à l’imbécile, trop préoccupé par l’idée de faire un faux pas qui me trahirait. Lorsqu’elle mentionne l’absence de mon badge je peux sentir l’air me manquer. Mes doigts serrent un peu trop le verre en cristal, cet alcool que je refuse d’ingurgiter. Je n’ai pas eu le temps d’inventer une excuse, mis devant le fait accompli je ne peux que baisser le visage sur mon poitrail innommable. Je déglutis, mon regard fuyant le sien en plissant les yeux dans un rire gêné. « J’ai du le perdre depuis tout à l’heure, je n’ai pas osé en demander un autre. Je ne voudrais pas déranger mes élèves, ils travaillent déjà assez dur. » Je tourne le visage vers les jeunes à l’entrée pour tenter de dévier l’attention de la conversation. Mais elle ne se laisse pas appâter. « Des camarades ? Oh oui, bien sûr… j’ai étudié ici. C’est aussi pour cela que je suis venu, même si je doute que qui que ce soit se souvienne de moi. » Je fais mine de porter mon verre à mes lèvres, technique flagrante pour tenter de noyer le poisson. Ma bouche trempe à peine et déjà s’éloigne dans une grimace non dissimulée. Comme un revers du destin, un karma mérité, un ancien camarade de classe me fait un signe de loin. J'essaie de l'ignorer, mais devant son enthousiasme mimé, je ne peux que forcer un signe de la main. Je perçois la silhouette de Delilah à mes côtés plus que je ne l’observe. Je peux sentir les brefs bruissements de l’air lorsqu’elle occupe l’espace. Et cette attraction irrésistible, tout mon corps veut s’approcher du sien comme un morceau de métal rouillé sur un aimant. Je peine à lutter contre le courant. « Vous êtes de la promotion de 2007 ? » Je la rajeunit volontairement de trois ans, c’est pas un mensonge quand c’est une flatterie pas vrai ? « C'est dommage, on a du se croiser de peu. Je suis arrivé ici en 2004 et je ne suis plus reparti comme vous pouvez le voir. » Est-ce que je peux vraiment m’en vouloir de lui mentir ainsi ? De consciemment échafauder une histoire qui n’existe pas ? Mais quel est le pire, lui jeter ces affronts au visage ou lui avouer que je l’ai rejetée parce que j’avais peur de l’aimer ? Que ce rejet a entraîné des conséquences désastreuses pour lesquelles je ne sais répondre de mes torts ? Car je ne peux m’empêcher de me sentir coupable, pour le passé. Et maintenant le présent. « Je parie que vous avez dû faire tourner les têtes plus que les examens. » Ce ne sont plus des compliments gratuits, mais des faits. Elle m’a fait tourner la tête, et je ne me suis aperçu du tourbillon qu’une fois le visage contre le sol. Je regarde le fond de mon verre encore plein, mes yeux se plantant dans les siens. J’aimerai lui dire toutes ces choses qui me rongent, mais comme les bulles à la surface de mon champagne, mon courage est trop volatile. Alors « Un autre verre ? » est tout ce que j’arrive à lui offrir comme mots d’amour. Rien ne s’efface, mais il ne reste pourtant plus que le néant. J’aimerai lui procurer autre chose que la mélancolie, la colère, mais je ne suis que cancer dévorant.
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Turning Tables - Ven 28 Sep - 19:50

turning tables

Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

L'ambiance finissait par être prenante et après avoir pu discuter tranquillement avec d'anciennes camarades, affronter Mal semblait faisable et surtout inévitable. L'avocate se risquerait-elle a enfin mettre fin à toute cette mascarade ridicule ? À remettre son cœur à l'épreuve une nouvelle fois ? Il l'avait fait souffrir à deux reprises déjà. Une fois en l'abandonnant mais en ayant étrangement eut le courage de lui dire en face et en personne que c'était fini. La seconde blessure était plus récente et vive : il l'avait oublié. Qu'il fasse semblant ou que ce soit vrai le résultat restait le même. Pourquoi s'entêtait-elle alors à revenir vers lui ... Elle ne pouvait s'en empêcher, leur histoire n'avait pas eu la bonne fin la première fois, il restait tant de sentiments en elle pour lui, il les avait tous rejetés sans pouvoir en supporter d'avantage. Orgueilleuse elle n'avait pu combattre ce choix. Lyla savait à son grand damne que lorsque Maldwyn Jones décide quelque chose, malheureusement il est difficile, voir impossible, de lui faire changer de cap. L’orgueil c'est laid, surtout chez une femme. En plus de cela vient s'ajouter la rancune, bestiale qui lui donne envie de le réduire en pièce malgré ses beaux yeux bleus. Mais son cœur est tendre, étonnement il l'est encore, peut-être les coups que tous ces hommes lui ont asséné au fil des années auraient du l'endurcir comme ce fut le cas pour son corps. Lorsqu'il s'agit de Mal il fond juste. Alors c'est à la tête de prendre le relais, de se rappeler la douleur, d'oublier sa peau, la douceur de ses gestes passés et révolus, ses sourires.

En tête à tête justement, pourtant entourés d'un beau monde, la jeune femme pâle avait l'impression d'être dans une bulle. Elle avait l'impression de pouvoir hurler sa rage au visage de cet homme irrespectueux que ça ne dérangerait personne. Si seulement. Il faudrait rester un minimum calme. La galloise essayait de le rester, de ne pas sortir un argument cinglant à chaque fois que son ancien camarade ouvre la bouche. La blonde révéla être venue à cette soirée non accompagnée. Elle ne portait plus son alliance depuis longtemps, cet objet qui avait été la clef de sa captivité, semblable à une menotte. Libérée, elle ne préféra pas demander à Maldwyn si c'était son cas également. La tête qui protégeait le cœur. La discussion s'enchaînait bizarrement plutôt facilement, une excitation s'emparait des nerfs de Delilah, tant elle avait hâte de pouvoir enfin mettre à nue la vérité. L'honnêteté, la justice, ces notions étaient primordiales à ses yeux. Elle se sentit un peu détective après avoir remarqué l'absence de badge du professeur. Il avait une explication à cela  : « J’ai du le perdre depuis tout à l’heure, je n’ai pas osé en demander un autre. Je ne voudrais pas déranger mes élèves, ils travaillent déjà assez dur. » Ça se tenait. Son accusatrice n'avait pas de raisons de douter de cela … Enfin pas d'intérêt surtout. Elle savait qui il était, elle n'avait pas besoin qu'il porte son nom tatoué sur le front pour ça. Ils se tournèrent tout deux vers les étudiants qui s’occupaient de l'accueil à l'entrée du gymnase. Cela l'attendrit, elle ne put s'empêcher de se revoir à leur âge. Elle ne s'était jamais portée volontaire pour ce genre de corvée lorsqu'elle aussi était élève ici. Il y avait bien trop à faire, les cours passaient avant tout ! Puis venaient les soirées et les sorties. De facto il ne lui restait pas beaucoup de temps pour aider l'université, bosser avec ses camarades de classe était déjà un bon acte d'altruisme, ça allait bien. En parlant de camarades de classe, Delilah s'était enquise de savoir ce qui amenait ce cher professeur à cette soirée, le poussant un peu plus à aborder le sujet qui fâche. « Des camarades ? Oh oui, bien sûr… j’ai étudié ici. C’est aussi pour cela que je suis venu, même si je doute que qui que ce soit se souvienne de moi. » L'avocate resserra l'étreinte de ses doigts sur son verre de champagne en entendant ces mots qui étaient comme un cracha lâché à son visage, ses phalanges blanchirent à vue d’œil. Lorsqu'elle avait repris ses études pour passer son master et qu'elle était tombée sur lui par hasard au détour d'un couloir c'est lui qui avait fait mine de l'avoir effacée complètement de sa vie, pas l'inverse, elle l'avait reconnu tout de suite. La joie s'était emparée d'elle, la nostalgie aussi mais tout cela avait laissé place à la déception et la douleur lorsqu'il s'excusa en lui demandant qui elle était. Elle se souvenait mais lui tenait apparemment à ce que tout le monde l'oublie malgré ces paroles qui semblaient indiquer le contraire. Il aurait préféré disparaître des songes de ses petits camarades mais non, Delilah plus que quiconque l'avait connu. Le visage de la fragile poupée devint une expression fermée sans qu'elle ne s'en rende compte alors qu'elle avait à peine effleuré ce souvenir éclaté. Son regard quitta celui de l'homme qu'elle avait contemplé avec tant de tendresse, lui préféra profiter de son verre plutôt qu'affronter le jugement douloureux de cette femme qu'il ne connaissait pas. Elle aurait voulu lui demander pourquoi il lui infligeait cela. Une boule de sentiments négatifs commença à se former dans la gorge de Lyla. De l'amertume, de la colère puis viendrait la tristesse. Pour l'instant elle contrôlait encore ce petit tourbillon d'émotions mais ses barrières ne tiendraient pas le coup longtemps avant que le tourbillon ne se transforme en tempête. Parce qu'elle en avait marre de s’aplatir, de s'effacer, de se taire pour éviter les confrontations, ça c'était l'ancienne Sulwyn.

Plus envie de l’épargner parce que ça lui faisait trop mal de le voir jouer les innocents. Les pupilles de Lyla se posèrent alors sur cet homme qui sembla avoir reconnu Mal. Grand bien lui en fasse, peut-être ne se souvenait-il pas de lui ? Le professeur lui retourna alors discrètement son geste avec une grimace imitant un sourire, peu convaincante. Et comme pour détourner l'attention de ce qui venait de se passer. « Vous êtes de la promotion de 2007 ? » L'avocate prit une gorgée d'alcool doré avant de secouer la tête en guise de négation. Elle eut même un petit rire désabusé. Il le faisait exprès ? Certainement … Ce qui la fit rire jaune était plus la question en elle-même que le compliment déguisé qui s'y rattachait. « C'est dommage, on a du se croiser de peu. Je suis arrivé ici en 2004 et je ne suis plus reparti comme vous pouvez le voir. » Sa mâchoire se contracta, comme chacun de ses muscles. Elle était à deux doigts de devoir se mordre l'intérieur des joues pour se contenir. Alors elle répondit sans appel. « Oui je sais bien. » Avant de reprendre une lampée de cette boisson amère qu'elle n'appréciait même pas. Juste pour faire quelque chose, pour ne pas avoir à supporter ces pensées et ces sentiments qui la tiraillaient et devenaient de plus en plus violents. Il prendrait ça dans le sens qu'il souhaite mais cela signait clairement la fin du jeu, plus aucune de ses pirouettes ne pourrait sauver sa peau. « Je parie que vous avez dû faire tourner les têtes plus que les examens. » Rajouta-t-il par dessus le marché. Bizarrement cela lui fit esquisser un mince sourire, tinté de tristesse. Personne ne l'avait intéressé plus que Mal à la fac, personne. Et elle avait réussi à ce qu'il soit sien pendant un temps, une période où elle avait été sans doute plus heureuse que n'importe quel moment dans son mariage raté. Voilà, la tristesse était enfin arrivée.

La boule avait grossi dans sa gorge. Son index se mit à tapoter sa flûte de champagne. Un signe avant coureur d'agacement classique. Perdre sa patience, son calme aussi, devenir sarcastique et déverser un torrent d'aigreur par des mots à la limite de l'agressivité. Ça ne ressemblait pas à Delilah. Mais qui à part Maldwyn pouvait la pousser à bout de la sorte ? Ce dernier lui proposa de lui apporter un autre verre. Il n'avait même pas terminé le sien et la jeune femme non plus. « Non merci, j'ai déjà du mal à avaler tes couleuvres. » Lâcha-t-elle de but en blanc en se frottant le front, faussement gênée, transformant soudainement l'atmosphère qui était cordiale en malaise. Elle aurait dû s'habiller en rouge Lyla pour cette soirée car elle s’apprêtait à prendre le taureau par les cornes en plein milieu de l'arène. « Je ne sais pas comment tu fais Mal, honnêtement … Je ne sais pas si je dois trouver cela épatant ou bien malheureux. » Dit-elle finalement sur un ton des plus glaciales avant de sourire tristement une nouvelle fois, son regard cherchant celui du menteur qui lui faisait face. L'alcool lui montait à la tête ? Non certainement pas, le ras-le-bol si par contre. Parvenant à accrocher ses yeux bleus aux siens elle ne put s'empêcher de lui parler à cœur ouvert, elle ne pouvait plus se retenir. « En te croisant après toutes ces années je ne m'attendais pas à ce que tu me prennes dans tes bras. Ou quoi que ce soit de la sorte. Je ne m'attendais pas non plus à ce que tu t'excuses. Je n'attendais rien de toi en fait, le temps avait passé alors je n'aurais pas su prévoir ta réaction, je ne voulais mettre aucune pression sur tes épaules, j'étais juste contente de te revoir. Tout simplement. J'avais tout envisagé à vrai dire mais je ne m'attendais pas à cette comédie, oh ça non. Alors je ne comprends pas pourquoi tu t'efforces autant à faire comme si tu ne me connaissais pas parce qu'à l'époque tu me connaissais mieux que quiconque ici. Je ne sais pas comment tu fais pour être si effronté en me sortant tout ces faits, en te pointant ici, avec ces chaussures qui plus est ... En me lâchant au visage que tu aurais aimé qu'on se croise à l'époque mais … Bon sang Mal, j'aimerais être dans ta tête pour comprendre cette manœuvre parce que franchement je n'en saisie pas le but. » Et alors que ces mots sortaient de sa bouche, son cœur s'accéléra, la peur prit la place de l'excitation, la colère lui fit monter quelques larmes aux yeux, rendant son regard humide. Mais elle réussissait à les garder encore. La mélancolie adoucissait sa voix, la tristesse la fit se briser un peu par moment et la rage appuyait sur certains de ses mots. Cette tempête instable d'émotions Branwen prit soin de la transmettre à Maldwyn de par son don merveilleux de partage. L'avocate ne put s'empêcher de se sentir également désolée de lui balancer tout cela à la figure. Mais qui sait, il prétendrait peut-être être sourd à présent pour éviter d'avoir à répondre à cela. Elle gardait contenance malgré tout, il le fallait, elle ne pouvait pas exploser ici, pas devant tout le monde en plus. Avaler sa salive était devenue douloureux, elle pouvait physiquement sentir cette concentration de bouleversements dans sa gorge, retenir tout ça n'était pas bon. Ses yeux humides finirent par se détourner afin de regarder en coin alors qu'elle cherchait les bons mots. C'était pourtant son fort les mots. Mais le cœur à vif c'était compliqué. Le lien entre les émotions de Delilah et Maldwyn fut ainsi rompu, il était de nouveau lui-même. Cette invasion sentimentale ne dura pas longtemps et la responsable ne se rendit même pas compte de ce qui s'était passé à vrai dire. Sa vue devint floue mais elle accusa ses larmes pour cela. De sa paume libre elle vint récupérer les gouttelettes salées pour cacher sa torpeur et faire comme si rien de spécial ne se déroulait ici. Juste une réunion d'anciens élèves.
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Turning Tables - Mer 3 Oct - 21:40




