"On attend après l'avocat." Un soupir de désespoir, de la part de Markus. Son collègue offre un sourire désolé, lui tapote l'épaule avant de partir parce qu'il a pas que ça à foutre, de tenter de calmer la colère qui gronde dans l'être entier du flic. Le regard qui se fait acier, alors qu'il balaye l'ensemble, qu'il a envie d'envoyer chier toutes les procédures. C'est qu'ils peuvent plus l'interroger, désormais qu'il a invoqué son droit le plus primaire. Alors peut-être bien qu'avec les mafieux, c'est l'espèce qu'il déteste le plus ensuite, ces foutus avocats qui défendent tout type de parasite. Bien assez vite, le pied bat fortement, un rythme sans constance, d'un geste furieux. Il faut se canaliser, ne pas laisser son sang bouillir de trop pour ne pas foutre tout en l'air. Ils ont des éléments et foncer dans le tas, à cet instant, c'est s'assurer de voir le dossier capoter par sa seule faute. Alors il fini par se lever, par faire les cents pas, d'aller dans le coin des archives, là où il fait plus frais, plus sombre aussi. Regarder les tas de boites empilées dans d'autres au travers des grilles, souffler encore. Tenir en laisse l'animal qui ne peut être muselé, qui aboie en son for intérieur, qui n'aime pas être dans la pénombre. Il poursuivait le jour, lui, réclame toute la lumière qui lui est dû. Un grognement sonore en réponse, avant de sortir de là, de repartir d'où il vient, faire le tour de son bureau, relire les pièces d'un autre dossier, se plonger dans le boulot le temps d'une heure, peut-être. Et on vient à frapper de nouveau à la porte de sa conscience. "C'est bon, on peut y retourner." Alors il se redresse immédiatement, la stature lourde et forte d'un homme qui ne peut jamais cesser de bouger. Le sport comme exutoire, plus que le reste, pour calmer les deux bêtes. Le collègue pousse la porte en premier, laisse Markus fermer la marche. Alors, c'est qu'une fois la porte claqué qu'il voit qui est là, à côté du prévenu. Ses yeux s’agrandissent quand il reconnaît que trop les traits qui le dévisagent tout autant. Vrai qu'elle est avocate, Sasha, mais qu'il préfère souvent l'oublier. Qu'elle reste une gosse dans sa tête, celle qu'il aidait pour ses devoirs, qu'avait des boutons sur la face et trop de choses à dire sur ses camarades de classe. Pas une avocate, non. Juste une petite soeur, que le monde qui lui est tombé dessus lui a fait perdre de vue. C'est qu'il est devenu comme aveugle, Markus, que la voici donc la lumière qu'il cherchait tant, Sköll. Sous ses yeux, présente, dans le silence d'une pièce qu'est rompu par le collègue. Faut saluer, c'est vrai. "Hum. Bonsoir." Une inspiration, alors que le monstre s'agite tout entier dans la carcasse, qu'il déchiquette des lambeaux éparpillés de raison et que Markus fait taire, soudainement. On ne la touche pas, elle. Il expire l'air avalé, prend place face aux deux. Le regard qui lâche pas l'avocate, qui se gorge de sa vision, parce que vrai que ça fait longtemps. Que depuis l'éclipse, il a pas su tellement donner de nouvelle de lui. Parce que comment on fait pour ça, quand on sait même pas ce qu'on est pendant un moment ? Il s'est cru fou, le flic, jusqu'à accepter cette nouvelle conscience sans morale en son sein. Logé là, au creux de sa cervelle, de son coeur, de son être. Une âme qui a dévoré la sienne pour en faire la leur. À deux, désormais. Alors tout l'interrogatoire, il le passe légèrement ailleurs, dans la lune, au grand damne du monstre. Plongé dans sa mémoire et surtout, dans ses ressentis d'humain. La faiblesse qui frappe en plein dans le poitrail, de ce coeur qui devrait demeurer éteint, pourtant. Mais qui peut pas, présentement. Une éternité, à se dévisager, à ce bras de fer verbale. Une pause, accordée à tous. Conduit dans une cellule du comico, le mec, alors que Markus fait un léger signe à l'avocate sans que personne ne le capte. La machine à café, comme excuse, pour se retrouver. Un doigt qu'appuie, après quelques piécettes. Un regard sur Alexandra, quand elle est là, enfin. "Salut." Enfin, enfin, il peut la saluer correctement. "Ça faisait longtemps..." Et c'est entièrement de ma faute. Pas totalement, parce qu'une bête rôde dans les parages. "... Café ?" Comme pour désamorcer la gêne qui règne, malgré tout. Par sa faute, oui.

