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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra)

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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Lun 26 Mar - 23:32

C'est toi qu'elle préfère

Le bruit de l'horloge brutalise le silence. La pièce est baignée par l'obscurité. Ça ne la dérange pas. Dans cet état d'indifférence patent, rien ne la dérange. Logée dans les bras de son fauteuil, Bonnie compile les nouvelles images qu'elle a volé à Sierra et Mahaut. Car il ne s'agit que de ça : un vulgaire vol. Comme si rien de tout ça n'était vraiment à elle, ou ne la concernait personnellement. Elle sera frustrée. Peut-être fâchée. Dès que Sierra traversera la porte, dès qu'on logera ses pupilles dans les siennes, la contrariété pourrira la carcasse, du cœur jusqu'aux ongles. Voila des semaines que ça dure. Des semaines que Bonnie demeure dans l'ombre. A observer. A imaginer. A vivre par procuration alors qu'elle pourrait simplement vivre. Elle s'est assez tue.  

Le visage, creux de neutralité, ne réagit pas tout de suite quand la porte s'ouvre pour laisser un carré de lumière percer le noir. Le ressentiment et l'insatisfaction commencent juste à poindre quand les phalanges se crispent autour des accoudoirs. Elle est définitivement fâchée.

« Il est trois heures. Constate-t-elle le plus naturellement du monde. »

Elles savent que ce n'est pas le fond du problème. Tout comme il ne sert à rien de mentir sur les activités, puisque conformément à leur accord préalable, Bonnie a le droit et a assisté à toute la scène. Qu'importe. Ça ne fait pas non plus partie du problème. Pas trop. Le bleu des yeux se pose sur le visage de Sierra. Il hésite manifestement entre dépecer ou écarteler. Ce n'est pas de la jalousie pure, qui loge là, cependant.

« C'était comment ? »

L'amertume strie les cordes vocales. Si au fond, elle souhaite réellement savoir comment ça s'est passé (car elle ne peut que voir au travers, non ressentir), ses nerfs sont trop tourmentés pour vouloir l'entendre immédiatement. Une main, d'ailleurs, se déploie en ce sens pour inciter au silence. Puis, d'un geste félin, dans un souci d'équité, Bonnie se lève pour mieux affronter Sierra. La figure dégage cette animosité clinique. Ces pulsions qui, à la fois assassinent et insufflent un peu plus de vie à chaque nouveau battement du cœur. Elle ressent. Elle est fâchée. Et plus que tout, elle souffre. C'est une évidence, pour cet amour vieux de quatorze années et cette connaissance intuitive de l'autre.

« Je veux la voir. Laisse-moi la voir. »

L'exigence cingle. Le choix n'en est plus un. L'ire déborde dangereusement. Ce n'est pas tant parce que la situation a changé, que parce qu'elle a passé une journée atroce (cette histoire de prophètes morts crée une sacrée merde au poste) : toute son irritabilité n'attendait que d'être libérée par la présence Sierra.

« Tu sais que j'en ai besoin. Autant que toi. »

Plus que toi, suggère même le timbre. Parce que Sierra est forte, et que Bonnie est faible. Une vérité qu'elle a rendue générale depuis des années, à force d'endurer cette déficience sentimentale, et de ne la voir se rétablir qu'auprès de sa femme. Le regard s'assombrit de plusieurs teintes. La flamme de l'affliction carbonise les intérieurs. Plus que la certitude que Mahaut est celle qui saura la rendre entière, Bonnie s'est surtout persuadée (ou plutôt s'en est-elle aperçue) qu'il lui manquait bel et bien quelque chose. Et cette absence, ce trou béant, se creuse à chaque nouvelle image qu'elle guigne de ses deux sœurs. Ensemble. Sans elle.

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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Mar 27 Mar - 23:01

La clef agace la serrure. Neuf fois sur dix, le mécanisme aussi vétuste que tout l’appartement se grippe. Une pression de la paume, un quart de tour à gauche, un autre après une légère résistance puis le battant cède le passage. À cause des briques qui constituent trois murs sur quatre, il y fait sombre mais frais toute l'année. Pas que Sierra s'en préoccupe ; elle s'est contentée d'acquiescer après que Bonnie le lui a débité comme une vérité générale et une nécessité absolue. Le fait d'avoir un endroit bien à elle – qui plus est bien à elles – lui est toujours étrange ; une adresse, une boîte aux lettres, un endroit qu'on n'est pas censé pouvoir quitter du jour au lendemain sous prétexte d'aller se faire tuer à l'autre bout du monde. Bonnie Bowen lui a donné envie de cela.

À tout bénéfice, certainement, ses contreparties.

