Augustin pose le sac de litière sur la table. Il a choisi la marque Fresh Step complètement par hasard, parce que la boîte lui donnait l’impression de pouvoir avoir confiance, et parce que c’était écrit en gros élimine les odeurs. Une litière spécial chatons, avec un partenariat affiché avec Febreze – il ne peut pas se tromper, non ? Il observe le paquet un moment d’un air dubitatif, pas certain que ce soit la marque qu’aurait choisi Callie, à la réflexion. Elle doit connaître des trucs plus adaptés et plus naturels, sûrement. Il hausse les épaules, pose le bac à litière sur la table, tout simple, en plastique rouge. Puis le paquet de croquettes pour chaton, ainsi qu’un petit collier avec une clochette, et quelques jouets que lui avait conseillés la vendeuse. Il les pose devant les croquettes et détaille une espèce de canne avec une ficelle et une plume rose au bout, fronce les sourcils. Pourquoi est-ce qu’il s’est laissé convaincre comme ça ? Il est le dieu des vendeurs, il ne devrait pas se faire avoir pour acheter des conneries pareilles...

La sonnette retentit, et Gus finit par reposer l’objet sur la table avant d’aller ouvrir. Bien entendu, c’est Lucky qui entre en premier et lui fonce dessus avec tout son enthousiasme naturel. « Mais c’est le plus beau ! » le salue Augustin tout en lui grattouillant les côtés de la tête, pour son plus grand plaisir. Il se relève et sourit à Callie avant de lui embrasser la joue. « Et la plus belle ! » Sourire amusé, il referme la porte derrière elle. Il est de bonne humeur Augustin, content de voir Callie et Lucky. Et le petit paquet qu’elle tient dans les bras. « Alors c’est lui, le petit miraculé ? » demande-t-il en référence au prétendu sauvetage de Lucky – qui l’a sûrement trouvé dans un coin de rue, perdu ou abandonné.

« - Lucky, laisse Minou tranquille, il va aller voir Papy » Je soupire, mon chien s’est entiché d’une petite boule de poils qu’il a sauvé et maintenant, c’est limite s’il ne le prend pas pour son petit. Il est mignon mais je n’ai pas le temps pour un troisième membre dans la famille. Il sera au mieux dans la grande maison de Gus. J’ai déjà Lucky et Mina. Deux rescapés de la vie, je ne peux pas en avoir un troisième mon emploi du temps ne me le permet pas. Et puis il y a Irlande aussi, ma belle Jument, c’est beaucoup de temps. Je veux le meilleur pour mes petites bêtes et j’ai déjà l’impression de ne pas passer assez de temps avec eux. Il faut d’ailleurs que j’aille monter Irlande. Elle a besoin d’entraînement, la saison des compétitions est terminée mais je ne veux pas qu’elle perde la main, c’est une compétitrice, comme sa maman. « - Lucky, apporte Minou, allez ! » Il tient le chaton dans sa gueule, par la peau du cou, comme un véritable papa. Il m’attendrirait presque mais je ne céderais pas, il est têtu mais je le suis encore plus que lui. Il finit par avancer et me laisser le petit chaton dans les bras. Une belle femelle tri-colore. Forcément une femelle, une calico on appelle ça comme ça dans le jargon vétérinaire. Les calicos sont à 99,98 % des femelles, lorsqu’il y a des mâles avec trois couleurs, il y a de grandes chances que le chat est une tare. Je n’en ai encore jamais croisé, des mâles tri-colores. Je caresse le sommet du crâne de Lucky, je sais qu’il ne veut pas voir partir la petite boule de poiles. Je lui fais un bisou sur la truffe. « - On ira le voir chez papy Gus, ne t’inquiète pas. » Il me donne sa patte, on a un deal lui et moi.

Je mets petit Minou dans la caisse de Mina pour le transport. J’embarque mon chien aussi, Lucky me suit partout, il faut faire avec. Gus a l’habitude. On monte à bord de mon pick-up et on prend la direction d’Elysium Height vers la maison de Gus. Lucky est assis à l’avant la langue pendante pendant que Minou miaule à l’arrière tout perdu. On arrive à destination. Je sonne à la porte et Gus vient nous ouvrir. Mon chien est ravi de pouvoir réclamer de nouvelles caresses, il fait comme chez lui ici. Je ris légèrement, j’ai dans les bras la caisse avec la petite boule de poils. Je souris à Gus lorsqu’il me fait des compliments. « - Tu parles de ta future colocataire et de moi ? Bonjour Gus! » Je ris et je l'embrasse sur la joue affectueusement. Le chat est sublime aussi il faut dire. Gus s’intéresse rapidement à ce que je tiens dans les mains. Je souris, je me dirige vers la table et je pose la caisse. Je l’ouvre, Lucky pointe sa truffe pour renifler. Minou sort un peu inquiète. « - je l’ai appelé Minou en attendant qu’on trouve mieux, elle n’est pas très farouche, Lucky l’a déjà dompté » Elle miaule pour qu’on s’intéresse un peu à elle. « - Minou, voici ton papa ! » Je prends la bête et je la tends doucement à son nouveau maître. Elle se cale dans ses bras et ronronne, je suis totalement sous le charme. « - Voilà, je crois qu’elle t’a adopté, c’est l’amour fou ! Maintenant, faut qu’on lui trouve un nom, digne de cette demoiselle ! Faudra que Lucky donne son approbation, bien sûr ! » Je regarde mon chien qui me répond par un jappement. Je tape sur ma hanche et il m’enlace en frottant son nez contre moi, un câlin digne de mon petit chéri 

Oh. Elle n'est pas farouche... En plus de pouvoir vérifier ces dires quand Callie pose le chaton dans ses bras, Augustin réalise que c'est une petite fille. Comme toujours, son cerveau a prophétisé que ce serait forcément un garçon, par défaut. Erreur. Le banquier porte le petit animal avec précaution, pas vraiment sûr de ce qu'il fait. Il a déjà porté des chats, mais celui-ci... celle-ci pardon. C'est un bébé. Et elle la lui donne, à lui. En tout cas Callie a l'air de dire vrai, la petite n'est pas farouche : pour preuve, elle se met à ronronner assez vite, pour sa plus grande surprise. « Désolé mademoiselle, » s'excuse-t-il auprès de la petite chatte. « Oui, un autre nom... » Parce que Minou, c'est pas très original. Il lui faudra quelque chose d'un peu plus classe, à cette petite.