C'est étrange. Étrange. Comme un écho dans la carcasse du flic, alors qu'il la regarde, la gosse à ses côtés. Des sensations qu'il retrouve, malgré la gêne qu'est là. Parce qu'elle n'est pas la fautive, Alexandra. Que personne ne l'a été, dans sa crise de la quarantaine tardive aux yeux du monde. Il aimerait lui souffler, simplement, qu'il est d é s o lé. Mais il n'arrive plus même à décortiquer le mot dans le creux de sa cervelle, ne sait plus dire ce genre de mot qui pue la faiblesse à leurs yeux à eux. Aux deux bêtes qui règnent dans ce même coeur. Et vrai qu'il a l'air fatigué, Markus. Qu'a force de porter à bout de bras la fuite en avant d'un monstre qui ne peut courir seul, il l'est. Épuisé de vivre pour deux. "On a beaucoup de boulot." Aussi. Pas tout à fait un mensonge, pas une pleine vérité. Café offert, un second qui va émerger des entrailles de la machine. "T'as l'air en forme." Deux antipodes. Un soulagement, aussi, face à cette constatation. Puis ce léger silence, parce qu'il ne sait pas tellement quoi dire de plus. Vrai que ça fait longtemps. Plus d'un an et demi, alors qu'il avait comme perdu la vue en plein été et qu'il venait seulement de la recouvrir, au plein milieu de l'hiver. Regard sur elle, appuyé, à se fondre dans le regard acier de la demoiselle. Une inspiration, avant de prendre son propre café, de le boire. Une épaule qui prend appui contre la machine. "Ça va, toi ?" Banalité déconcertante. Il ne sait même pas bien quoi dire. N'a fait acte de présence que dans des messages lointains, pour les moments où la f a m i l l e se doit d'être là. Anniversaire, Noël, nouvelle année. Pas de quoi être fier, mais qui lui assure au moins de ne pas être totalement mal à l'aise. Et il ne sait comment justifier tout cela. Alors, finalement, il crache les mots avec difficulté, tant ça fait battre son coeur, appuie sur la faiblesse que la bête a apporté avec elle. "... Désolé pour... Hum." Il détourne le regard, le quarantenaire. Fatigué d'exister encore une fois, à constater les éclats fracassés de sa vie, de remarquer une fois de plus les dégâts de cette éclipse qu'il avait fixé trop longuement. "Cette année." Disons les choses ainsi. Nouvelle gorgée qui aurait brûlé l'oesophage auparavant, sans la présence de Sköll en ses tripes pour le protéger des morsures de ce genre. Alors ce n'est qu'une vague de chaleur sur laquelle il n'a même pas tenté de souffler. Des braises qu'on avale.

Pas besoin de balles pour abattre l'homme. Juste ce ton qui tranche les veines, les vannes. Il sent le coeur se flétrir sous l'impulsion et la rancoeur pas tellement planquée, crachée dans les airs, venin qui l'atteint en plein dans le mille. Ça coûte si cher, l'Humanité. Si bien qu'il faudrait la renier entièrement mais qu'il n'en est pas capable encore, malgré toute la haine qui règne au sein du palpitant, de cette colère qui le fait se lever encore. Un silence d'abord, aucun rire pour accompagner celui de la gosse. R i e n. Puis une inspiration, après une longue gorgée de café. La fadeur du jus de chaussettes ne l'atteint pas plus que la chaleur qu'il dégage, qui devrait chauffer le bout des doigts et qui lui semblent glacé, comme si le mort qu'il abritait en sa carcasse avait fini par les faire pourrir tout deux, d'avec ses entrailles qu'ont connu les Enfers et plus encore. Dis, Sköll, il faisait tout noir alors ? Et puis, finalement, un épaule qui se hausse. La fatigue qui ressort, la faiblesse bien trop présente pour que ça ne pèse pas sur son âme entière, sur ce mouvement qui s'éteint après avoir à peine vécu. M o  r t - s. "Il n'y en a aucune." Qu'il dit alors, très simplement, le flic. Le regard quelque peu vague, l'affirmation tout autant. Il lui a jamais semblé être aussi vrai qu'à cet instant, pourtant. "Juste cette ville qui m'épuise." Lui, l'être entier, l'homme qui n'en plus de toute cette colère qui gronde et dévore ses tripes bien plus efficacement que l'affamé en son sein. Où est passé le soleil ? "J'imagine qu'à force d'avoir envie de la voir brûler, j'ai perdu de vue le reste." Fracassante, cette vérité. Brute et violente, pour ce mec qui a toujours voulu protéger les gens. Mais les g e n s s'entretuent, se volent, se détruisent. Ils roulent le beau dans la merde, l'en recouvre entièrement et semblent tous si fiers de ça. Alors, Markus, il semble plus qu'à faire brûler le tas de fumier sans plus se soucier des quelques bouts de paille qu'auraient été épargnés par cette machinerie infernale. Parce que, tout au fond de lui, il le sait déjà. Qu'ils sont foutus d'avance, qu'ils finiront par rejoindre une de ses foutues mafias. Alors autant les abattre, tant qu'ils sont bons. Il hausse derechef les épaules, repose ses iris d'acier sur Alexandra, sur cette bouille qu'il aurait aimé continuer à préserver. De lui-même, de ce qu'il est devenu, de cette colère qu'il ne sait plus contenir. Des  c r o c s  de la  b ê t e.

