- C'est l'histoire d'un type qui va dans un confessionnal. Il dit au prêtre : "pardonnez-moi mon père, mais j'ai péché..." "Qu'avez-vous donc fait mon fils ?" "J'ai fais l'amour sept fois cette nuit." "Ah oui ? Avec qui ?" "Ma femme ..." "Vous avez fais l'amour sept fois avec votre femme ?" "Oui, mon père..." "Mais ... Ce n'est pas un péché, ça, mon fils !" "Oui mais ... SEPT FOIS ! Vous vous rendez-compte ? Il fallait bien que j'en parle à quelqu'un !" -
Dans une semi-conscience, je me met à rire. Sheitan n'a pas son pareil pour trouver des manières de me réveiller le matin. Je regarde vaguement l'heure et constate qu'il n'est que sept heure et quelques du matin. Étrangement, il semble que j'ai le contrôle de notre corps.
- Ce n'est pas encore mon heure, Sheitan. Tu peux nous faire dormir encore un peu si tu veux. -
- J'arrive plus à dormir. J'ai réfléchi et j'ai fais des recherches, cette nuit. Pour toi ! -
- Quelle bonté. - Je pense en me retournant sur le côté pour profiter de mes dernières minutes de tranquillité.
- Tu penses que Preeti accepterait de se convertir ? Si vous vous convertissez tous les deux au protestantisme, vous pourriez être ensemble. -
- Il est hors de question que je lui demande de faire une chose pareille. Et être pasteur est différent d'être prêtre. -
- Tu savais qu'être chaste et être abstinent sexuellement étaient deux choses différentes ? Toi, tu es chaste, mais pas nécessairement abstinent, n'est-ce pas ? -
- Pourquoi tu me poses toutes ces questions ? Les prêtres n'ont pas le droit de se marier et aucun catholique n'a le droit d'avoir des rapports hors mariage. -
- En 1500 en Angleterre, il y a cette loi qui est passée comme quoi les catholiques n'ont pas le droit d'avoir des rapports hors mariage ... Entre eux. Cela ne concerne pas les païens ... -
Me voilà tout à fait réveillé à présent.
En effet, la première loi sur l'interdiction d'avoir des rapports hors mariage étaient avant tout une précaution sanitaire pour éviter la propagation de maladie sexuellement transmissible. La seconde loi avait été faite pour contourner l'interdiction d'avoir des servantes non-catholiques dans les églises. Une femme d'une autre confession que juive, chrétienne ou islamique pouvait vivre en union libre avec un prêtre tant que cette union restait consentie, fidèle, cachée et, bien entendu, chaste.
Il faut bien admettre que le démon avait soulevé un point important qui vient de m'ôter toute envie de paresser. En réalité, il faudrait en référer à une entité supérieure pour avoir la bénédiction mais ... ça se tenait tout à fait !
- Preeti, on peut la considérer comme une païenne, non ? Du coup, ça fonctionne ! -
D'un coup, toute mon excitation fond comme de la neige au soleil. Tout à fait conscient à présent, voilà que je comprend que de cette vieille loi ne change strictement rien à ma situation.
- Preeti est une femme formidable. Je l'aime mais pas comme tu prétends que je l'aime. C'est une excellente amie. Même si la loi divine m'autorise à fréquenter une telle personne, n'oublie pas qu'il y a la différence d'age entre nous, son deuil vis-à-vis de son mari... Et, je n'y connais strictement rien en relation amoureuse. En plus, qu'est ce qu'elle pourrait bien me trouver ? -
Aucun doute, la tristesse vient se mettre de la partie. Je frotte mon visage pour essayer de faire passer mon envie de simplement me rendormir.
- Non mais je dis ça ... Juste au cas où il se passerait un truc, que tu ne nous fasses pas chier avec tes interdits à la con. Bref, en tout cas, on est amis maintenant, n'est-ce pas ? -
- Je suppose. Je te remercie. Mais bon, de toutes façon, je ne vais pas la voir avant dimanche... -
- Oui, d'ailleurs ...A ce propos ... -
---
- QUOI ??? -
- Non mais il s'est rien passé, c'est un malentendu ... -
- Tu es un traitre. Tais-toi, va-t-en, je ne veux plus t'entendre - "VA-T-EN !"
