Pour toujours et à jamais

Ses mots prononcés dans ma langue avec un adorable accent finissent de me faire monter les larmes aux yeux. Dire que je les retenais depuis si longtemps et qu'il n'y avait qu'une seule phrase qui me sépare de la fin de nos serments.

Je souris tendrement à Preeti et voit Dmitri, dans l'assemblée, les pouces en l'air avant de s’empresser de traduire à Indira dont les yeux s'éclairent. J'incline la tête en un merci silencieux à l'attention de ma quasi-femme. Me dire cela ainsi est un magnifique cadeau.

Au bord de l'émotion, je répond à mon tour, alors que j'achève notre septième tour de feu :

"Om sakhi jaradastayahga"

Traduction:

Puisses ces paroles être vraies. J'adresse cette prière à toutes les divinités qui voudront bien l'entendre. Je regarde Preeti, plus qu'une seule phrase et tout cela sera scellé à jamais dans nos cœurs.

Pour toujours et à jamais

Les tout derniers mots de ma fiancée ne se font pas attendre, comme s'ils étaient devenus trop lourds à porter. Une fois lâchés, je regarde ma femme, désormais, seule et unique. Que n'avons nous pas donnés et sacrifiés pour en arriver où nous en sommes aujourd'hui ?

Preeti s'approche de moi et je n'ai pas le temps d’exciser le moindre geste que le monde autour de nous disparait dans son baiser d'amour pur. Jamais encore cela n'avait été aussi intense entre nous. Naturellement, mes bras viennent s'entourer autour d'elle quand j'entends, au loin, l'assemblée applaudir puis émettre des cris de joies. Lentement mais toujours trop rapidement, nous revenons à la réalité. Nous aurons bien le temps plus tard.

Je me détache de Preeti à regret, ressentant ce manque familier de son corps contre le mien.

Nous prenons donc place pour les échanges d'anneaux. Je retire mon talisman et récupère les deux bijoux de rubis pour Preeti graver. avant de le remettre cérémonieusement autour de mon cou. J'essaye d'effacer discrètement une larme qui me vient. Je me penche vers mon épousée pour lui murmurer :

"Bienvenue au monde, Madame Preeti."

Je regarde l'alliance de main et remarque la minuscule gravure que j'avais faite faire. Peut-être qu'un jour, elle l'a remarquera. L'idée me fait sourire.

Pour toujours et à jamais

Sa demande me fait chavirer... "Madame Skoro" Sérieusement ? Je n'en reviens pas de la chance que j'ai à cet instant. Je ferme les yeux pour profiter encore un peu du contact de sa main sur ma joue et je sens une nouvelle larme me quitter pour aller rejoindre ses doigts.

Mon doigt entre dans l'anneau comme s'il avait été fait spécialement pour ce jour et je sens désormais physiquement le lien qui m'unis à Preeti. L'anneau est encore plus beau que dans mes souvenirs. Je regarde ma main désormais munie d'une preuve concrète de mon union, visible par tous et tout le monde.

Je prend la main de ma chère et tendre, couverte de dessins noirs sur sa peau. Comme ses gestes auparavant, j'enfile l'anneau à sa main. Ce geste est tellement symbolique pour moi que j'ai du mal à cacher mon sourire amusé : ce geste, je l'ai tellement vu faire, juste face à moi, qui aurait pu croire qu'un jour, quelqu'un me le ferai à moi. Je ne nourrissais aucune envie alors, aucune jalousie, mais maintenant que je sais ce qu'est l'amour, plus jamais je ne reviendrai vers autant d'ignorance. A présent, je comprend parfaitement ce que ressente les jeunes mariés que j'ai si longtemps accompagné.

Afin de placer l'autre anneau à son orteil, je tend la main vers son pied qu'elle dépose dans ma paume, faisant teinter ses bracelets de chevilles. Pendant un moment, je regarde celui du premier mariage de Preeti qui semble me narguer comme une entrave à notre nouvelle vie, comme s'il s'agissait d'une menotte qui empêche Preeti d'aller de l'avant.