Il ne sait pas, si tout s'explique. Ne peut mesurer combien il a l'air trop vieux pour son propre âge. Combien il a les mâchoires crispées en permanence, à quel point ses expressions s'affaissent d'à force de plus savoir ce que c'est, de sourire. Pas qu'il est malheureux, Markus. Ou peut-être que si, mais qu'il s'en rend pas compte et que c'est bénin, comparé au reste. Y'a juste sa gueule qu'est là, qui semble crier l'évidence que les mots appuient. Qu'il a envie de tout cramer, ouais, qu'il en peut plus de la vermine. Peut-être que plutôt Sköll, il aurait pu avoir ce gars qui contrôlaient les rats, d'avec sa flûte. Que ceux des mafias aux alentours auraient suivis, pour mieux se jeter dans la mer. Et il aurait continué de jouer, jusqu'à les voir tous morts. Pas de radeau à l'horizon, juste lui qui se noie à la place, qu'a la gorge et le coeur rempli de haine, d'une colère qui ne semble plus connaître de limite, qui pèse sur son visage, qui tire le regard et la bouche. Tout vers le bas, jusqu'à finir par suffoquer, pas vrai ? Mais en attendant, y'a une bouffée d'oxygène. Un élan d'humanité qui se ramène à lui, qui le serre de sa petite carcasse en comparaison à la sienne. Et ça fait mal. Et ça fait du bien, aussi. Alors il la regarde, cette tignasse accolée à lui. L'alliée, l'ennemie, son passé. Et son futur ? Le loup grogne et l'homme élève juste une pogne, pour l'apposer dans le dos de la gosse. La même qu'est devenue une femme, qu'a connu le monde bien plus que lui sans doute. Qu'a eu trop d'épreuves pour être encore considérée comme une môme mais qu'en restera à jamais une, à ses yeux à lui. Ceux qu'ont de l'affection dans le fond de ses iris, qui se rappelle soudain de ce que c'est, de respirer. Et les murmures l'affectent encore plus, le fond se rappeler ce que c'est, oui, que d'avoir quelqu'un à ses côtés. Prêt à vous tenir la main, qu'accepte le travers et le pardonne, qui dit que tout s'explique alors que non. N o n. "... Moi aussi." Et vrai qu'il l'est, oui. De voir que Sköll n'a peut-être pas tout détruit encore. Pas tout saccagé de crocs, qu'il reste une lueur, dans cette foutue éclipse qui repart pas de son esprit. Alors il esprit, hoche doucement. Parce que c'est vrai que ça serait bien, ouais, de se voir ailleurs. Un instant de silence, alors qu'il ferme les yeux, réfléchissant en venant écraser ses paupières, du bout de ses doigts, massant avant de parler. "Je peux t'appeler, quand je termine ? On pourrait aller manger. Dans un endroit discret." Et par là, il entend dans lequel ils pourront rester côte à côte sans craindre les regards. Où ils pourront parler, plus librement, sans vraiment le faire. Où la pudeur pourra se mêler à l'affection. La main s'abaisse et il termine son café à son tour, repose son regard sur Alexandra. "J'ai encore du boulot." Qu'il marmonne, presque aussi amer que le café. "Ton client est un emmerdeur." Et là, on pourrait jurer qu'il y a l'orée d'un sourire, d'un bout d'une vanne affectueuse, au travers de ses mots, pour la blonde. Un appel du coude, verbale, pour elle. Markus sait plus très bien ce que c'est, que l'humour, depuis un an et demi. Mais il pourrait frotter la poussière de ses souvenirs, pour que ça revienne un peu, rien que pour elle. Pour e u x.