J'ai hurlé, hurlé à m'en prendre la tête dans les mains. Il était hors de question que j'entende encore ses mensonges. Preeti, il était allé voir Preeti cette nuit. Que lui avait-il fait ? L'avait-il envoûté ? Non, je n'arrive pas à me résoudre à le croire.
Je prend un moment pour me calmer, les mains jointes collées à la tête, j'en appelle à la force de mon Dieu.
---
J'ai couru jusqu'à l'hôtel de Preeti à en perdre halène. Curieusement, il semble que j'ai fais extraordinairement vite. Moi qui ne suis pas sportif, il semble que j'ai parcouru trois quartiers en moins d'un quart d'heure, ce qui est impossible. Je met ça sur le compte de ma peur, et du probable retard de l'horloge devant laquelle je suis passé. Autour de moi, les gens semblent aussi plus ... lent ? Je n'ai plus le cœur à me demander ce qui se passe.
Je monte les marches quatre à quatre et lève le poing devant sa porte. J'hésite, je me sens terriblement mal, presque nauséeux. Que se passe-t-il ? Est-ce cela le goût de la jalousie ? Non, c'est autre chose, quelque chose de plus physique.
Je frappe finalement, je me rend compte trop tard que je suis encore essoufflé et en nage. La tête me tourne affreusement.
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Sept heure, je me réveille comme une fleur, avant de sentir des palpitations. Pas d'angoisses.
Je me leve et va directement faire mes chapatis. Les habits seront pour après.
Sept heure trente, les dieux sont honorés, je part m'habiller. Un sari rouge et or, un bindi, et me voilà dans mon salon, à attendre un visiteur surprise.
Un temps infini plus tard, j'entends un bruit sourd, et le grincement des marches, poussives d'habitude, m'indique que mon invité doit être non seulement arrivé, mais aussi arrivé en courant. Je me met contre la porte, et le doute m'assaille: et s'il était en colère contre moi? Et si ce que je voulais lui dire n'était qu'à sens unique?
Le stress monte d'un cran. Il n'y a aucun bruit dans le couloir. Est ce qu'il m'entend respirer de manière saccadée derrière la porte? Est ce qu'il entend mon coeur battre comme si c'était moi qui avait couru?
Finalement, un bruit sourd à la porte. Je me retiens d'ouvrir immédiatement : il saurait que je l'attendais. Je me sens paranoïaque.
Enfin, j'ouvre la porte et ouvre de grands yeux: c'est bien lui, rouge, et respirant comme s'il avait couru toute la ville.
"Mais qu'est ce qui t'es arrivé ? Entre! Installé toi dans le salon, je t'amène de quoi boire!"
Et les chaussures ? Qu'importe. Il a plus besoin de souffle que moi de propreté !
Le temps d'ouverture de la porte me paraît infini, comme si le monde s'était mis à tourner au ralenti. Voilà Preeti qui apparaît dans l'encadrement de la porte, elle est rayonnante et vive. Elle est aussi étrangement floue, non ? Je la regarde des pieds à la tête, elle me parle et je me décide enfin à entrer.
Un pas, deux pas, et voilà que je tombe dans ses bras. Enfin, pour être plus précis, je tombe à genoux devant elle, et, par pur réflexe, je l'enlace au niveau de la taille. Je comprend confusément qu'il me faudra quelques secondes avant que mes jambes ne marchent à nouveau.
Nous voilà alors lors d'un premier enlacement particulièrement maladroit. Moi, sur mes genoux m'agrippant au sari rouge comme s'il s'agissait de la dernière chose que je pourrai étreindre de ma vie, la tête posée tout contre les flancs de Preeti. Que m'arrive-t-il ? Je remarque que ma position est particulièrement à propos, pour le coup. Je prend alors une profonde respiration et sans quitter le sol des yeux, je dis dans un souffle.
"Preeti, je suis profondément et terriblement désolé pour cette nuit. J'aurais du ... J'aurais du te prévenir de ne pas m'appeler aux heures de la nuit... Je n'aurais pas du laisser Sheitan sortir... Il y a tellement de choses que j'aurais du faire, ou ne pas faire. J'espère sincèrement que tu pourras me pardonner."
A nouveau, je reprend une inspiration, mon cœur se calme petit à petit et je commence à voir les choses à nouveau telles qu'elles devraient être. Le sol ne tangue plus sous moi et je sens mon sang affluer comme il devrait normalement le faire.