― Turning Tables ―
Dreamers they never learn oh they never learn,
beyond the point of no return.
And it's too late the damage is done,
this goes beyond me, this goes beyond you.
Delilah Sulwyn & Mal Jones

Parce qu’il est trop tard et que le dommage est fait. Parce qu’on ne rattrape pas des années de vide, parce qu’il n’y a plus rien à voir lorsque tout est déjà parti en cendres. C’est l’excuse que je porte comme une égide maladroite, un bouclier cabossé par les années de combat. Mais c’est l’intérieur qui tombe en ruines, éternel conflit avec moi-même. J’ai construit ces défenses pour protéger les autres du danger, mais au final c’est moi que j’essayais de sauver. Une piètre fraude, un chevalier servant que la moindre blessure rends plus lâche que de raison. Mais c’est l’exception à la règle, Delilah. Elle ne m’a jamais blessée, jamais abandonné. Elle m’a fait ressentir des choses que je n’ai plus ressenties depuis. Elle a réussi à infiltrer sa présence au plus profond de mon être sans éveiller le moindre soupçon, sans que je ne cherche jamais à l’en extirper. Jusqu’à ce jour-là. C'est étrange, d’avoir peur d’aimer au point d’en rejeter la possibilité. D’être terrifié par l’idée de l'être en retour, et de tout faire pour l’éviter. Alors je nous ai détruit. J’ai pris la fuite de cette relation qui aurait pu. J’ai sacrifié tout ce que nous étions dans mon sillage; je suis devenu celui qui ment. Je suis devenu celui qui meurtrit le moindre de nos souvenirs, piétinant les tombes de ces cadavres d’émotions. Elles sont bien mieux six pieds sous terre. Ces mots qui lui sont adressés, ces syllabes qui percent mes lèvres sont autant de flèches en plein cœur. Mais ils atteignent deux cibles. Il est trop tard et le dommage est fait. Alors je ne fais que prétendre la table rase, j’essaie de ne pas sombrer de nouveau dans le passé. Parce que s’il m’a fait fuir, qu’est ce qui empêchera l’histoire de finir mal une seconde fois ? Alors je ne peux pas la regarder en face, je ne peux pas assumer la vérité. Je joue l’imbécile finit pour retarder un peu plus l’échéance de ces aveux qui prennent la poussière depuis toutes ces années. Parce que je ne peux pas lui dire maintenant la raison. Parce que je ne peux pas oser prétendre que je l’ai mais autant quand mon affection s’est transformée en poison.

Alors je fais semblant, j’invente des fabulations plus ridicules qu’improbable. Je mène une pièce de théâtre dont je suis le seul acteur, une comédie élaborée pour cacher le drame qui se trame derrière le rideau. Et elle me laisse faire, se contente d’observer mon jeu d’un haussement de sourcils, quelques piques sarcastiques pas assez acérées pour trancher en deux cette tromperie. Elle ne m’a pas oublié non plus, je peux le sentir dans son regard, dans la manière dont elle sourit sans conviction. Je ne suis pas idiot au point de penser que mes mensonges fonctionnent. J’aimerai tout arrêter, jouer cartes sur table et lui annoncer que oui, je me souviens de qui elle est. Mais je ne trouve pas la force de le faire, pas quand je suis déjà enfoncé dans ces faux semblants jusqu’au cou. Pas maintenant que je sais que c’était une erreur de briser cette promesse. Je n’ai jamais oublié que nous étions bien l’un pour l’autre et la sensation de n’avoir rien besoin de plus que sa présence. Je l’ai voulue et je l’ai perdue. J’ai rejeté cette possibilité et je l’ai précipitée vers encore plus pitoyable que ma personne. Une culpabilité que je ne peux empêcher. J’avais promis d’être toujours là pour elle, de ne jamais l’abandonner. Et je l'ai poussée dans cette abîme sans fond. Si elle a souffert c’est à cause de moi. Je ne peux écarter ce fait. Indirectement j’ai contribué à son malheur, j’ai scellé son destin d’un coup funeste. Comme si je l’avais moi aussi frappée au visage. Alors non, je préférerai prétendre être quelqu’un d’autre que celui qui aurait pu avoir Delilah Sulwyn pour lui et qui s’est défilé.

Ses mots me percutent de plein fouet. Je ne m’attendais pas à ce qu'elle mette fin à ma supercherie. J’espérais qu’elle continue suffisamment de jouer le jeu pour que j’ai le temps d’appréhender comment m’exprimer, rattraper ce mensonge et lui dire la vérité. Mais la froideur de ses mots me coupe le souffle. Je ferais presque un pas en arrière devant sa prestance et son ton impérial, mais je suis crucifié sur place par le châtiment mérité de sa verve. Elle allume le bûcher et y jette toute mon hypocrisie, vide le bidon d’essence en entier. Ma main se met à trembler sur mon verre de champagne. Je cherche à la fuir du regard mais ses yeux savent me trouver. Ils ont toujours su m’emprisonner. Mon cœur s’accélère et je sens la colère me brûler les entrailles. Ma gorge se serre, comme une réaction allergique à ma propre personne, m’étouffer tout seul. La haine m’emplit, mais pas la honte de faire face à mes propres actes. Une haine viscérale teintée de tristesse, des sentiments qui me font encore plus mal que l’auto-négation dont je suis capable. Des sentiments qui ne sont pas que les miens. Chacun de ses mots semble faire écho, j’ai l’impression de vivre ses émotions à mon égard, un trop plein d’une violence inouïe. Est-ce qu’elle a brisé les chaînes qui retenaient encore tout ce dégoût pour moi même ? Cette mélancolie de l’avoir perdue par le passé ? Tout mon corps tremble de colère et de douleur, mes muscles se contractent et la retenue me devient inconnue. Alors que la coupe de champagne se brise en mille morceaux entre mes doigts, la vérité se déverse sans que je puisse encore la contrôler. Un flux rendu libre par la colère qui a entraîné la culpabilité. « Parce que je t’aimais !  » La voix abîmée, le cœur qui tombe au sol comme le verre pilé. A nu des chairs qui se gorgent de sang, j’explose de sentiments.  « Parce que je t’aimais et j’ai tout foutu en l’air parce que j’avais peur ! Parce que j’étais putain de terrifié de ce qu’il pourrait se passer ! » Mon corps est agité de mouvements paniqués, erratiques.  « Parce que t’es la meilleure chose qui m’est jamais arrivée et je t’ai abandonnée parce que je suis un putain de lâche Lyla ! » J’hurle presque, la langue à présent déliée par une force inconnue, le palpitant débordant de tristesse. J’aimerai continuer, vider le trop plein, lui expliquer la raison de tous ces mensonges. Lui dire que je me sens coupable pour son mariage raté. A quel point je l’ai aimée, que je ne peux encore pas m’empêcher de toucher du bout des doigts ces relents de sentiments oubliés. J’aimerai lui demander de me pardonner, de tout oublier. Mais tout ce que je peux faire c’est de prendre la fuite, encore une fois. Je secoue la tête, agitant les mains dans l’air comme pour chasser l'emprise écrasante de ce passé. Je hoquète, haletant bruyamment. Je crois bien que j’ai les yeux humides, et la vue d’une larme sur sa joue suffit à m’achever.

Le sang coule le long de mon poignet, la douleur me vient tout à coup, comme si m’en apercevoir avait suffit pour la déclencher. Je suis incapable de la regarder en face, il y a une goutte pourpre sur le bout de mes Converses, métaphore de notre relation malmenée. Et je tourne les talons, je disparaît au milieu de la foule de ces visages autrefois si familiers. Je ne peux pas surmonter de lui avoir avoué ce que ce moi s’il y a des années n’a pas su lui dire. Mes pas trouvent le chemin des vestiaires comme une vieille habitude, plongeant avec soulagement dans les ténèbres de la pièce, fuyant la musique et les rires des autres conversations qui n’ont rien de dramatique. Je cherche l’interrupteur à tâtons, une pâle lumière illuminant les douches et les bancs. Une vague odeur d’humidité, de sueur et de lessive. Je n’ai pas envie de me regarder dans les miroirs au dessus des éviers, je ne veux pas voir les cernes sous mes yeux et mon visage de lâche. Une grimace anime mes traits, je traîne de quelques enjambées sur le sol carrelé. Un bref coup d’œil sur ma paume m’indique que quelques morceaux de verre s’y sont logés. « Merde… » Je ne me suis même pas rendu compte de ma force, trop préoccupé par la colère je m’en suis châtié physiquement. J’échappe un soupire, m’approchant de l’une des douches collective. L’eau glacée m’éclabousse légèrement le visage, nettoyant douloureusement la plaie. Le bout de mes chaussures trempe dans l’eau rosée, mon cœur lui s’est déjà noyé. Un juron désespéré m'échappe. « Putain...» Car si le dommage est fait, j’aimerai pourtant y croire encore. Parce que ces années de vide on toujours été comblées, parce que j’appartiens à Delilah Sulwyn à jamais.
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Turning Tables - Mer 31 Oct - 1:07

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Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

Jamais elle ne lui aurait demandé l'impossible, jamais elle n'avait attendu de lui plus que ce qu'il ne lui donnait déjà. Il l'aimait, sincèrement. Et elle aussi, éperdument. Se retrouver pour travailler ensemble sur des cours, entourés d'amis ou en simple tête-à-tête. Commencer à avoir des habitudes dans leur dortoir, leur histoire s'était faite naturellement, comme l'eau qui coule. Alors Delilah n'avait jamais vraiment compris pourquoi Maldwyn l'avait ainsi rejetée, construisant un barrage étanche et inébranlable sur ce qu'ils avaient pu vivre. Elle n'avait même pas cherché à en savoir plus, elle l'avait laissé partir à l'époque, là avait sans doute été sa seule erreur : respecter la volonté de l'homme qu'elle aimait. Peut-être tout cela l’effrayait trop, ce qu'elle pouvait comprendre bien entendu mais il ne lui semblait pas avoir mit quelconque pression sur ses épaules, non était une réponse parfaitement acceptable. Plusieurs fois la jeune femme avait rêvé de ce qu'aurait pu être leur vie, il y avait les et si positifs et merveilleux ainsi que les moins glorieux. En vieillissant, en se mariant et en divorçant, l'avocate avait appris à se rendre compte que la vie ce n'était pas que des bons côtés, aussi candides soit-on, aussi heureux soit-on à l'instant T. Comme des enfants ils s'étaient promis de toujours être présents, solides, fidèles. Ces paroles étaient lointaines et malgré leurs sens, du temps où ils n'étaient qu'un elles furent respectées, personne ne pouvait leur enlever ça, vivant leur relation sans se mettre d'étiquettes, tout allait de soit. Donnant sans avoir besoin de demander en retour, peu importait ce que les rumeurs pouvaient dirent, ils étaient heureux. L'honnêteté était également un élément important et bien qu'elle n'est pas été d'une grande finesse dans ses mots, Lyla ne pouvait plus se permettre de jouer, de mentir, de faire semblant. Plus en se retrouvant devant le fait accompli à cette soirée de commémoration, les faits étaient là malgré toutes ces pirouettes plus ou moins ratées, la femme avait fini par comprendre qu'on se payait sa tête éhontément.  Alors elle avait vider son sac d'une traite, telle une boule de bowling dévalisant le parquet ciré et venant s'écraser sur les quilles. Elle savait qu'elle roulerait sur le cœur de Mal en lâchant les fauves de la sorte, sa fierté aussi peut-être mais elle était convaincue que ça leur serait bénéfique, avec le temps. Ne plus avoir ce passé flou et ces questions incessantes du pourquoi, ça ferait de la peine en moins, des regrets s'effaçant aussi pour leurs vieux jours. Elle voulait comprendre pourquoi il s'était entêté à mettre toute cette mascarade en place, à quoi cela pouvait bien lui servir. Ils n'avaient plus de comptes à se rendre, plus après toutes ces années passées éloignés.

