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Would you be happier ✶ (Libre)

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Would you be happier ✶ (Libre) - Sam 18 Jan - 1:41


Would you be happier
Dix-huit Janvier de l’an de grâce deux-mille vingt. Le caoutchouc du quatuor de pneus de la clinquante Lamborghini au moteur ronronnant, roule sur l’asphalte des rues nimbées par le tiède et capricieux soleil d'Arcadia dans un train de sénateur. Transposition moderne de la pavane de la Renaissance. L’art de la représentation est inscrite dans les gênes des Innerhofer. L’étalage outrancier de signes extérieurs de richesse doit être de rigueur en toute circonstance. Belles voitures, belles maisons, belles mises … . Alors on roule au pas. Pour attirer tel des bombyx dans des abat-jours, les regards envieux des badauds. Leur arracher une myriade de soupirs las et rêveurs, en exhibant sous leur nez quelque chose qu’ils ne pourront jamais caresser l’espoir de posséder. Aujourd’hui sonne le glas des quelques bribes de dignité qu’il te reste. Depuis la mésaventure survenue quelques jours en amont dans ce nouveau bar à l’orée de New Kabukicho - où vous vous étiez tous retrouvés pour écouter Jetmir et son groupe jouer à l’occasion de la soirée d’inauguration – tes aînés ont décidé – ou plutôt exigé - qu’il était temps de faire quelque chose. Tout trois sont venus aux aurores te chercher par la peau des fesses, afin que tu fasses l’acquisition d’un chien guide dans une animalerie spécialisée. Un compagnon à quatre pattes dressé pour seconder et assister au quotidien « les gens comme toi ». Ca y est. On est en passe de t’embastionner dans l’habit carcéral de l’aveugle. Bientôt l’effet domino s’enclenchera. Sur revendications des parents, ils sommeront que tu chausses sur ton nez bourbonien les lunettes aux opaques verres teintés et que la canne blanche se greffe dans la paume de ta dextre. Pendant dix-sept ans, tu t’es efforcé d’être comme tout le monde. De mettre un point d’honneur à te débrouiller par toi-même et être traité comme une personne lambda. Sans ménagement excessif, sans tact exacerbé ni égards démesurés.

Eh voilà que l’on s’apprête à te passer autour du cou, une pancarte disant "aveugle", encore plus voyante que le néon rouge de l’enseigne d’une maison close d’Amsterdam. Une perspective qui te fait enrager et fulminer intérieurement. Mais la rébellion reste aux fers. Tu es fatigué de devoir te battre et lutter pour disposer de ta vie comme tu l’entends. La résignation a fini par l’emporter. Tu abdiques, abandonnes et laisses ceux se targuant de savoir ce qui est bon pour toi, tirer les ficelles de ton existence. Tu as le sentiment d’être un condamné à mort vénitien dans une gondole passant sous le pont des soupirs, et emmené en place de grève sur le billot. Un esquif à plusieurs millions de dollars conduit par Xherdan, tiré à quatre épingles dans son costume Armani hors de prix, et embaumant le « Sauvage » de Dior que tu lui as offert pour son anniversaire. A sa droite sur le siège passager : Jetmir. Que tu imagines sûrement entrain de griffonner son fidèle carnet à dessin aux allures de prolongement de lui-même. Assis sur le cuir odorant de la banquette arrière à ta gauche : Sinan. Sinan qui joue sempiternellement les mamans kangourou, en ayant de cesse de te tenir le bras pour te guider. L’envie de prendre tes jambes à ton cou et de t’enfuir du flamboyant bolide, s’accroît crescendo lors de chaque arrêt à ce que tu supposes être des feux tricolores. Maugréant et déployant de pharaoniques trésors de mauvaise volonté, tu n’as pas décroché un traître mot de tout le voyage et fait le choix de t’isoler dans ta bulle, en vissant dans tes ouïes des écouteurs Bluetooth crachant les mélodies de ta playlist « Spleen ». Caché sous la visière d'une casquette New-York grège, ta tempe en ébullition vient s’écraser sur la fraîcheur de la vitre fumée. Tes disques mazoutés fixant le vague. Vides. Vitreux. Inertes. Prêt à euthanasier une nouvelle fraction de ton âme. « On est arrivé. », informe la voix au timbre velouté de l’impérieux conducteur.