"Et je suis désolé aussi pour cette entrée. J'ai un peu trop forcé pour courir jusqu'ici."
Je me remets alors sur mes jambes. Ma tête me tourne toujours mais au moins je tiens debout. Enfin, je me décide à regarder Preeti dans les yeux, timidement, et honteux, mais en face.
"J'aimerai savoir s'il ta fait quelque chose, n'importe quoi qui aurait pu t'être préjudiciable. Tu veux bien qu'on en parle ?"
Étrangement, j'ai cette impression qu'en réalité, Preeti m'attendait. Mais en même temps, j'ai aussi l'impression que je vais tourner encore de l’œil donc je ne vais pas me fier à ce que je ressens présentement.
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"Qu'est ce qu_"
Kyan n'a pas fait un pas qu'il s'effondre devant moi en se rattrapant sur le tissu de mes hanches. Je sens les épingles qui se tendent, et prie pour qu'elles restent en place: si ce n'était pas le cas, le tissu tomberait, et là, je n'aurais plus aucune chance d'exprimer mes sentiments: je serais simplement morte de honte.
Mais elles tiennent bon, et je pose mes mains sur le front de l'homme agenouillé, autant pour voir s'il est souffrant que pour la simple envie de toucher ses cheveux.
"Pas de fièvre, tu dois juste être en hypoglycémie..."
Il garde la tête prostrée, et c'est peut être mieux ainsi: la brûlure du rougissement est telle que je pense avoir la même couleur que mon sari.
Dans un murmure à peine audible, Kyan s'excuse, et je ne comprend pas.
"Je... Pourquoi? Sheitan ne t'as rien dit ?"
Je pense à peut être m'assoir que déjà, toujours en se confondant en excuse, le prêtre se relève. Je le prend par les bras, et son regard se heurte au mien. De la gène, de la honte, du regret? Le miens doit être juste perdu et inquiet... Pourquoi Sheitan n'a pas dit que ça c'était bien passé ?
Il me demande d'ailleurs ce qu'il m'a potentiellement fait, et ma première réaction est de l'inciter à aller au salon.
"Reprend des couleurs et ensuite on parlera de ma soiree, d'accord? Je vais chercher de quoi boire, et de quoi reprendre du sucre. Ça ira mieux après ! "
Je profite de ma virée en cuisine pour vérifier mes épingles : l'une a bien tenue, la majorité est tordue, mais tiennent tant que rien ne retombe dessus, et une s'est décrochée. Je raccroche celle qui peut l'être, prend un verre et sort des halwas. En espérant que cela suffisent à le remettre sur pieds...
Sans même m'en rendre spécialement compte, je suis transporté au salon et je me retrouve assis sur le canapé. Autour de moi, le petit appartement n'a pas changé, toujours impeccablement tenu, j'en ressens presque un sentiment de sécurité. Je reprend très vite mes esprits. Être assis me fait du bien. Je tressailli un instant en repensant à la main de Preeti sur mon front, ce geste maternel, ce contact charnel. Il faut que je reprenne le contrôle de moi-même et vite.
"Il a très mal agis. Je n'ai pas souhaité l'écouter. J'ai voulu savoir si tu allais bien en priorité."
Et Preeti s'en va dans la cuisine pour aller nous chercher à boire. Encore une fois, je me fais servir comme le prince que je ne suis pas. Sans doute vaut-il mieux que je reste sagement assis ou je vais vraiment finir allongé par terre.
Voilà la déesse qui revient avec des verres et des gâteaux. Sur le moment, je m'en veux de m'imposer chez elle ainsi et de lui faire du soucis. Mais avec une seconde réflexion, j'ai non seulement très envie de passer du temps avec elle, mais j'ai aussi très faim. Bon dieu, voilà que je deviens égoïste ...
"Je suis vraiment confus de tous les soucis que je t'apporte."
Au moins, Sheitan ne semble effectivement pas avoir affecté Preeti. Cela me rassure un peu mais je dois vraiment en avoir le cœur net ou je ne pourrais plus jamais dormir de ma vie.
Je me sers alors, presque forcé. De l'eau tout d'abord, je me rend compte à quel point j'ai la gorge sèche. Alors, Preeti m'avoue qu'elle est heureuse que j'ai eu envie de la voir, autant dire que je manque de m'étouffer dans mon verre. Me voir moi la rend heureuse ? Étrange mais très agréable nouvelle.