« Commence pas... »

L'index pousse sur l'interrupteur du salon et Sierra n'a besoin que d'un coup œil vers Bonnie pour savoir. L'épouse est tellement lisible, et prévisible en plus. Or, on n'a aucune envie de discuter l'horaire ou de décortiquer chacun des instants de son absence. C'est assez d'être observée, épiée sans un relent de pudeur, de partager une infinité de détails, tous et chacun à ses dépens, sans devoir, en plus, s'en expliquer dès la porte poussée. Si c'est au mépris des sentiments de Bonnie, les tempes de Sierra ont, elles, encore un peu de la fièvre et elle aime à la savourer. Car il y a chaque fois un moment de fusion, un zénith fugace et sublime, où l'aura de Mahaut ne l'a pas encore quittée et qu'elle rencontre celle de Bonnie. Dans ce laps qu'elle reconnaît une fois qu'il agonise, Sierra se sent pleine, légèrement euphorique, comme de connaître, enfin, un état de paix.

On l'interroge que déjà on repousse l'exposé. Tant mieux puisqu'en vérité Sierra n'avait aucune intention de tourmenter Bonnie avec ses impressions. Pour une fois, ce n'est pas de la jalousie, pas vraiment. L'existence de Mahaut suscite la même sorte de violences mais pour d'autres motifs, plus primitifs et primordiaux qu'elles n'en ont l'habitude. C'est encore nouveau, malhabile et surtout exigent. Cela requiert de la compréhension, de part et d'autre, et Sierra, par un acte de naissance qui la voulait sauvage, en est aussi bien pourvue qu'en patience.

« Je veux la voir. Laisse-moi la voir.
- Tu sais très bien ce que je vais te répondre... »

Le blouson est jeté sur le fauteuil, le débardeur passé par-dessus la tête. Sierra en a déjà fini de cette discussion mais Bonnie, qui rumine et remâche depuis Zeus-sait-combien-de-temps, rappelle son attention à elle. Un éclair d'irritation traverse les pupilles de l'irlando-albanaise. « Je suis pas ta mère, B. Si tu veux la voir, tu vas la voir... Et tu viendras pas te plaindre. » La langue agacée claque le palais et quelques gestes impatients la font quitter ses rangers et son jean. En ce qui la concerne, Sierra ne pense pas qu'à se glisser sous la douche ; elle est sale de sa journée de travail, de la moitié de la nuit avec Mahaut, et il est plus de trois heures du matin alors qu'elle bosse le lendemain. Sur le moment, non, définitivement, la sensibilité de Bonnie ne compte pas, ou pas assez. Un peu, aussi, parce que Sierra la trouve injuste. Ç'a été décidé ainsi, parce qu'il en fallait une plutôt que l'autre et que sa perception, là où elle lui a permise de débusquer Mahaut dans un premier temps, lui offre une lecture de son tempérament dont il est encore plus facile d'abuser. Au demeurant, c'est encore plus naturel qu'elle n'aurait pu l'imaginer mais, cela, Sierra ne croit pas bon de le préciser maintenant que la liaison est entamée et gagne à se poursuivre.
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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Mer 28 Mar - 2:57

Bonnie suit les gestes de Sierra d'un œil accablant. Le dédain nonchalant lui écorche les nerfs à vif et, l'espace d'un court instant, elle est tentée de la prendre au mot. Ou, à minima, de déserter l'appartement pour la nuit (ce qu'il en reste). C'est le mot mère et l'impertinence de la comparaison qui la convainquent de rester. Le mot mère et tout ce qu'il véhicule de profondément mauvais. Les muscles se contractent jusqu'aux poings. L'orage gronde aux pupilles. C'est pire encore que Sierra ne l'a assurément pas fait exprès. On se fiche si ouvertement de son ressenti, d'elle, que ça frise l'indécence. A rouvrir les plaies et à y jeter du sel avec inconscience, on termine de réveiller le monstre d'insatisfaction.

« Tu déconnes, j'espère ?! T'es pas entrain de me dire ça ? Regarde-moi. Sierra, regarde-moi, bordel ! »

La voix éclate, propulse des tessons de haine et d'indignation à travers toute la pièce. Désormais, chaque mot, chaque manière, chaque regard compte. Et le moindre d'entre eux pourrait suffire à briser tous les verrous de sa colère. Le corps se rapproche, cherche à confronter sans jamais toucher. Bonnie n'est pas assez stupide, ou pas encore assez courroucée pour oser prétendre qu'elle pourrait physiquement dominer, n'est-ce que rivaliser avec Sierra.

« Tu veux vraiment que je te rappelle ce qui est arrivé à ma mère ? Marque-t-elle le silence comme une menace. Alors non. Non, tu l'es carrément pas, c'est clair ! »

Parfois, ses nuits sont encore remplies de ses mains peinturées de rouge et de morceaux de chair. De cette colère immanente qui lui sciait le crâne et la résistance. Aujourd'hui, après des années à se soigner, Bonnie arrive à soutenir la pensée sans trembler. Mais il lui semble qu'elle ne pourra jamais totalement se détacher de l'événement, à tout le moins, pas au point de laisser filer pareil affront. Et surtout pas de la part de celle qu'elle estime être la vraie meurtrière, puisse-t-on être sa femme et sa sœur.
Au fond, Bonnie sait. Elle sait que sa mère le méritait. Et qu'à peu près pire, elle le méritait aussi. Sa liberté. Sa vengeance. C'est une bénédiction autant qu'une malédiction. Souvent la seconde plutôt que la première. Car il est plus facile d'accuser Sierra que d'endosser le rôle de la matricide.