Le ressentiment était présent, la mélancolie aussi, tout cela et plus encore, c'était impossible que le professeur ne ressente rien. Ne serait-ce que de la sympathie pour son ancienne camarade car ils s'étaient bien amusés à la fac. Ou bien même de la peur de la revoir dans de telles circonstances après leur séparation nette, quelque chose, c'était obligé que cela remue dans un coin de son cerveau à défaut de chambouler son palpitant. Alors en lâchant sa bombe en plein milieu de la salle, pas trop fort et ne causant pour autant aucune scène, la galloise ne s'attendait pas à une telle réaction de la part de Maldwyn. Elle avait exprimé plus que clairement ses propres sentiments, elle ne le haïssait pas pourtant, femme intelligente et empathique qui réussissait toujours à se mettre à la place des autres. Il lui sembla alors que les rôles changèrent, qu'elle n'était plus la victime de cette farce mais l'instigatrice d'une colère bouillonnante dans les entrailles de Mal qui devint sujet de ses sentiments ravageurs. Son regard bleu devint dur, furieux, elle était prête à y faire face. Le verre de champagne qu'il tient entre ses doigts se brise en mille morceaux, tout comme ses mensonges. Jamais de souvenir Delilah avait pu voir s'énerver Maldwyn Jones, c'était inattendu, disproportionné peut-être ? Elle n'avait pas tout les éléments en sa possession pour comprendre ce qui pouvait se passer dans cette tête d'accro mais elle ne demandait que ça. « Parce que je t’aimais !  » Lâcha-t-il alors à bout de souffle. Les yeux humides de Lyla ne le quittaient pas. Cet aveu résonna dans la tête blonde de la jeune femme à l'en rendre sourde. Cette révélation n'en était pas vraiment une mais le professeur n'avait pas terminé : « Parce que je t’aimais et j’ai tout foutu en l’air parce que j’avais peur ! Parce que j’étais putain de terrifié de ce qu’il pourrait se passer ! » L'avocate fronce les sourcils, un poids se retire de ses épaules mais elle ne se sent pas libérée pour autant, le sera-t-elle un jour seulement ? Comment pouvait-elle se défaire de l'emprise que cet homme avait sur son cœur ? Elle n'avait pas réussi à oublier la douceur dont il faisait preuve à chacun de ses mouvements envers elle, la façon qu'il avait de la regarder comme si elle irradiait d'une lumière douce et chaleureuse. Personne ne la regardait ainsi, pas même William dans ses bons jours. Cela ne l'a pas empêché de l'épouser, ce monstre, alors que Mal lui avait déjà donné tout ce qu'elle pouvait attendre d'un homme … Qu'est-ce qu'elle croyait ... « Parce que t’es la meilleure chose qui m’est jamais arrivée et je t’ai abandonnée parce que je suis un putain de lâche Lyla ! » Termina-t-il de toutes ses forces. Nombreux sont les regards qui se retournent alors sur eux. Pourtant Lyla ne flanche pas, elle continue de le regarder lui. Une telle colère, jamais elle n'avait vu ce sentiment peint sur le visage du Jones.

Le temps avait aidé à ce que la rancune se transforme en souvenir amère, puis en doux regret. Relativisé n'avait jamais été aussi facile grâce aux temps qui s'écoule. Des heures, des mois, des années. Maldwyn quitta la scène de crime, la rage au ventre, laissant perler derrière lui des goûtes de sang tel le Petit Poucet. Elle lui en avait fait voir de belles et il s'était bien défendu aussi. Delilah se retrouva seule au milieu d'une marée d'yeux interrogateurs. La musique niaise continuait à sonner mais c'était fini. Les lumières s'éteignent alors que Mal disparaît derrière des portes qui se referment. Ses paupières se fermèrent, elle emplie ses poumons d'air. Soulagement au combien âpre et acide. Des murmures, des chuchotements, elle rouvrit les yeux pour les poser sur ces camarades juges. Elle n'avait que faire de leurs messes-basses. Son calme retrouvé elle regarda autour d'elle, fusillant quiconque serait assez téméraire pour affronter son regard noir. Peu de spots restèrent allumés. Une toile blanche tirée sur un mur s'illumina. La musique changea. C'était l'heure des souvenirs, des vrais. Des photos de leur yearbook commencèrent à défiler. Combien de fois lorsqu'elle était enfermée chez elle elle avait feuilleté ce bouquin sous les yeux jaloux et incompréhensibles de son ex-mari. Les conversations et explosions de rires réanimèrent le gymnase, comme si rien n'était arrivé. Les paroles de Maldwyn ne cessèrent de tourner sans cesse dans ses pensées, elle regardait les photos et avait déjà l'impression d'être ailleurs, son esprit avait pris la fuite, accompagnant le professeur blessé. Elle regardait les visages souriants figés mais ne voyait personne. Jusqu'à ce que son propre visage fut affiché. Elle n'était pas seule sur cette photo, en bonne compagnie, celle de Maldwyn, assis dans un amphithéâtre à réviser. À vrai dire ils n'étaient pas seuls sur ce cliché mais elle ne voyait qu'eux. Une transition en fondu noir et l'image avait disparu. Elles continuèrent à défiler, puis ressurgit alors un autre visage familier. William. Professeur imbu de lui-même, étudiante crédule, résultat catastrophique. Voilà Lyla était mise devant le choix de sa vie. L'erreur était grosse et lui avait tant coûté. Elle seule avait décidé de cela, elle était le dénominateur commun, le lien, il était hors de question que Mal se sente coupable de quoique ce soit. Ses phalanges resserrèrent de nouveau son verre d'alcool pétillant. La différence était là : il ne lui avait fait que du mal et ne se serait sans doute jamais arrêté alors que lui l'avait quitté de peur de lui en faire plus que nécessaire. Excédée par ce constat elle tourna le dos au diaporama du passé et vint poser avec colère sa flûte sur une des tables du buffet avant de suivre les pas de celui qui avait quitté les festivités trop tôt.

Il s'était blessé à cause d'elle, vu la direction qu'il avait pris il était parti se réfugier dans les vestiaires. Quittant la pénombre de la salle Lyla se retrouva dans un vieux couloir. Le choix s'offrait à elle et c'est la lumière qui trahit la présence de celui qu'elle cherchait. Mais que lui dirait-elle ? Après tout ça ? S'assurer qu'il aille bien, qu'elle ne l'ait pas trop amoché, c'était ce qui était le plus important. En entendant ses propres pas résonner entre ces murs étroits elle s'arrête. La poupée pâle ne sait même pas ce qu'elle fera. En pensant que la situation pouvait s'aggraver des larmes vinrent de nouveaux couvrirent sa cornée mais elle se reprit, évitant de penser au pire. Elle entendit alors de l'eau, le son résonna au fond d'une des salles. Reprenant son chemin en suivant le doux ronflement de l'écoulement elle atteint le vestiaire où Maldwyn s'était réfugié pour se soigner. Elle s'arrêta sur le pas de la porte, des casiers lui bloquait la vue sur les douches, tout ce qu'elle voyait était un pommeau de douche fixé en hauteur en marche. Le cœur de l'avocate se mit à battre rapidement. Elle avait peur de lui faire mal encore une fois. Alors elle respira de nouveau à plein poumons et sécha ses yeux. Elle entra, prenant soin de ne pas glisser sur le carrelage humide par endroit à cause de fuites. Ses yeux se posèrent sur la veste de son vieil ami, elle prit le temps de l'observer un court instant, lui et sa tignasse indomptable. Il était tellement brisé au fond … Lyla n'avait aucune idée à quel point mais peut importait le degrés, elle ne pouvait s'empêcher de vouloir l'aider. Parce qu'elle avait le cœur sur la main, la douceur d'une plume d'oie et une capacité illimité à ressentir les choses, n'abandonnant jamais. « J'espère que ce n'est pas trop grave ... » Souffle-t-elle alors doucement. Qu'il n'ait pas besoin de point de suture pitié, même si une soirée à l’hôpital ne serait pas une première. Elle ne pouvait pas lui en vouloir toute sa vie et était également capable de ressentir plusieurs contradictions à la fois. Elle n'avait pas aimé devenir n'importe qui à ses yeux, ses mensonges l'avaient amusée un temps puis avaient commencés à lui faire mal mais elle n'arrivait tout simplement pas à le détester pour ça ou bien même pour l'avoir quitté. Il avait ses raisons, elle en était persuadée, enfin elle savait maintenant. Ne voulant pas continuer de l'accabler d'avantages elle préféra laisser de côté ce sujet de discorde pour l'instant. Elle s'approcha de lui, à ses risques et périls, doucement. Tout comme on approche un animal sauvage et craintif, elle avait peur qu'il fuit de nouveau même si sa seule sortie était à présent barrée par le fantôme en robe de ce passé heureux qu'il ne semblait plus supporter. « Je suis désolée. De t'avoir mis au pieds du mur de la sorte. Sincèrement. Mais je t’interdis de dire que tu es un lâche Maldwyn Jones, ne redis plus jamais ça devant moi. » Déclara-t-elle alors d'une voix calme mais dure. Le regret, les excuses, les larmes remontèrent mais elle les combattait. Elle ne pouvait plus supporter ce manège idiot. Il devait l'avoir compris maintenant.

Elle ne supportait pas qu'on s'en prenne à lui, alors que devait-elle faire quand son pire ennemi était lui-même ? Il était son bourreau, depuis toujours. Au jugement impartial et sévère, il ne se laissait rien passer. L'homme qu'elle avait aimé et pour qui son cœur n'avait jamais vraiment cessé de battre n'était pas un lâche. Il avait peur, il ressentait des choses comme peu d'hommes sont capables et c'était une force indéniable. Sans s'en rendre compte elle avait continuer à avancer vers lui. Parlant comme pour le calmer, elle n'avait aucune idée de l'état dans lequel elle allait le récupérer. La puissance du jet d'eau sonna plus fort à ses oreilles maintenant qu'elle était proche de lui. Elle l'aurait sans doute pris dans ses bras si ils étaient retournés à cette époque où ils étaient étudiants ici. Elle l'aurait serrer fort contre elle. Elle en avait envie mais elle redoutait de se faire rejeter encore une fois. Elle avait changé en se battant contre ses démons mais lui aussi, même si il n'avait pas encore vaincu.
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Turning Tables - Jeu 15 Nov - 2:26




― Turning Tables ―
Dreamers they never learn oh they never learn,
beyond the point of no return.
And it's too late the damage is done,
this goes beyond me, this goes beyond you.
Delilah Sulwyn & Mal Jones

Il n'est pas d'ermitage assez isolé, de chemin suffisamment accidenté pour me tenir éloigné de Delilah Sulwyn. Si je croyais alors peut être serais-je enclin à en appeler au destin, pointer du doigt l'inévitable fatalité. Mais tout n'est que science de cause à effet, un gouffre qui ne peut qu'être comblé, deux mondes qui gravitent l'un contre l'autre sans autre choix que de se rattraper. Se rattraper pour se détruire et tout recommencer, le grand cataclysme d'un univers toujours en mouvement. Si j'ai fuis c'est parce que je pouvais voir cela arriver, défiler l'instant avant de foncer droit dans le mur; parce qu'il est des lois immuables à ma personnalité. Je fais souffrir les autres, que ce soit par passivité, maladresse ou passions incontrôlées. Peu importe les circonstances, la finalité sera toujours teintée de regrets. On aurait pu être, devenir. Deux existences pour le prix d'un seul hasard. Si j'étais resté à ses côtés, si j'avais tenu ma promesse de ne jamais l'abandonner alors peut être que le sort l'aurait épargnée des violences d'un autre. Mais tout cela est de ma faute et peu importe si je ne suis qu’un l'écrou mal vissé sur des milliers lorsque j'ai quand même envoyé ce navire par le fond. Je ne récolte que la tempête, les conséquences de mes choix et de mes actions. La présomption d'innocence ne me sauvera pas lorsque je suis déjà coupable de l'avoir aimée. Et ce serment de ne dire la vérité rien que la vérité je le fais, main levée au verre de champagne éclaté. Les mots qui s'échappent de mes lèvres sans aucun contrôle, plaidoyer pitoyable d'un crime commis il y a des années et pour lequel je n'ai pas encore payé. Je n'ai pas mis la bague au doigt de Delilah, pourtant la corde au cou. Si j'étais resté elle aurait souffert de ma présence plutôt que de l'absence. Peut être que j'aurais alors eu le rôle meurtrier; dans ce procès de nous j'aurais été l'homme qui l'a bafouée plutôt que celui qui l'a négligée. Celui qui l'aurait possédée jusqu'à la dernière goutte, un rouge carmin au creux de ma main, une affection qui abîme la chair lorsqu'elle éclate. Et si rien de tout ceci n'était arrivé, si j'étais resté à ses côtés. Si j'avais surmonté mes peurs, si je l'avais aimée comme elle le mérite et que j'étais resté éloigné de ces paradis cajoleurs qui empoisonnent mon esprit. Si j'avais décidé autrement alors peut être que cela aurait fonctionné. Mais rien ne sert de courir après le passé lorsque le présent amène les faits : je suis un sacré bordel qui ne demande qu'à se produire. Je n'ai pas pu demeurer en retrait, je n'ai pas pu l'éviter. Elle se tient devant moi, nouvelle croisée des chemins. Alors sans doute à tort ai-je refusé une fois le bonheur qui portait son nom, mais aujourd'hui elle ne doit pas subir ce que je suis devenu. Je ne peux pas aimer Delilah Sulwyn parce que je suis déjà l'amant de mon auto destruction programmée. Je ne peux pas lui faire face et lui faire mal de tout celui que je me fais. Elle ne doit pas savoir, que l'homme qui porte cette paire de converse à ses pieds à prit trop de mauvais tournants pour en arriver là. Plutôt seul que de risquer de blesser la compagnie. Éternelle fuite, cette fois-ci justifiée. J'espère juste qu'il lui reste assez de bonté pour me faire pardonner de ce qu'il va maintenant se passer.