"Je suis désolé d'y revenir mais je ne serais pas en paix si je ne le sais pas. Quand tu as vu Sheitan hier soir, enfin, cette nuit. Vous n'avez pas ... Enfin, il ne t'as pas forcé à faire quelque chose que tu regrette aujourd'hui ? Cette question, après, je te laisserai tranquille avec lui, et on pourra parler d'autre chose, si tu le souhaites."
L'idée qu'il ait pu abuser d'elle me donne un sentiment amer. Est-ce la traitrise, ou la jalousie ? Malgré tout, je sais que Sheitan n'a pas pensé à mal sur le coup, il est fourbe, mais il n'est pas menteur. Cependant, j'attends ma réponse, ensuite je pourrais me détendre ou sévir.
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Ma presque confession manque de l'étrangler, et je me retiens de lui demander si ça va, parce que c'est bête et que j'ai déjà l'air assez gourde comme ça.
Comme il insiste sur le sujet, je m'assois près de lui, et lui dis avec un sourire: "Tes questions ne m'ont jamais gêné, et si c'est important pour toi, pose les questions que tu veux!"
Je laisse une seconde passer en regardant la table basse, puis le regarde dans les yeux:
"Tout s'est bien passé. J'ai été surprise que vous ayez la même cicatrice et le même téléphone, mais finalement, après quelques haut et bas, on a réussi à passer une soirée sympa. Pas de mal de fait, ton frère est pas aussi terrible que tu ne le vois!"
La même cicatrice ? Quelle cicatrice ? Celle que nous avons sur le visage, ou celle de notre épaule droite des suites de l'accident ? C'est une question totalement stupide. Preeti ne m'a jamais vu torse-nu donc elle ne peut pas s'être fait ce genre de réflexion.
Cette réponse est tout à la fois inattendue et curieusement satisfaisante. Une soirée sympa ? En fait, c'était exactement la réponse que j'aurais aimé qu'on me fasse pour me rassurer pleinement. Je fini alors mon verre et sourit à Preeti.
"Je sais, je le juge sans doute un peu trop durement. Mais il faut bien comprendre qu'il m'en a fait voir de toutes les couleurs. J'ai du mal à ne pas le considérer comme un enfant dans un corps d'adulte aux mœurs d'adolescent."
... et aux redoutables pouvoirs. Bon, une promesse est une promesse, je ne reviendrai pas sur les agissements ou non-agissements de Sheitan. Si Preeti a des questions, je lui répondrai honnêtement, pour le moment, je pense l'avoir suffisamment déranger avec ce sujet. J'ose prendre une part de gâteau et m'exclame :
"Encore une fois, c'est véritablement délicieux, Preeti. Il faut que tu te méfie où je vais y prendre goût et venir souvent chez toi."
Me voilà totalement détendu à présent, je pense même que je pourrais marcher quelques mètres sans trembler ou tomber. Je me tourne vers la Déesse et lui souris.
"Au fait, tu avais peut-être un truc à faire, comme tu es toute habillée alors que tu es rentré tard la veille. Notre discussion peut attendre au besoin, à moins que tu n'avais envie d'aborder un sujet en particulier ?"
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Enfin, le visage de Kyan s'éclaire, et j'ai même le droit à un sourire.
"Je préfère ça, tu as repris des couleurs!"
Quand le prêtre me parle de son frère, je ne peux m'empêcher de rire:
" C'est vrai qu'il agit parfois comme un enfant! Mais il a un bon fond, c'est ce qui compte...Je suis sûre qu'avec quelques compromis vous pourriez vous entendre."
Je me prend à re-detailler mon hôte. Définitivement, ils ont la même cicatrice. Mes yeux dérivent sur son front, avec quelques mèches rebelles du matin, au toucher tel que je m'y attendais, doux...
Je suis rassurée de le voir manger, et lorsqu'il me complimente je pique un fard (ce qui devient une habitude en sa présence)
"Je suis vraiment contente que tu l'apprécier. Au moins elle profite à quelqu'un !"
Certes, elle cuisinait aussi pour les associations d'aide du coin... Mais l'attention était bien différente !