« Encore que ma mère aurait au moins eu la décence de pas me faire miroiter comme la dernière des connes ! »

Comparaison pour comparaison, coup pour coup, Bonnie rend la violence verbale au centuple et frappe à l'aveugle. Elle est hargneuse. Toujours. Prête à déguster pour mieux renvoyer.

« Tu crois que j'aime ça ? Tu crois que c'est drôle, d'attendre dans ce fauteuil et de te regarder prendre ton pied ?! De vous regarder prendre votre pied ! Cingle-t-elle à en faire vibrer la brique. »

Le fond du problème n'est pas là. Pas dans le sexe. Mais dans tout ce qui se crée autour. Dans tous ces liens qui se tissent, dans toute cette compréhension mutuelle et cette connaissance intuitive de l'autre. Dans cet équilibre fantasmé depuis tant d'années. Jusqu'à récemment, ce n'était qu'une brèche vaguement colmatée. Bonnie avait fini par s'y faire. Par rendre le besoin latent.

« Cinq semaines ! Ça fait cinq. Putain. De. Semaines. »

A l'entendre, on croirait à une éternité. Et pour elle, c'en est bien une : chaque jour, la souffrance menace le cœur au couteau, y enfonce un peu plus la lame. Révélé par l'existence même d'une troisième érinye, le manque grouille, agace la poitrine à l'en consumer toute entière.

« Tu n'as pas le droit ! »

Tu n'as pas le droit de me traiter comme ça. Tu n'as pas le droit de parler de ma mère. Tu n'as pas le droit de me dire 'tu viendras pas te plaindre'. Tu n'as pas le droit de m'ignorer. Les mots flottent si distinctement dans l'air qu'on pourrait les attraper. Et la flamme aux pupilles exulte. Crache son mépris. Sa colère. Sa tristesse. Sa douleur. Sa nécessité. Son désir. Son amour. Aussi fort et aussi clairement qu'on prononcerait je t'aime ou je te hais.

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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Mer 28 Mar - 13:04

Sierra lève deux pupilles qui exsudent : quoi encore ? Parce qu’elle n’a pas la volonté nécessaire à se disputer, c’est pour elle déjà terminé. Réglé. Relégué à ces incidents qui ont la bonne intelligence de ne pas lui équarrir les nerfs. Parce qu'elle est prompte à se battre, et qu'on lui en fait souvent le reproche, la brune n'accorde que peu de crédit aux colères extérieures. À celle de Bonnie, surtout, aussi par habitude. Elles se sont plusieurs fois usées, pour pas grand-chose, et Sierra a toujours eu tendances à penser que les mouvements d’humeur de sa femme étaient moins légitimes – pour aucune raison qui soit valide ou tout juste acceptable. « Je te regarde, elle réplique, le putain au bord des lèvres. Quoi ? » Sierra crève d'envie de savoir ce qu'elle a encore fait, encore dit, quel prétexte misérable Bonnie a pris pour entamer une guerre qu'elle refusait. Et, comme la blonde approche, elle se redresse, machinalement, pour lui faire face. Dans la figure, il y a un peu de : qu'est-ce que tu comptes faire ? A priori, pas l'attaquer physiquement, car ce serait l'idée la plus stupide du monde. Il n'empêche : l'ex militaire s'apprête, le corps façonné par le réflexe, et l'impression sordide qu'elle va devoir se défendre nichée dans les entrailles.

À rebours, Sierra attrape la vilaine petite grenade embusquée dans ses mots. Peut-être pensait-elle, en arrière-plan, à cette salope de ménade que Bonnie a eu pour génitrice. Peut-être pas. Ce n'était pas intentionnel, mais quel intérêt de s'en expliquer ? Tout l'effort belliqueux de Bonnie s'y concentre déjà. « Ta mère n'avait aucune espèce de considération pour toi alors arrête un peu le couplet sur ce qu'elle aurait jamais osé te faire. » Voilà, ça ressemble de plus en plus à un prétexte et, pour sa part, Sierra n'a pas l'once d'un remords pour ce crime. C'était un châtiment, une juste peine. L'érinye a simplement poussé de tout son talion et elle aimerait qu'enfin cette vieille rancune expire. Il en est disparus de meilleurs que cette femme – si tant est qu'elle en fut bien une – et Sierra en a supprimé son comptant pour ne pas s'attribuer le mérite de celle-là. Toujours persuadée d'avoir fait ce qu'il fallait (s'imposait à elle pareil à un devoir sacré, une obligation invincible où la lutte n'aura conduit qu'à repousser l'échéance) et d'avoir libérée celle qui allait devenir son épouse, elle est tranquille, en paix avec elle-même, jusqu'à l'indifférence. Les bourreaux ne regardent plus après leurs exécutions, à peine après la diapositive mentale de la tripaille et du sang.