Puis, je décide que le symbole de ce bracelet n'a que l'importance que je lui donnerai. Je passe donc l'anneau au pied de Preeti qui devient à ce jour et à jamais ... ma femme.

Avant que les flashs n'arrivent avec les applaudissements et les félicitations de rigueur, je retourne voler les lèvres de ma Déesse pour un dernier baiser en public. Peu m'importe ce qu'on pourra dire de cela à présent.

Pour toujours et à jamais

Je secoue la tête.

"Ça me fait immensément plaisir. Je pense que je n'avais jamais pleinement réalisé jusqu'à maintenant ce que c'est que de t'avoir comme femme, alors que tu portes ces anneaux et mon nom... J'ai... J'ai du mal à croire en mon bonheur."

Quand enfin le mariage est scellé, je ne suis pas au bout de mes peines. La totalité des invités souhaite nous rencontrer et tous ont des questions pour nous, et surtout pour moi. Preeti, patiente, me les traduits pour que j'y réponde au mieux afin qu'elle traduise la réponse. Dmitri vient à notre secours en nous apportant un plateau avec deux tasses de thé fumantes mais il repart bien vite hors de la foule pour retrouver Indira.

Je pense que jamais dans ma vie je n'ai été autant touché, félicité, photographié que dans un pays où le contact physique est mal vu et où les mariages sont arrangés. Je remarque que la foule de gens est bien loin de diminuer et nous n'en sommes qu'au cinquième des invités. Rapidement, je vais étouffer, je vais avoir besoin d'un éléphant dans pas longtemps.

Apercevant le papa de Preeti dans les invités, je profite d'un petit moment de flottement pour demander à ma femme :

"Au fait, quelles étaient les plantes dont tu as semer les graines pour le rituel ? Ton père n'a jamais voulu me le dire ... Et d'ailleurs, ça a donné quoi ?"

Je suppose qu'en deux jours, rien n'a eu le temps de germer... Mais sait-on jamais...

Pour toujours et à jamais

La foule arrive enfin à se tarir. Je souffle et respire un peu mieux à présent. L'avantage est que j'ai appris plusieurs mots et phrases en Hindi au cours de ce voyage et même si mes vœux ont été si dur à retenir, je sais que jamais je ne les oublierai.

Il y a toujours autant de mystère autour des plantes de Preeti mais cela va bientôt toucher à sa fin alors j'accepte d'un signe de tête. Je prend la main de mon amour et y dépose un baiser sur le dos. Il y a des gens étonnés puis amusés par ce geste.

"J'ai cru le comprendre, oui ! Moi aussi je t'aime. Merci d'apporter du sens à mon existence et de m'avoir fait renaître de mes cendres."

J'allais ajouter autre chose quand je vois la foule s'écarter. Au milieu deux paires d'oreilles recourbées nous font face avant que le père de Preeti et un autre homme ne nous amène nos montures. La Marwari palomino semble douce et docile. L'autre, un étalon gris fer, regarde la foule d'un air farouche en faisant régulièrement des écarts sur les côtés. Les deux bêtes sont apprêtés et richement décorés pour le mariage.

Je me demande si j'ai encore la fougue de monter un étalon rendu nerveux par la foule quand je vois Pati apparaître derrière ce couple hippique. Celui-ci est bien plus calme que l'étalon et je me demande sur lequel des deux je serai plus à l'aise à cet instant. Je me dis que j'aurai tout le temps en Serbie pour apprendre à nous connaître.

"Prête à rentrer ?" Je demande à Preeti avant de l'accompagner directement vers Pati qui s'agenouille devant moi.

Comme on me l'a appris, j'installe Preeti sur le dos avant de me glisser devant elle et faire redresser l'éléphant, nous emportant loin de la foule par sa taille. Immédiatement, me voilà beaucoup plus à l'aise. Pati, quant à lui, semble être ravi d'être entouré d'autant d'attention.

"Preeti ? Il nous faut un éléphant !"

Une fois serein, je remarque que les jambes de Preeti sont tout contre les miennes. Je me redresse afin que mon dos soit en contact avec son corps. Enfin un contact privilégié et prolongé loin de tout jugement.