L'eau froide est un électrochoc suffisant pour m'éclaircir l'esprit, la douleur physique un lointain écho qui n'arrive pas à percer au travers du poids de cette blessure invisible. Le crystal a coupé comme du rasoir, la paume abîmée contre le verre broyé mais les dizaines d'entailles minuscules ne sont pas assez profondes pour me mettre définitivement hors jeu de cette soirée. Beaucoup de sang pour rien. Beaucoup de larmes et de mots amers. Et pour quoi ? Je soupire, fermant les yeux quelques instants, la main teintant toujours l'eau sur le carrelage. C'est d'abord le claquement discret de ses talons qui l'introduit, sa voix me parvient comme un songe, quelque chose de familier et pourtant surréaliste. « C'est rien du tout. » Je balaie rapidement ses inquiétudes sans pour autant me tourner pour lui faire face. « J'ai...l'habitude. » D'avoir mal, d'être maladroit, de souffrir des petits bobos si facilement évitables. Elle sait, elle a déjà tout vécu à mes côtés. Elle a connu ma gaucherie lorsqu'elle n'était encore qu'un charmant défaut. Maintenant ce n'est plus que la bêtise, celle du bordel intérieur qui a finit par se refléter à l'extérieur. Les bleus comptent les jours comme les traits gravés sur les murs d'une prison. Elle s'approche de nouveau et ses pas précautionneux me donnent pourtant envie de reculer. Animal à l'affût, malgré moi prêt à ressortir les crocs sous l'emprise de cette colère étrange qui m'a secoué le cœur il y a quelques minutes. Je n'ai d'autre choix que de me tourner, me laisser irradier. Elle a encore les yeux humides, le joli maquillage qui soulignait ses paupières à légèrement coulé sur sa joue. Noir d'encre sur sa peau claire, la marque indélébile de ses larmes en mon déshonneur. Je détourne le regard lorsqu'elle s'excuse, qu'elle me réprimande pour avoir été honnête avec la vérité et les faits. Fidèle à moi-même. De toutes les personnes, comment peut-elle réfuter ma fuite ? Le pardon fait plus mal que la colère. Un pas en arrière, puis deux, ma main valide serrant fermement celle blessée.  « Tu vas tout me pardonner ? Même le jour où je t'aurais mise plus bas que terre ? Comme avec tous les autres ? » Comme tu as pardonné à tous les hommes de ta vie ? Les mots s'échappent sans que j'ai le temps de les pondérer, ma voix étonnamment stable. Cette fois je trouve le courage de plonger mes yeux dans les siens. Elle est beaucoup trop proche, chaque pas que je fais pour m'éloigner qu’elle persiste à rattraper. Je peux sentir quelques éclaboussures sur ma nuque, la chaudière du gymnase commençant enfin à réchauffer l'eau des vestiaires. Une légère vapeur s'égare entre nous, probablement chaleureuse en d'autres circonstances. Les vannes sont ouvertes et que se déversent les flots, les sentiments en crue. « Je t'interdis de m'excuser. Je t'interdis de laisser les bons moments compenser pour les mauvais. Je ne mérite pas ta bonté. » Le ton amer, le nez relevé avec une pointe de défi. Que dois-je faire pour qu'elle comprenne, qu'elle cesse de me regarder avec cette nostalgie irrémédiablement affectueuse. Celui que j'étais mais que je ne suis plus. « Le Maldwyn Jones que tu connais est mort Delilah. J'ai mentis parce qu'il ne sert à rien de prétendre ressasser un passé déjà six pieds sous terre. Je ne suis rien de plus qu'un étranger avec un visage qui t'es familier. » Lui faire mal, la faire souffrir. Peut être que c'est la solution pour qu'elle abandonne, qu'elle oublie sa douceur et sa détermination à mon égard. Devenir l'espace d'un instant cet autre connard à qui elle aurait pu être mariée, viser droit dans le cœur et rater juste assez pour que la prochaine frappe ne lui soit pas fatale. J'émets un léger rire acerbe, continuant de reculer imperceptiblement vers les douches face à son obstination à vouloir se rapprocher de moi. « Toi et moi c'était juste une catastrophe qui attendait de se dérouler. T'as sûrement choisis le moindre mal avec William. » Toujours plus violent, mes propres mots faisant monter quelques larmes de rage que je peine à retenir. Mes poings se ferment, l'hémoglobine coule sur mes phalanges sous la pression. Je ne pense même pas ce que je dis. Mais il faut qu'elle comprenne, que je la dégoute suffisamment pour la protéger de mon existence. Affection tordue, intentions contraires. J'échappe un souffle rauque, je grogne comme un chien donne son dernier avertissement avant de mordre. L'eau éclabousse les épaules de ma veste, j'ai presque reculé sous les flots pour couvrir ma fuite. « J'aurais pu le tuer Lylah… » Ma voix se brise, soudainement incontrôlable. Je dois continuer à lui faire mal, je ne peux pas tout saboter maintenant. Mzis je ne peux garder la face à la pensée de tout ce qu'elle a traversé. « J'aurais pu le tuer pour ce qu'il t'a fait. » Mais je m'en veux encore plus pour ce que je t'ai fait. Je me contredis dans mon discours, mais j'arrive pourtant mieux à respirer tout à coups. Le poids des non-dits qui commence à s'envoler. Ma main se tend vers sa joue, mon pouce brouillant un peu plus le maquillage charbon sur sa pommette en l'effleurant. Est-ce qu'on peut tout oublier, s'il te plaît ? Je réalise sa proximité, la victoire imminente de sa douceur sur mes manigances pour lui faire peur. Alors dans une dernière tentative je fais un pas en arrière, passant cette fois au travers du jet d'eau pour me retrouver le dos collé au mur, le mince flot me tombant sur les chaussures pour nous séparer de force. « Tu ne peux pas me suivre Lylah, je peux pas te laisser nager dans ces mêmes eaux troubles. » Je désigne d'un geste la douche non sans provocation.  « Parce que tu ne pourras pas rester à mes côtés sans devoir te mouiller. Si je dois te faire souffrir pour te garder à distance, pour éviter de répéter les erreurs du passé, alors je te ferais souffrir Delilah. Un mal pour un bien. » Mais au fond de moi je ne peux m'empêcher de chercher la rédemption maintenant que la seule personne capable de me l'offrir me regarde avec autant d'intensité.

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Turning Tables - Jeu 22 Nov - 1:33

turning tables

Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

Comment cette charmante soirée avant tant pu tourner au désastre ? Comment n'avaient-ils pas réussi à discuter de tout cela calmement, comment elle n'avait pu s'empêcher de lui parler avec le cœur et non la tête ? Comment avait-il pu lui répondre avec autant de vivacité et de sincérité alors qu'il n'avait fait que lui mentir jusque là ? Ce revirement soudain et inattendu de la part du professeur dérouta sans aucun doute Delilah. Elle pensait le prendre assez au dépourvu pour qu'il s'explique, qu'il abdique sans faire de vagues. Jamais elle ne l'avait vu si tendu, si en colère. Peut-être ne le connaissait-elle plus après tout, les gens changent lorsque les années passent. Pourtant en le voyant débarqué sur le parquet du gymnase il ne semblait pas avoir pris une ride, il avait ces fameuses chaussures aux pieds, ses cheveux en bataille, c'était comme le revoir à l'époque qu'ils s'efforçaient de célébrer. Le même petit sourire charmeur, la fausse assurance … Cela avait été stupide de croire que tout se passerait en douceur. Elle avait été stupide. Les éclats de verre, le subite retour à la réalité. Tout ce que ces souvenirs projetés avait réussi à faire ressortir avait été le pire choix qu'avait fait la jeune femme dans sa vie. Si elle n'avait pu être avec Maldwyn et éviter au moins William, demeurant seule, ça aurait été une option tout aussi valide. Pourquoi n'avoir pas envisagé cette option ? Se laisser séduire par le diable en personne, ce sociopathe déguisé. Laisser partir Mal sans se battre, tomber dans les bras d'un connard manipulateur, voilà les deux plus beaux plantages de l'avocate illustrés en deux minutes sous ses propres yeux. Dans cette ambiance de cinéma c'était comme être obligé d'assister à une rétrospective sur sa vie sentimentale ratée de bout en bout. Pourquoi avait-il fallu que le temps avance, pourquoi n'aurait-elle pas pu rester une enfant sans histoire, pourquoi s'était-elle entêtée à faire des études, pourquoi n'avait-elle pas écouter ses parents … L'indépendance et les rêves, quelle supercherie. Pourtant son travail était la seule chose qui lui restait à présent, plus de vie de famille pour elle, plus beaucoup d'amis non plus. Revoir Maldwyn était un peu son étincelle dans cette vie monotone, espérer qu'il se souvienne d'elle et de leurs moments ou juste lui parler, voir son visage. Elle s'était trop raccrochée à cela et ça avait causé sa perte, leur perte. Alors qu'elle se croyait innocente et dans son bon droit elle se rendit compte qu'inconsciemment elle lui en demandait trop, le regarder avec tant de douceur comme si de nouveau ils étaient étudiants alors qu'ils avaient tout les deux vécus de sales choses depuis. Sauf qu'elle ne savait pas, c'était tout ce qu'elle demandait pourtant, rattraper le temps perdu comme deux bons vieux amis mais il voulait la tenir éloignée.