Assez vite, l'assassine trouve Bonnie ridicule et pas un gallon de pitié ne monte à la bouche : « Personne te force à t’asseoir dans le noir et à regarder. Tu fais ça toute seule. C'est écrit nulle part que tu dois voir chaque seconde de chaque minute que je passe avec elle. » Dans les fonds du timbre, on discerne ce qu'il y a d'incommodant là-dedans pour Sierra ; elle n'a rien à cacher à Bonnie, rien du tout car même le pire lui est exposé, et sans doute lui plus que le reste ; la notion même d'intimité n'a pas beaucoup de sens ; c'est juste un aiguillon, le sentiment confus qu'elle aimerait que Mahaut soit à elle, et à elle seule, pas toujours, pas longtemps, mais juste une ramée de secondes qui ne soient pas préméditées, calculées, épiées, dépecées puis reprochées. « Alors je me fous complètement de ce que j'ai le droit de faire. Si t'es pas contente, t'as qu'à te référer au plan. C'est le plan depuis le début. » Tout le temps où elle répartit, la voix de Sierra est plus froide et sentencieuse qu'autre chose : elle expose une chose qui est, et sans qu'il soit possible d'en discuter.

Les fringues sont ramassées en boule, roulées sous le bras. Sierre s'échappe que des phalanges lui frottent le poignet. « Qu'est-ce que tu veux à la fin ? Tu veux ta part, c'est ça ? » Les sourcils se haussent avec un intérêt teinté d'ironie. La prison de chair et d'os qui la retenait est brisée et retournée contre Bonnie. La main de Sierra l'empoigne, l'autre se déleste des vêtements et l'attire à elle. « Tu préfères que je te raconte dans le détail ou que je te montre ? »
(c) AMIANTE
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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Mer 28 Mar - 17:05

Comme durant la plupart de leurs altercations, chacune campe sur ses positions. Bonnie n'est pas tant surprise que déçue. Car il lui semble que Sierra n'a pas (ou moins) matière et aucune raison valable pour réagir de la sorte. C'est elle, la laissée-pour-compte, elle encore, qui endosse le rôle de la perverse tapie dans l'ombre. C'est elle qui devrait être inconfortable, non le contraire. En l'occurrence, Bonnie ne se laissera ni impunément marcher sur les pieds, ni culpabiliser par les mots. Et plus que tout, elle ne laissera certainement pas Sierra lui tourner le dos. Ce n'est pas juste. On n'a pas le droit. Pas le droit de se soustraire. Pas le droit de fuir, de repousser ou de dédaigner. Ses phalanges cerclent le poignet pour la retenir. Elles serrent. Serrent si fort qu'elle a sans doute plus mal qu'elle ne retient vraiment.

« On a pas fini. »

Je n'ai pas fini. La colère a mué. En quelque chose de plus dangereux. Baissée de plusieurs octaves, la voix accuse et menace. Une aura glaciale, meurtrière, émane de la carcasse, alors que les yeux incendient jusqu'à l'os. Sans surprise, l'étau rompt et est utilisé contre elle. Mais l'attitude ne flanche pas. Les babines se retroussent, dévoilent les dents pour tenter de se donner du courage. Même un ascendant. Elle n'a pas peur de Sierra. Or, sa présente attitude la dégoûte, jusqu'à vaguement lui rappeler tous ces connards qui la clamaient leur pour quelques heures, parfois quelques minutes, sous prétexte d'une poignée de billets verts.

« Lâche-moi. Tout de suite. Détache-t-elle chaque syllabe. »

Sa main libre agrippe la base de la mâchoire. Le reste du bras appuie le long de la trachée, jusqu'aux clavicules, pour maintenir la distance. Les visages sont proches et étrangement loin. La fine couche qui les sépare a l'effet d'une ère glacière, d'un fossé abyssal et impossible à combler.

« Si tu faisais des efforts, même minimes, et que t'essayais de te mettre un peu à ma place deux secondes... »

Alors peut-être que Bonnie arrêterait. Peut-être qu'elle n'aurait pas cette horrible sensation de progresser dans le noir total. Seule, à ses dépens. Vide et terriblement incomplète. Car c'est là, dans l'affliction, que les mauvaises manières l'abandonnent.

« Je suis pas un de tes soldats. Je suis ta femme. »

Bonnie n'a pas à obéir, ni à suivre le plan. Elles n'ont pas à suivre le plan. Et si c'est le cas, elle y mêle ses sentiments, n'exécute pas sans broncher ou sans se poser de question. Parce qu'elle est un être humain, de chair et de sang, de cœur et d'amertume. Elle y a droit. Plus que n'importe qui, et parce qu'il n'y a guère qu'à son côté qu'on lui laisse, Sierra devrait l'encourager, ou à minima, le reconnaître.

« On emmerde le plan. On l'ajuste. On l'adapte. On le fait évoluer ! »

Ce n'est pas la guerre. Ce n'est pas une mission. C'est leur vie. Et Bonnie aimerait aspirer à la sienne. Avec Sierra et avec Mahaut. Enfin. Pour toucher cette plénitude fugace qu'elle observe, impuissante, sur le visage de sa femme, à chaque fois qu'on rentre d'une escapade nocturne. A chaque fois qu'on frôle cet état de grâce auquel elles aspirent. Alors non. Non, elle ne veut pas qu'on lui raconte ou qu'on lui montre. Elle veut le vivre. Le ressentir. L'endurer. En profiter.

