Le dossier était arrivé de manière peu conventionnelle au bureau ; en règle générale, les clients s’adressaient à un détective en particulier, ou bien l’un des deux prenait en charge la nouvelle affaire lorsque son emploi du temps le lui permettait. Cette fois-ci, l’ordre de mission concernait les JJ’s, tous deux avaient été recrutés pour la même mission. Si Jules n’avait aucune difficulté à travailler de pair avec Jan, elle savait aussi que leurs méthodes n’étaient pas forcément les mêmes et nécessitaient de s’harmoniser pour les besoins de l’enquête. Leur client était anonyme et avait laissé une sacrée somme d’avance pour régler les frais liés à la mission confiée ; dans l’enveloppe de papier craft où avait été épelés les noms des deux associés au marqueur noir, se trouvait ce qui ressemblait à la constitution d’un dossier de pré-enquête, des soupçons sur un réseau pédophile qui se serait infiltré petit à petit dans les établissements un peu chauds d’Arcadia.

***

La robe était si serrée que Jules avait le choix entre dévoiler son décolleté ou ses cuisses mais ni l’une ni l’autre de ces solutions ne lui convenait, aussi alors qu’elle sortait de la voiture qui les avait conduits au club, la brune ressentait la longue veste qui était censée protéger le peu de pudeur qui lui restait. Ses joues roses qui faisaient ressortir ses taches de rousseur, le rouge carmin sur ses lèvres, elle était assez différente de l’image qu’elle renvoyait d’ordinaire, elle avait troqué son air pensif pour un sourire naïf, ses longues boucles brunes étaient nouées en une demi couette avec un ruban écarlate. Perchée sur ses talons qui la faisait se sentir femme, la détective avait tenté de camoufler un maximum son âge pour paraître le plus jeune possible sous une couche de maquillage qui affinait ses traits, du moins assez pour qu’on lui demande ses papiers à l’entrée si elle avait eu le courage de venir seule. A son bras, Jan qu’elle collait particulièrement pour le rôle qu’ils s’étaient donné. Claquant la portière de la voiture derrière eux, Jules suivait les pas de Jan, se préparant à mesure qu’ils approchaient des portes et des gardes. Lui avait dompté sa crinière rousse et malgré les centimètres en plus que lui octroyaient les échasses sur lesquelles elle était suspendue, elle se sentait encore plus petite que d’ordinaire dans cette situation, peut être justement car elle devait se faire passer pour une mineure qui se faisait passer pour une majeure alors qu’elle venait en réalité de fêter ses trente ans. En somme, tout allait bien dans le meilleur des mondes. Les regards filent droit sur eux, duo incongru qui se découpe du paysage, cliché ambulant de l’homme qui amène son trophée dans les recoins de la ville, prêts à s’adonner aux excès qu’offrait les Douze Coups.

Mais Jules se sentait en sécurité, accompagnée du Lion et bientôt d’Ikaar. Le plan était simple, concis, s’il fallait intégrer le réseau pour pouvoir le démanteler, arracher les mauvaises herbes, alors cette humiliation n’était qu’un faible prix à payer ; la détective était heureuse de ne pas se retrouver seule dans ces jeux de rôles pervers. Alors que le vigile les observe d’un air mauvais, la jeune femme met enfin en place le rôle qu’ils avaient prévu, faisant papillonner ses cils exagérément longs :

« Daddy, » roucoule-t-elle à l’intention de Jan. « Il ne faut pas qu’on soit en retard, je dois m’occuper de toi. On nous a promis une place VIP... »

Daddy.
Oui, ils avaient prévu, ça.
Et oui, elle savait que ça les poursuivrait longtemps.