Quittant à son tour le gymnase sur les traces du déserteur blessé Lyla voulait s'excuser pour son comportement et s'assurer que les plaies n'aient pas été trop profondément dans la chaire de Mal. Elle n'en revenait toujours pas d'avoir été la cause de ça … Elle s'en voulait terriblement. Alors elle le retrouva dans les vestiaires, près des douches. L'eau se déversant avec force sur le carrelage venait s'écraser contre la paume meurtrie du professeur. Delilah s'approcha alors doucement, elle voulait voir, se rassurer de ne pas avoir tout perdu. Ses pas avait été hésitants dans un premier temps, se demander si c'était une bonne chose de le rejoindre était une question sensée. Mais lorsqu'il s'agissait de Maldwyn le sens n'avait plus trop sa place dans le monde. Elle avait pénétré sa cachette en retrouvant un peu d'assurance. Elle ne voulait pas qu'il la voir chanceler, blessée ou faible. Toujours il fallait qu'elle arbore ce visage de femme forte qui s'en était sortie, qui avait surmonté ses démons passés. Il n'avait pas à pâtir de ce qu'elle avait pu vivre, elle ne pouvait lui infliger ça, jamais ça lui viendrait à l'esprit. Venant à sa rencontre de peur qu'il ne se torture plus que nécessaire comme il en avait l'habitude ses pas la menèrent à à lui, sans détour, sans arrêt. Il était en train de rincer sa blessure, le dos voûté, comme fermé au monde qui pouvait arrivé. Il ne voudrait sans doute plus la voir mais elle ne pouvait encore une fois le laisser partir sans explications et surtout sans lui courir après. Elle exprima son inquiétude lorsqu'elle était sur le pas de la porte. Alors qu'elle arrivait à lui il lui répondit : « C'est rien du tout. J'ai... l'habitude.  » Assura-t-il sans pour autant prendre la peine de faire face à son fantôme. Alors elle continuait de l'approcher, doucement, pour ne pas l'effrayer, il allait vouloir lui échapper encore pour ne pas avoir à affronter ses mots aussi doux soient-ils. Puis elle l'atteint enfin. Elle ne le touche pas pourtant elle en crève d'envie. De prendre sa main, de l'aider, toujours. Ça n'aurait pas été la première fois qu'elle assiste à une petite maladresse de sa part. Après quelques secondes il se retourne enfin vers elle alors qu'elle se permet de lui taper sur les doigts. Leurs regards se séparèrent bien vite. Il recule sans réussir à faire face à son visage qui n'est empli que de douceur à présent. Parce qu'il souffre, qu'elle est présente pour lui, que peu importe les mots.  Enfin c'est ce qu'elle croyait avant qu'il ne se lance dans cette guerre contre elle, de tirer ces pics pour la faire saigner à son tour. « Tu vas tout me pardonner ? Même le jour où je t'aurais mise plus bas que terre ? Comme avec tous les autres ? » Les sourcils de l'avocate se froncèrent à ces paroles. Il n'avait rien fait de mal, il ne l'avait jamais mal traitée, elle n'avait rien à pardonner excepter mettre à plat cette histoire de mensonge. Avec tous les autres ... Il n'y avait pas eu beaucoup d'hommes qui avaient compté dans la vie de Delilah. Maldwyn en faisait partie, il le savait. Jamais elle ne pardonnerait à son ex-mari ce qu'il lui a fait vivre, ce n'était pas pour rien qu'elle s'était lancée dans cette croisade insensée et ce divorce pour le faire payer. Jamais elle ne lui pardonnerait d'avoir réussir à effacer qui elle était juste par la force d'un anneaux à son doigt. Jamais elle n'aurait autre chose que de la rage pour lui, de la haine. « Tu dis n'importe quoi, tu n'aurais jamais rien fait de la sorte et tu le sais. » Répond-t-elle alors fermement, ses yeux redevenant humides, sa mâchoire se serrant. Était-ce l'amertume de ses mots ou bien la chaleur qui commençait à s’échapper de l'eau qui lui faisait monter les larmes ainsi ? Toujours pour Mal elle serait douce, parce qu'il a été son meilleur ami avant de devenir sa moitié, pour un temps. Il s'entête à continuer de lui échapper en s'enfonçant un peu plus dans la douche, frôlant le jet continue, distribuant son poison. « Je t'interdis de m'excuser. Je t'interdis de laisser les bons moments compenser pour les mauvais. Je ne mérite pas ta bonté. Le Maldwyn Jones que tu connais est mort Delilah. J'ai mentis parce qu'il ne sert à rien de prétendre ressasser un passé déjà six pieds sous terre. Je ne suis rien de plus qu'un étranger avec un visage qui t'es familier. » Ce fut alors au tour du professeur de devenir âpre alors qu'il parvenait enfin à la regarder, un air faussement triomphant affiché sur le visage. Il jouait au con, au connard. Il n'avait peut-être pas tort cela dit, si il avait tant changé que ça il n'était qu'un étranger mais son petit subterfuge avait empêché à Lyla de faire la connaissance du nouveau Maldwyn Jones. Il la gardait sans cesse à l'écart de ce qu'il prétendait être devenu alors qu'elle aurait été plus que ravie de pouvoir juger par elle même de ces fameux changements. Elle aurait aimé aller de l'avant, si il n'avait pas joué cette comédie absurde ils auraient pu avancer, pas forcément main dans la main mais au moins aux côtés d'un visage familier. Il n'avait pu se transformer au point de ne plus pouvoir devenir son ami, cela lui semblait impensable, malgré tout ses travers, toutes ces affreuses passes. Il rit de ses propres paroles, appuyant sur sa mauvaise foi, masquant sa peur et ce mouvement de recul constant. « Toi et moi c'était juste une catastrophe qui attendait de se dérouler. T'as sûrement choisis le moindre mal avec William. » Une montée de colère monta directement aux visage de la jeune femme qui serra les poings et les dents, ses nerfs se crispant, ses lèvres se pincèrent. Elle l'aurait giflé, si elle avait écouté son premier instinct il s'en serait pris une en pleine face puis elle aurait tourné les talons sans en attendre plus. Maldwyn a la même réaction pourtant. Se rend-t-il seulement compte des conneries qu'il profane ? Rien ne pouvait être pire que William, même morte elle aurait été plus libre et en paix. « Tu n'es pas sérieux. » Affirma-t-elle sans flancher, la mâchoire serrée, ses yeux clairs se perdant sur le carrelage inondé de la douche. Quand bien même leur histoire n'avait pas été une réussite elle restait un des plus belles qu'avait pu vivre la galloise parce qu'elle avait été vécue avec le cœur, sans arrière-pensée, juste eux en tout simplicité. Ce n'était pas ainsi que Mal pensait, il se jouait d'elle encore une fois, il commençait à devenir maître en la matière pour se payer sa tête. Elle avait envie de pleurer, de nerfs, seulement de nerfs. L'homme lâcha un râle qui extirpa la femme en colère de sa fulmination. Pendant un instant, à force de l'écouter déblatérer ses conneries, elle avait omis qu'il était bel et bien blessé. Elle redescendit alors sur terre, elle ne comprenait plus rien. Confuse elle s'arrêta d'avancer, le laissant reculer autant qu'il le voulait, le laissant s'éloigner d'elle et de son emprise étouffante. Il y a cinq secondes il semblait satisfait qu'elle se soit faite frapper par William, ce qui était d'après lui le moindre mal. Il se foutait de sa gueule. « J'aurais pu le tuer Lylah… J'aurais pu le tuer pour ce qu'il t'a fait. » Les yeux de la blonde se relèvent alors enfin sur lui. Ces mots elle y croyait, plus que cette merde qu'il lui avait servi avant. Alors pourquoi ? Pourquoi faire autant de détours lorsque c'est si simple de dire la vérité, le fond de sa pensée. Une mélancolie certaine s'empara alors de son cœur en miette. Les choses auraient-elles pu être différentes si au moins ils étaient restés en contact, si il ne l'avait pas abandonné sans explications ? Aurait-elle été apte à tenir au loin les démons du professeur ? Aurait-il pu la sauver du sien ? Elle n'en savait rien, elle ne préférait pas y croire pour éviter de se faire du mal. Il tend une main vers son visage à la peau de porcelaine. Il touche délicatement sa joue, elle put alors se rendre compte que dans son animosité une larme s'était échappée du coin de son œil, emportant encore un peu de mascara dans sa chute. Ils étaient proches du jet, il la protégeait des possibles éclaboussures jusqu'au moment où il fit l'utlime pas qui la sépara d'elle, se retrouvant littéralement au pieds du mur. Passant sous la cascade d'eau chaude, il ne pouvait plus s'éloigner d'avantage. Elle le regarda au travers de l'eau qui s'écoulait. Il ne voulait vraiment plus être à ses côtés pour autant la fuir … Cela lui fit mal, un mal de chien. « Tu ne peux pas me suivre Lylah, je peux pas te laisser nager dans ces mêmes eaux troubles. Parce que tu ne pourras pas rester à mes côtés sans devoir te mouiller. Si je dois te faire souffrir pour te garder à distance, pour éviter de répéter les erreurs du passé, alors je te ferais souffrir Delilah. Un mal pour un bien. » Il aurait été tellement plus facile de mettre les points sur le "i" dès leurs retrouvailles plutôt que d'avoir eu à vivre tout cela. Si il lui avait dit qu'il ne voulait plus rien avoir affaire avec elle, elle aurait respecté son choix, comme chacun des choix qu'il avait fait jusque là. Mais avec Maldwyn Jones rien n'était simple, c'était une aventure de tout instant, des montagnes russes desquelles on ne descend jamais. Delilah ne lâchait jamais rien, têtue comme une mule c'était un atout pour son travail de tous les jours mais ici … Il la provoquait pourtant et elle aurait répondu sans sourciller si ils n'avaient pas un passé aussi lourd, si les enjeux étaient moindres.

Elle aurait aimé lui dire tant de choses, pouvoir retirer la pression qu'il se mettait tout seul sur les épaules. Elle s'aperçut que ses escarpins étaient trempés, cela ne l'avait pas frappé plus tôt. Ce n'était que de l'eau, que de l'eau qui les séparait. Ce n'était rien et pourtant le jeune homme y tenait, à mettre cette distance entre eux. Si sa présence était si difficile à supporter alors très bien, elle le laisserait tranquille, faire sa vie, comme si il n'était jamais entré dans la sienne. Si c'était des adieux qu'il voulait, la logique voudrait que ce soit ici et maintenant, leur dernier moment ensemble. Delilah tendit alors sa main, faisant passer également son avant-bras au travers du jet de la douche, n'ayant clairement rien à faire de tremper en partie ou en totalité sa robe. Elle avait encore son regard dans le sien même si l'eau venait entraver cette connexion. Son bras tendu elle passa ses doigts dans les cheveux mouillés de Maldwyn qui gouttaient sur son front. Elle avait le regard plein de tendresse, cette douceur qu'il avait tenté de faire disparaître, ses larmes qui revinrent à cause de ses mots. Ses doigts glissèrent jusqu'à sa joue. Elle le considéra alors un instant, émue par cette vision, par ses pensées qui lui criaient que c'était la fin, qu'elle devait lâcher prise. Elle n'en avait pourtant pas envie. « Tu es une belle épave Maldwyn. » Murmura-t-elle. Qu'elle aurait aimé comprendre ce qui pouvait bien se passer dans cette tête trempée qui semblait fonctionner à reculons. « Tu sais que je serais capable de te suivre. Au fond tu le sais très bien. » Elle n'avait qu'à faire un pas. Un simple pas. La soirée n'existait plus, plus depuis que son regard avec croisé celui de cet homme avec lequel elle avait partagé une partie de ses études. Plus depuis qu'elle avait décidé de découvrir la vérité. Malgré qu'il clame être un tout autre homme ses yeux pouvaient encore déceler ça et là les vestiges de l'étudiant qu'elle avait connu. Il était toujours là, il s'était juste un peu perdu en chemin. Son souffle se coupa, elle n'arrivait plus à respirer calmement. La boule d'angoisse et de regrets fit son retour dans sa gorge. Tirant sur ses cordes vocales, essayant de sortir en poussant à travers sa peau. « Je ne sais pas ce qui t'es arrivé, pourquoi tu dis avoir changé. Mais si ... » Sa voix se brisa, le temps était venu, la boule d'émotions dans sa gorge prit trop d'ampleur. Elle savait qu'il l'oublierait alors pour de vrai, si elle avait insisté il serait sans doute encore parti alors elle capitula. « Si tu ne veux plus me voir, même en temps que vieille amie, très bien. » Elle avait pourtant enduré plus ardu comme situation dans sa vie mais cela la brisa. Devoir dire au revoir à cette partie importante de son passé ... Les larmes coulèrent doucement sur ses joues, amères. Encore une fois elle avait fait le choix de le respecter. Pourquoi ne pouvait-elle jamais prendre le taureau par les cornes avec lui ? C'était toujours la même erreur qu'elle faisait, trop gentille, trop douce. Elle ne voulait pas lui faire du mal, ne pas le forcer comme on avait pu la forcer. Pourtant malgré ce qu'elle venait de dire elle se rapprocha du professeur, passant à son tour sous la douche qui crachait son eau chaude et embuait la pièce. Elle le regarda alors un instant avant de prendre son visage dans ses mains. Elle se mit sur la pointe des pieds et vint déposer un baiser sur son front, fermant les yeux, pressant doucement ses lèvres contre sa peau humide. « Je serais toujours là si tu as besoin. » Lui murmura-t-elle une nouvelle fois, la voix cassée emplie de tristesse. Elle savait qu'il n'aurait certainement pas besoin d'elle. Que si il la mettait ainsi à l'écart c'était pour ne pas à avoir à se laisser hanter par le passé. Qu'il devait vivre sa vie sans se soucier de ce qu'elle pouvait bien représenter ou penser. Elle se remit ensuite bien à plat sur ses pieds. Ses yeux s'ouvrirent sur le bleu profond de ceux de Maldwyn, tenant toujours son visage. Ses larmes avaient été balayées par le torrent d'eau et à présent qu'elle était trempée on ne pouvait faire la différence entres les gouttes salées et les gouttes douces qui perlaient sur son visage tout entier. Elle ne pourrait s'empêcher de vouloir l'aider mais ne le ferait que si il vient à elle pour ça. Elle l'abandonnait comme il lui conseillait mais elle lui prouva tout de même qu'elle pouvait littéralement se mouiller pour lui. Amie dévouée, ancienne amante coriace ou bien simple fantôme, le choix lui appartenait maintenant. Elle ne demandait rien d'autre que pouvoir retrouver ce vieil ami de fac avec qui elle avait été vraie du début à la fin et qui la connaissait mieux que personne mais elle respectait son choix de jouer les inconnus si c'était ce qu'il désirait.
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Turning Tables - Jeu 13 Déc - 21:37




― Turning Tables ―
Dreamers they never learn oh they never learn,
beyond the point of no return.
And it's too late the damage is done,
this goes beyond me, this goes beyond you.
Delilah Sulwyn & Mal Jones

Alors puisqu'il faut en finir que tombe le rideau. Les bouquets de fleurs qui auraient pu être à ses pieds; que des flaques de mots amers qui espèrent la faire déraper. Mais campée sur ses échafaudées elle refuse de comprendre : je ne peux que lui offrir cette souffrance qu'elle croit avoir échappée. Ce mélodrame qu'elle connaît si bien. Elle est fière et pire encore, elle est fière de moi. Douce amère, une Piété qui m'invite à mourir entre ses bras, l'affection sacrée et inébranlable à mes péchés. Parce que plus que l'objet de l'affection d'un homme elle est l'amie d'un adolescent, la gardienne d'un enfant. Parce que tout aurait été plus simple si nous nous étions aimés de corps avant d'esprit, si nous avions cherchés à impressionner de nos mensonges avant de partager nos vérités touchantes. Nous avons un passé et une affection qui n'est pas uniquement celle d'anciens amants. Et c'est parce que nous avons aussi dépassé les frontières de l'amitié que les choses sont si complexes. Pas de retour en arrière possible, pas complètement. Ni d'aller de l'avant, pas quand nous traînons ces lourds bagages, pas si facilement. Alors c'était plus simple, la fuite. Tomber le voile sans encore, avorter les possibles plutôt que de les voir échouer. Ce n'est pas que de la peur, de la culpabilité ou de l'indécision. Quelque part j'ai l'impression de l'avoir trahie, de ne pas être devenu celui que je lui avais promis d'être. Au delà de ma promesse de toujours être là pour elle, quel serment pourrai-je encore tenir lorsque je ne sais même pas demeurer auprès de moi-même ? Au chevet de mes démons, ceux que Lise a eut tout le loisir de deviner, ceux que Clemens a choisi d'ignorer. Que j'ai choisi d'ignorer aussi. Je ne suis pas qu'une belle épave, je suis aussi un capitaine bien décidé à couler avec son navire. Je ne veux pas l'entraîner avec moi. Les promesses semblaient si faciles à l'époque, quand la vie ne nous avait pas encore révélé ses quatres vérités. Lorsque je regarde mes élèves cela me frappe parfois, à quel point ils ont de la chance. On passe ses études à préparer sa vie alors qu'elle se vivait là, au son des rires de Delilah. Alors je ne peux que lui affirmer que je ne suis plus le même, je ne suis plus celui qu'elle a connu. Un étranger qui n'a plus que ses souvenirs pour tirer des fils de Polichinelle et prétendre encore danser la valse du passé.

L'eau. C'est toujours l'eau qui semble m'accompagner. Sur la vitre dans la bibliothèque. Sur le sol dans cette ruelle mal famée. L'eau de l'océan, celle des larmes. Les miennes, les autres, les siennes. Elles suffiraient à conjurer des catastrophes ces larmes-là. Elles ont déjà arrêté des guerres ouvertes et gratifié des attentions de leurs versants heureux. Des trombes de larmes qui disparaissent sous des trombes d'eau chaude. La douche me laverait tout entier mais je me sens sale à l'intérieur. Corrompu de lui avoir dit toutes ces choses pour la faire partir, pour défendre l'intégrité d'un mensonge inutile et surtout dirigé contre moi-même. Une colère à sens unique. L'évidence même de sa présence ardemment désirée. Je n'avais rien espéré d'autre, être déjà une fausse connaissance satisfaisait amplement mon cœur. Mais si soudainement reprendre ma place, remboiter la pièce du puzzle et redevenir Maldwyn Jones à ses yeux, est quelque chose que je redoutais. Mais on ne peut rien cacher à celle qui vous a déjà connu accompli, celle qui a déjà les clés. Alors je ne peux que la laisser entrer. Et elle a raison, je la sais capable de me suivre jusqu'en enfer. Je n'ai pas cru un seul instant réussir à l'effrayer, mais il me fallait essayer. Acculé contre le mur, ses doigts qui traversent le voile aqueux pour venir se saisir de quelques mèches de cheveux. La manche de sa jolie robe qui colle contre sa peau, les torrents et les montagnes ne savent arrêter Delilah Sulwyn et j'aurais dû m'y attendre.