Le rire d'Alexandra est comme une floraison inattendue. Une fleur qu'on a vu flâner par notre faute, plante morte d'à force de ne plus savoir trouver d'eau pour l'abreuver et qui après quelques gouttes reprend vie, qui semblait n'attendre que ça pour renaître des poussières de nos vestiges. Alors il se sent mieux, à cet instant, bien loin de la bête assoiffée en son sein qui ne cesse de prendre toute l'eau pour lui. "Le chômage me dérangerais pas." Markus rétorque, en haussant les épaules, bien loin de plaisanter de nouveau. Il aimerait mieux ça, oui, à tout ce qui peut se passer dans cette ville. C'est qu'il n'en dort plus, de tout ce qui se trame dans les ombres, de tout ce qu'elles peuvent déclencher sans jamais être vues de quiconque. Peut-être est-ce là leur plus grande différence, c'est que lui n'y prend aucun plaisir dans cette foutue ville. Qu'il la subit parce qu'il du bon côté de la barrière. Ou du mauvais, c'est au choix. Et Sköll aimerait mieux qu'il soit de l'autre, à dévorer les belles âmes pour se venger des promesses du passé qui n'ont jamais été respectées, pour venger le père enchaîné et la confiance bafouée. Conflit interne, conflit à l'extérieur aussi. Parce que Markus pourrait donner sa vie - a bien failli déjà - en échange que tout cesse. Que la paix revienne sur les terres qu'ils ne cessent d'assombrir, ces foutus Dieux qui se pensent au-dessus de toutes Lois alors qu'ils n'en ont érigé aucunes, finalement. "M'ouais, je serais pas à un blâme près." Il avoue sans phare, parce que c'est Alexandra, qu'il peut bien lui dire à elle qu'il est sur un fil raide, Markus. "À plus tard." Un léger signe de tête, avant de reprendre un café finalement qu'il ira boire dans les bureaux, face à des feuilles en papier qui narguent sans cesse.


Le téléphone contre l'oreille, les cernes sous les yeux. La fatigue est évidente, mais il ne ratera pas cette seconde chance accordée par l'avocate. Une clope tirée de l'étui, coincée bien assez vite. "Hey." Qu'il marmonne ainsi en amenant le briquet vers lui, quand elle décroche. Il tire sur la tige, avant de continuer et de parler avec un collègue, confirmer quelque chose avant de pouvoir réellement quitter le boulot. Alors bien assez vite, il retrouve l'écran du téléphone, un numéro connu à qui il n'a pas assez écrit depuis que le loup rôde dans les parages. Et c'est presque étrange à faire, que de lui donner rendez-vous. Pour autant, il est bien assez vite au lieu donné, qu'il connaît pour toutes les fois où il ne voit plus assez pour rentrer. La luminosité est basse, comme toujours lorsque la nuit est tombée et que lui se retrouve presque aveugle. Mais ce chemin, fort heureusement, il peut le faire à pied et connaît chaque segment à parcourir pour s'y poser. L'endroit est éclairé à souhait, comme pour effacer l'idée qu'il fait si nuit, dehors, comme pour intimer à tous qu'ils sont bien, ici. Il s'installe dans un coin, loin de tous, l'idée de se reposer un peu tout de même. Et la discussion interne débute. Tu es faible. Déjà il grince des dents, souffle l'air que tout son buste peut bien contenir, avant de se frotter le nez d'un pouce qui dévie sur une paupière. Va te faire foutre. La cohésion n'est point de mise, une nouvelle fois.