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Costume blanc impeccablement repassé, chemise noire ouverte sur la peau du torse, souliers vernis, lunettes de soleil également alors qu'il faisait nuit noire... Non, le Lion n'avait pas l'habitude d'un tel accoutrement. Il n'avait pas pu se résoudre à la vulgarité cependant, préférant l'indécence. Une frontière fine, comme toutes celles avec lesquelles Jan aimait jouer...
A son bras, Jules. Du moins, une version particulièrement cauchemardesque de Jules, comme une petite poupée héroïnomane s'accrochant à ses aînés pour récupérer un peu d'argent, avoir sa dose.
Il avait fallu les préparer, ces rôles. Elle, la prostituée mineure, lui, le client exclusif...
Il avait fallu en discuter, mettre au point un code, un mot pour éviter que les choses dégénèrent puisque sa collègue serait dans une situation particulièrement vulnérable.
Elle avait changé son apparence légèrement, et Jan aussi, sacrifiant sa barbe bien aimée pour ne laisser que deux traits de fines moustaches au dessus de sa lèvre, à la manière d'un acteur italien has been.
Ses cheveux étaient toujours roux, ils les avait foncé cependant, gominés aussi, en arrière sur son crâne. Ca, et puis des favoris aussi, pas de mauvais goût mais presque. L'apparence de quelqu'un qui a les moyens; quelqu'un qui essaye mais qui au fond de lui, reste un gros boeuf.
Et cela faisait vibrer le Lion évidemment, qui ne supportait pas une comparaison pareille. Lui, il était pour le carnage et l'éclat, rien de plus...

Jan avait du s'occuper d'autres détails terre à terre également, il n'avait pas maquillé les bras et les mains de Jules avec de fausses traces de piqûres, arguant que les filles préféraient se piquer entre les orteils pour éviter les traces d'aiguille justement. Ne pas gâcher la marchandise. Un tip qu'on apprenait tôt, à l'école de la rue. Il lui avait également monté où lui-même porterait une arme sur lui, qu'elle puisse s'en saisir au besoin tout en faisant semblant de le caresser, de le toucher. Ils avaient répété les gestes aussi, habillés normalement tous les deux, les endroits où jan pourrait saisir sa collègue, la manière dont sa main descendrai plus bas de d'habitude dans le dos de celle-ci, que la jeune femme s'habitue au geste. Enfin (et cela, jan ne lui avait pas dit), dernier détail sordide, l'enquêteur avait acheté une coquille qu'il portait présentement, afin de mettre une barrière entre lui-même et Jules lorsque la jeune femme aurait à s'asseoir sur ses genoux avec une jupe beaucoup trop courte.

”Tu es bien pressé, Pumpkin. Tu vas l'avoir, ton Daddy...”La main possessive sur la hanches de la jeune femme, il entra. A l'intérieur, du bruit, du monde. Ikaar devait les rejoindre également, ils l'avaient prévenu de leur petite “opération”. Néanmoins, avec l'autre roux, tout était possible et Jan ne savait quand ou comment le patron les rejoindrait.

”Soit sage, arrête de trépigner. Regarde, la voilà notre réservation...” Une banquette rien que pour eux, leur permettant d'embrasser la salle du regard. D'un signe du doigt, Jan ordonna qu'on leur amène un seau de champagne. Ne pas commander à boire attirerait les regards ici...

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L’établissement ne changeait pas vraiment. Fantasque, animé. Les douze coups aux feutrés par un velour vieillit, sombre. Un speakeasy ou les hôtes sont peu regardant sur la clientèle. Ou tout peut s’acheter à un juste prix, si on sait comment parler au patron. Ce n’est pas vraiment le genre d’établissement que les parents Killough était fier de voir en la possession de leur progéniture héritière, pourtant, il avait choisi celui là parmis tant d’autres malgré la réputation des lieux, bien avant qu’il ne signe le contrat. Vraiment, les choses ne changeaient pas beaucoup. Peut-être plus de roux derrière le comptoir et dans les allés, une carte des alcools plus étoffée que dans le passé et une carte aux mets divins pour les clients aux natures plus qu’humaine. En général on retrouvait le patron de l’établissement à une des tables lui aussi, marchandant quelque chose avec quelqu’un ou dans son bureau, à écouter sa sénéchale lui faire les derniers rapports sur la situation de leur clan. Pourtant, ce soir, il était assis au bar sans être entrain de discuter avec personne. Pire encore, il semblait attendre quelque chose de son impatience d’enfant gâté, petit prince devenu roi incapable de rester sans rien faire dans ses bons jours. Ils avaient promis d’arriver ce soir et il était plus que près. Quand il avait accepté d’aider sa colocataire et son ami, c’était avant tout pour l’excitation de participer à une mission d’espionnage, une vraie, avec des détectives et des déguisements sophistiqués. C’était l’occasion de s’amuser sans toucher à la mafia, et pire, c’était l’occasion de pincer des criminels que même lui, ne voulait pas dans son établissement.  