« Tu comprends pas ? Bien sûr que si. J'en peux plus. »

(c) AMIANTE
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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Mer 28 Mar - 22:00

« On a fini. J'ai fini. »

Pourtant, fussent-elles pour l’heure des adversaires, il suffit que les carcasses se rapprochent pour qu’un frisson amer cavale jusqu’à l’arrière du crâne. Ce n’est pas bien. Ce ne sont pas les frontières habituelles ; pas de légal ni de moral, ni crédo ni éthique, dont, il est vrai, elle se fout totalement. Ce n’est qu’à propos de Bonnie et de la manière dont il convient de la traiter entre tous les mortels (et les immortels) de cette planète. Or, Sierra n’a aucune envie de lâcher ni de faire des efforts. Elle aimerait qu’on n’ait pas bousillé son maladroit tissage de quiétude, son court moment de plénitude. Sa femme, puisqu’elle l’est bel et bien, a mis quelques méchants coups de canif là-dedans. Était-ce pour la ramener parmi leur quotidien de souffrance continue et ordinaire ? ou, comme Sierra commence à le toucher du doigt, pour lui demander de l’égard, sinon du soutien ? Avant qu’elle n’ait bien tranché, elle relâche, ainsi que commandé. Il n’est aucun mal qu’elle lui ferait par le corps ; d’autres se chargent fort bien de cette besogne. Elle n’en recule pas pour autant et n’ouvre plus les lèvres. Il lui faut admettre que Bonnie a raison sur sa méthode : ce n’est ni l’armée ni la guerre, ce n’est en fait rien que Sierra sache bien faire.

Le noir aux pupilles est solide, même rigide. De vieilles routines crissent qu'on n'emmerde pas le plan mais ce n'est pas la question. Bonnie outrepasse ce que l'on veut supporter mais ce n'est pas suffisant. À se glisser dans sa peau, oui, l'on mourrait de l'attente et de la solitude ; de l'exclusion. C'est néanmoins mal connaître la mauvaise nature de Sierra (cette habitude finalement très humaine) que de s'imaginer qu'elle puisse revenir de suite sur sa bêtise, colmater les brèches par son indifférence élargies et réparer les dommages.

Un coup de poignet met un bras de distance entre elles. « Je suis fatiguée. » Ou plutôt trop près de céder. « Je comprends, ne ment-elle qu'à moitié. Mais tu savais quelle réponse j'allais te donner et c'est toujours non, elle complète avec toute la vérité. » Un index négligent désigne le blouson suspendu sur le fauteuil. « Tu sais où est mon téléphone, tu connais le code. T'as qu'à lui passer un coup de fil et tout foutre en l'air. Moi, je vais me coucher. »

3h42

« B. ? » T’as déconné, Moran. Pieds nus sur le parquet craquant, Sierra a cette frustration ambigüe : ne pas s’être disputée jusqu’au bout ou n’avoir pas cédé à temps. À la même distance de l’un et de l’autre, elle traîne son corps encore un peu humide de la salle de bain jusqu’à la chambre. Comme il n’y a pas trace de Bonnie, l’irlando-albanaise se figure qu’on a filé sous les lampadaires, avec la complicité de la nuit. C’est tellement typique de ce qu’elles sont, de ce qu’elles font. Avec le temps, on pourrait croire qu’elles se seraient lassées. Tempérées. Neutralisées. En un sens, c’est ce qu’elles ont fait. Petitement, outrageusement pour ces êtres bancals, elles ont progressé l’une vers l’autre. Au début, elles ne savaient pas qu’il existait une alchimie particulière ; c’est à peine si Bonnie était instruite, à l’ombre de sa mère, de sa nature. Ça s'est imposé aux deux. Avec la croissance de ses pouvoirs, Sierra s'est mise à percevoir leur lien différemment ; il en était encore plus anormal, bizarre et dérangeant. Ce doit être les divinités qui les hantent, a-t-elle fini par penser. Les Érinyes sont affreuses, colériques, chaotiques... Elles leur ressemblent. Elles, Sierra et Bonnie. Elles, les Érinyes.

En revenant au salon, elle n'est qu'à moitié surprise de trouver son portable en miettes. Ça aussi, c'est typique. Et nulle ombre de sa blonde. Soupir tout au bord des lippes, Sierra ramasse les morceaux dans sa paume et s'installe dans le fauteuil. Après quelques essais, elle constate que la batterie ne retrouvera jamais sa place et que, de toute façon, l'écran est fracturé sur six ou dix axes différents. Elle devrait être exaspérée mais, en vérité, se languit. Même si elle disposait d'un téléphone encore en état de marche, Bonnie ne lui répondrait pas. Il n'y a rien à faire qu'attendre et espérer qu'elle rentre avant le matin. Sinon... Sierra n'aime pas penser à ce qu'il se passerait sinon.
(c) AMIANTE
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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Jeu 29 Mar - 3:03

C'est toujours non.