Quelques syllabes s'échappent de mes lèvres, un sursaut qui s'échappe comme un souffle que je n'avais pas conscience d'avoir retenu. Je ne peux plus reculer pour échapper à son contact, ces empreintes délicates qui ne m'atteignent pas autant que la tristesse qui redouble sur ses joues. Non… arrête Ma main chasse la sienne avant de chercher à tâtons le robinet sans pour autant le trouver, le regard tétanisé par la proximité de sa peine. Contradiction de corps et d'esprit, j'aimerai lui hurler de partir autant que de refermer mes bras sur ses épaules. J'ai envie de lui parler autant que de me taire. L'avoir à mes côtés autant qu'elle ne disparaisse. Moi qui ait rêvé pendant des années de pouvoir tout recommencer. Le souffle court, j'aimerai pourtant la contredire. Donner les derniers sacrements de cette relation d'un dernier jet de sarcasme. Une violence verbale aussi pauvre que mes excuses. Mais la véritable brutalité est dans la capitulation de son visage. La vraie torture c'est ces mains qui soutiennent le mien, ces lèvres qui déposent une bénédiction sur mon front. Arrête je t'en supplie… « Je serais toujours là si tu as besoin. » Mes doigts ont enfin trouvé le robinet, mais c'est un autre flot qui s'écoule maintenant. Je me suis brisé si facilement. Pourtant j'aimerai encore essayer de la protéger. La préserver de moi. « Tais-toi. » Que je grogne en retenant un hoquet, les larmes contenues dans un élan de fierté. Mes bras emprisonnent rapidement sa silhouette pour la coller contre la mienne. « Arrête de me respecter Delilah. » J'ordonne sans pour autant réussir à imiter ce ton froid espéré. Là tout de suite, mon corps est prêt à fondre contre le sien. « Arrête de calmement hocher la tête face à mes choix et me laisser te blesser comme ça. » Je la serre encore plus fort malgré mes mains tremblantes. Girouette aux quatres vents, les sentiments en vrac et les mots contradictoires. « Je ne mérite pas ta compassion et surtout pas ton support, c'est clair ? Pas après t'avoir laissée. » A ces mots je me détourne pour la pousser contre le mur carrelé, maintenant tant bien que mal ma poigne pour ne pas la brusquer. J'accepte enfin de la regarder en face après avoir fui dans la proximité de notre étreinte. Les dents serrées sur l'intérieur de ma joue pour ne pas laisser transparaître les fêlures de mon être, les larmes amères prêtes à rejoindre les siennes. Ma main s'approche de sa joue, récoltant une nouvelle fois sa tristesse d'encre du bout du pouce. Que sommes nous, sinon deux fantômes du passés détrempés par la hantise du présent. Un soupire douloureux m'échappe. « Ne bouge pas, j'ai pas envie que tu glisse sur le carrelage à essayer de me rattraper. » Un sourire point presque au milieu de la tristesse, un geste spectral pour replacer une mèche derrière son oreille avant de me détourner. Non sans peine je parviens à dénicher une serviette oubliée dans les vestiaires par l'un des concierges du campus. Je la ramène près d'elle, non sans essayer en vain de ne pas tâcher le tissu éponge avec ma main abîmée. Regarde-moi, un imbécile qui souffle le chaud et le froid armé de sa serviette à l'odeur légèrement rance. Sans ajouter un mot, j'approche le tissu de son visage et entreprend délicatement de sécher ses larmes et tamponner l'eau qui ruisselle encore sur son cou. Je descend le long de ses bras, effaçant tant bien que mal l'audace qui lui avait coûté son apparence soignée. « T'aurais pas dû me suivre, c'était stupide. » Que je commente avec un nouveau grognement avant de me souvenir de qui il s'agit vraiment. La seule femme capable de me suivre, celle qui était toujours restée à mes côtés même dans l'absence. Je me mord la lèvre, stoppant mes gestes un instant avant de me reprendre. « Je suis désolé Lylah. » Je ne m'attarde pas, croisant brièvement son regard avant de m'agenouiller à ses pieds. Je saisis délicatement l'une de ses chevilles pour la hisser hors de son escarpin gorgé d'eau, continuant sur ma lancée je frotte la serviette contre ses chevilles. Il y a une marque à peine visible sur l'os de l'une d’elle, une fine ligne blanchie que je remarque surtout parce que j'en connais l'existence et l’origine. Je m'arrête un instant, mes doigts en dessinant à peine le tracé. Je ferme les yeux, soupirant. Ma voix à du mal à s'élever dans le silence. « C'est étrange de se dire que quelque chose qui s'est passé il y a si longtemps est encore bien visible. » Rien d’important, juste le résultat d'une mauvaise chute lors d'une balade en montagne, un été. Un été si lointain et pourtant j'en dessinerai encore les contours. Comme avec chaque souvenir d'elle. Je caresse une dernière fois la cicatrice de ces mémoires accidentellement heureuses, me redressant pour enrouler la serviette autour de ses épaules. Les mains jointes contre ses clavicules, mon regard se perd dans le sien avant de lâcher prise. « Mais je crois que ce sont les cicatrices qu'on ne voit pas qui sont les plus vicieuses. » Je lui offre un pauvre sourire, écartant une nouvelle mèche de cheveux de son front. « J'ai besoin de toi Lylah, mais tu n'as pas besoin de moi. Crois-moi. » Je dépose un baiser contre sa tempe, fermant les yeux un instant. Demeurant joue contre joue plus longtemps que je ne l'aurais voulu, je finis par me détacher doucement. « Je vais appeler un taxi si tu veux, c'est le moins que je puisse faire pour avoir ruiné ta soirée… » Je me passe une main sur ma nuque. « Il y a une sortie par les vestiaires, tu n'auras pas besoin de sortir devant tout le monde dans cet état… » Je jette un regard vers la musique qui a repris et la lumière qui parvient par la porte entrebâillée avant de me reprendre. « Même si tu restera toujours la plus belle de notre promo. » Je rougis moi-même du compliment, réajustant en hâte la serviette sur ses épaules avant de m'éloigner. Puisqu'il faut en finir et tomber le rideau. Tous ce drame et tous ces mots parce que je l'aimais et que je l'ai trahie. J'ai peur de faillir de nouveau à cette promesse, parce que je crois que je l'aime encore.
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Turning Tables - Mer 16 Jan - 2:47

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Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

Abandonner, capituler, rendre les armes. Aussi féroce combattante soit-elle Delilah avait renoncé à garder cet homme dans sa vie. Avec le respect qu'elle ne pouvait s'empêcher de ressentir, cette envie de ne pas appuyer plus fort car elle avait déjà assez abusé de lui. Il ne voulait plus la voir, soit. Elle n'aurait pu supporter l'idée de l'avoir forcé à partager plus que ce qu'il ne désirait, tout comme William l'avait forcé, elle ne pourrait supporter de devenir à son tour le démon de quelqu’un, surtout pas de quelqu'un pour qui elle avait eu des sentiments profonds. Maldwyn ressemblait vraiment à un animal apeuré, il crachait sur la blonde comme pour lui signifier de reculer. Sauf qu'elle n'écoute qu'à moitié, parce que les animaux ou personnes mal en point c'est sa faiblesse. Elle subit, bronche à son tour puis finit par se radoucir à mesure qu'il s'éloigne. Alors elle entre dans sa danse une dernière fois, pour les adieux. Elle l'approche de trop près, l'accule. Il s'est mis dans le pétrin et n'arrive pas à s'en sortir. Lyla prend sur elle pour prononcer des mots qui lui font mal mais termine par une note d'espoir. Parce que si lui veut la rayer de sa vie, elle n'en voit pas l'utilité et pense qu'avoir une vieille connaissance qui traîne dans le coin est toujours bon à prendre. Avec regrets mais pour son bien, pour sacrer sa volonté, elle lui dit au revoir. Il se serait sans doute bien passé de cet ultime geste, de cet ultime touché. Elle est égoïste et pense seulement que c'est la dernière fois qu'elle peut l'approcher alors elle en profite alors qu'il la repousse, visiblement désemparé. Elle dépose ce baiser sur son front, plonge une dernière fois son regard dans le sien et s'y perd. « Tais-toi. » Qu'il rétorque et elle ne tremble pas. Ses larmes se sont calmés, elle a accepté cette fatalité injuste qu'elle s'auto-inflige : elle le laisserait partir une énième fois. Ce serait les derniers mots qu'elle accepterait de garder de lui ? Si elle n'avait pas le choix ... Alors elle esquisse un sourire triste et s'attarde tandis que sa raison lui crit de tourner les talons, que c'était ce qui avait été convenu pour protéger le cœur. Elle acquiesce doucement alors que sa gorge se sert en pensant que c'est cette image qu'elle gardera de lui ; elle ne rajoute rien et acquiesce simplement, docile. Elle sera restée jusqu'au bout, aura essayé. La galloise aurait pu se rassurer n'importe comment mais le résultat n'en restait pas moins douloureux.

Jusqu'à la dernière seconde, elle essaye de garder la face alors que le professeur s'écroule lui petit à petit. Sa voix se casse, son corps se secoue de sanglots contenus. À cause d'elle … Mais Maldwyn la surprend à l'attirer dans ses bras alors qu'elle avait abdiqué. Il la sert contre lui et craque en premier alors qu'il lui avait intimé de se taire et de s'éloigner. « Arrête de me respecter Delilah. » Ordonne-t-il a nouveau. Elle respire, se sent libérée d'un poids énorme lorsque leurs corps trempés se retrouvent enfin. Les larmes coulent de nouveau, cette tristesse qu'elle s'apprêtait à contenir en lui tournant le dos éclate, l'avocate lâche prise tout comme le professeur. C'est limite si elle arrête de l'écouter parce que tout ce qu'elle souhaitait se trouve là, aux creux de ses bras. « Arrête de calmement hocher la tête face à mes choix et me laisser te blesser comme ça. » L'étreinte se resserre et Lyla enfouit son visage contre la chemise humide de Mal', le laissant s'accrocher. Elle ne pouvait pas s'empêcher d'être douce et attentionnée, de penser à son bien, elle ne pouvait pas passer outre. S'excuser pour cela lui semblait bien inutile, elle ne l'interrompit pas, le laissant vider son sac. Elle sent que ses mains tremblent, il est blessé, elle n'a pas oublié. « Je ne mérite pas ta compassion et surtout pas ton support, c'est clair ? Pas après t'avoir laissée. » Trop sévère envers lui-même. Ils ont fait l'erreur de se faire des promesses alors qu'ils étaient jeunes, Delilah avait compris avec l'âge combien cela avait été absurde ; elle sait à présent que les promesses peuvent être effacées d'un revers de la main, qu'elles soient signées ou non. La poupée blonde ne sait pas quoi lui répondre. Si elle lui confère l'absolution et que ça permet de le libérer, pourquoi ne pas l'accepter ... L'entendre parler ainsi lui fait mal au cœur. Alors qu'elle reprend un peu possession de ses moyens le professeur la met à son tour contre le mur avant de desserrer sa prise sur elle. Le calme n'est pas encore total dans les vieux vestiaires et Maldwyn s'éloigne pour oser enfin supporter le regard bleu de cette femme qu'il a si bien connu autrefois. Il caresse une nouvelle fois la joue de Lyla, qui ne ressemble plus à grand chose, afin d'essuyer ses faiblesses liquides. « Ne bouge pas, j'ai pas envie que tu glisse sur le carrelage à essayer de me rattraper. » Il range doucement une mèche de ses cheveux blonds derrière son oreille avant de reculer. Elle le regarde disparaître le cœur serré, elle a peur qu'il la laisse ici, que ce ne soit qu'une simple manipulation pour pouvoir mieux fuir et s'évaporer pour toujours. La galloise ne se laisse pourtant pas envahir de nouveau, elle se redresse et essaye d'essuyer ses yeux sauf que chaque parcelle de son enveloppe corporelle est humide ou bien recouverte de tissu qui l'est également. Elle ravale ses larmes, se calme doucement en l'absence de Maldwyn, elle réalise doucement même si elle a l'impression de flotter encore un peu entre le rêve et la réalité malgré la lourdeur de l'eau. Aucun son n'est encore sortit de sa bouche depuis l'abandon du professeur face à elle. Delilah ne s'attendait pas à ce qu'il craque, elle avait cédé et avait pris la décision de le laisser, de stupidement respecter sa volonté, elle avait été prête à l'abandonner parce qu'il ne voulait pas avoir affaire à elle, d'aucune manière que ce soit. La jeune femme était un peu perdue mais semblait commencer à comprendre les contradictions entre les paroles et les actes de son vieil ami de fac.