Et il trépigne, le bougre, le verre sur le comptoir qu’il remplit à mesure qu’il vide, se tournant pour observer les environs, parfois. Ils étaient où bon dieu, qu’il gromelait presque..Quand ces yeux tombent dessus. Appelez ça la vision d’aigle ou simplement un radar à connerie, c’est la robe - ou plutôt sa quasi absence - qui alerte le détective en herbe puisque non loin, la touffe de cheveux roux signifiait que non, il n’y avait pas d’erreur possible. C’était eux, et ils allaient vers la table réservée en leur honneur. En embarquant la bouteille et le verre avec lui - quelque chose lui disait qu’il en allait avoir énormément besoin pour la suite de la soirée. Le pas habitué à se glisser dans les lieu il passe au travers des tables et des clients sans encombre, jusqu’à les rejoindre. Jan et Jules, les détectives à la discrétion à revoir de ce qu’il lui était possible d’observer en arrivant devant eux, les yeux désolés quand il observe Jules   « Tu en caches beaucoup des tenues comme ça dans notre dressing ? » Qu’il demande, sans chercher à les saluer d’avantage avant de s’asseoir lui aussi sur la banquette, déposant sa bouteille et son verre sur la table - ça ne serait de toute manière pas la seule à arriver puisqu’une des serveuses arrive avec du champagne. Pas le plus cher, tristement. Il les regarde de nouveau, déjà le look de Jan sorti d’un porno des années 80 ou d’un film de la même époque, avec leur propre image du mafieux pédophile.  « Quand vous m’aviez demandé de l’aide, je ne pensais vraiment pas que c’était ça, votre idée. » qu’il souffle en prenant une gorgée de son verre qu’il pose sur la table de nouveau, pas trop certain de quoi penser. On a vu mieux, niveau infiltration.

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Les talons claquent sur le sol, elle rejette la tête en arrière alors qu’elle glousse tout en se dirigeant vers les places qui leur ont été réservées. Libre. Ecervelée. Facile. « Oh dis, s’il te plaît, je pourrais m’asseoir sur tes genoux ? » A son bras, le lion fait facilement une figure imposante, se veut élégant et à la fois éloigné de son apparence habituelle. Elle, elle avait remballé ses tenues strictes et ses cernes, ses joues rougies par le blush lui donnant l’air de sortir d’un dessin animé. Jules savait parfaitement ce qu’elle était : un trophée, une vitrine. Tous les regards qu’elle attirerait seraient curieux de savoir d’où elle vient, combien elle coûte, comment peut-on l’obtenir. Comme cela avait été étrange de répéter ainsi les comportement qu’elle allait devoir adopter, laisser ses mains se balader, ses yeux paraître dévoués, les doigts de Jan la toucher. Ils étaient rarement dans le contact physique, ces deux-là, leur affection passant essentiellement par du non verbal et des actions à peine assumées. Jan faisait dans la brutalité, Jules brillait par sa capacité hors norme à ne jamais savoir comment s’exprimer sans paraître trop froide ou trop gênée. Mais ce soir, ils n’étaient plus que de nouvelles personnes, leurs masques étant leur nouvelle personnalité. Elle rayonne de cette insouciance adolescente, lolita partagée entre la sensualité et l’innocence, elle n’aurait eu qu’à battre des cils pour obtenir des faveurs. Ils sont là, avachis sur la banquette, la main de Jules se perd sur le torse de Jan alors qu’on leur fait venir à boire, les étoiles dans ses yeux sont factices mais l’excitation bien réelle alors que l’infiltration, le jeu de rôle grandeur nature rendait le tout sorti d’une fiction. La fausse nymphette fait claquer sa langue sur son palais alors que les verres sont servis et elle remercie la personne qui leur apporte avec enthousiasme, observe l’ensemble de la pièce en se levant pour saisir le sien, les bulles ocre lui offrant des promesses d’ivresse, elle le porte à ses lèvres en croisant le regard d’un client au loin, insiste lors de ce bref échange pour que cela soit plus indécent que cela pourrait être.

Oh.

