ava et andrei

Il se demande comment peut-il éprouver à son égard autant de haine, tout en gardant l'infime espoir qu'elle lui revienne. Mari bafoué, adultère agité sous son nez, l'homme ressent ses canines poindre, comme elles en ont l'habitude lorsqu'il essuie un affront de plus. Presque deux cent ans d'existence et il ne peut se défaire de son influence, enchaîné à elle depuis que ses crocs se sont cimentés à sa carne. Elle se tient devant lui, fleur gracile d'une beauté éternelle, le faux air enfantin tatoué sur la face. Pris en otage dans son propre bureau, il soupire : Avdotya, je crois pas t'avoir invitée.

ava et andrei

Fatalité faite femme. Femme-enfant, aux allures de gamine malgré les trop nombreux printemps. Corps maintes fois souillé, offert aux vagabonds, aux rois, aux princes, aux artistes, aux poètes. Plus rarement aux amoureux. Encore moins à l’amour lui-même. Corps longiligne, qu’elle rêve de voir détruit. Que sur la chair morte fleurissent des roses de sang bleutées, violacées.  Que son cou s’orne d’une parure de doigts serrés, asphyxiants. Elle a cru l’avoir trouvé. N’a rencontré qu’un énième idolâtre. Revient maintenant aux sources. A l’époux haineux, amoureux. Pas besoin, tu me connais. Sourire dégueulasse. Connaissance intime reniée. Et pourtant désirée. Elle le voit dans ses yeux.

ava et andrei

le rictus mauvais en guise de réponse, ses deux crocs apparaissent et entaillent sa lippe. il ne frémit pas, garde ses yeux noirs fixés sur l'objet de son désir. il l'aimait, elle le méprisait. du moins avait-elle osé. mais les rôles étaient inversés, plus d'un siècle séparés. le timbre de voix guttural s'élève. Et tu es là parce que... ? il espère entendre que la raison de sa présence, c'est lui. mais il ne se fait plus d'idée, il a payé bien cher pour ses espoirs brisés. la silhouette sombre se lève, glisse doucement à la rencontre de l'importune. naturellement, il vient se saisir d'une de ses mèches blondes, s'hypnotise des reflets chauds que la lumière du plafonnier renvoie. éperdument amoureux, finalement rien n'avait changé.

ava et andrei

Le carmin qui émerge la fait vriller un instant. Mais la vieille carne se maîtrise suffisamment pour rester de glace face à l’appel du liquide vital. Même si les lippes sur lesquelles il s’échoue exerce sur elle une attraction tout aussi puissante. Chatte curieuse et gourmande, elle le regarde glisser vers elle et attraper une mèche entre ses doigts. Geste maintes fois répété. Autrefois, dégoût dissimulé. Avidité aujourd’hui à peine masquée. Elle lève le nez pour embrasser les lèvres où perle le sang. Se régale du goût ferrugineux. Tu sais pourquoi. Double sens qui ne laisse aucune place au doute. Les mains fines se perdent dans la chevelure sombre de l’époux.

ava et andrei

ses yeux bleus l'engloutissent sans ménagement, le ramenant à l'homme désespéré qu'il était lors de leur première rencontre. ses doigts dans ses cheveux, le doux souffle contre ses lèvres, le kaléidoscope de sensations le traversant de toutes parts lui font fermer les yeux. sa bouche, restée immobile sous les assauts précautionneux de la belle, prend brusquement vie et s'approprie avec violence celle de l'épouse honnie. sans plus de cérémonie, il se désintéresse des lèvres pleines et part dans l'exploration de son cou, se pressant contre elle. écorchant doucement la peau d'albâtre de ses crocs, il appose ses mains sur le corps qui est sien. amants centenaires, esclaves de leurs pulsions meurtrières.

ava et andrei

Il s’anime contre elle et l’infâme se délecte de la sensation. Comme avant, elle étend son emprise sur l’homme faible, prisonnier de son désir. Ses lèvres partent à l’assaut de son cou et elle frissonne au contact de ses crocs contre l’épiderme blafard. Il se fait propriétaire, plaque son corps gracile contre le sien, masculin. La belle éternelle laisse ses mains vagabonder à la rencontre du corps, se glisse sous la chemise pour égratigner la peau de son ventre. Les griffes laissent leur marque sur le derme frémissant, répondant par réflexe à son contact. Comme un chien répond à son maître.