Bonnie n'a rien su rétorquer après ça. Ou plutôt s'est-elle enfin convaincue que ça n'en valait pas la peine. L'aigreur l'aveugle un peu, et si elle y avait mieux regardé, elle aurait sans doute perçu la fenêtre de culpabilité qui commençait à s'ouvrir. En ça, c'est autant de sa faute que celle de Sierra.

La furie demeure longtemps stoïque après qu'on l'ait quittée pour la salle de bain. Les mots noient encore l'esprit. Et la distance reste trop minime pour que les sentiments s'estompent totalement. Parmi eux, la colère règne en maîtresse et lui ordonne de saisir le téléphone. Elle fixe l'écran une, deux, trois, dix, vingt secondes qui s'effilochent en minutes. Finalement, elle ne trouve le courage que d'arriver jusqu'au répertoire, et dès que ses pupilles rencontrent les six lettres qui forment le prénom 'Mahaut', une impulsion soudaine lui fait jeter le portable contre le mur. Il est fichu. C'est certain.

Mais ça n'a pas d'importance immédiate quand Bonnie décide de claquer la porte. Elle doit s'éloigner. Éteindre les sentiments pour les remettre en ordre. La frustration pulse si fort à travers les tempes qu'elle se sent prête et encline à déclencher des cataclysmes.

04H38

Assise aux abords de la baie, Bonnie fixe l'horizon. Le vide l'a réinvestie. Et les relents de contrariété qui l'habitaient ne sont plus que des souvenirs latents, un rosier auquel on aurait arraché toutes les épines. Ça ne l'apaise pas, cependant. Car le manque de quelque chose s'exacerbe à chaque fois, et que ce n'est allé qu'en s'aggravant, depuis que Mahaut existe. C'est horrible. Insidieux. Impossible de s'en débarrasser.

La carcasse se redresse et s'avance vers les flots. Peut-être que l'expérience de la mort pourrait la réveiller. Il lui est arrivé d'y penser, ces dernières années. Pas souvent, quoique de plus en plus souvent. Jamais avec Sierra. Et jamais au point d'essayer. Ce soir, elle en a envie. Il lui semble même qu'elle en a besoin.

Le corps entier plonge sous l'eau.

05H23

Le verrou de la porte cède bruyamment, mais a la décence de le faire rapidement. Bonnie est encore trempée quand elle pénètre dans l'appartement. Ses vêtements sont lourds, et la fatigue qui resurgit au contact de Sierra n'aide pas. C'est d'ailleurs la seule barrière qui la fait traverser le salon sans adresser un regard en direction de sa femme (puisse-t-on être réveillée ou non) : elle est fatiguée. Et si on l'interpelle, on ne manquera pas de lui signaler, comme on lui a signalé tout à l'heure.

La trajectoire la mène directement à la chambre, et à la salle de bain attenante. Elle ne prend la peine de fermer aucune des portes. Sierra serait capable de les défoncer et, au-delà de ça, le double des clés est disponible dans la commode de l'entrée, justement pour éviter ce genre de désagrément. Appuyée contre la vasque, Bonnie se mire un instant dans la glace. Qu'est-ce qui t'a pris, imbécile ? T'es débile, ou quoi ? Elle est en colère, c'est évident. Plus contre elle que contre quiconque, cette fois. Ça la tuera réellement, un de ces jours. Ça grandit. C'est cette réalisation qui lui fait le plus peur et qui la fait désespérer de rencontrer Mahaut.

Comme elle voit qu'on l'épie, que les regards se nouent même à travers le miroir, Bonnie entreprend de sortir de sa réflexion. Elle se déleste ainsi de sa veste, et du reste de ses vêtements. Une à une, les couches pèlent et finissent dans un coin de la pièce. On s'en occupera plus tard, décide-t-elle en enfilant négligemment un des peignoirs qui gît sur l'étendoir. Les talons pivotent. La silhouette rencontre la silhouette, et les yeux se posent mieux dans les yeux. Elle n'essaye pas de forcer le passage, ou de fuir la confrontation. Mais elle n'a pas non plus la force de rentamer une guerre qui achèvera définitivement la courte nuit dont elles ont toutes les deux besoin.

« Quoi ? »

Par mauvaise habitude, le mot fend comme une invective. Or, ça n'en a pas tout à fait la teneur. Et Sierra a toute sa confiance pour le figurer.

(c) AMIANTE
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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Jeu 29 Mar - 13:35

La brune a fini par s’endormir sur son sentiment d’insécurité. La sale impression reflue de bord en bord dans son ventre. Ses prémices de rêve sont mordantes, bistrées. Pliée contre le cuir dans des contorsions douloureuses, le réveil de Sierra est pénible. Les quelques centilitres d’alcool absorbés la veille, au soir, pèsent désormais sur l’estomac ; on n’a pas suffisamment dormi pour qu’il ait bien digéré les acidités. Les muscles se plaignent. Les tempes grincent. Tout l’esprit se met en branle une seconde avant que Bonnie ne pousse la porte. Les réflexes de saccage des dortoirs, à toute heure du jour et préférentiellement de la nuit, sont encore huilés, quinze ans après. Les vieilles habitudes de soldat aiment cela ; l’instinct qui s’excite repousse les ans, discipline chaque fibre de l’être, l’apprête à survivre, à se battre et à vaincre ; un truc à se sentir vivante.