Lorsqu'il remarque mes habits, je regrette presque d'avoir pris mon temps pour les choisir. Que faire ? Je me rappelle les mots de Sheitan, et décide de les suivre... À ma façon.
"En fait... Sheitan m'a plus ou moins prévenu de ta venue ce matin... Il se doutait que tu viendrais, alors je ne me suis pas faites surprendre au pied du lit. Et puis je suis matinale."
Aucun mensonges. Mais le courage de me déclarer à un homme marié à Dieu n'était pas encore là... Et de toute façon, comment rivaliser?
"Nous essayons de nous entendre, je te l'assure ! D'ailleurs, pour être tout à fait franc, tu es même un sujet sur lequel on arrive plutôt bien à s'accorder. Enfin, jusqu'à ce matin..."
Évidemment que Sheitan l'avait prévenue... Ceci dit, cela signifie qu'elle s'était aussi élégamment vêtue que pour me voir. Non, ce n'était certainement pas ça, elle doit simplement s'habiller ainsi pour tout le monde et je ne fais pas exception.
"Tu es très jolie en tout cas ce matin..."
Pourquoi ais-je dit ça ? Sérieusement, pour qui je me prend ? Je me reprend comme je peux.
"Et je suis ravi que du coup, tu ais un peu de temps à me consacrer. J'espère vraiment ne pas te déranger, d'autant que, pour ma part, je ne suis pas arrivé aussi frais que toi."
"Pas aussi frais" est un euphémisme. Pour peu, j'abuserai presque en demandant à Preeti si je peux prendre une douche chez elle, froide, glacée de préférence. Bon, la chose la plus sage à faire serait de prendre congé et de laisser la dame tranquille, mais quelque chose, comme la dernière fois, m'ennuie dans l'idée de partir.
"Tu veux que je nous fasse du thé ? Je connais une recette avec de l'orange et du gingembre que je pense que tu vas beaucoup aimer. Enfin, si tu en as, bien sur !"
C'est à peu près la seule recette de cuisine que je connais et que j'arrive à faire. Je me lève et constate qu'effectivement, je tiens debout tout seul à présent.
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Sa remarque me surprend, mais je prend la mesure et lui jette un clin d'oeil en souriant :
"Tiens, c'est drôle, vous avez l'air de beaucoup parler de moi. Sheitan ne voulait pas me dire pourquoi... Il voulait que ce soit toi qui m'en parle! Du coup je suis toute ouïe, de quoi pouvez vous bien parler d'une femme que vous avez rencontré une fois chacun?"
Je le taquinais, et je savais aussi que c'était pour prendre la température, voir si quelque chose était possible... Jusqu'à son compliment. J'allais prendre le contre-pied mais il se reprend. Ses remarques tempère mon empressement, et je répond simplement :
"En réalité, je n'attend personne d'autres... Et je suis libre aujourd'hui. Tu ne me dérange pas, fait comme chez toi, si tu as besoin de quelque chose..."
Je me mord l'intérieur de la joue: qu'est ce qui me prend "fait comme chez toi"... Quelle idiote !
Pendant que je m'insulte intérieurement, Kyan me propose... De faire un thé. C'est instantané, toute autre pensée à disparue. Un thé... Pour moi?
"Oh! Bien sûr ! Euh... Je vais te montrer ce que j'ai!"
Le voir debout me rassure, et je l'emmène à la cuisine.
Elle n'est pas très grande, mais aménagée assez efficacement pour que je puisse cuisiner en paix. Ouverte au salon, l'évier regardant vers le canapé, l'endroit est confortable et cosy. Je lui ouvre les trois placards au dessus des plaques, où je stocke tous mes thés.
De toutes origines, de toutes couleurs, mis dans des pots en verre transparent soigneusement étiqueté, ma collection doit être au nombre d'une centaine, petits et grands pots confondus. Une vraie mine d'or pour les amateurs.
Pour le gingembre, je lui montre la corbeille à fruits, et rajoute de fouiller s'il a besoin de quoi que se soit... Où bien de me demander.
J'en profite pour passer à la salle de bain: j'ai besoin de me rafraîchir, surtout les idées !
La question me fait sourire et puis rire. Deux hommes qui parlent d'une femme, je suppose qu'effectivement, l’intéressée doit se poser pas mal de questions. Du coup, je prend une inspiration pour répondre au mieux. Encore assis sur le canapé, je me penche vers Preeti.