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les mots ne sont plus nécessaires, comment retranscrire tout ce qu'ils auraient bien voulu se dire ? il gronde délicieusement à la sensation des fines mains sur son ventre, referme son emprise sur la fragile poupée lorsqu'elle le griffe. il parsème sa peau de quelques baisers, s'octroie le droit de descendre doucement sur sa poitrine, se fait doux un instant. mais il sait que la sanguinaire ne se satisferait jamais de ce calme. alors il la soulève brutalement et la pose sur son bureau sans délicatesse. le regard fiévreux, il revient plaquer ses lèvres aux siennes et s'empare de ses fesses qu'il pétrit sans tendresse. chien enragé, trop longtemps privé de son maître, revient chercher son os à ronger.

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Elle vibre, pareille aux cordes d’un violon. Déjà ivre des baisers qu’il sème sur sa peau ; dans son cou, sur ses épaules, sur sa poitrine. Elle voudrait sentir ses crocs s’enfoncer dans sa chair. Lui rendre la monnaie d’une pièce depuis longtemps donnée. Avide de violence. Avide de sang, de galaxies plaquées sur les côtes explosées. Capable de faire ressortir le pire chez lui. Désireuse de faire ressortir le pire. Lorsqu’il l’agrippe sans ménagement pour l’arrimer au bureau, ses lèvres dévorant les siennes et ses mains ancrées dans sa chair, elle frissonne. Ses jambes fines enlacent la taille, emprisonnent le corps, tandis que les mains déchirent la chemise, aussitôt abandonnée au sol. Un sourire se dessine dans le baiser ; le chien a répondu à l’appel de son maître.

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plus grand que sa soif de sang, son besoin d'elle le submergeait. il avait cru pouvoir l'oublier, se débarrasser de douloureux souvenirs, disparaître en martyr. la vérité était qu'il n'avait même pas eu le cran de se défaire de son alliance. accrochée à la même chaîne en or blanc, suspendue à côté d'une autre bague, oscillait toujours le témoin de leur mariage. chemise enlevée, le collier apparaît et accroche la lumière du plafonnier. il lâche avec regret la prise sur sa femme, revient à l'examiner d'un œil brûlant. le bref coup d’œil à son annulaire gauche nu lui fait serrer les dents. Où est ton alliance ?

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Elle le laisse explorer son corps. Comme un chercheur d’or, avide de richesses. Ses fines mains pâles effleurent le torse dénudé ; ses ongles se plantent dans les épaules. Un doigt fait tinter la chaîne qui brille autour du son cou. Elle esquisse un sourire. Satisfaite de voir que, malgré tout, il lui reste attaché. Ce n’est pas de l’amour. C’est de l’ego. Je ne sais pas. Fausse ingénue. La bague dort depuis longtemps dans son coffre à bijoux. Innocente, elle agite sa main gauche avant de caresser sa joue glabre. Oublie ça. Sourire enjôleur, tandis que sa main droite s’accroche à la ceinture de son époux.

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et l'indifférence de son épouse finit la poussée de ses crocs, entaillant profondément les lèvres crispées. les crocs qu'il voudrait lui planter en plein coeur, qu'elle comprenne à quel point lui l'avait dans la peau. depuis toujours ou presque. il s'abandonne presque à son toucher, pressant sa peau contre la sienne, ce besoin oppressant de l'avoir contre lui, pour lui. Tu n'es pas sérieuse Avdotya. il refuse de croire qu'elle ait pu se débarrasser de l'alliance alors que lui l'avait gardée tout ce temps. il a cessé ses caresses, s'évertue de ne pas exploser de colère.

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Gamine insolente, qui s’amuse du désir de l’époux, qui joue avec ses sentiments et son corps. Mais elle se retrouve prise dans son propre piège, les nerfs enflammés par les caresses qu’il lui prodigue. Elle en veut plus. Elle le veut lui. Enjôleuse, elle se plaque contre lui, ses cuisses délicatement pressées contre les hanches de l’homme. Impatiente, elle lève les yeux au ciel lorsqu’il s’offusque. Je ne l’ai pas portée depuis des années. Elle doit être bien rangée, voilà tout. Insouciance agacée. Pourquoi ça compte autant ? Tu ne veux de moi que si je suis marquée de ton sceau ? Regard acéré, sans concession.