Il sourit en voyant Lucky japper joyeusement en réponse à sa maîtresse. La complicité entre ces deux-là est sans pareille, Gus soupçonne qu'il doit y avoir un peu de divin là-dedans. Il s'accroupit et laisse le chaton se libérer de son emprise. Elle fait quelques pas, secoue sa patte arrière et avance prudemment pour aller renifler le coin de l'îlot dans la cuisine. « Où est-ce que vous l'avez trouvée ? » demande-t-il tout en suivant la petite boule de poil des yeux. « Café ? » La question sort toute seule alors qu'il relève les yeux vers Calliope, puis s'avance dans la cuisine pour mettre la machine en route en faisant attention de ne pas faire peur à la minette. Il sort deux tasses et pointe du doigt les affaires qu'il a acheté posées sur la table. « J'ai acheté tout ça hier. Je sais pas si c'est bien. J'ai jamais eu de chat. »

C’est la mission prioritaire. On doit lui trouver un nom digne de cette demoiselle, elle va vivre dans les beaux quartiers, elle ne peut s’appelait Minou, ce n’est pas digne d’elle. Et puis Minou c’est provisoire c’est comme cela qu’on appelle tous les chats qui passent. Il fallait bien que je lui trouve un petit nom en attendant. Maintenant, elle va avoir sa petite identité rien qu’à elle. En tout cas je souris quand je vois qu’elle se cale déjà dans les bras de son nouveau papa en ronronnant. Qu’est-ce que je disais, elle n’est pas farouche pour un sous. C’est impressionnant, elle raffole des câlins. Je crois que Gus va trouver une véritable partenaire de vie. Il ne va pas s’ennuyer.

Je regarde la petite canaille prendre ses aises dans la cuisine alors que Lucky m’enlace joyeusement la taille. Il ronronnerait s’il pouvait celui-là. Gus me demande où est qu’on l’a trouvé. Je souris. « - Je faisais mon jogging, il s’est un peu éloigné quand j’étais sur la baie et il est revenu avec la demoiselle. » Je souris. « - Il l’a ramené comme ça jusqu’à la maison. Elle était toute apeurée, elle a dû être abandonnée si tu veux mon avis vu l’endroit. » Je trouve ça vraiment triste que des gens osent encore faire ce genre de choses, mais le monde est pourri jusqu’à la moelle alors qu’est-ce qu’on peut faire. J’accepte le café d’un signe de tête accompagné d’un sourire. J’adore ça le café. Je me retiens de ne pas sortir mon paquet de cigarettes. Pour le moment, je tiens le coup, j’essaie de diminuer un peu. Je ne sais pas vraiment si cette idée restera mais je tiens bon. Gus me montre alors tout ce qu’il a acheté pour Minou. Je souris. Il ne semble rien avoir oublié. Je regarde le tout. « - Et bien, un vrai papa responsable ! L’erreur à ne pas faire c’est de lui donner du lait de vache, leur estomac ne le digère pas et ils peuvent avoir mal au ventre après, ce n’est pas conseillé. Il y a des laits adaptés, bien que les maux de ventre peuvent persister » Je souris, je n’aime pas l’idée de lui faire un cours presque magistral. Je souris en attrapant la canne à pêche avec le jouet à plumes au bout et je le mets sous le nez de la demoiselle. Elle réagit illico. « - Voilà, tu vas pouvoir la faire jouer des heures avec ça » Je ris légèrement attendrie par le comportement du chat. « - Bon alors, ce prénom, il faut qu’on trouve quelque chose, tu as des idées peut-être ? Elle devient une Esposito maintenant il ne faut pas n’importe quoi » Je plaisante quoiqu’à moitié, elle va devenir la dame de la maison, elle doit avoir de l’allure et ne pas s’appeler juste Minou.

Augustin n'est pas vraiment du genre à s'émouvoir à la moindre petite histoire triste. Un chat abandonné, ça arrive. Sa propre grand mère éventrait les lapins devant leurs yeux pour faire à manger et quand il y avait trop de chatons dans une portée, la solution était souvent rapide et efficace. On ne faisait pas dans la dentelle à l'époque, et encore moins quand le patriarche était un patron de mafia. Pourtant quand il regarde la petite chatte gambader prudemment dans sa cuisine, il se demande comment on pourrait songer à lui faire le moindre mal. Il sourit à Callie et lui tend une tasse de café. « Eh bien, elle a eu de la chance de tomber sur vous, » dit-il avant de gratter la tête de Lucky, le héros du jour.

Il écoute ce que lui dit Callie avec attention et hoche la tête. Elle fait bien de lui dire, car il aurait serait tombé dans le piège à coup sûr. Au moins, il est content d'avoir apparemment pensé à tout. « Heureusement que tu me l'as dit, sinon tu pouvais être sûre que je lui servais une tasse de lait dans la journée. » Calliope agite le jouet qui le laissait sceptique un peu plus tôt. Il y a une seconde de flottement, d'attente, où Augustin et la jeune femme observent la réaction de la petite boule de poil. Elle regarde le jouet puis finit par foncer dessus. Bon, d'accord, il avait tort. Ca a l'air de lui plaire. Il sourit à Callie qui est complètement dans son élément.