Et ainsi la bataille a duré, jusqu'à ce que la voix d'Alexandra le sorte de cette sanguinolente guerre qui, il ne doute pas, ne trouvera sans doute jamais de fin. Une belle âme envahie par un parasite. Sans vouloir reconnaître tout ce qu'ils ont commun, tout ce qui gronde en chacun et qui est devenu un seul cri, unique et terrible. Une violence qu'il planquait et que l'autre a débusqué, sans honte aucune, qu'il nargue avec depuis. "Non, t'en fais pas." Il n'en a aucune idée, à vrai dire. ne peut que constater qu'elle est là, qu'elle ne semble pas prête à partir. "Tu as faim ?" Il crève la dalle, Markus. A véritablement l'impression de manger pour deux, désormais, comme s'il fallait que la carcasse s'alourdisse encore plus, alors que déjà imposante, pour supporter le poids de deux consciences. Commandera ainsi le burger le plus imposant avec un supplément de bacon, et double portion de frites. Et un cendrier, aussi, au passage. Parce qu'il n'a pas pensé à en prendre un en arrivant. La tête trop pleine, qu'il n'a pas su vider. Débusque encore son paquet et le pose sur la table, avec son briquet, à la portée des deux. "Tu m'en veux ?" Markus demande directement ce qui peut bien lui rester dans un coin de tête, dont il doit se débarrasser. Qu'importe la réponse, au moins il sera fixé. Saura s'il faut se repentir ou si pourrait avoir été compris. Il n'en sait rien, le fait que tout s'explique le hante. Il n'a aucune excuse, après tout. A u c u n e.

Il laisse le silence se faire, le sait sacré par moment. Le respecte trop pour la presser et sait que la réponse viendra. Vient juste imiter le geste de se prendre une cigarette aussi, qu'il coince avec bien moins de délicatesse entre les lèvres, l'embrase bien assez vite pour tirer dessus en écoutant enfin la réponse. Et il hoche, étire un bref sourire. "Depuis quand ?" Une taquinerie qu'elle pourrait lui faire payer d'un coup dans l'épaule si elle voulait. L'affront fraternel fait, il revient à son sérieux, hochant vaguement à l'information. C'est qu'il ignore s'il l'est réellement. Il survit, plutôt. C'est qu'ils le  d é v o r e, les  c r o c s  de la  b ê t e. Une bouffée de nicotine, avant de se frotter les paupières de ses doigts, la clope coincée aux frontières de sa bouche. "Je sais." Qu'il dit en laissant retomber ses pognes, lorgnant de nouveau sur Alexandra. Quelques gorgées de fumée avant d'écraser la clope qu'il a fumer sans doute trop vite, observant le repas, apportant déjà une première frite dans le gosier. "Te l'ai dit." Crunch. "Cette ville m'épuise." Il ne ment pas, Markus, en déclarant cela. Parce que c'est sur cette même ville que l'éclipse s'est abattue, qu'elle a englouti l'entièrement de son être pour le recracher, déformé. D'avec cette tumeur en plus, rajoutée durant le processus. L'âme qui cohabite sans le faire, qui souhaite dominer et qui fait tout pour le tuer un peu plus chaque jour. C'est qu'il n'avait qu'un seul frère. Markus se met à manger concrètement plutôt que de ruminer ses pensées, suivant l'exemple d'Alexandra en venant croquer généreusement dans le burger, attrapant bien assez vite une serviette pour éponger le gras qui s'en échappe. Mastiquant tout en s'essuyant le menton, lorgnant de nouveau sur sa voisine quand la parole est reprise. Léger lever de sourcil face à la nouvelle de sa séparation. "Oh." Première réaction loin d'être satisfaisante, sans doute. "Qu'est-ce qu'il s'est passé avec Ismael ?" Il a retenu son nom, le bougre. C'est qu'au bout d'autant de temps, il n'aurait pas pu faire autrement. Qu'il n'était pas comme aujourd'hui, avant. "Et tu as déménagé où, du coup ?" De nouveau, il croque, prend une bouchée moins ambitieuse, découvre que le bacon a pas plus de goût que le steak, juste plus salé. Mais ça le dérange pas plus que ça, pas venu pour se régaler les sens, plus pour se remplir et que la carcasse cesse pas de fonctionner de sitôt. "Rien de neuf de mon côté." Parce qu'en dehors du loup en son poitrail, il n'y avait rien eu... "... Ah, si." C'est qu'il oublie, trop souvent. "J'ai été rétrogradé." Et quand on sait comme son parcours avait pu être exemplaire et combien il avait pu s'impliquer dans son travail... C'est finalement une sacrée nouvelle qui n'a pas besoin d'être accompagnée par autre chose.