Les bruits de ses chaussures en tissu retentissent, comme si chacun de ses pas se faisaient dans une flaque d'eau. Pouik pouik. Ces chaussures … Elle en sourit tellement sa pensée est bête, elle a même envie de rire rien qu'à entendre ces pas revenir. Ça y est, elle perd un peu la tête Lyla, libérée de ce poids sur ses épaules et frappée enfin par la scène qui venait de se jouer, elle avait envie de rire et pleurer en même temps. Mal' réapparait dans la douche armé d'une serviette de bain à la couleur suspecte. Pas que la couleur d'ailleurs mais qu'importe, il est revenu. Trempé aussi, il entreprend d'abord de s'occuper de la frêle poupée à la peau de porcelaine. Elle le regarde, le toise silencieusement et se laisse faire, légèrement gênée. Le visage quasiment sec, son maquillage détruit, Maldwyn s'attaque ensuite à ses bras. « T'aurais pas dû me suivre, c'était stupide. » Les sourcils de Delilah se levèrent instinctivement et une moue de fausse surprise s'afficha sur son visage. C'était l’hôpital qui se foutait de la charité, elle eut envie de rire devant tant d'audace, simplement, sans aucune mesquinerie ou méchanceté, juste parce c'était beau et franc. Des choses stupides il en avait fait un paquet, à commencer par prétendre l'avoir oublié, alors elle avait de quoi s'esclaffer l'avocate. Mais elle se contenta de sourire, amusée par ce retour de bâton. Oui elle avait été stupide, très clairement, mais jouer avec le feu était souvent synonyme de se brûler, elle avait l'habitude. « Je suis désolé Lylah. » Elle croise ses yeux et a envie de lui dire qu'elle aussi est désolée, désolée qu'il se fasse du mal à cause d'elle, désolée de vouloir lui donner la paix qu'il mérite alors qu'il n'en veut pas. Surtout désolée qu'il se torture de la sorte pour rien … Elle entre-ouvrit la bouche puis se ravisa. Comprendrait-il seulement ? Que leurs promesses étaient intenables et qu'il n'avait pas à s'en vouloir de l'avoir laissé … Que si elle avait croisé le chemin de Will et de ses coups ce n'était pas de sa faute. Le professeur s'agenouilla et alors que son ancienne camarade plongeait dans ses pensées, à chercher les mots, il entreprit de lui retirer ses escarpins afin de lui sécher les pieds. Elle sent son doigt toucher une de ses cicatrices. Celle-ci est vieille et se dessine faiblement, plus blanche que le reste de sa peau. « C'est étrange de se dire que quelque chose qui s'est passé il y a si longtemps est encore bien visible. » La galloise baisse un regard tendre sur la crinière de Maldwyn, plié à ses pieds. C'était une bien belle métaphore pour les blessures que leur avait infligé la vie à chacun d'eux. Elle avait acquis une nouvelle marque peu commune l'année dernière … En y pensant n'importe qui la trouverait repoussante ; cette cicatrice violette qui sillonnait de sa clavicule jusqu'à son omoplate en passant par son épaule. Elle s'étendait telles des racines nombreuses d'arbres fines et anguleuses. La foudre à jamais tatouée sur sa peau. « Ça guéri à son rythme. » Souffle-t-elle tout bas en relevant les yeux en même tant que le professeur se redresse face à elle. Les deux âmes écorchées échangent alors un regard, Mal ayant pris soin d'enrouler la biche pâle dans la vieille serviette tâchée d'un peu de sang. « Mais je crois que ce sont les cicatrices qu'on ne voit pas qui sont les plus vicieuses. » Elle comprend qu'il a besoin de temps et qu'il ne va pas bien. Comme il le dit si bien les blessures qu'on ne voit pas sont les plus terribles. Elle ne savait pas qu'elles étaient ces nouvelles cicatrices, elle n'avait pas idée et n'avait pas la prétention de pouvoir les deviner. Elle voulait savoir pour mieux pouvoir aider. Mais l'homme ne se livrait pas facilement. Suffisait de voir le bazar qu'il avait fallu mettre pour qu'il la considère enfin et s'adresse à elle normalement. D'un simple geste il débarrasse le front de Lyla d'une mèche de cheveux égouttant sur son visage. « J'ai besoin de toi Lylah, mais tu n'as pas besoin de moi. Crois-moi. » Son avis n'avait donc pas changé … Il rapproche son visage et colle ses lèvres contre la tempe froide de la blonde, caressant sa joue de la sienne. Delilah ferme les yeux. Lui dire qu'elle n'avait pas besoin mais qu'elle avait juste envie de l'avoir à ses côtés lui ferait perdre pieds, elle ne voulait pas encore être la cause d'un désastre, alors elle ravala ses sentiments. « Je n'arriverais jamais plus à me sécher toute seule maintenant. » Fit-elle simplement, décoinçant sa gorge qui se serrait légèrement avant qu'il ne s'éloigne et que ses paupières s'ouvrent sur son visage désolé. Le plus gros étant déjà passé et avait été déversé en même temps que les jets qui avaient inondé cette douche. La Sulwyn reprenait peu à peu de son assurance et de sa contenance. Si il admettait avoir besoin d'elle, forcément Lyla serait là. « Je vais appeler un taxi si tu veux, c'est le moins que je puisse faire pour avoir ruiné ta soirée… Il y a une sortie par les vestiaires, tu n'auras pas besoin de sortir devant tout le monde dans cet état… » Elle avait totalement oublié la soirée subsidiaire qui se déroulait juste à côté, de laquelle ils s'étaient échappés. Elle en avait oublié pour quoi tout cela était, une célébration de plus qui ne faisait que ramener inlassablement dans un passé idyllique. « Même si tu restera toujours la plus belle de notre promo. » Ce compliment parvient à faire naître un sourire sur le visage de la galloise. D'un sourire franc elle secoue doucement la tête, ne croyant pas ce qu'elle venait d'entendre. Elle s'agenouille à son tour et attrape ses deux échasses noires qu'elle tient du bout des doigts. Une fois de nouveau debout elle retire de ses épaules la serviette bien imbibée d'eau et l'essore avant de se mettre à cheminer sur le carrelage de la douche, pieds-nus, avançant avec prudence. La jeune femme retrouve le professeur vers la sortie, dans le couloirs à l’extérieur des vestiaires. Elle baisse son visage et attrape doucement la main blessée du professeur, y dépose le morceau de tissu avant de faire pression dessus. « Je vais chercher mon manteau et j'arrive, on se retrouve devant. » Déclare-t-elle la tête haute. Delilah n'avait rien à faire de ce que pouvait dire les gens, un événement comme celui-ci était l'occasion de voir quel chemin chacun avait pris, elle avait choisi le sien et n'en avait aucunement honte. L'avocate débarqua alors sur le parquet du gymnase, ses chaussures à la main et sa robe gouttant encore. Beaucoup dansaient, ils étaient peu au final à avoir fait attention à la revenante alors qu'elle traversait la piste pour retrouver les étudiants qui tenaient l'entrée. C'est avec de grands yeux qu'ils l’accueillirent avant de lui rendre son bien qu'elle n'enfila pas tout de suite. Elle sortit par la même porte qu'elle avait poussée à son arrivée. Pas dans le même état mais ce n'était qu'un détail. Une fois dehors elle emplie ses poumons d'une grande bouffée d'air. Et alors le froid commença à la mordre jusqu'au os. Ses yeux aperçurent Maldwyn qui attendait sous les étoiles de cette nuit d'été, elle l'observa un instant ... Qu'allait-il advenir d'eux? Se cachant et se réchauffant sous son manteau elle finit par s'approcher de lui. Elle jeta un coup d’œil à sa main pour voir si il avait bien gardé la serviette dessus, en espérant qu'il n'attrape rien avec ce linge. « Ça va aller ? » Qu'elle demande doucement en le regardant avant de laisser ses yeux glisser sur la voûte céleste. Peut importe ce qu'il avait pu vivre, ce qu'il pouvait subir, les pires choses qu'il pensait avoir commises, rien n'était insurmontable aux yeux de Delilah. Elle le lui prouverait si il le lui laissait, si son propre exemple ne suffisait pas. Avec les bonnes personnes tout était possible.
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Turning Tables - Sam 19 Jan - 14:49

[quote="Maldwyn Jones"]


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this goes beyond me, this goes beyond you.
Delilah Sulwyn & Mal Jones

C'est glacé et pourtant brûlant, léger et lourd à la fois. Un soulagement coupable, le souffle qui s'échappe et dépoussière des poumons qui ne savaient plus respirer. La vouloir dans mon esprit après l'avoir voulue exilée. Réapprendre à penser mon existence en sa présence, savoir lui trouver une place ailleurs que dans la mélancolie. Un siège au premier rang, un rôle dans cette tragédie dont j'ai voulu la protéger. Je ne peux plus me cacher derrière le rideau de mes mensonges, je ne peux plus être faible lorsqu'elle me croit fort. C'est effrayant ce sentiment de ne pas être à la hauteur mais d'être pourtant tout pour quelqu'un; d'être pardonné alors que l'on sait que ce ne sera pas la dernière offense. Une affection inconditionnelle, un bandeau sur les yeux pour ne pas voir les défauts que le cœur aveugle aime comme des qualités. Elle est ainsi Delilah, et peut être que c'est tout cet amour qui m'a terrifié la première fois. N'avoir que la désinhibition de l'adoration, être porté par quelque chose impossible à quantifier. L'euphorie qui galvanise un homme lorsque la voix d'une femme lui murmure à l'oreille que tout est lui possible. Parce que tout est possible pour un homme comme ça, même le pire. On fait les pires choses par amour, c'est si facile de faire mal quand on veut du bien. Si facile d'oublier les bas quand on a atteint les hauteurs. Flanqués sur le trône d'un royaume en ruine mais qu'importe puisqu'il est nôtre, puisque nous sommes ensemble, que je t'appartiens comme tu m'appartiens. Otages de nos sentiments prit entre deux feux, crédules des risques encourus. Je l'aurais détruit. Je le sais parce qu'elle m'aurait laissé faire. Et parce qu'à l'aimer je n'aurais pas eu le courage de lui dire de m'abandonner, égoïsme viral et destructeur. Parce que je la voulais pour moi mais que je voulais rester le même. Choisir l'inconnu, la déraison d'un chemin que je ne suis pas certain d'avoir été équipé pour. Je n'ai pas manqué d'affection, mes demi sœurs et ma grand mère ayant largement compensé l'échec du duo parental. Mais je ne suis pas certain de savoir comment aimer. La peur inconsciente d'être un poison, que ces gènes familiaux endommagés soient aussi présents en moi. Je n'ai jamais vraiment aimé avant Delilah, et je n'ai jamais aimé depuis. Comment comparer et pouvoir affirmer que ce que je ressens est sain, que mes pensées sont pures et non les parasites de la discorde. Comme ma mère j'ai fais souffrir, comme mon père j'ai fuis. Alors comment être sûr que je suis vraiment quelqu'un de bien et que tout ceci n'est pas une illusion.

Contact de douceur mais chaque geste est pourtant douloureux. Retracer les courbes de son corps, toucher ses cheveux comme je les ai autrefois si souvent touchés. Quand je pouvais encore dormir la nuit et que je me réveillais à ses côtés, l'aurore perdue dans ses mèches blondes. Tout est familier et pourtant nouveau, un homecoming qui donne le goût amer de la nostalgie. Tâtonner pour retrouver ses marques et en trouver d'autres à la place. C'est si différent de toucher Lise, d'approcher n'importe quelle autre femme. Avec Lise tout n'est qu'exploration, l’euphorie de la découverte, l'esprit sonné par la mince ligne entre oser le flirt et conserver l’amitié. La tentation irrésistible dont j'ai depuis bien longtemps franchi les limites avec Lylah. Lise Mon cœur se serre en pensant à elle. À notre dernière rencontre qui a changé tellement de choses. La crainte de regarder en arrière, pour voir que je ne peux pas affronter le passé, la révélation de ce qu'elle est. Mais je ne sais pas si je peux pour autant affronter le présent. Faire face à cette nouvelle version de Delilah, si connue et pourtant si changée. Elle aussi n'est plus vraiment humaine à mes yeux, le charmant fantôme d'une jeunesse révolue. Embrasser sa tempe, son odeur reconnaissable. Fermer les yeux pour apprécier l'instant et devoir s'en détacher tout aussi vite. Parce que je suis un papillon en train de s'approcher de trop près de la flamme et que je sens déjà mon cœur grésiller.

Elle s'approche toujours avec précautions, mais mes muscles ne sont maintenant tendus que de l'envie d'une fuite en avant. Percuter son être et rester à proximité de sa chaleur même si ça fait aussi mal que ça fait du bien. Je sursaute à peine lorsque sa main attrape la mienne, le pourpre qui a glissé le long des doigts et cette coupure aiguë dont je n'ai au final que faire. Je la regarde s'exécuter, le frottement mesuré du tissu éponge contre la plaie. Il n'y a aucun rejet à avoir, aucune fierté mal placée qui ne me ferait pas accepter d'être l'animal blessé entre ses bras. Dompteuse de mes humeurs, elle pourrait me mettre à genoux d'un seul geste à cet instant. Mes lèvres s'entrouvrent pour former des mots mais elle m'annonce qu'elle va chercher son manteau. Sans gêne, sûre d'elle, le pied nu qui n'a que faire d'être l'objet de toutes les attentions. La cible de potentielles rumeurs qui lui voleront bien haut, au dessus de la tête comme des oiseaux disgracieux. Parce qu'elle est de nouveau cette lionne qui domine la savane universitaire, la loi de la jungle qu'elle ignore royalement. Face à elle, ils ne sont tous que des charognards crasseux. Alors elle fend les rangs des regards inquisiteurs et j'en reste immobile un instant derrière ma porte entrebâillée. Les héros traversent le champ de bataille tandis que les lâches fuient par la porte de derrière.