Le prénom, oui. Augustin hoche la tête d'un air un peu pompeux, s'amuse de cette prétention qu'il ne cache pas en règle générale. « Oui elle va devenir une vraie dame, una principessa » affrime-t-il avec un sourire joueur, l'italien roulant agréablement sur sa langue - et le geste de la main qui va avec, c'est peut-être un cliché mais c'est vrai. « Qu'est-ce que tu penses de... Arianna ? Ou Simonetta. » Les propositions sortent sans réfléchir, prénoms italiens pas forcément adaptés à un chaton. C'est comme si Lucky s'appelait Charles. « Ou Diana ? Pour une princesse. » C'est cohérent. Augustin rit un peu en voyant la petite chatte donner des coups de patte sur la plume rose, sûrement un peu perturbée par le fait qu'elle ne bouge plus soudainement. Il a soudaine une merveilleuse idée, la propose à Callie avec un sourire facétieux. « Jai trouvé ! Augusta. C'est parfait. »

Je ris à l’énonciation des prénoms que Gus me propose. Il tente de trouver quelque chose de digne d’une princesse. Je grimage quand même. Diana… Arianna. Non, cela ne va pas tellement pour un chat. Je pouffe de rire. J’avale une gorgée de café pour me calmer et je regarde la petite belette se balader et renifler tout ce qui lui passe sous la truffe. Je la trouve adorable, j’aurais pu la garder mais je n’ai déjà pas beaucoup de temps pour Mina, alors pour une nouvelle demoiselle, cela aurait été compliqué. Et puis pas sûre qu’elle aurait appréciée avoir une petite dame avec elle, elle a son caractère, quand s’est temporaire, ça va, mais trop longtemps elle serait capable de faire pipi sur mon lit juste pour me manifester son mécontentement. Non vraiment Minou sera super bien dans la grand demeure de Gus. « - On n’y est toujours pas niveau prénom de chat » Il propose alors Augusta. J’éclate de rire. « - Ok, là il va falloir intervenir pour que cette petite merveille ne s’appelle pas comme ça. Je me penche pour venir la caresser, elle ronronne illico. « - Il faut quelque chose de plus évoquant et moins.. farfelue. Il y a Lady, ça passe pas mal pour un animal. » Je réfélchis. « - Hm, Duchesse ? C’est assez noble pour ton nouveau compagnon non ? » Je le taquine. Lucky aboie, j’aime quand il me soutient. « - Tu vois, Lucky semble d’accord, Duchesse c’est pas mal » Après si on veut rester dans le côté Italien. « - Après tu peux avoir Dolce aussi, si tu veux la touche italienne, à toi de voir, c’est ta nouvelle fille maintenant » Je finis mon café et je repose la tasse sur le plan de travail. J’attrape la minette et je le prends dans mes bras, elle mordille mes doigts pour jouer et cela me fait rire. Elle est en position comme un bébé… cela me rappelle que j’ai trente ans et que je n’ai pas de prétendant… et qu’à mon avis, je peux dire adieu à la maternité un jour. Je soupire et je laisse s’échapper le chat qui va se jeter sur la queue poilue de Lucky pour jouer.

Callie a raison, ça ne le fait vraiment pas pour un chat. Il sourit en voyant que ses âneries la font rire aussi sûrement que la petite boule de poils qui s'amuse à bouger la plume. Il feint d'être vexé quand elle met le veto sur Augusta. « Quoi, c'est très bien Augusta. » C'est au tour de Calliope de se mettre à réfléchir et à faire des propositions. Une chose est sûre, elle a meilleur goût que lui. Il hoche la tête quand elle propose Lady, songeur, boit tranquillement son café. « Lady... pas mal, mais trop commun. » Il est sûr qu'il y a déjà plein de chats qui s'appellent comme ça. Duchesse par contre, sonne très bien. Il hausse les sourcils et y réfléchit, sourit en voyant Lucky et Callie se montrer très enthousiastes à la proposition. Parfois il a l'impression que ce chien la comprend, c'est assez impressionnant. « Duchesse, comme dans Les Aristochats. » Il regarde le chaton marcher, avant que Callie ne la reprenne dans ses bras. Elle a vraiment l'air d'aimer se faire dorloter. « Ça me plaît bien, Duchesse. Va pour Duchesse. »

Ladite Duchesse s'attaque à la queue du labrador, apparemment elle n'a pas peur de son sauveur. « Duchesse, j'attend de toi un comportement digne de ton nom. Alors pas de pipi partout, per favore, » la prévient-il tout en finissant son café. Une tentative bien vaine, il se doute qu'il aura son lot de flaques d'urine accidentelles. Il tique un instant à cette idée. Est-il vraiment prêt à cela ? Oui. Il a intérêt. Parce que dans neuf mois c'est des couches qu'il va devoir changer... Il regarde un moment chat et chien s'amuser gentiment, puis regarde Calliope. « Sybille est enceinte, » déclare-t-il de but en blanc, surpris lui-même par cette phrase qu'il n'avait pas anticipée. Il comptait parler de Lucky, mais c'est ça qui est sorti. Il cligne des yeux, un peu médusé. Il ne l'a encore dit à personne, pas même à Alcide... il fallait peut-être que ça sorte, et Callie a toute sa confiance.