"Pour commencer tu es la raison pour laquelle je suis à Arcadia. Toi, et mon accident, bien entendu. Ensuite, quand la police m'a donné tes coordonnées, j'ai utilisé le téléphone de Sheitan pour t'appeler et, comble du comble, te donner rendez-vous ! Autant dire que si on avait toujours nos parents, ils auraient été mis au courant dans l'heure et un mariage aurait certainement été organisé ! Tu es la seule personne avec laquelle je suis jamais sortie comme si nous étions un ... Hé bien, un couple !"
Un grand verre d'eau plus tard, je reprend. La suite est infiniment moins glorieuse.
"Après, j'ai parlé de ta fille à Sheitan, au cas où s'il avait une information. Avec ses fréquentations, on sait jamais ... Et puis, je l'ai défendu d'essayer de te draguer. Ou de faire de toi ce qu'il fait d'habitude avec les personnes qu'il rencontre le soir... "
Preeti est libre aujourd'hui ! Cette simple idée me fait repenser à ce que j'ai moi-même à faire dans la journée et j'en conclu sans doute un peu rapidement que rien d'important ne m'attends.
Nous allons donc à la cuisine et je reste admiratif devant toutes les sortes de thé qu'elle possède. J'attrape donc le pot qui contient du thé noir, une racine de gingembre et une orange.
"C'est impressionnant ! Je suis ravi d'aimer le thé, du coup. Tu en fabrique toi-même ?"
Enfin, Preeti disparait dans la salle de bain. Je m'active donc à faire chauffer l'eau, à rapper le gingembre, à l'écraser, à prendre du zest de l'orange avant de mettre le tout dans une passoire. Je regarde les épices et remarque que je pourrais presque rajouter du piment des oiseaux ou peut-être un peu de cannelle. Je me tourne vers Preeti qui n'est pas encore revenue. Pendant que l'eau boue, je vais doucement frapper à la porte de la salle de bain.
"Tout vas bien ? Tu m'as l'air un peu préoccupée. Tu sais que tu peux tout me dire..." J'allais pour retourner à ma préparation mais j'ajoute avec humour. "Tu sais, je suis un prêtre qui a un peu l'habitude des confessions et je sais repérer quelqu'un qui a besoin de soulager son âme."
A présent que je sais que Sheitan n'est plus un soucis, je peux absolument tout entendre !
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La question le fait rire, puis il se penche vers moi, se qui me trouble toujours un peu. La réponse est surprenante, et après une seconde de silence, je croise les bras, un sourire taquin, et m'exclame:
"Un mariage? Mais je ne connais ni votre caste, ni votre comptabilité astrologique très cher, indispensable pour un bon mariage auprès de mes parents. Un bon mariage indien j'entends."
C'était vrai. Mais ce que je ne disais pas, c'est qu'avec mes sentiments ça ne compterait pas.
Après que Kyan ai finit son verre (que je rerempli instantanément), il m'explique la fin de ses raisons, et je lui souris :
"Merci. Plus d'yeux dans les rues nous donnent plus de chance de la retrouver... "
Son regard est admiratif devant mes bocaux remplis, et il choisit un thé noir du Ceylan, avant de chercher ses autres ingrédients. Un instant, je me dit que j'aimerais ça, un homme dans ma cuisine. Cet homme. Puis le rêve se brouille lorsque je secoue la tête.
L'eau froide me ramène à la réalité. Contre ce sentiment on ne peut rien. Le nier ne fait que le renforcer. Alors, quand le son d'une main toque contre la porte, et que le prêtre me taquine,je me remémore les phrases que j'ai pû entendre et lui dit, un sourire dans la voix pour cacher le stress qui grandit.
"D'accord. Je suis ici mon père, parce que j'ai péché..."
La phrase me ferait rire si la suit n'etait pas si importante à mes yeux.
Je reste un moment derrière la porte de la salle de bain, riant de cet étrange décalage. Que répondre à ça ?
"Ouh ça, je n'en doute pas, ma fille. Déjà, tu es païenne, et tu as voulu envoûter un prêtre. Je me demande ce je vais bien pouvoir te demander pour ta pénitence. " je dis d'une voix faussement charmeuse.