La serviette abandonnée dans les vestiaires, les doigts qui cherchent la flexibilité douloureuse de la peau tiraillée au creux de ma paume. Je réfléchis sous les étoiles à tout ce qui vient de se passer. Une façade qui a éclaté en un instant, le coup unique qu'il lui a suffit de porter pour me faire voler en éclats. Elle est plus forte qu'avant, je peux le constater maintenant. J'espère juste être à la hauteur, capable de suivre et de mériter une telle femme. Je ferme les yeux et me laisse porter par le murmure de la musique, le calme de cette nuit d'été qui semble si normale malgré cette soirée. Mes paupières se soulèvent d'instinct lorsqu'elle revient à mes côtés. Un pâle sourire à la lueur d'un lampadaire. « Ça ira Lylah, vraiment. » C'est plutôt mon cœur qu'il faudrait suturer pour stopper cette hémorragie de sentiments confus. J'ai déjà appelé un taxi parce que je savais que si j'attendais qu'elle revienne je n'aurais plus la force de la laisser partir. « Le taxi… est en chemin… » Que je lui annonce en observant son visage alors que son regard se pose sur le ciel. Je n'ai pas besoin d'observer les merveilles de l'espace quand elle est déjà plus de mystères qu'il n'en faut. A distance et pourtant si proches, mes doigts brisent ce vide qui nous sépare pour agripper les siens. Je porte sa main à mes lèvres, fermant les yeux pour déposer un baiser au creux de sa paume, m'enivrant de sa chaleur. Je caresse sa peau de mon visage, agrippé à ce contact avec une pointe de désespoir. Cet animal blessé en manque de son affection. Qu'as-tu fais de moi, Delilah ? Mes lèvres se posent de nouveau contre sa paume, puis son poignet, ma main valide glissant sur sa joue pour agripper sa nuque et l'attirer contre moi. J'enfouis mon visage dans son cou, mon front échouant contre sa clavicule. Mes bras emprisonnent sa taille avec force. « Est-ce qu'on peut…rester comme ça…le temps que la voiture arrive s'il te plaît. » Parasite qui dévore sa présence, morsure qui tient bon et refuse de la laisser s'échapper. Le palpitant contre le sien, égoïstes battements. « Si je suis une épave… » Alors je suis ta belle épave. « Qui sait si je ne vais pas me désintégrer si tu lâche prise…» Les mots ne sont qu'un murmure. Qui sait ce qu'il va se passer si tu me laisse faire.
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Turning Tables - Ven 8 Fév - 19:21

turning tables

Maldwyn Jones & Delilah Sulwyn
Under haunted skies I see you and when love is lost your ghost is found. I braved a hundred storms to leave you as hard as you try, no I will never be knocked down 'Cause I can't keep up with your turning tables.

N'aurait-elle rien appris de son mariage désastreux ? Rien retenu de ses erreurs, rien garder comme ultime leçon de vie ? De ses mains humides Delilah essaye de retenir tant bien que mal son cœur qui flanche à chaque contact avec la peau de cet ancien amant. Parce qu'elle n'avait jamais été aussi proche de personne d'autre depuis, jamais. Il ne s'agissait pas seulement de corps mais bien plus, tout ce qu'elle avait pu lui donner elle l'avait fait sans hésiter une seconde à l'époque. Se détester pour être ainsi absolue mais également ne sachant faire autrement lorsqu'il était question de Maldwyn Jones, c'était son quotidien. Peut-être avait-elle réussi à l'oublier pendant les premières années heureuses de son union à présent décharnée jusqu'à l'os. Peut-être ... Mais elle n'avait cessé de songer à lui dès les premiers coups, parce qu'elle était persuadée que ça aurait été différent si ils avaient pu vivre leur amour au delà des murs de cette université. Elle ne voulait pas devenir la femme battue à ses yeux, elle voulait de nouveau être Delilah Sulwyn, qu'il oublie autant qu'elle s'était efforcée à le faire ces années passées sans lui. Même si ils avaient changés, fatalement. C'est elle qui pour la première fois l'abandonne alors, maintenant qu'elle a retrouvé ses forces, qu'elle a réussi à regagner cet ami qui avait voulu se réinventer en recommençant à zéro. Elle va chercher son manteau, lui n'ayant pas quitté sa veste de costume lors de son entrée. Il n'avait aucun moyen de se sécher ou de se réchauffer, pourtant ils allaient affronter cette nuit d'été.

Les murs du gymnase contenaient tant bien que mal la musique qui s'échappait des enceintes à l'intérieur. Un bruit de fond, écho lointain de ce qu'ils avaient manqués en s'exilant dans les vestiaires. Pourtant Mal n'avait en aucun cas gâché la soirée de l'avocate. Au contraire même, elle n'aurait pu espérer mieux comme dénouement, pouvoir de nouveau lui parler librement, essayer de le comprendre et de l'aider comme elle pouvait, renouer simplement. Bien sûr elle aurait préféré que cela se fasse sans qu'ils n'aient à se blesser mutuellement, autant physiquement que psychologiquement. Elle regrettait d'avoir été si dure et franche avec lui mais son cœur ne supportait plus ces odieux mensonges. Alors la lionne avait fini par sortir les griffes pour s'imposer, qu'on lui mente, qu'on la prenne pour une simplette femme, c'était son lot quotidien au travail mais le professeur ne l'avait lui jamais traité ainsi jusque là. Se faire marcher sur les pieds n'était pas dans ses habitudes, encore moins maintenant. Malgré ces calomnies elle n'arrivait pas à lui en vouloir comme lui le voudrait. Elle pouvait constater sans aucun doute ce mal-être et cette culpabilité qui l'assaillaient au moment où la vérité avait commencé à faire surface. Lylah voulait alors tout savoir, tout savoir de ce qui constituait le nouveau Mal qui n'était plus le même qu'avant. Les bonnes choses comme les mauvaises, elle prendrait tout et embaumerait cela de sa bienveillance parfois si crispante et déconcertante, c'était assommant, certainement encore plus pour lui que pour les autres.

Cette fois elle n'eut pas peur qu'il prenne la fuite. Il était revenu à elle une fois et cela avait calmé ses doutes et ses craintes. Elle le laissa aller, appeler le taxi qu'il lui avait promis pour qu'elle puisse regagner son loft à l'Historic District. Lui n'avait pas à aller bien loin. Demander si ça va, c'était stupide. Maldwyn était devenu plus secret, plus réservé, peut-être l'aurait-il moins été si il ne se retrouvait pas devant ce fantôme de son passé, si pendant tout ce temps ils avaient gardé contact … Ou alors cachait-il encore des choses pour la protéger, inlassablement. « Ça ira Lylah, vraiment. » Sa blessure oui mais le reste … ? Mais nous ? L'envie de le garder auprès d'elle était forte maintenant qu'elle l'avait retrouvé elle ne voulait plus le perdre. Son cœur se sert dans sa poitrine, il bat lentement, se calme après toutes ces émotions fortes, cela faisait longtemps qu'il n'avait pas été ainsi malmené. Alors elle contemple le ciel pour ne pas qu'il s'emballe de nouveau, jamais elle n'arrivait à le dompter, trop prompt à sauter dans le vide dès la première main tendue, comme si la chute ne saurait le blesser, comme si toujours Delilah saurait s'en relever. « Le taxi… est en chemin… » La galloise esquissa un mince sourire et acquiesça doucement avant de poser ses yeux sur lui, quittant le voile céleste de cette nuit. Il s'était écroulé et pourtant restait à ses côtés jusqu'à la fin, malgré toutes ces histoires, malgré les mots durs échangés. Il lui faudrait marcher à son rythme, ne pas le brusquer tout en l'accompagnant pour qu'il comprenne qu'elle serait là; du moins qu'elle en avait envie tant qu'il en aurait besoin, qu'il l'y autoriserait. Parce que si il était une épave, elle ne voulait pas le laisser pour autant échoué, le laisser à l'abandon, seul. Lorsqu'on a fait partie de la vie de Delilah, qu'on a un jour compté pour elle, alors on le reste, cette sentence était sans détours et enfin Maldwyn semblait l'avoir comprise.

Il tend ses mains pour attraper celles de la blonde, les deux peaux détrempées se heurtant doucement. Elle le regarde avec tendresse et son palpitant fond à ce contact, comme toujours. Il pose délicatement ses lèvres dans la paume de l'avocate, aspirant une petite partie de son être par ce baiser. Elle caresse alors sa joue maintenant qu'il effleure sa paume du reste de son visage, profitant de cette étreinte au teint désespéré, qui se voulait retenue. Elle partage sa chaleur avec la sienne, réchauffant ses doigts fins et froids grâce à cette douce friction qui s'étale plus loin que sa simple paume. Le professeur vient ensuite poser sa seconde main sur la joue de son ancienne camarade, fermant ses doigts sur sa nuque sous ses cheveux pour l'attirer contre lui, les liant ainsi d'avantage, cœur contre cœur. Lylah passe ses bras sur les épaules de Maldwyn et emprisonne sa tête qu'elle vient coller encore plus contre elle alors que lui serre sa taille. Elle sent sa respiration dans son cou, ça la réchauffe, elle resserre sa prise sur lui, fermant les yeux, soupire de soulagement comme si une nouvelle fois se retrouver contre lui la libérait d'un poids énorme et lui permettait de mieux respirer à plein poumons. Les battements de son cœur s'accélèrent un peu alors qu'elle enfouit son nez et sa bouche dans les cheveux encore humides du professeur, s'imprégnant de son odeur qui lui avait tant manqué. « Est-ce qu'on peut…rester comme ça…le temps que la voiture arrive s'il te plaît. » Les yeux toujours clos sous le ciel, un sourire s'empare de ses lèvres en entendant cette requête sincère, éperdue. « Bien sûr. » Murmure-t-elle doucement avant de déposer un baiser sur le crâne de son ami perdu. La jeune femme ne s'était rapprochée d'aucun autre homme depuis son divorce, des petits flirts sans grands impactes et surtout sans engagements. Elle n'en avait peut-être pas la force et plus la confiance nécessaire alors qu'avec Maldwyn tout était simple parce qu'ils se connaissaient déjà. Un être connu par le passé qu'il lui fallait redécouvrir certes mais dont les fondations n'avaient pas bougé. Il avait pu se perdre en chemin et se retrouver pourrait lui demander du temps mais elle resterait là comme point de repère, comme phare, pour le guider dans ses moments de troubles, inébranlable Lylah au creux de la tempête que presque rien n'atteint. « Si je suis une épave… Qui sait si je ne vais pas me désintégrer si tu lâche prise… » Elle le serre alors un peu plus contre sa poitrine. Elle ne le lâcherait pas. Enfin littéralement elle serait bien obligée mais elle lui avait dit : elle serait toujours là. Même si Mal n'irait sans doutes jamais vers elle de son plein grès. La blonde posa une main sur la nuque du professeur tandis que l'autre se perdit dans ses cheveux. Elle se mit alors doucement à se balancer, comme pour se bercer, elle avait toujours fait ça, cela l'apaisait, certainement un réflexe inconscient dû à son enfance, elle n'en savait rien. « Je suis là Mal ... » Qu'elle souffle doucement en faisant glisser son visage sur le côté pour pouvoir poser sa joue sur la tête du jeune homme, rouvrant enfin les yeux sur le décor tranquille qui les entourait. « Je n'ai aucune envie de lâcher prise. » Avoue-t-elle tout bas. Sa bouée, son canoë de sauvetage, son ancre.

Ils passèrent ainsi un instant serrés de la sorte jusqu'à ce que des phares approchent sur la route. Delilah espérait que ce ne soit pas son taxi, pas déjà. À vrai dire elle aurait pu passer la nuit ainsi étroitement étreinte avec Maldwyn tout contre elle … Comme à l'époque. Ses paupières se fermèrent, espérant que l'automobile trace son chemin si elle ne la regardait pas. Le léger crissement des pneus retentit et le bruit du moteur stationnaire demeura auprès du couple. L'avocate soupira alors, lascivement. Elle avait profité de ce moment autant qu'elle avait pu et ce dernier contact calma son esprit. Qu'elle aurait aimé que ça dure … La vitre côté passager du taxi descendit de manière automatique et le chauffeur interpella les deux vieux amis, demandant si le taxi était bien pour eux. Alors avec regrets la blonde desserra son étreinte sur l'homme qu'elle tenait au creux de ses bras et qui était attaché à elle. Elle posa une main sur la joue du professeur tout en attrapant sa main valide de l'autre puis plonge son regard bleu dans le sien. « Je regrette de ne pas t'avoir retrouvé plus tôt ... Mais je suis contente d'avoir passé cette soirée avec toi, sincèrement. » Elle s'était égarée longtemps avant de se reprendre en main, de poursuivre ses études et de les terminer. Personne n'était infaillible, Lylah avait ses travers comme tout un chacun. Alors comme elle acceptait ses propres faiblesses elle en faisait de même pour les êtres qui lui étaient chers malgré son intransigeance reconnue. Son regard se perd dans ce dernier échange qui s'attarde et ce n'est que lorsque le conducteur du taxi les rappelle de nouveau à l'ordre que la galloise parvient à reprendre ses esprits. Elle esquisse un sourire amer avant de se détourner enfin de son fantôme aux cheveux en bataille. À peine détachée de lui que son être le réclamait déjà, que son cœur lui criait de retourner dans ses bras. Elle serait restée si cela avait été sa volonté, si il le lui avait demandé, c'était plutôt évident. Mais il ne fallait pas qu'elle le bouscule, elle aussi devait s'accorder du temps. Sa main finit par lâcher celle de Maldwyn une fois qu'elle ouvrit la porte arrière de la voiture et qu'elle fut assise dans le véhicule. « Ne m'oublie pas Maldwyn Jones. » Parce que je ne suis pas prête de t'oublier moi. Qu'elle lui ordonne presque avant de fermer la porte. Elle le regarde au travers de la vitre jusqu'au moment où le moteur se met de nouveau à vrombir et que le chauffeur se mette à rouler, demandant la destination de Madame qui se perd déjà dans ses pensées, réalisant à peine ce qu'elle venait de vivre.
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