« Bonnie. » Sierra ne tente pas plus que ces deux syllabes et leur volume est si timoré, bouffé par la gorge, qu'on ne doit pas l'entendre – ou bien est-ce qu'on l'ignore. Ce n’est pas grave, c’est mérité – ou l’un de ces prétextes qui lui évite d’être contrariée. Au prix d'un grognement à se délasser les jambes et les genoux et d'un frémissement au contact des orteils sur le parquet, elle se lève et suit l'ombre qui s'enfuit. Elle ferait sans doute mieux d'aller se glisser dans le lit, de prendre deux bonnes heures d'un sommeil plus franc et de repousser au lendemain la conversation qu'il leur faudrait avoir. Les flaques, cependant, que Bonnie dissémine à loisir dans son sillage la persuade du contraire. Le cerveau reste perplexe un bon moment, ne comprend pas. Les pieds pataugent. Il lui faut de longues secondes qui font une longue minute pour se glisser jusqu'à la salle de bain, l'épaule retenant tout le corps contre l'embrasure. « Quoi ? » « Je t'aime, répond-elle simplement. » L'expression de Sierra consent rarement à se tendre en une sorte de tendresse. Le résultat est approchant. Du moment que Bonnie ne l'a pas quittée, pas définitivement, et qu'elle est en vie, à peu près bien portante, c'est le soulagement qui domine. Une prunelle scrutatrice file néanmoins jusqu'au petit tas humide. « Il ne pleut pas, fait-elle remarquer. » On entendrait les gouttes tomber sur la verrière. Par conséquent, une question, une seule, s'impose à l'esprit normalement cartésien : « Qu'est-ce que t'as fait ? »

Les bras sont tentés d'aller enlacer. Les lèvres, d'embrasser. Sierra ne bouge pas de sa sentinelle. Chaque fois que Bonnie entre dans son aura, selon à peu près les mêmes règles qu'à l'inverse, elle se révèle imprévisible et sensitive, et parfois virulente. Ça force une méfiance qui fait se tenir droit et à distance, puis lorgner le moindre mouvement. Qu'est-ce que ce sera : de l'amertume ? de la vindicte ? du déni pur et simple ? Maintenant que la chaleur de Mahaut s'est quasi entièrement dissoute, Sierra est mieux torturée par tous les nanomètres qui la séparent de la blonde. Elle aime cette femme jusqu'à la douleur.

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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Jeu 29 Mar - 15:54

Un je t'aime aussi monte à la gorge mais ne traverse jamais les lèvres. A la manière dont ses traits se détendent jusqu'à piètrement mimer la tendresse opposée (autant qu'elle peut avec cette colère sourde qui l'allume), on décèle néanmoins la réciprocité. De toute façon, s'il y a bien une chose qu'il lui est impossible de nier, c'est son amour incontinent pour Sierra. Et c'est à peu près la seule constante dans sa vie. Ça, et le vide lancinant qui la bouffe de plus en plus. Un frisson lui parcourt l'échine rien qu'à se remémorer les poumons remplis d'eau. Qu'est-ce que t'as fait ?

« Une tentative de suicide. Annonce-t-elle de but en blanc. J'ai essayé de me noyer dans la baie. »

La réponse est tellement absurde et le ton si franc qu'on pourrait croire à une mauvaise blague. Or, la façon dont le regard baisse et le visage dévie dénoncent une forme de honte qu'il est difficile d'interpréter autrement que comme une vérité. C'est ce qui s'est passé : elle a fait une tentative de suicide. Ses dents accrochent nerveusement sa lèvre inférieure, et ses bras se croisent en ramenant mieux les pans du peignoir contre son corps. Telle une enfant qui jauge l'humeur de l'adulte, les pupilles observent d'en bas.

Bonnie ne voulait pas réellement se suicider. Ou plutôt ne le pense-t-elle pas. Il s'agissait davantage de combler cette sensation d'espace. De vide. Ou Juste de... Ressentir. Endurer si fort et si loin que le cœur n'aurait pas d'autres choix que de se réveiller. Quand bien même il eut fallu en crever la seconde suivante. Jusqu'aux dernières bribes de la limite du corps, elle aura attendu. Rien. La vérité, c'est que Bonnie ne serait probablement pas remontée à temps, si sa mémoire n'était pas pleine du souvenir immanent de Sierra, et de leur amour.

« Je n'ai pas envie de mourir. Tente-t-elle de rassurer. »

Et c'est vrai. Elle est fondamentalement persuadée de ne pas avoir envie de mourir. Et toujours furieuse contre elle d'avoir n'est-ce qu'essayé.

« C'était... A but purement scientifique. Pour la postérité. »

Dans ta postérité, oui, abrutie. Bonnie s'énerve toute seule, peste contre elle-même dans un amas de marmonnements indistincts. La fatigue qui guette n'aide pas spécialement, et use les nerfs plus qu'à l'accoutumée. Peut-être que ça lui ferait du bien. Qu'on la confronte. Qu'elle craque un bon coup, quitte à frôler l'implosion. Pour évacuer, par les larmes et la rage, tout ce qu'elle stocke de profondément affligé et dangereux.