Alors qu’elle se penche pour murmurer à l’oreille de son compagnon, nombreux penseraient en voyant le sourire qu’elle contrefait qu’il s’agit de propositions obscènes alors que… « A six heures, ça nous regarde depuis qu’on est arrivés.  » Certes ils attireraient sans doute les regards mais une fois la surprise passée, seuls ceux réellement intéressés continueraient de les dévisager. Reprenant sa place, la détective voit la silhouette d’Ikaar se découper et en voyant son colocataire qui l'attaque immédiatement sur sa tenue, elle ne casse pas son rôle une seule seconde, il s’installe avec eux, elle garde son sourire espiègle pour ceux qui observent au loin : « Je te laisserai vérifier par toi-même…  » Une fois le serveur parti, elle se permet de prendre un ton qui se veut moins séducteur et plus bas : « Je ne savais pas que le patron avait des vues sur les mineures, lui aussi.  » Une simple pique qui lui signifiait que venir à visage découvert n’était pas forcément une bonne idée quand on voulait coincer des types faisant du trafic dans son propre établissement. Reprenant son rôle, elle s’installe sur les genoux de Jan, marquant son appartenance par la même occasion : « Peut-être qu’on pourrait inviter des gens, qu’en penses-tu, Daddy ?  » Pitié, Jules espérait que rien de ce qu’elle disait actuellement ne serait retenu contre elle plus tard. Quelle torture de jouer ce rôle, à des années lumière de ce qu’elle était. Mais bon… Il paraît que c’est pour la bonne cause. Et puis, ils étaient payés d’avance… Une moue boudeur apparaît sur son visage alors qu’elle plante un nouveau clou à son cercueil : « En plus, tu m’as promis un peu de bonheur… » Ouais, après la prostitution de mineurs, la drogue. Vraiment, on enchaîne absolument pas les malaises dans cette mission.

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Il était là, assis sur une banquette ayant vu passer bien d'autres séants, et une femme voulait s'asseoir sur ses genoux, gestes tendres, gestes aguicheurs. Gestes tout court. Un contact humain, presque trop fort pour Jan, il ne voulait pas de cela. Il, lui ou le lion? Les deux peut-être? Ce n'était pas Jules, la jeune femme était l'une des rares à pouvoir le toucher, l'approcher à l'improviste. D'autres le pouvaient, complices aussi, pas intimes. L'intime, c'était le néant, c'était la mort. Il ne gronda pas, c'était Jules là avec lui, c'était une mission qu'ils faisaient. Une mission, rien de plus...
Et quand Ikaar vint les rejoindre, le Lion laissa parler la Déesse. Lui, il se contenta de regarder là où la jeune femme avait voulu attirer son attention...

L'homme qu'ils recherchaient? Celui qui aimait ce qu'il ne devrait pas aimer? Celles. La chair était complexe, on l'accusait de bien des appétits. EN jan, le lion gronda sur la perte de temps qu'était la moralité des hommes. Le lion était agité ce soir, cela lui arrivait rarement. Etait-ce ce qu'éprouvait Eskel tous les jours quand Jan se contentait lui d'être placide? Il avait un sens de la justice, lui, un honneur vrillé au corps qu'il aurait pu porter en crinière. Honneur, morale, des mots, des sentiments.

”Vous n'avez pas eu le courage de lire mon mail de trois pages, Ikaar?” Au fond, ceci n'était pas une surprise. Le temps libre pour de telles choses avait une valeur, un prix, cela ne se monnayait pas en espèces sonnantes et trébuchantes mais en actions passées ou à venir, en conséquences aussi. Prendre le temps d'une chose, c'était ne pas en accorder à une autre. Par principe, Jan avait envoyé le mail, une question de respect.

”Un peu de bonheur?” Cette fois-ci, c'était Jules qui prenait son collègue de court. ”C'est que tu me coûtes cher, là, ça ne te suffit pas tout ce que tu as déjà?”

Une excuse. Une excuse pour que la jeune femme aille voir ailleurs, demander ailleurs ce gros bonheur que son Daddy méchant lui refusait. Le daron en question sentait le tissu synthétique du costume lui gratter la peau, il s'empêcha de grogner. Un tissu cheap, une imitation de luxe, le genre d'habit que portait quelqu'un pour faire illusion, draguer un peu. Rien à voir avec les costumes bien taillés que Jan arborait dans la vie de tous les jours. Ceux-ci lui manquaient, ses cravates aussi. Un seul vêtement vous manque et tout est dépeuplé...