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l'appel des besoins impérieux de la chair le torture. mais elle s'amuse une fois de plus de sa détresse. trop peiné de ces paroles jetées au visage, avdotya fidèle à elle-même, se contrefoutant de tous les puissants sentiments qu'elle attise sur son passage. ses crocs le démangent, il les planterait volontiers dans la carotide de la belle, qui pulse sous la peau ivoire. Peut-être bien oui. et elle l'est encore, sous l'emprise de ce contrat centenaire les unissant. il défait rapidement son collier, enlève la seconde alliance pour la glisser fermement à l'annulaire de la main gauche, trop fin pour que la bague ne lui aille parfaitement. il ne lui laisse pas le temps de protester pour refermer ses paumes autour de sa taille et reprendre leur étreinte, plus violente et brûlante que jamais.

ava et andrei

elle lève un sourcil impérieux. déesse immortelle descendue sur terre pour être adulée, vénérée des hommes. elle n’imaginait pas attraper dans ces filets quelqu’un comme lui. prêt à se plier à ses moindres désirs, chien servile et consentant, et en même temps prompte à dégainer une colère froide et implacable. prompte à opposer sa volonté à la sienne, à lui tenir tête. et elle en a fait un jeu. avoir le dernier mot est devenu une obsession. cette fois encore, elle veut avoir raison. pernicieuse, elle le regarde enfiler l’alliance de leur mariage. chatte jalouse, elle louche sur la relique de la précédente union. et crache son venin. Tu vois, le problème c’est que tu me réclames fidélité. Mais tu ne l’as jamais oubliée. Je ne peux pas te faire confiance, Andrei. elle sait où appuyer pour faire mal. et ne se prive pas de planter ses griffes dans le cœur atrophié de son époux. pour remporter au moins cette bataille.

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il s'en veut, andrei, d'avoir baisser si rapidement les armes. non pas aujourd'hui, mais il y a de cela un siècle. il l'avait abandonnée aux bras d'un autre, sous prétexte qu'il n'avait pas cœur à se battre pour garder celle à qui il avait lié son nom. sa lâcheté le rattrapait, encore et encore, chaque nuit qui avait suivi la séparation. il avait consenti, n'avait rien dit et avait fui. Tout comme tu n'as jamais pu l'oublier, lui. Cosimo, rival dont il n'avait que de rares fois entendu parler, à la présence pourtant insidieuse. andrei restait un incorruptible jaloux. et si son amour pour sa première épouse n'a pas totalement disparu, toute la dévotion qu'il porte à la gamine sanguinaire éclipse toutes les autres femmes. J'ai gardé la nôtre. Depuis tout ce temps. C'est à toi que je pense. et il se consume à son contact, s'écrase comme s'il n'avait qu'elle à qui se raccrocher. et même si elle lui avait déjà prouvé sa traîtrise, andrei ne peut faire autrement que revenir. attiré comme un aimant. Avdotya Vorobiova. Ca sonnait pourtant tellement bien.

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l’éternelle se crispe lorsque l’époux évoque son créateur. deux siècles après, la blessure est toujours béante, sanguinolente. elle a eu beau chercher des substituts, aucun ne s’est révélé à la hauteur. personne n’arrive à la cheville de cosimo. et personne ne semble la satisfaire. sauf, peut-être… amère, elle se mord les lèvres. il a fait de moi ce que je suis… une immortelle en mal d’adoration. une déesse en quête de fidèles. les mots d’andrei lui font lever les yeux sur lui. je ne peux pas en dire autant. la fidélité n’a jamais été son fort, malgré la laisse qu’il a autrefois passée à son cou – et à son doigt. pourtant, elle ne s’en excuse pas. jamais.

ava et andrei

il jalouse ce lien avec lequel il n'a jamais pu rivaliser. le créateur et sa créature, intimement liés. puisque le premier apprend tout à l'autre, le second qui arpente la terre avec un nouveau souffle. celui qu'avdotya avait offert - ou imposé - à andrei. la réponse qu'elle lui offre, toute négative qu'elle soit, le rend d'autant plus entreprenant. il se presse, souhaite lui faire avouer son désir pour lui. qu'elle se dénonce, la succube blonde. qu'elle cesse de jouer avec ses nerfs à lui, qu'elle arrête ses manigances qui l'ont tant fait souffrir, lui. lui qui n'a jamais voulu qu'elle. et peut-être une autre, avant. mais elle n'est plus là, alors qu'ava si.

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ses mots semblent déclencher une nouvelle vague de frénésie chez andrei. la belle s’en amuse. comme toujours. enfant capricieuse, elle n’aime rien tant que voir ses jouets se tordre entre ses doigts mortifères. andrei ne fait pas exception. jamais une pointe de regret. jamais une once de compassion. la gamine n’en contient plus un gramme depuis des siècles. trop usée par les abus des hommes. alors elle prend sa revanche. une main délicate appuie sur l’épaule de l’amant, le repoussant vers le sol. agenouille-toi. un sourire mauvais se dessine sur son visage enfantin, alors qu’elle laisse andrei l’allonger sur le bureau, éparpillant les papiers autour d’eux.