« Bref ! Marque-t-elle une impulsion au dessus, avant que la voix ne retombe aussi sec. C'est passé, et plus important. Est-ce qu'on pourrait aller dormir, maintenant ? Je suis crevée. Et il me semble qu'on doit toutes les deux être en poste dans moins trois heures. »

Cette fois, le bleu du regard perce mieux dans le le brun adverse. Ce n'est pas tant pour défier que pour implorer l'indulgence. Elle comble un peu mieux la distance. Et la main va prudemment chercher la main. Il y a une crispation subtile, très instinctive, un rien qui tend les muscles pour préparer à un potentiel rejet, et à la potentielle guerre qui va avec. Car le plus souvent, c'est dans les batailles, dans le chaos, qu'elles choisissent de s'exprimer... Sans doute même que c'est là, qu'elles s'expriment le mieux.

« S'il-te-plaît ? »

Je n'ai pas envie de mourir.

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c'est toi qu'elle préfère. (avec Sierra) - Jeu 29 Mar - 17:16

Qu’est-ce que Sierra croyait entendre ? Et, voyant les témoins détrempés du forfait, qu’a-t-elle eu le temps d’imaginer ?

« Tu as… essayé de te noyer dans la baie ? »

Elle répète lentement, platement. Chaque syllabe abîme la suivante. La phrase s’écoule du tympan dans le crâne mais ne pénètre pas l’entendement. Il y a quelque chose de si absurde là-dedans, d’en dehors des réalités, que l’esprit ne marque pas. En fait, Sierra est immobile, figée dans les muscles et glacée dans les tripes. « Tu as essayé de te noyer dans la baie. » Ce qui se voulait une question, l’écho tenace de l’incompréhension, vire à la déclaration, même à l’épitaphe. « Je n’ai pas envie de mourir, rétorque tout de suite Bonnie. » « Tu. » Ça fait encore moins sens que tout le reste. L’engeance de la Bratva est un abîme de sensations atténuées, mourantes. À l’inverse, la môme d’An Riocht est vivace, imprégnée d’émotions en pagaille. Elle ressent trop, trop de choses et trop intensément, un vacarme qui confine à la souffrance, à la torture, constante. Enfant de la guerre, en plus, elle ne comprend pas qu’on puisse se rendre à la mort et ne pas y prétendre, à la fois. La gestion insensible de Bonnie jette, s’il en fallait davantage, du sel sur la plaie. Sierra, qui s’est aplatie le râble en lorgnant après cette curiosité, cette créature funeste, dans la peau de sa femme, piétine le sol. « Non. » Elle s’entend le dire plus encore qu’elle ne le prononce. Non, pas s’il te plait. Non, elles ne peuvent pas aller dormir. Les paupières papillonnent, griffées par la fatigue, peut-être, mais giflées par le surréalisme de cette dernière minute. Maudite minute des enfers.. « V-va te faire foutre, putain. » La bouche paraît surprise de sa propre audace, cependant que les entrailles parlent pour leurs remugles insoutenables, enfin. « Va t’faire foutre ! » Les phalanges sont roulées en un poing serré ; elles briseraient n’importe quoi si un lointain verrouillage, sur la grand-porte du non-retour, n’entravait son bras. Deux paumes, en revanche, s’en prennent sèchement au clavicule. Le genre d’entame qui cultive la rage plutôt que de la consommer. « Qu’est-ce qui va pas chez toi pour me balancer ça comme ça ! » Pour seulement le commettre. C’est insensé, au-delà de la stupidité et de la folie. Et, surtout, c’est injuste, parce que Sierra n’est prête à vivre dans un monde déserté par Bonnie. « Ça t’aurait fait mal de mentir ? elle crache et vomit ce qu’elle peut de son horreur. Ou… ou d’aller te faire foutre ! » On a trop mal pour organiser une attaque, se servir de n'importe quel biais pour riposter. Il n'y a bien qu'à l'endroit de Bonnie que Sierra peut manquer d'arsenal. Pas que l'envie, elle, soit en carence. Cette tentative, quels qu'en soient les détails et la réussite, avait pour but de la punir. La formuler en toutes lettres, à tout le moins. Si c'est l'aboutissement de son refus, Sierra se félicite de n'avoir pas cédé, pas d'un iota, pas un lambeau du sublime que leur promet Mahaut si elle fait jamais partie de leur existence. « T'as pensé à moi ? » Puis ça n'a plus d'importance, ce serait même une insulte. « Va dormir, espèce de conne égoïste. Et quand tu te réveilleras, fous-toi bien dans le crâne que je suis pas près de te pardonner ! » Si Bonnie tente de la retenir, les nerfs de Sierra sont trop à vifs pour lui céder ou l'éprouver. Elle remonte énergiquement le couloir, s'engouffre dans le salon. Elle n'a jamais mis aussi peu de temps à s'habiller, même en caserne. Les clés de voiture sont ratissées sur un pan de table et la porte claquée derrière elle.
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