Il reposa son verre (la coupe était encore pleine évidemment), obligeant Jules à se lever d'une petite tape (les hanches, pas les fesses) comme pour l'encourager à être raisonnable. Pas les gestes de Jan, lui il était fait de silence et d'impassibilité. Les étreintes étaient rares avec un homme comme lui, il ne savait pas consoler mais juste regarder pleurer...

Jules ne pleurerait pas ce soir, pas même pour faire semblant, pas même pour la mission. Elle était sa collègue et son amie, cela avait du sens pour Jan, peut-être pas le même que pour les autres mais assez pour qu'il traduise cela par la violence au besoin.

”J'ai déjà connu mieux, en champagne...”

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C’était une mauvaise idée, tout ça. La mine renfrognée il a rejoint le groupe de détective dans son propre établissement, filature peu discrète orchestrée par un duo de choc. Ah, Ce qu’il ne ferait pas pour aider Jules. Non seulement la loger chez lui suite aux houleuses discussions avec le grand frère, mais maintenant il leur accordait son établissement comme terrain de jeu, quelques mois seulement après que son autre commerce se soit fait en partie détruire par un dieu de pacotille et une tarée toujours dans ses pattes. Un véritable bonheur, que sa fatigue en s'asseyant près d’eux trahissait énormement. Qu’est-ce qui était le pire ? La situation globale ou sa colocataire en… est-ce qu’on pouvait décrire cette tenue sans faire dans le vulgaire directement. En tout cas, lui ne pouvait pas, ne trouvant rien à répliquer qui ne serait pas déplacé à souhait alors que le serveur était encore là - même si il devait avoir l’habitude d’entendre le patron parler comme un marin toute la journée. Une fois partis pourtant la réflexion glissée le fait soupirer. Vrai, mais ce n’était pas quelque chose d’impossible à réaliser maintenant et peu importe son costume, le maître du déguisement saurait se faire plus discret qu’eux, c’est clair. “Je fais pas là-dedans non, je venais simplement vous saluer.” qu’il formule, attendant une nouvelle arrivée d’une table obstruant la vue pour se transformer. Ici personne ne faisait jamais attention à rien de toute façon, les yeux rivés ailleurs, sur la scène, ou sur le décolleté de la serveuse. De quoi lui laisser le champ libre, la métamorphose en un type patibulaire dont il ne connaissait rien hormis le visage, la voix, empruntée au dernier trou du cul qu’il a croisé. Un homme proche de la quarantaine dans un costume sombre, aux cheveux grisonnant, le visage beaucoup trop carré et le visage inspirant tout sauf la bonté. Le rouquin était parti avec les autres, disparu comme il sait si bien le faire. “Satisfaite ?” qu’il demande en reprenant son verre, comme si, il voulait s’y noyer. “J’y vais toujours au talent, Jan. ” Pourtant rien ne le prépare à entendre ce surnom, “Daddy”, alors qu’elle s’installer sur Jan. Il ignore complètement ce que donnait cette expression sur ce visage, mais il pouvait se sentir blêmir, voir même en vomir légèrement tant il ne s’y attendait pas, tant c’était obscène à ses oreilles pourtant habituées à bien pire. Pourtant il fallait qu’il se tienne bien, qu’il reste de marbre alors que ça l'énerve déjà. Alors qu'en les regardant de loin c’est comme si il pouvait déjà entendre tout ce qu’ils avaient en tête de sordide, pouvoir déjà affolé par la foule, par les gens, par eux tous. E ces porcs allaient venir ici, les observaient. Se ressaisir et faire ce qu’il sait faire de mieux, en général, quand cela ne touche pas à ses morales . Pas comme aujourd'hui. “T’as pas choisi le meilleur, tristement. J’en aurais bien eu besoin ou du neptra carrément, à ce stade.” qu’il gromelle en jetant un oeil aux deux compères.

make everything louder, do it till my skin vibrates. more volts in the system, drown out the symptoms. everything louder, louder. i don’t wanna listen, just wanna feel it.