Notre étrange cortège se met donc en route sous le son des cris de joie, des tambours, des claquement des sabots de chevaux et des barrissements.

"Tout va bien, Ma Dame ?"

Pour toujours et à jamais

Je me redresse quand je vois les parents de Preeti s'approcher de nous. Les deux me félicitent pour ma prestation en Hindi, pour moi, ce n'était pas grand chose comparé à tous les psaumes et les passages de la bible que je devais retenir. Cependant, l'intimidation et l'importance capitale de la chose n'avait certes pas aidé. Je prend donc les compliments en m'inclinant respectueusement.

"Aapaka dhanyavaad."

Le cadeau semble surprendre Preeti autant moi. Cela nous fera quelque chose en commun à découvrir ensemble. Rapidement, le couple s'éloigne laissant place à mon frère et à Indira. Cette dernière nous félicite à son tour puis Dmitri vient faire de même.

"Très belle cérémonie, très émouvant ! Bien joué le coup de la langue Serbe dans les vœux, Preeti. D’ailleurs, ç'aurait été tellement chouette que vous fassiez ça à chaque fois."

Sans doute, et j'admets que je n'y avais pas pensé. En même temps, tout traduire et tout apprendre par cœur juste pour un seul invité me semble excessif.

"Je voulais aussi vous prévenir que je partirai demain midi pour la Serbie, j'accompagne nos chevaux, Kyan. Après, je devrai rentrer vite, j'ai quelques trucs à régler."

Il regarde Preeti quand il dit cela et je me demande un instant pourquoi. Cela m'attriste qu'il nous quitte déjà mais je dois admettre que redécouvrir mon pays d'enfance seul à seul avec Preeti a le don de me réjouir. Je remercie donc Dmitri pour sa présence aussi longue car je sais qu'avec son travail, ce n'est pas facile de se libérer autant de temps d'affilé.

Sur l'éléphant, je sens Preeti se rapprocher de moi et coller sa tête contre mon dos. Je tourne alors mon visage pour l'embrasser.

Arrivés au croisement, j'hésite avant qu'il ne soit trop tard. Docilement, l'animal à suivit le chemin de la salle où il a naturellement l'habitude d'aller. Si nous avions tourné, tout le cortège nous aurait suivit et cela aurait été compliqué de demander des précisions sur les plantes choisies sans être interrompus.

"Mon amour, tu ne veux pas simplement me dire ce que tu as choisis et la signification que ça a ? Pourquoi tant de mystères ?"

Je glisse une main dans les cheveux de ma femme pour lui caresser la nuque. Dans son oreille, je murmure :

"Si la salle n'est pas trop loin, on trouvera bien un prétexte pour s’éclipser tous les deux et revenir chez toi. Il n'y a personne dans les rues, tout le monde est au mariage et ... je cours vite."

Je fini en laissant mes lèvres caresser sa joue.

Pour toujours et à jamais

Le tournesol ? C'est un choix vraiment inattendu. Le tournesol symbolisera donc notre future descendance si jamais on y arrive un jour. Son insistance à me montrer de quoi il s'agit me laisse interrogateur, y avait-il un soucis avec les semis ? Une fois de plus, je décide de ne pas partir en conclusion avant d'avoir vu de mes propres yeux.  

Avec regret, je laisse donc mes pensées là quand je vois apparaître la salle et l'éléphant, habitué, s'arrêter devant l'entrée. Déjà, les invités s'amassent autour de la porte et je n'ai presque pas formulé de demande que notre monture se ramasse déjà sur ses genoux. L'ambiance ici est différente, moins religieuse, beaucoup plus festive. Jamais les invités ne m'ont paru être aussi nombreux. Je met pied à terre avant d'aider Preeti à descendre, sous des centaines de paires d'yeux.

"Prête à célébrer ton mariage ?"

Si j'avais fais énormément de mariages, jamais, en revanche, je n'avais eu l'occasion d'aller dans une fête à l'issu de l'un d'entre eux. Je sais que cette partie est exempte de traditions ou de codes, du moins, je l'espère.