Je crois qu’on tient un potentiel prénom. Il semblerait que Duchesse plaise mon cher Gus. Je rigole. Elle va être bien gâtée cette mémère, je le sens bien. Je le regarde partir à l’aventure et attaquer la queue de Lucky. Il me lance un regard blasé mais je ne dis rien, je sais que Duchesse ne risque strictement rien avec mon chien. Je rigole en le regardant. « - On dirait un papa dépassé par son petit » Je soupire légèrement repensant au faite que je n’aurais sans doute jamais d’enfant. Sujet compliqué. Il semblerait qu’aucun homme ne soit à la hauteur d’Artémis. Elle les chasse aussi vite qu’ils sont venue me séduire et je n’ai pas le temps de comprendre. Je finirais vieille fille, c’est juste une logique imparable. Les animaux sont mes enfants, je les aimes plus que tout, c’est peut-être dingue d’avoir autant d’amour pour des boules de poils mais c’est sans doute l’influence de ma déesse. j’avais une vocation pour être dans le monde vétérinaire. « - Si elle a autant de caractère que Mina, elle va t’en faire voir de toutes les couleurs, Mina aurait dû s’appeler Marie-Antoinette, elle raffole de la brioche et elle se prend pour une reine, littéralement » Je souris. Alors Gus me sort un truc. Je crois que je ne suis pas prête. Je me tourne vivement vers lui. Impossible de cacher mon air étonné. J’ai rencontré Sybille cet été et elle est déjà enceinte ? Elle a mon âge… Gus pourrait être son père. Enfaîte je me fiche de ça, c’est leur relation je crois que ce qui me fait réagir c’est qu’elle soit enceinte et pas moi. Je déglutis, je fuis son regard. La maternité me fait rêver mais je n’aurais jamais cette chance, je ne suis pas capable de garder un homme. Un psy pourrait dire que j’ai un problème avec la relation avec mon père et c’est tout à fait vrai. Il m’a abandonné, il a laissé ma mère se débrouiller. Je n’ai qu’une peur c’est de ne pas compter pour un homme… je ne me fixe pas, Artémis refuse, méfiante envers tous les hommes, j’ai cette tendance à les repousser. Seuls ceux que je considère comme ma famille font exception. Ils sont rares. Gus en fait partie. Je tente de me réjouir, parce qu’au fond, je suis ravie. Cela me ramène juste à ma condition. « - C’était désiré ? Je veux dire… C’est officiel vous deux ? Je ne sais pas… est-ce une bonne nouvelle ? » Je souffle légèrement. Je sors alors de la porte arrière de mon levi’s mon paquet de cigarette avec un briquet. Je l’allume. Voilà qui dit montée de stresse, dit cigarette. Il faut croire que je ne suis pas prête d’arrêter.

L'anecdote sur Mina lui tire un nouveau rire et il hoche la tête d'un air un peu exaspéré. Quelle princesse cette Mina, elle sait se faire plaisir dis donc. « De la brioche, carrément. » Il n'avait jamais entendu parler de chats qui mangent de la brioche - mais en même temps, il ne parle pas souvent de chat à part quand il est avec Callie, ou Sybille qui a son matou elle aussi, Shadow. Il faudra qu'il lui envoie une photo de la minette d'ailleurs, il est quasiment certain après ça de la voir débarquer dans la soirée pour faire sa connaissance.

En parlant de Sybille, justement, la conversation prend un tournant inattendu. Encore subjugué par sa propre prise d'initative, Augustin ne fait pas vraiment attention à la réaction un peu étrange de Calliope au début. Ses mots pourtant le surprennent un peu. Il ne s'attendait pas à la voir sauter de joie mais... les gens ont toujours l'air ravi quand on leur annonce ça, non ? Il ne sait pas, c'est la première fois qu'il est de ce côté là de la barrière. Nina... il n'a pas vu naître Nina, n'était même pas au courant de la grossesse de sa mère. C'est une première pour lui, et pas vraiment réussie s'il en croit les mots de Calliope qui émettent un doute tout à fait légitime. Est-ce une bonne nouvelle ? Sybille a l'air heureuse, et il l'est aussi, même si cette annonce le remet droit face à ses démons. Face à Nina, encore. « Désiré... non. Mais il l'est, maintenant. » Il baisse les yeux et s'assied sur un tabouret de la cuisine, triture la tasse de café, songeur. Quand il relève le regard, Callie a sorti une clope. Il fronce légèrement les sourcils, capte enfin le changement d'atmosphère dans la pièce et particulièrement les signaux de malaise que la jeune femme renvoie. Il l'observe, un peu interdit. Il ne pensait pas que ça l'ennuirait à ce point... « Sybille veut le garder, » continue-t-il tout en l'observant d'un regard attentif. « Et... » Officiel ? Il ne sait pas quoi répondre à cette question, car elle lui pose bien trop de soucis en ce moment. La tasse est tapotée nerveusement sur le marbre alors qu'il laisse le poisson se noyer. Il se passe quelque chose de plus important là, sous ses yeux. « Callie, qu'est-ce qui ne va pas ? »

Et oui, de la brioche. Cette chatte est une diva. Ma phrase est à double sens… parce que clairement même le sous-entendu est valable aussi… Bien que ce soit malgré moi. Mon intimité n’a pas vu le loup depuis des années. Il parait que lorsqu’on n’a pas eu de rapport intime depuis plus d’un an, notre corps redevient vierge disons que le corps de la femme se resserre. Alors clairement on peut largement dire que je suis encore vierge. Je ne sais plus vraiment comment on fait. Mais passons, là n’est pas le sujet.

Je reprends mes esprits, j’admire cette merveille de la nature, Duchesse donc. Il semblerait que l’on soit d’accord. Gus note la similitude avec les Aristochats. Mon dessin animé préféré quand j’étais petite. C’est bien simple, quand il y avait des animaux en protagonistes, alors j’étais conquise. C’est comme ça que je connais les Aristochats par cœur, comme le Roi Lion… Tarzan ou alors le Livre de la Jungle… et même Pocahantas… parce qu’elle parle presque avec les animaux quand même, c’est plutôt mon rêve. J’avais un costume de Pocahantas quand j’étais petite, avec une perruque brune et tout ce qui va avec. Je l’ai porté jusqu’à ne plus loger dedans… cette déception quand ma mère l’a donné à la fille de la voisine. Je m’égare à nouveau.