ft. @Ikaar Killough & @Jan Arsen

Jules aurait pu être gênée en temps normal, elle qui avait tendance à porter plus de pulls volés à ses frères que de véritables tenues travaillées (bien qu’elle faisait des efforts pour le cabinet, elle avait même apprit à enfiler des collants sans les effiler quelques secondes après et enfiler des bottes était bien plus simple qu’elle n’aurait jamais pu l’imaginer) mais elle se surprit à être à l’aise dans ce rôle tout droit sorti d’une mauvaise série télévisée. Elle dodeline sa tête en rythme, deux mèches de cheveux s’invitent pour encadrer son visage, cachée par la pénombre elle était bien moins mal à l’aise qu’à son arrivée quand toute les lumières étaient braquées sur eux. Tout n’est qu’artifices et paillettes, même l’affection est simulée, une tension inexistante mais suffisamment feinte pour mettre de la poudre aux yeux. «  J’étais sûre que tu lui avais envoyé le rapport...  » La détective connaissait son associé sur le bout des doigts, peut être un peu trop, elle conserve cet air amusé d’enfant au milieu des adultes en train de discuter même si le sujet est beaucoup moins croustillant que ce que laissait paraître son aura, ses yeux dévient un instant pour retourner se poser sur la nouvelle apparence de leur hôte. «  C’est mieux… Enfin, si on veut.  » Mieux pour la mission, pas forcément pour les yeux. A choisir, elle préférait son air légèrement espiègle et ses taches de rousseur mais quand on a l’avantage de pouvoir changer son apparence en mission d’infiltration, on ne va cracher dessus.

Et en parlant d’infiltration, il en faudrait bientôt un peu plus, parce que pour obtenir des informations, ce n’est pas en restant à papoter autour d’un verre qu’ils allaient avancer et maintenant qu’ils étaient plus ou moins fondus dans la masse... Ses grands yeux sombres s’écarquillent à la réponse de Jan et elle reprend son air innocent, princesse offusquée par ce manque d’attention que son personnage du soir devait avoir d’ordinaire. «  Quoi ? Mais...  » Son air est boudeur, la capricieuse relève la tête et dévoile sa nuque gracile, la queue de cheval tombant sur son épaule nue avec son charme de jeune fille, exprès, pour attirer le regard et les curiosités malsaines de ces figures tristes qui n’attendent que des nymphettes pour éclairer leur nuit.

Jan et elle avaient une relation où ils n’avaient pas forcément besoin de se parler pour se comprendre, les deux utilisant un langage qui ne nécessitait pas de mots et dont certains gestes pouvant paraître déplacés n’étaient qu’un signe facile à décrypter. Le regard de la jeune femme se plante dans les yeux du propriétaire des lieux : « Alors, tu veux être un détective ? » Elle lui fait un clin d’œil amusé tandis qu’elle se tortille sur le canapé et c’est à ce moment précis que la cible se décide à approcher, visiblement intéressé mais ce n’est pas à Jules qu’il parle, c’est aux deux hommes qui l’encadrent, d'abord des salutations d'usage, creuses, puis : « Elle vous a coûté cher ? » Pas la bouteille de champagne, obviously.

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Ikaar était et resterait une énigme pour Jan. Une énigme qui ne le concernait en rien cependant, les hommes avaient droits à leurs secrets, leurs hommes avaient droits à leurs traumatismes.
Il ne détestait pas l'autre, avait pour lui comme un certain respect. Le respect, une chose dure à donner par ici...
Lui-même d'un caractère compliqué et étrange, Jan acceptait que d'autres le soient autant, bien que différemment. Si le Lion s'accommodait de sa situation et de ses tristesses, il ne savait pas cependant si cela était le cas pour le Roi. Pas plus qu'il ne demandait.
Lorsque l'autre changea de visage, jan eut le début d'un demi sourire, la lèvre relevée laissant découvrir ce qui paraissait bien plus un croc qu'une dent dans l'éclairage spécial du club.