Alors que nous avançons, j'entends même de la musique rythmée par les percussions. Inexplicablement, il me semble connaitre cet air, ou du moins, savoir par instinct les notes et le rythme qui arrivera par la suite. Sans savoir pourquoi, je regarde mes mains, prises d'envies de suivre cet air entraînant.

- Surprise ! -

- Pardon ? -

- Comme je ne savais pas quoi t'offrir pour ton mariage, j'me disais que j'allais au moins t'apprendre à danser ! Du coup, j'me suis entraîné pendant plusieurs nuits à apprendre les pas et les mouvements. -

Je souris devant le cadeau inattendu.

- C'est pour ça qu'on avait mal aux hanches quelques jours avant de prendre l'avion ? -

- Tout juste ! Allez, profite ! -

Je jette un regard entendu à ma femme

"Tu veux danser ?"

Pour toujours et à jamais

Je regarde les personnes qui commencent déjà à s'amasser autour de nous. Ils gardent heureusement une distance respectable.

"Un peu... Mais avec toi, je pourrai tout affronter."

Ici et là, je remarque des yeux posés sur moi puis des lèvres murmurer des choses à mon propos. Très honnêtement, je ne pouvais pas moins m'en soucier qu'à cet instant où les doigts de ma femme s'entremêle aux miens en une étreinte intime.

Un frisson me parcourt l'échine, celui caractéristique de Sheian qui afflue à la crête de ma conscience, me laissant la finalité du corps mais en restant prêt à réagir en cas de problèmes.


"Bien sûr ! Et je ne danserai avec personne d'autre. Tu es ma femme désormais."

Je suppose que je n'ai pas le choix à présent. Le rythme étrangement familier a pris possession d'une partie de mon corps, et Sheitan me guide pour le reste. La danse traditionnelle commence mari et femme séparés. J'embrasse la main de mon amour avant de consentir à la lâcher. Tout le monde nous regarde et j'entends les conversations s'arrêter. Il ne reste que le bruit brut des tambours.

Soit. Faisons abstraction de tout, de tout à l’exception de la musique, et de Preeti.

Je prie intérieurement pour que tout se passe bien et remercie intérieurement Sheitan quand je me met presque naturellement en position quand les tambours cessent et que la musique chantée commence. Oui, je connais ce rythme comme si je l'avais écouté en boucle soirs après soirs. Serein, je regarde Preeti avant que ne s'enchaînent presque naturellement mes mouvements.

Je découvre avec joie que petit à petit, la foule disparaît pour ne laisser place qu'à elle et moi. Même si je n'apprécie certainement pas la danse, je dois admettre que je comprend pourquoi Preeti l'affectionne tout particulièrement et je suis fier de pouvoir lui offrir cette première danse en remerciement de ce moment merveilleux.

Pour toujours et à jamais

- On s'détend, tout va bien. De toutes façon, ils ne regardent que ta femme parce qu'elle dansera forcément mieux que toi. Le secret pour une danse masculine indienne est toujours d'aller à fond. -

Il guide chacun de mes pas et je le laisse aller jusqu'au bout de ses gestes. Effectivement, la danse des hommes est beaucoup moins dure que celle des femmes et j'ai du mal à ne pas me laisser distraire par les mouvements de mon amour.

Après un temps qui me paraît infini, nous nous rapprochons enfin pour danser ensemble. Son bras se passe sur mon épaule, et ma main glisse sur sa hanche. A présent, je profite moi-même de la musique, de la proximité et du rythme et Sheitan lâche même un peu la bride afin de me laisser libre. Nos corps deviennent miroirs l'un de l'autre et se rapprochent l'un de l'autre presque malgré nous. Quand la musique se termine, Preeti est dans mes bras et je suis à bout de souffle.

Les mains de ma chérie se serrent autour de mon cou et sa bouche rejoint la mienne sans que je ne m'y attende. Les gens reviennent autour de nous petit à petit dans mon champs de vision, ma gêne revient avec eux. Il y a quelques exclamations puis des applaudissements et les cris suivent.