Et me voilà reparti dans la cuisine. L'eau a une température parfaite, je verse le tout dans la passoire et j'attends les cinq minutes d'infusion. J'ai utilisé pas mal de gingembre, le tout risque d'être épicé mais je ne pense pas que ça soit un problème.
"Et pour finir de te répondre, je suis certainement d'une caste basse mais je saurai convaincre... oh, et je suis vierge. Ça ira ?"
Sentiment étrange que d'être dans une cuisine. Encore une fois, étrange parce presque naturel. J'aimerais tellement pouvoir cuisiner des bons plats aussi, servir Preeti est une place qui me convient, même si notre relation devait en rester là.
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C'est vrai. Pour sa religion, je n'étais qu'une païenne, quand mes dieux les considéraient juste comme des hommes. Que dire? Fallait-il vraiment le dire?
La fin de sa réponse m'y poussait, mais les pas derrière la porte m'indique que le prêtre n'écoute plus ma confession. Tant pis. Je sors, et m'installe dans le salon, me retourne sur le canapé pour voir Kyan s'affairer dans la maison. Naturellement. Il avait l'air à l'aise, et je me surpris encore à rêver qu'il resterait.
Devant la question de sa caste,je lui répond pensive:
"Être prêtre dans ma religion, ce serait être Brahmane, la plus grande caste qu'il soit. Cependant, en tant que non indien, et en tant que prêtre d'une religion différente... Je ne sais pas. Que faisait tes parents?"
Toujours dans ma casi contemplation, je continue doucement:
"La chasteté masculine n'est pas importante aux yeux de nombreux peuple. Ça n'aurait pas eu d'importance."
Ça n'avait pas d'importance pour moi. Je l'aurai aimé avec ou sans relation antérieure. Et puis... J'en avais eu, moi... Alors je ne pouvais pas en demander beaucoup à ce sujet.
Je me redresse dans le sofa et le regarde surprise:
"Tu veux... Que je t'apprennes? ... D'accord, je t'apprendrais, j'imagine que ça plaira à Sheitan... Et à tes collegues... On dit comment pour parler des autres prêtres? Des collègues ? Des camarades?"
Je dispose la théière, les tasses et decoupe les oranges en quartiers comme accompagnement. Preeti s'est assise au salon et nous continuons à parler.
"Mes parents ? Ils n'étaient pas très versés dans la religion. Je pense qu'avec la guerre, peu leur impotait à part mon bonheur"
Je reste un instant pensif. Sans doute qu'avec leur mort et avec le temps, j'ai tendance à les idéaliser. Mais c'était un fait, ils m'ont toujours poussés à faire ce dont j'avais envie de faire. Je ferme les yeux et leur adresse une prière silencieuse.
"La chas.. pardon ?" sur le coup, j'ai du mal à comprendre de quoi Preeti me parle. Alors, j'éclate de rire en comprenant la méprise "Non, je voulais dire... rapport à la compatibilité astrale. Je suis né un 21 septembre, je suis donc vierge !"
D'un sens, le fait qu'elle sache sur ma virginité physique et n'en fasse pas grand cas est réconfortant. C'était rare un prêtre de mon âge qui n'ait vraiment aucune expérience dans ce domaine et, sans en être une honte, je ne l'ai jamais vraiment partagé.
J'arrive dans la salle avec mon plateau et le pose sur la table basse devant Preeti avant de nous servir tous les deux. J'essaye de conserver mon sérieux mais j'ai toujours envie de rire. Je m'installe face à Preeti, sans doute un peu trop proche d'elle selon les conventions mais je ne veux pas qu'elle se défile à nouveau.
"Alors, Déesse, à présent que nous nous faisons face, on parle de ce qui pèse sur ton âme ?"
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Je ris, un peu nerveuse.
" Non, ce que je veux dire, c'est que la caste est divisée en sous-caste formée par les métiers. Selon ce que tes parents font, tu es d'une certaine caste. Par exemple je suis une Vaishyas, par mon pere qui est marchand. Je suis donc dans une caste moyenne, avec deux castes supérieures et deux castes inférieures. C'est ton père qui détermine ta caste. J'espère que je ne t'ai pas fais mourir d'ennui avec cette explication !"
Il reste silencieux un moment, mais quand je murmure la non importance de la chasteté masculine, il rit au éclat. Devant ma méprise, j'en fais de même, et m'exclame:
"Désolée, je ne sais pas pourquoi j'ai pensé à ça ! "
Espérons qu'il ne pense pas que je pense à notre sexualité... Ne pas y penser. Ne pas y penser.
