La sirène résonne telle le glas urbain accompagnant le trépas d'un énième malheureux. Naturellement,braillante, elle annonce l'arrivée de la police en ces lieux, alors que l'aube commence à peine à pointer le bout de son nez. Après tout, il est bien trop tard pour les secours ; le cadavre est déjà froid. Le type est mort au cœur de la nuit, c'est un des commerçants du coin qui a trébuché dessus en venant ouvrir sa boutique. Le type, l'air hagard et emmitouflé dans un plaid, a les yeux rivés sur son café. C'est la première chose qu'elle remarque en quittant sa voiture, garée à l'écart de la scène. Avant d'avancer, elle balance son gobelet de café presque vide dans une poubelle presque pleine. Approchant de la scène de crime, elle observe les techniciens s'affairer autour du corps.

Des agents se dispersent, tâchant de trouver dans le quartier, quelque éventuel témoin. Une aubaine ce serait ; mais il y a peu de chance, songe-t-elle, de sombre humeur. Ce serait bien trop facile. Peut-être qu'elle se trompe, mais, malgré la fraîcheur de la chose, ce genre de scène lui est tragiquement trop familière. Quelques badauds, membres de l'ACPD évidemment, la populace a déjà été éloignée du lieu, la regardent avec curiosité. Nouvelle bête au sein des forces de police, à peine quelques semaines au compteur. Bien sur que ça intrigue. Elle adopte son attitude habituel ; regard figé, s'éloignant dans la direction opposée (heureusement celle du cœur de l'affaire). Les bavardages n'ont pas de place ici. Son "snobisme" n'est pas tellement apprécié des collègues. tant pis.

Mains fourrées au fond de ses poches, col ramené en bordure du visage, Rapunzel préfère ignorer. Il n'y a pas tant de méfiance dans leurs actes que l'appétit du jugement, celui de savoir ce que la nouvelle, ou nouveau, amènera sur la table : compétence ou emmerdes ?  Avec détachement, son regard tombe sur le macchabée. Pas sa première fois, des scènes comme ça il y en a pléthore dans les villes du type Arcadia. Sans compter... Peu importe. Une nouvelle arrivée lui arrache un rictus ; enfin une distraction. « O'Laery... il était temps » lâche-t-elle, exhibant une expression entre le sourire forcée et la grimace à l'adresse de son partenaire foutu d'office dans ses pattes.

Ou serait-ce plutôt l'inverse ?

Y a pas de retard pourtant, du moins pas tant que ça. La petite pique non nécessaire, c'est juste ce moyen d'évacuer sa frustration. Travailler en équipe, c'est nouveau ; et ça annonce rien de bon. C'est les vieux réflexes qui se réveillent, cette envie de fuir quand il y a trop de têtes sur le coup. Et surtout de risques. Sans compter, les premiers moments de cette relation imposée (entre gêne et colère(s) plus particulièrement). Malgré tout (même si ça lui demande un effort certain), Rapunzel met les doutes et les gamineries de côté ; se concentrant sur les informations tout autour d'eux, et à la victime qui gît toujours sur le sol, autour de laquelle s'affairent les légistes.

« Homme. La quarantaine. Mort par strangulation  » le constat est froid, clinique. Un des agents ajoute quelques mots, les détails, les broutilles habituelles. La jeune femme s'empresse de le couper pour une révélation plus intéressante : « Lachlan Miles, homme d'affaire, apprenti policien... notable du coin en somme » les derniers mots sont lâchés entre des dents serrées, bien qu'elle fasse mine de dissimuler l'ignorance de la dernière arrivée, un statut qu'elle est bien forcée d'assumer étant donné que ses premiers pas dans cette maudite cité ne remonte qu'à quelques mois. De plus, son arrivée en avance sur la scène ne lui a pas tant permis que ça d'accéder en vip aux éléments majeurs de l'enquête. Résultat : la coopération s'impose.

Merde.