- Merci Sheitan -

- A ton service ! -

La musique continue et tous nous rejoignent sur la piste de danse. Je me penche à nouveau sur ma femme pour l'embrasser. Ma bouche passe à son oreille et je murmure :

"Tu veux qu'on aille boire un verre rapidement et ensuite qu'on ... s'éclipse ? T'as toujours un tournesol à me montrer."

Je pense qu'à cet instant, personne ne fera attention à notre absence car tout le monde sera persuadé que nous sommes en train de nous faire féliciter quelque part. En bref, plus il y a de monde, plus c'est facile de passer inaperçu.

Pour toujours et à jamais

La ... La meilleure... Danse ... de sa vie ? Venant de Preeti, je ne pouvais avoir de meilleur compliment.

- T'entends ça, Sheitan ? -

- 5/5 ! J'suis fier de nous ! -

"Tu danse merveilleusement bien, ma chérie. Merci pour l'expérience. Je veux bien qu'on danse à nouveau ensemble, c'était effectivement une expérience captivante."

Je dit, essoufflé comme après une étreinte charnelle. La sensation était similaire en plusieurs points d'ailleurs mais il était socialement accepté de faire ça en public.

Après sa réponse positive, je suis Preeti afin de nous désaltérer. Ne connaissant pas la moitié des choses qui me sont proposées, j'opte pour une boisson à base de mangue. Ce breuvage est tellement sucré que la fatigue de la danse est bien vite oubliée.

Dans mes pensées, je regarde la foule qui danse en rythme. Si j'ai véritablement adoré l'expérience, je ne me vois définitivement pas au milieu d'une foule aussi compact. Je remarque alors que mon frère ne se débrouille pas trop mal non plus et attire à son tour le regard des curieux. Je regarde les parents de Preeti qui dansent aussi, timidement, et jettent des regards curieux au couple Indira-Dmitri.

Personne ne fait attention à nous. J'en profite pour voler un baiser à mon amour avant de lui murmurer dans l'oreille :

"Tu viens, très chère ?"

Je prend son bras et nous voilà bientôt hors de la salle et de portée de vue. Ceux qui sont restés à l'extérieur ne font même pas attention à nous. Sans oser me mettre à courir, je nous dirige d'un pas décidé vers la maison d'enfance de Preeti.

La rue est très curieusement silencieuse et vide. Seules quelques vaches et chiens efflanqués semblent s'étonner de ne trouver personne. Je me penche vers ma femme et lui murmure.

"Danser avec toi m'a beaucoup attisé. Je suppose qu'on aura pas le temps de faire quoi que ce soit d'autre chez tes parents que voir les graines mais sois prévenue qu'il ne m'en faudrait pas beaucoup pour que j'avance notre nuit de noce."

En espérant sincèrement qu'elle prenne cette mise en garde au sérieux.

Pour toujours et à jamais

"Tu veux de moi comme partenaire régulier ? Ça me fait vraiment plaisir ! Par contre, sans Sheitan, je ne vaut pas grand-chose."

Mais toute chose était toujours bonne à apprendre. Je déguste le gâteau que Preeti et moi partageons avant de m'étouffer de rire devant sa déclaration. Que répondre à ça ? Que dire à cette femme et à son air mutin ? Un coup d’œil à la foule m'indique que personne ne fais vraiment attention à nous. Je m'approche donc de Preeti et l'embrasse dans une étreinte qui dure avant de m'échapper dans son cou pour respirer l'odeur de sa peau enivrante, comme elle m'avait manqué !

"Tu es très jolie, tu sens très bon. Tu es certaine de vouloir te retrouver seule avec moi à présent ? Je ne pense vraiment pas pouvoir te résister. Même si je ne mords pas tu sais... Sauf si on me le demande"

Alors que nous sortons de la salle échaudée par les danseurs, me rend compte que je respire enfin un peu plus librement. Nos mains enlacées ne posent aucune gêne dans les rues vides.

Arrivés à la maison vide, Preeti m'entraîne directement dans le jardin où elle me montre les pots de fleurs que j'avais déjà vu avec son père. Là, quelque chose de différent se passe : il y a déjà des pousses qui sont sorties pour l'occasion.