Une trinité de vocables qui peine à se frayer un chemin, entre la forêt de notes du solo de contrebasse égayant le bridge d’un tube des Vespers et trustant la quasi totalité de tes facultés auditives. La soudaine interruption des micros trépidations sous ton séant rebondi et la plante de tes pieds emprisonnés dans des Converses azurées, t’indique que le caractère de cette halte n’a rien de transitoire. Sous les catacombes du capot, la horde de tigres croupissant dans les geôles du moteur ont cessé d’entonner leur récital de feulements et se sont assoupis. Le concert de cliquetis des ceintures de sécurité qui se détachent, entremêlés aux trilles des portières s’ouvrant et se refermant les unes après les autres, vient corroborer ce constat et transmue ton frêle pressentiment en irrécusable certitude. Vous voici arrivés à bon port. Dans cette nébuleuse topographique située à cheval entre le Downtown et les beaux quartiers. Le Centre Mary Todd Lincoln pour terminus. Une structure venant en aide à tes compagnons d’infortune. Afin qu’ils apprennent à conjuguer avec les irrémédiables contraintes plombant ad vitam æternam leur existence. Avec une place prépondérante accordée à l’apprivoisement des quadrupèdes aboyeurs, censés vous seconder dans maintes actions du quotidien. Des actions anodines et d’une simplicité déconcertante pour le commun des mortels, mais qui s’apparentent pour vous à d’infernaux parcours du combattant. Paraît que ce serait bien que tu te familiarises avec ces valets canins et que tu connaisses le b-a ba pour solliciter leur assistance, en amont d’en acquérir un. C’est ce qu’ils affirment à l’unisson. Alors, tu consens en ne disant mot. Leur laissant ainsi tout le loisir de régenter et disposer de ta vie comme bon leur semble. Fourbu de te démener pour garder le famélique contrôle que tu peux encore avoir sur ta vie.

Exténué d’avoir à t’époumoner et t’égosiller pour faire entendre ton petit filet de voix, dont tout le monde se fiche et que personne ne prend en considération. Les dents vissées à t’en éclater l’émail ivoirin, tu déglutis laborieusement les quelques scories de salive stagnant dans ton antre buccale afin d’exterminer un tant soit peu l’aridité y sévissant. Pomme d’Adam sautillante, tu enfouis ta patte ankylosée dans les tréfonds de la poche ventrale du sweat à capuche informe engloutissant ta carcasse. L’exhumation du smartphone parachevée, tu parviens non sans mal à presser la touche pause, ornant le milieu de l’écran tactile, au terme d’une salve de pianotages infructueux. Mettant ainsi un terme aux premiers accords de guitare de la chanson Titus Andronicus du groupe éponyme. Les petits condensés de technologie promptement retirés de tes pavillons et mis en bière avec le cellulaire made in Korea dans le cercueil en tissu safre couvrant ton buste, tu ligotes tes doigts gourds autour de la poignée et ouvres indolemment la portière. Les semelles de tes chaussures n’ont même pas le temps d’alunir sur le macadam, qu’un pas leste accourt et se rapproche de toi. Une aile s’enroule doucement autour de tes épaules et t’aide à t’extirper de l’habitacle du petit bijou automobile transalpin. Trop fluette pour être celle de Xherdan. Pas assez longue pour appartenir à Jetmir. L’âcreté d’un assouplissant – que tu reconnaîtrais entre mille – fleurant bon le jasmin de synthèse, t’irrite la gorge et te pique les sinus. Sinan, évidemment. Qui d’autre … ? Quelques mètres de bitume avalés par tes extrémités pédestres dans l’atmosphère hivernale. Sans doute suffisamment fraîche pour que s’échappe d’entre tes pulpeuses un stratus de buée. Puis il y a soudain le crissement suraigu de la gomme sur le goudron qui vrille tes tympans. L’avant-bras de celui dont tu sus dire le nom avant même de babiller « maman », qui se love tel un boa constrictor autour de ta ceinture abdominale et entrave toute velléité de mouvement vers l’avant.

Une rafale de coups de klaxon hargneux. Sonorité propre aux véhicules de confection européenne. Britannique, peut-être. La voix de Jetmir acérée comme le fil d’un cimeterre, qui déverse un rageur torrent d’injures dans un albanais maternel perfectible et imparfait. Et la résurgence d’abominables minutes, dont les stigmates entachent encore de leur encre violacée l’unicité ocrée du papyrus de ta gorge. Un aléa ponctuant la frénésie urbaine et germant aux quatre coins de cette ville où les choses ne sont pas toujours ce qu'elles semblent être tel du chiendent. Un rien qui suffit pourtant à métamorphoser ton métronome cardiaque, en un inoxydable danseur irlandais s’adonnant à un numéro de claquettes sur les planches de ta cage-thoracique. Tes phalanges ambrées s’agrippent à l’étoffe en laine du pardessus de ton tendre paladin, avec autant de vigueur qu’un homme à la mer se cramponnant à une bouée. Les malléoles et les rotules qui s’entrechoquent. Les traits de ta frimousse hâlée qui s’ensevelissent et se froissent dans le creux d’une épaule contre laquelle tu ne t’es que trop blotti. « Chhhhut, c’est fini. Ce n’est rien. On est là. », te susurre Sinan de sa suave et cotonneuse voix, en multipliant les languides caresses sur le derme praliné de ta nuque. La pointe de son nez et ses charnues appontées sur le textile écru de ton couvre-chef. Un chapelet de paroles aux vertus lénifiantes doucement égrainées, et qui parvient bon an mal an à te rasséréner. Tes griffes émoussées desserrent lentement le tissage du manteau d’excellente facture. Les trapèzes s’affaissent et le chef finit par craintivement se relever. La traversée du ruisseau calfaté s’amorce posément. Ton aîné t’avertis de votre imminente arrivée sur l’autre rive. Une enjambée plus élevée te permet d’atteindre sain et sauf la grève voisine. Trottent les minutes vagabondes porté et bercé par l’ininterrompu flux des badauds. L’errance dans le noir s’achève. Le silence qui s’enracine. T’assassine. T’occis. T’exsangue. « Ca va ? », s’enquit de savoir Jetmir de sa singulière voix rauque, monocorde et dénuée d’inflexion interrogative.