”J'aurai presque préféré un visage féminin” plaisanta-t-il, la voix grondante. Une simple blague et rien de plus.
Si les mots de Jan étaient durs, pareils à des crochets venimeux, leur venin restait une illusion et l'homme oubliait bien trop souvent la portée de ses propres mots.
Il s'en fichait en réalité, tout autant qu'il oubliait. Certains possédaient le désir de faire mal, Jan ne cherchait pas aussi loin que cela. Tout allait et venait, tout s'écrasait et s'effaçait, lames dans la pluie et pluie sur un visage.
Ses pensées étaient ainsi parfois, à la recherche de vers, de poésie. Cela ne venait pas du lion, un lion n'était pas poète, jamais. Bien des secrets pouvaient exister dans l'âme d'une personne après tout.
Encore une chose sur laquelle Jan haussait les épaules...

Ikaar se plaignit du champagne et un homme approcha, celui là même qu'ils avaient remarqué et sur lequel ils avaient enquêté de longs jours durant. Leur cible, on pouvait le qualifier comme cela. Gros connard de salaud de porc de mes deux, ça marchait aussi mais c'était un peu plus long, contrairement à l'appendice génital du type.

”Ca dépend, c'est quoi, cher, pour toi?” Du bout du menton, Jan désigna Ikaar et son faux visage. ”Pour mon ami, rien n'est assez cher. Peut-être que tu joues pas dans la même cour?”

Titiller un prédateur, une chose risquée. Le lion osait malgré tout, regard fixe, prunelles qui ne cillaient pas.

”Et si t'as vraiment de l'argent, on peut peut-être te proposer un meilleur catalogue. T'en penses quoi, André?”

Est-ce que Jan avait pensé au premier prénom venu pour la fausse identité d'Ikaar? Oui. Parfois, même s'il ne le montrait pas, il paniquait un peu...

"Dans tous les cas, on vend pas à n'importe qui."

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Vouloir devenir détective… c’était un bien grand mot. Ce que voulais Ikaar au final c’était rendre service, surtout, amis très vite la situation le met tout sauf à l’aise. Parce que l’appât c’était elle, parce que le jeu le dérange, comme il devrait déranger n’importe qui. Que c’était effectivement convainquant et que ça lui donnait la gerbe rien qu’à y penser. Où était ce neptra ? Il en avait grandement envie, même lorsque Jan s’exprime, rajoutant une couche de malaise par dessus les autres. «Ça ne m’étonne pas du tout étrangement.» qu’il répond, répliquant la voix de Jules à la perfection avant de récupérer son verre qu’il sirote sans pour autant sourire malgré son envie de le faire.Il aurait très bien pu prendre l’apparence d’une femme, en effet, mais un seul appât était suffisant, particulièrement vu la situation.

C’était déjà trop, et de toute façon il n’allait pas changer de nouveau, pas quand l’attention avait été posée sur eux et que le groupe de toute à l’heure, s'approchait dangereusement. En s’installant un peu mieux sur la banquette, Ikaar fait attention à sa posture, mon.. Moins Ikaar, plus proche du manspreading que de son habituelle posture lors que l’homme approche, et après de simple salutation routinière, demande directement combien ils avaient payé, pas pour la bouteille, mais pour la fille. Cela suffisait à irriter ses nerfs malgré l’absence de réaction sur son visage. Heureusement Jan entame une réponse, l’incluant seulement ensuite dans celle-ci. Son prénom c’était donc André, aujourd’hui. Bien, il saurait s’en souvenir. « Pourquoi pas oui...Si t’as de quoi payer bien entendu, c’est que c’est pas donné. Surtout des comme ça... » Jeune. Ils voulait dire des jeunes, même si Jules était plus âgée c’est bien ce que ce porc cherchait non ? Des jeunes.

Il avait beau haïr le type face à eux, quel choix avait-il, que celui de rester dans ce petit jeu, répondre, participer alors que ça l’écoeur franchement. « C’est clair. On ne vend pas n’importe quoi au premier venu, j’espère que tu comprends. Néanmoins..On peut voir ce qu’on a en stock... Tu cherches quoi de précis ?» qu’il demande, même si il n’avait absolument pas envie de connaître les préférences de ce gros dégueulasse, encore moins si.. « Elle te plaît celle-ci ? On en a d’autres comme ça si ça t’intéresse » qu’il demande, feignait un rictus. Quelle horreur. Quelle putain d’horreur ce truc. Définitivement il regrettait son choix d’aider, la prochaine fois, ils pouvaient aller se faire voir.
Hors de question, plus jamais, les infiltrations.

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