Gus m’interpelle alors avec une nouvelle. Je ne peux pas cacher mon visage stupéfié. Sa copine est enceinte. Sybille, la belle brune que j’ai rencontrée il y a quelques mois. Je ne peux m’empêcher d’être surprise, je ne suis pas prête à entendre cette nouvelle. Ce n’est pas que je ne suis pas contente… mais… c’est étrange, une part de moi est jalouse, littéralement de cette femme qui ne cherche pas à être enceinte et qui porte la vie. Je rêve de cela moi aussi, la maternité me fait envie, il n’y a qu’à voir comment je me comporte avec des animaux, plus maternelle avec eux…on meurt. Je dois savoir d’abord si c’est une bonne nouvelle, si Gus est heureux, si c’était voulu, accidentel… si la brune le garde. Je ne veux pas mal réagir, je veux être présente… indirectement cet enfant devrait être un peu comme mon frère… ou ma sœur… 30 ans de différence. Je songe à autre chose, je suis horrible, égoïste. Cette enfant va m’éloigner, forcément, je ne partage pas de sang avec Gus et là, la vie lui offre cette occasion. Il comptera plus, c’est logique. Et à nouveau, je serais mise de côté. Je me sens mal. Parce que je devrais sauter au cou de mon père adoptif, être ravie, une part de moi est ravie, ravie de voir que la vie se perpétue, qu’on aura un divin à tous les coups. C’est Alcide qui sera content. Je soupire, je sors une clope. J’en ai besoin. Au diable les bonnes résolutions. Elle veut le garder, il semble plutôt content… je n’ai pas vraiment de réponse sur l’officialisation du couple. Je suppose que maintenant cela coule de sources ? « - Et ? » Il me demande ce qui ne va pas. Je frotte mes yeux, je remets mes cheveux en arrière, je n’ai toujours pas l’habitude de les avoir courts. Je me confronte à lui. « - Rien, ce n’est rien, je n’étais pas prête à ce genre de nouvelles, désolée » Je me force à sourire et je m’approche pour l’enlacer sans le brûler avec la cigarette. Lucky couine, comme triste. Je le regarde pensant que Duchesse l’embête mais elle est en train de jouer avec les pans de ma veste installée sur le dossier de la chaise. Non, il s’avance vers moi et vient me faire un câlin, comme pour me consoler… je fronce les sourcils, étonnée de son comportement. Je n’ai pas l’habitue qu’il soit empathique. Je le repousse légèrement, je vais écraser ma cigarette dans un cendrier et je retiens des larmes que je n’ai pas senti depuis des années. J’ai arrêté de pleurer il y a longtemps. Je renifle légèrement en me cachant un peu. « - Tu dois être heureux de devenir papa… C’est une bonne nouvelle alors, surtout si Sybille est contente, c’est vraiment génial » je manque d’entrain dans mes mots. J’ai la gorge serrée. Une larme glisse sur ma joue, je suis une piètre menteuse… ce n’est pas un scoop, quand je suis confrontée à des choses qui me tiennent à cœur ce sont les émotions qui me guident.

De mémoire d'homme, il a dû voir Callie pleurer une seule fois en douze ans, peut-être deux, à la suite d'une blessure. La petite a du sang Bellandi, c'est une battante, la vie n'a pas été facile avec elle et elle a toujours affronté les obstacles le menton haut, le poing levé, le flingue à la main. Ce n'est pas pour rien qu'elle est caporegime. Alors quand il reconnaît les signes annonciateurs d'une larme à venir, Augustin se sent un peu désemparé. Il l'a déjà consolée, réconfortée, Callie est une personne très chère à son cœur et il la connaît bien, sait à quel point les émotions la guident. Il n'empêche qu'il se fige un peu en voyant cette unique perle salée glisser sur sa joue, ne comprenant pas vraiment pourquoi cette annonce la touche autant.

Même Lucky est plus efficace que lui et vient se frotter à elle pour la réconforter. C'est mignon, même si un peu étrange... il savait que les chiens ont une certaine capacité à l'empathie mais là... Callie écrase sa cigarette, feint un sourire à son adresse pour montrer qu'elle est heureuse pour lui mais... ses yeux sont tristes. Et Augustin n'aime vraiment pas quand elle est triste. Il se détache du tabouret et s'approche d'elle, pose une main sur sa joue pour la forcer à le regarder. Leurs regards se trouvent et il l'observe quelques secondes, essayant de lui transmettre toute l'affection qu'il a pour elle, pour la rassurer.« Callie... je vais pas t'abandonner, » lui promet-il, testant l'une des deux possibilités qui lui viennent à l'esprit quant à son mal-être soudain. Soit elle a peur que le bébé l'accapare trop, soit... soit il s'agit de tout autre chose.