"Je savais que les tournesols poussent vite, mais c'est pas un peu rapide ? Tu sais que ton père croit à ce genre de signe ..."

... Et moi aussi.

"Que penses-tu que ça signifie ?"

Je demande, terriblement dubitatif.

Pendant un instant, je contemple ma désormais femme et j'ai encore du mal à croire à ma chance. Ce qui est fou est que nous sommes déjà plus ou moins en train de parler de faire de moi un père. Cette idée me fait presque tourner de l’œil.

"Je vais rentrer à l'intérieur, j'ai un peu chaud ..." Je dis en déboutonnant un peu le haut de ma tunique.

Sur le seuil, je trouve le sac de Dmitri que j'ouvre pour espérer y trouver un peu d'eau. A la place, je trouve mon livre sur le Kamasutra tome 7 et ... une boite de préservatifs dans laquelle je me sert allégrement en laissant un petit billet en remerciement. Dmitri a de l'espoir avec Indira, ou n'avait absolument pas perdu son temps, au choix.

Mon livre dans les mains, je regarde à l'intérieur et sourit.

"Mon amour ? Regarde ... Je ne me souvenais plus que je l'avais utilisée comme marque page."

Je sors une enveloppe dans laquelle il y a la photo de "moi" et Sheitan. Le montage que mon alter-ego satyrique a fait lors de notre séparation. Je la montre à Preeti qui souhaitait la voir.

"C'est la seule photo que je possède de moi-même. C'était un cadeau de Sheitan pour me remonter le moral quand ... Enfin tu sais ... Mais je n'en ai plus besoin maintenant. J'aimerai beaucoup te l'offrir."

Pour toujours et à jamais

Ses mots m'encouragent à tenter l'expérience.

"On dirait que tu me qualifies pour notre...première fois. Ni le meilleur, ni le plus habile, mais parfait parce qu'on était ensemble. Je suppose que tu m'as convaincu... Un homme amoureux est comme un coupon de réduction, il faut vite le faire passer à la caisse."

Alors que je l'embrasse à en perdre la tête, Preeti y va encore d'une phrase qui me fait rire. Soif d'amour ? Non.

"Et si l'homme a soif de toi ?"

Quand Preeti m'annonce la descendance nombreuse que les graines semblent présager, je ne peux m'empêcher de rester silencieux et pensif. Finalement, ma femme me rejoint et s'inquiète de mon état, je vide intégralement la bouteille qu'elle m'apporte avant de secouer la tête.

"Non, c'est juste que... avoir des enfants, nous n'en avons jamais vraiment parlé. Je me suis toujours focalisé sur Nisha sans oser... espérer. Tu comprends ? Ça me fait un peu tourner la tête que de penser ... je ne sais pas... te voir enceinte... nous voir en tant que parents..."

Je ne voulais pas gâcher un si merveilleux moment en lui demandant mais je ne peux pas m'empêcher d'avoir un sourire rêveur à cette idée. Je m'assois directement sur le sol, à côté du sac.

"Moi, papa, tu te rends compte ?"

Je me redresse quand elle refuse mon cadeau. Je le reprend donc et tire un stylo du sac pour inscrire sur le dos :

Pour mon amour,
Celle qui a réussi l'impensable :
Nous reunir

Et je tend à nouveau la photo à ma femme.

"Maintenant, tu ne peux plus la refuser."

Pendant un instant, je detaille la maison d'enfance de Preeti, ce que je n'avais pas osé faire la première fois. J'aimerais tellement que ces murs parlent pour me murmurer ses secrets d'enfance. Je me lève et demande à Preeti, amusé.

"Alors c'est ici que tu as passé ton adolescence à rêver d'épouser un étranger blafard ?"

Redressé sur mes deux pieds, je prend la main de Preeti avant de l'embrasser. Notre solitude est sur le point d'enflammer ma raison quand je me reprends in extremis.

"A présent, Ma Dame, je vous invite à sortir d'ici pour aller finir de célébrer notre mariage.