« Ca va ? ». Interrogation dissyllabique tenant en quatre petits phonèmes. Question vide de sens que tout à chacun débite machinalement sous le poids des conventions sociales, avec autant d'émotion et de sincérité que des "B'jour" marmonnés ou des « je t’aime » désincarnés. Politesse et courtoise obligent. Une colle dont on n’a en réalité cure de la réponse. Cette accratopège rétorque qui consiste à affirmativement réverbérer à l’envoyeur le propos énoncé. « Ca va. ». La formule magique qui offre la merveilleuse possibilité de répondre à tout en ne disant rien. Ta meilleure alliée lorsqu’il s’agit de repaître la curiosité de tes interlocuteurs et de leur passer l’envie d’en apprendre davantage. Cette stichomythie que tu grées d’ordinaire à un généreux sourire éclatant, faisant crépiter une kyrielle de nitescences au fond de tes lagunes fangeuses … tu n’as même plus l’énergie d’aller puiser en toi les ressources nécessaires pour la psalmodier. Alors tu tentes avec la force du désespoir de sauver les apparences et de dissimuler ton minois menaçant de se déchirer sous les affres d’un sanglot en courbant le cap, qui ne tarde d’ailleurs pas à mollement s’articuler de bas en haut en guise de mutique réplique à la question du paria de la famille. Laconique pantomime qui arrache à l’incorrigible optimiste te gardant au plus près de lui, un lourd soupir teintée d’impuissance et de désolation. Son autre abattis ceint ton buste et ton faciès se retrouve bientôt niché entre la cavité séparant ses vallées pectorales. Paupières vigoureusement cadenassées, tes cuticules s’incrustent et meurtrissent les lignes sinuant sur tes paumes. Tu as envie de hurler. De leur sommer de foutre le camp. De vociférer des « Barrez-vous ! » ; « Foutez-moi la paix ! » ; « Allez vous faire ! ». Tu as envie de chialer. De les supplier de rester. Entre les larmes et les cris. D’ânonner des « Ne me quittez pas … . » ; « Restez … . » ; « Serrez-moi … . ».

Défaits, tes poings se desserrent. Les paumes fébriles escaladent paresseusement la taille, ciselée en un « V » tutoyant la perfection, de « Monsieur Deuxième » et viennent bivouaquer sur ses musculeux dorsaux. Les doigts d’une dextre pincent la visière de ta casquette qui pivote à cent quatre-vingt degrés sur ton crâne. Les hémicycles labiaux cerclés d’une fine barbe de trois jours soigneusement taillée et structurée de Jetmir, se posent sur la veine serpentant sur ta tempe caramel. Une autre main flagorne le grain cuivré tapissant le revers de tes phalanges, à grand renfort de sacs et ressacs. Le contact glacial de la chevalière en platine cerclant le majeur, te révèle l’identité de l’instigateur de ce geste tendre et tout en retenu. Xherdan. Qui d’autre … ? Tes doigts se nouent à tour de rôle autour des siens et les broient tel des brodequins. Un de ces moments de tendresse que tu voudrais figer pour l’éternité et qui doit pourtant déjà s’en aller. « On passera te chercher pour déjeuner. Ensuite, on ira dans cette animalerie de Elysium Heights pour trouver une petite boule de poils qui pourra t’aider dans la vie de tout les jours. Ok ? Si jamais on est un peu en retard, tu nous attends hein. », t’intime la voix modulée de Xherdan dans un ton alliant un savant mélange d’autoritarisme et de douceur. Prunelles toujours échouées sur les métatarses, tu opines une nouvelle fois du bonnet. Les commissures de tes labres s’étirant en une illusion de risette. Le halo protecteur de tes trois archanges s’éloigne peu à peu et le charivari des portières de la Lamborghini donne une seconde représentation sonore à tes oreilles. Les fauves encagés dans le moteur sortent de leur torpeur et poussent à nouveau leur litanie de rugissements. Des râles mécaniques qui s’estompent peu à peu. Qui s’éloignent et se meurent sous tes fjords boueux mirant la mauvaise portion de la route.

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