Lucky couine un peu, assis il regarde sa maîtresse, comme s'il essayait de lui parler lui aussi. C'est dingue cette relation qu'elle a tissé avec lui, c'est comme s'ils se comprenaient, mais en même temps Callie se comporte avec lui comme une mère le ferait. Un mère, justement. Augustin a le sentiment que c'est de là que vient le problème. Il repose son regard sur la caporegime, replace une mèche de ses cheveux derrière son oreille. Si son impression est la bonne... il ne sait pas vraiment comment l'aborder. « Callie, » commence-t-il, réfléchissant encore aux mots qui vont venir. Les mains se placent sur le haut de ses bras, réconfortants mais aussi saisissants, pour avoir toute son attention. « Tu en auras toi aussi. Tu as le temps encore, » lui assure-t-il avec un petit sourire. Il n'y a qu'à le voir, lui, cinquante-et-un balais et un bébé en route. Certes lui n'est pas limité par l'horloge biologique comme le sont les femmes, mais la question ici est que tout arrive même quand on s'y attend le moins. « Ça viendra quand ça viendra, la vie est capricieuse. Regarde-moi, ça m'est tombé dessus quand je ne m'y attendais le moins. » Certes lui n'est pas limité par l'horloge biologique comme le sont les femmes, mais la question ici est que tout arrive même quand on ne s'y attend pas. Même quand on ne s'y sent pas vraiment prêt... car malgré toute la joie qu'il ressent, les doutes restent, et c'est le visage de Nina qui le hante et lui rappelle à quel point il a échoué par le passé.

Pourquoi je pleure ? Pourquoi j’en arrive à verser une larme… ? Pourquoi ? Je suis stupide. Je devrais être plus forte, moins sensible, ne pas être juste une femme portée par son désir de famille, de stabilité, d’enfants… la vie semble oublier parfois qu’on ne peut pas juste souffrir, qu’il faut un peu d’espoir et de lumière, pas juste de la douleur. Il faut croire que je n’aurais jamais le droit à un bonheur sain. Un bonheur totalement légitime, qui n’aurait pas été quémandé. Je me sens lourde, pleine de sentiments, ressentiments, triste mais en même temps heureuse, comment ne pas être joyeuse à l’idée que la vie perdure, qu’une femme puisse porter un bébé. Seulement j’aimerais tellement être cette femme. Pas la femme d’Augustin, juste une femme enceinte, ne pas avoir à envier, juste vivre une grossesse… profiter de ce cadeau. Mon coeur est serré mais il bat encore, il se bat, il frappe ma poitrine, bonne nouvelle, sentiments personnels. Je souris bêtement à voir mon chien comprendre cette douleur, il est de plus en plus empathique, il m’étonne de jour en jour, je ne sais pas à quoi c’est dû mais j’ai de plus en plus l’impression qu’il me comprend… littéralement qu’il lit dans mes pensées. Je le caresse, je me penche même pour l’embrasser sur la truffe, certaines personnes trouvent ce réflexe dégoûtant mais ce n’est pas pire que de tenir la rambarde dans le métro… et niveau microbes, allez savoir lequel est le pire. Peu importe le jugement des gens, il n’y a que moi et Gus.

J’inspire et je tente de faire bonne figure pourtant Gus semble comprendre ce désaroie. Ce n’est pas tant l’abandon qui me fait bien, bien qu’avec un véritable enfant… notre relation va forcément se ternir, sembler moins vraie… juste être factice. Cette peur est un handicape, affreuse… elle pourrait me rendre possessive si je ne savais pas me contrôler. Abandonnée une fois par mon père. Abandonnée une fois par ma mère. L’un l’a choisi l’autre et morte. La douleur est toujours là et cette blessure me marquera à vie. Je soupire… « - Ce n’est pas ça Augustin... » Je ne veux pas qu’il me prenne pour une fille égoïste… je me réjouis vraiment pour lui, il va découvrir un plaisir que tout homme mérite. Gus tente de venir me réconforter.. ses mains sur mes bras, il me regarde presque tendrement. Je détourne le regard, mal à l’aise… les sentiments ce n’est pas ce que je préfère, cela me rend vite confuse. Il commence à comprendre, ce désir ardant en moi… qui sera probablement inassouvie. Je l’écoute, je regarde par terre, je joue nerveusement avec mes doigts. Ses paroles me font sourire, il tente de me donner de l’espoir mais il ignore que je n’en ai plus. « - Je crois que je suis vouée à finir seule. Artémis n’est pas réputée pour ses nombreux amants, elle laisse cela à son frère ou son père. Elle est trop fière, trop méfiante. Et moi j’ai été abandonnée trop de fois pour espérer réussir à construire quelque chose avec un homme. » Je soupire, je suis lasse. L’idée me blesse mais c’est une réalité. « - Personne ne semble comprendre, je suis heureuse pour toi, vraiment mais ça me ramène inévitablement à ma condition… vieille fille avec ses animaux... » Je soupire. « - Je ne devrais pas me lamenter, on devrait fêter ça… tu n’as pas une bouteille de champagne à ouvrir ? » Je tente de noyer le poisson, changer de sujet. « - Je ne gâcherais pas ton plaisir à être père, sûrement pas. » Je souris, je me force un peu, je le repousse légèrement. Lucky me suit à la trace, j’attrape la petite Duchesse qui proteste en miaulant. « - Et puis tu vas pouvoir t’entraîner un peu à pouponner avec cette poule de poils » Je souris, même si mes yeux sont embués de larmes, je souris et je me cache un peu derrière le chat. Lucky jappe jalousement, je souris. « -Mais oui ! C’est toi mon fils, ne t’inquiète pas. » Comme un enfant il se dresse sur ses pattes arrière et m’enlace la taille maladroitement. « - De quoi je me plains, c’est vrai, c’est un véritable gosse ce chien... » Je soupire pour évacuer ma tristesse… je regarde Gus, je ne veux pas l’inquiéter, pas maintenant.

