Le couloirs vide. Au loin, derrière elle, l’écho des voix dans la salle. Devant, plus près, la rumeur métallique d’une cuisine. Ses pas résonnent à un rythme presque similaire à celui de son coeur qui bat dans ses tempes. Elle ne sait pas ce qu’elle vient faire là, si ce n’est qu’une voix lui a indiqué la route. L’odeur des plats cuisinés lui met l’eau à la bouche, mais l’idée de finir en viande hachée pour le plat principal, un peu moins. Elle longe le mur, jette un oeil par la grande porte : une seule âme s’y trouve encore. Un cuisinier, rien de moins louche dans une cuisine. Il pose un chiffon et quitte la pièce. June n’y porte pas trop attention et se glisse dans la pièce où son regard est soudainement attirée par la panoplie de couteaux, autant ceux traînant dans un bac gris en attente d’être lavés que ceux propres et bien rangés. Ceux propres lui paraissent comme plus intéressants, c’est donc ceux-ci qu’elle manipule avec précaution en espérant retrouver celui qu’elle a vu dans sa tête.

Au bout d'un moment, les arômes de la nourriture s’estompent vaguement, envahis par celui du métal rouillé. Une nouvelle nausée lui prend. L’odeur de la corrosion, comme le goût du sang dans la bouche…

Les sourcils froncés, elle continue d’observer les couteaux, déçue de ne pas trouver celui qui la hante. Rien d’aussi menaçant que celui qu’elle a vu furtivement. Les lèvres pincées, Juniper essaie d’ignorer le sentiment persistant d’être observée (c’est sûrement juste dans sa tête, elle sait bien qu’elle n’a rien à foutre ici) et l’odeur exécrable qui ne s’en va pas, bien au contraire. Le dernier couteau retombe dans la boîte en un claquement métallique qui s’étouffe vite. La curieuse tourne les  talons pour aller voir ce qui cuit dans le four – l’estomac avant tout, qu’ils disent. Au creux du coeur, la déception de n’avoir rien trouvé d’intéressant est rapidement remplacée par l’amusement : elle marche sur une fourchette et le mouvement lui rappelle quand  les bonshommes de dessins animés marchent sur un râteau. Ça apaise ses craintes, un peu. Elle recommence deux ou trois fois, se penche finalement pour ramasser le pauvre ustensile.
Soudainement, un sifflement fend l’air, comme si quelque chose avait essayé de la frapper. Son cœur s’arrête le temps d’un battement et celle qui s’apprêtait à baisser toutes ses gardes se plonge derrière une grosse boîte métallique. Les yeux grands ouverts, iris tremblantes, elle inspire silencieusement pour se calmer (autant que possible quand une soirée « normale » se transforme en slasher night). Le temps c’est la survie et prévoir un plan d’attaque n’est pas tellement une option. Agir brusquement ou paniquer, non plus. Elle refus d’être une de ces connes qui meurent en premier dans les films. On ne l’avait pas formée pour crever lamentablement non plus. Le palpitant à la dérive, elle regarde distraitement son attaquant. Un « x » sous son œil. À nouveau, la nausée lui prend la gorge.  Elle ne cerne pas tous ses traits, mais elle en a perçu suffisamment pour bien le cibler et tenter d’entrer dans sa tête.

Après avoir analysé vite fait ses issues, elle tente un premier mouvement : ramper à gauche, où se trouve son téléphone qui a glissé de sa jarretelle. Du même côté, une sortie.  

La curiosité tue le chat, elle aurait dû s’en souvenir.

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