Il a touché du doigt le problème qui semble ronger Callie, et ce depuis un moment si l'on en croit ses paroles. Elle n'est pas du genre à parler de ce qui la tracasse, Callie, il faut des événements comme ça pour qu'elle accepte de s'ouvrir. Ce n'est pas l'idéal, mais Augustin a toujours été comme ça lui aussi. Ne rien dire, ne rien montrer, jusqu'à ce que ça explose. Il a appris avec le temps que ce n'est pas comme ça qu'il faudrait faire, et bien qu'il fasse des efforts avec Sybille notamment, il sait bien qu'il continue à être bien trop têtu sur certains sujets, à se voiler la face. Alors il ne fera pas la morale à Calliope, parce que c'est inutile. Qu'ils viennent du même milieu où la moindre émotion est une faiblesse. Pourtant elle ouvre les vannes, Callie, et lui explique à quel point cette problématique la touche. Qu'elle finira vieille fille avec ses animaux.

Augustin a un faible sourire, veut se montrer rassurant, encourageant. Le dilemme avec Artémis a l'air d'être plus compliqué à vivre pour elle qu'il ne le pensait. « Hé, je te rappelle que tu es Calliope Bartolli avant d'être Artémis, » dit-il, en pointant l'index sur sa poitrine. « Tu n'es pas obligée d'être comme elle. » Ils ne sont pas définis par leurs divinités. Ils forment un tout, un seul être, mais le mortel existait avant que la récurrence n'apparaisse en eux. Lui n'a pas connu de tels questionnements avec Hermès, car bien peu de choses semblent les séparer. Mais il sait qu'il n'est pas lui, pas tout à fait. Sa vie aurait été sensiblement la même sans le dieu, même sans son pouvoir. Peut-être même aurait-il été plus heureux. Peut-être que Nina serait encore là.

Mis à part le fait qu'Artémis soit une parfaite indépendante, il y a aussi l'histoire de l'abandon qui ne doit pas aider, c'est certain. Augustin hausse les épaules, voudrait l'encourager à se relever et ne pas s'arrêter à ces doutes et ces blessures. Facile à dire. « Et si tu veux tant que ça avoir un enfant... T'as pas besoin d'un homme. Plus aujourd'hui. » Le vieux modèle familial, c'est compliqué de s'en défaire. Il a eu du mal, lui aussi, mais c'est là aussi qu'Hermès l'a aidé à accepter. Son frère s'est vite marié, lui, s'est casé, mais Augustin ça ne l'a jamais intéressé. Il n'aurait probablement pas pensé par lui-même à avoir des enfants si Nina ne lui était pas tombée dessus par accident. Pire encore, c'était d'accepter avoir des tentations chez les hommes aussi ; ça, il a fini par l'embrasser, sans pour autant être prêt à le crier sur tous les toits - bien que cela soit un secret de polichinelle. « Tu peux le faire pour toi. Tu sais qu'on sera là pour t'aider si besoin, mais tu as les épaules pour t'en sortir seule, j'en suis certain. »

Elle finit par changer de sujet, s'excuse de se plaindre alors qu'elle en a tous les droits. Il hoche la tête, lui sourit pour lui montrer qu'elle n'a pas à s'en vouloir. « Oh, je dois bien avoir du champagne dans la cave, » répond-il en souriant alors que Callie prend Duchesse dans ses bras. Il ne résiste pas à l'envie de lui gratouiller la tête. « Ça sera un bon test, ouais. Avant les couches. » Il grimace un peu à cette idée, puis lâche un petit rire. Il n'empêche qu'elle a raison. Voilà presque quatorze ans que Augustin n'a vécu que pour lui même, alors réapprendre à s'occuper d'un autre être vivant ne pourra pas lui faire de mal.

Lucky réclame de nouveau l'attention de sa maîtresse. Ils sont vraiment fusionnels tous les deux. Augustin les observe interagir en silence, se remémore quand Callie l'avait adopté, les bêtises du petit chiot et les nombreuses balades où il les a accompagnés. Il n'y va plus très souvent, en ce moment, c'est dommage. Il n'avait pas réalisé à quel point ça pourrait lui manquer, en fait, ces instants tranquilles. Lucky a l'air heureux quand elle lui parle, et il ne peut s'empêcher de se dire qu'il comprend vraiment. « C'est dingue cette relation que vous avez. » Il laisse un petit moment de silence, continue d'observer le toutou qui est très content. « Il a toujours été intelligent mais... là c'est fou à quel point il a l'air de te comprendre. Tu n'as même pas besoin de lui parler, on dirait. »

Ne pas être Elle. Ne pas être la divinité. Il n’a pas tort. Parfois j’oublie que je suis d'abord humaine avant d’être une déesse. Artémis s’avère très présente et peut être que ça me rassure de la laisser me gouverner parce que je n'ai pas la moindre idée de ce que je vais faire de ma vie. J’ai cette impression d’être de trop partout où je vais. Alcide à bien fait sa vie sans moi. Je ne suis qu’un enfant de plus sur une longue liste. Il a un tas d’enfants bâtards et je suppose que je n’aurais jamais toute la vérité sur mes potentiels frères et sœurs. Augustin ne m’a pas attendu non plus, même s’il prend soin de moi comme il le ferait avec sa propre fille, il a une vie et aujourd’hui elle me rattrape. Il va construire sa famille et cela me renvoie juste au fait que je n’ai finalement des liens bancals. Rien de concret. La fille de trop. Celle qu’on accepte mais qui n’a sa place nulle part. J’ai peur, c’est bête je crois mais si je suis moi et que je n’arrive pas à m’adapter, comment je suis censée faire ? Je soupire aux mots justes de Gus, il a parfaitement raison dans le fond. Il faut quand même que j’apprenne à être Calliope et non une déesse d’un ancien temps. « - Je le sais…elle s’impose beaucoup je le sens. Et je crois qu’une part de moi a peur d’être juste Calliope. Parce que je ne trouve pas ma place. Et que j’ai l’impression que je la trouverais jamais. Regarde ma relation avec Alcide. Je m’impose comme sa fille mais est-ce qu’il ferait ce que toi tu fais pour moi ? Je n’en ai pas la certitude. » le sujet de ma relation avec mon père est épineux, je sais que Gus est un de ses amis les plus proches.


Gus pointe à nouveau quelque chose de juste. De nos jours, nous ne sommes plus obligées nous les femmes d’avoir un homme, un époux, pour la conception d’un enfant. « - Je le sais. J’y ai déjà pensé tu sais… seulement je ne veux pas faire vivre à cet enfance ce que j’ai vécu. J’ai grandi en voulant un père, en le cherchant… et tu imagines ma réaction quand ma mère a fini par me dire qui il était ? » Je lâche un faux rire. Un soupire presque. « - On ne va pas ruiner la soirée par mes lame tâtions hein tu veux bien, je veux être heureuse pour toi, tu vas être papa » et il va pouvoir s’entraîner avec Duchesse, bien que cela n’est rien à voir, mais les chats aiment l’attention, comme les petits. Je ris quand même légèrement même si mes yeux sont encore rouges. « - J’ai hâte de te voir galérer avec les couches. Et puis je suis sûre que tu vas être un papa gâteau. » c’est même sûr.


Lucky ressent mes émotions et vient comme m’enlacer les hanches. Sa tête contre moi, il cousine presque. Je lui gratouille la tête en en rendant compte que j’ai un peu un enfant avec ce chien. C’est là que Gus fait une remarque qui me fait réfléchir. Et si Lucky comprenait ? Il est vrai que ces derniers temps il était très empathique avec moi, je mettais cela sur notre relation fusionnelle. Je le regarde, il bat de la queue heureux. « - Tu crois qu’il comprend vraiment ? Tu veux dire comme une espèce de télépathie » je repense à la soirée chez Aaron Harrelson, la jument qui s’est pliée pour me faire monter sur son dos à cru. « - Maintenant que tu le dis, l’autre soir, j'ai voulu monter une jument à cru et elle s’est baissée pour m’y aider sans même que je prononcé un mot… tu crois qu’il pourrait s’agir d’un don ? » la question se pose réellement. Je regarde Lucky qui jappe. Je crois que Gus a mis la main sur un truc…

Artémis est une déesse qui s’impose, cela se voit. Et peut-être qu’inconsciemment, Callie se réfugie en elle, rassurée par cette force qu’elle lui confère, cette certitude qu’elle lui donne. Il sait à quel point la relation que Callie entretient avec Alcide la tracasse. Il est son père, certes, il l’accepte à ses côtés et au sein de la Camorra, mais au fond ne montre pas de véritable affection pour elle. Augustin n’en a jamais vraiment discuté avec lui, il ne sais pas ce qu’il pense en vérité. Il sait en tout cas qu’il tient à Callie, même si il ne le montre pas. Un père aime toujours ses enfants, quoi qu’il arrive, mais Alcide n’a jamais été un homme qui laisse s’exprimer ses sentiments. Augustin ne dit rien, se contente de serrer doucement les épaules de la jeune femme sous ses doigts, pression réconfortante qui, si elle n’apporte pas de réponses, lui montre qu’elle n’est pas seule. « Tu as sûrement raison, pour l’enfant, » dit-il d’un ton serein. Il est normal qu’elle veuille ce qui est de mieux pour lui ou pour elle, et si ce qu’elle a vécu l’a faite souffrir, ne pas réitérer le processus. « C’est très sage de ta part. » Elle a toujours fait preuve d’une grande maturité, Callie. Et d’une bienveillance à toute épreuve, ce qui ne l’empêche pas d’être une redoutable combattante qui sait se montrer ferme et autoritaire avec ses hommes.

Le sourire revient sur le visage de Callie quand elle évoque le sujet des couches, et elle réussit à en tirer un à Augustin également. C’est vrai que ce doit être une vision amusante à imaginer pour elle, et pour pas mal d’autres. Il n’est plus tout jeune, Augustin, et l’imaginer avec un bébé dans les bras, une couche pleine à changer… Lui-même à du mal à s’y voir, mais il sait qu’il fera ce qu’il faut pour l’enfant, et pour Sybille. « Merci pour ton soutien, » répond-il en riant. Quant au fait d’être un papa gâteau, c’est plus que certain oui. Il n’aurait jamais cru devenir un de ces pères poules et complètement accro à sa petite, mais il était dingue de sa Nina. Il a encore de ses vieux dessins d’oiseaux qu’elle adorait faire et colorier, ceux qu’il a réussi à récupérer dans les décombres de leur appartement après l’incendie. Il y en a un qu’il a encadré, et qui trône dans le salon. La mésange, celle que Nina préférait.

Lucky couine, collé à sa maîtresse, et la remarque de Augustin a l’air de faire réfléchir Calliope. Il faut dire qu’elle a toujours eu un certain feeling avec les animaux, mais Gus en vient à se demander si ça ne dépasserait pas les limites du normal, cette complicité qu’elle partage avec son toutou. Ce qu’elle lui dit est tout de même intriguant… Augustin l’observe d’un regard songeur, puis regarde Lucky japper de contentement sous les caresses de la caporegime. « C’est possible... » Il croise le regard de Calliope, pondère ses paroles. « Tu ne serais pas la première a acquérir un nouveau don. » Il a déjà vu ça plusieurs fois, et son propre grand-père, Maximilio, lui avait expliqué que les récurrences pouvaient espérer atteindre différents stades divins tout au long de leur existence. « Après tout, Artémis est la déesse de la nature… ça ne me surprendrait pas tant que ça. » Son regard est attiré par duchesse qui gambade prudemment dans le salon. « Tu n’as qu’à faire un essai, » propose-t-il à la jeune femme. « Par exemple, essaie de la convaincre de revenir vers nous. » Voilà un développement qui est intéressant.