" Il ne faut pas que ça pour faire une comptabilité. Il faut faire tout ton thème astral, avec toute les planètes, et celui de ta partenaire, puis analyser les deux ensembles pour voir les traits harmonieux et les dissonants. On le faire faire par une marieuse généralement !"
Vierge alors ... Signe tranquille, et étrangement terre à terre, en opposition avec son métier donc ... Ça doit faire parti d'un autre morceau du thème. Par rapport à mon signe, les deux s'accrochent...
En sortant de ma rêverie, je vois Kyan un plateau à la main. Que la vie serait douce ainsi, avec Nisha et cet homme si attentionné...
Il ne se met pas sur le canapé et pose un pouf en face de moi, signe que l'interrogatoire reprenait. Ses paroles nous ramène à ma confession, et je baisse les yeux.
" Et bien.. il semblerait que je cumule les péchés en ce cas. Je suis païenne, et je crois même avoir quelques péchés capitaux en moi... La gourmandise d'abord. Ton thé à l'air délicieux et j'adore les agrumes! "
"Mourir d'ennui, du tout ! Du coup, ma maman était institutrice et mon papa élevait des chevaux. Si la caste vient du père, je ne pense pas être très élevé hiérarchiquement..."
Pendant un instant, j'hésite à ajouter en plaisantant que je trouverai bien un autre moyen pour convaincre ses parents, mais je me dis que c'est certainement pousser la blague un peu loin. Je trouve déjà que Preeti à tendance à rougir facilement et je me demande si c'est bien normal. Sans doute que je devrais arrêter de badiner ainsi.
"Je vois, cela m'a l'air compliqué à comprendre pour quelqu'un qui n'est pas de cette culture. Personnellement, quand je marie les gens, ils se sont généralement déjà mis d'accord au préalable. Ça fait partie d'une des choses que j'adore faire à l'église, marier les gens... Au fait, pour répondre à ta question tout à l'heure, j'appelle les gens de mon église ma communauté, toutes personnes confondues, fidèles comme membres."
Mais il faut avouer que ma communauté d'ici est bien différente de celle de New-York. Les gens d'Arcadia ont d'autres soucis que la religion et s'il y a énormément de choses à améliorer pour la société, les Arcadiens sont nettement moins enclins à mettre la main à la patte.
Preeti se défile encore, ses yeux me fuient. Pour aujourd'hui, je ne vais pas insister. Il serait facile pour moi de prendre le raccourci Sheitan, mais dès notre première rencontre, il semble qu'elle aurait souhaité me parler de quelque chose sans oser le faire. Et aujourd'hui, cette envie semble plus forte.
"Pardon si je t'ai vexé avec le terme de Païenne. Cela signifie simplement quelqu'un d'une religion polythéiste, ou sans religion. Je sais qu'il a une connotation péjorative, c'était juste pour plaisanter."
Je reprends un peu de gâteau et me sers une tasse de thé fumante. Il est assez épicé mais à mon sens, il est juste parfait, jamais je ne l'avais aussi bien réussit. En même temps, l'environnement particulièrement chaleureux et la présence de la Déesse joue aussi énormément sur mon appréciation.
"La gourmandise ? Alors oui, c'est un péché capital, mais tu es surtout en train de me contaminer, et ça, c'est dramatique ! Je ne vais plus jamais pouvoir me contenter de nourriture simple et fade, à présent."
My fingers claw your skin, try to tear my way in. You are the moon that breaks the night for which I have to howl
" Alors, ça dépendrait des chevaux. Si ce sont des chevaux de travail, de guerre ou de roi. Selon, tu serais soit Shudras soit Kshatriyas. Mais qu'importe."
Je vois qu'il est près d'ajouter quelque chose, mais il se ravise, et la discussion part sur les mariages d'amour. Je rêve un instant, mais me retiens au dernier moment.
"Dans les mariages arrangés aussi, nous sommes d'accord. Enfin, en tout cas on m'a demandé mon avis. J'ai refusé deux mariages avant celui là. On se rencontre, on voit la famille... L'amour vient généralement après. Dans mon cas, c'était plus une tendresse amicale."
Rien de comparable au feu que j'entretenais depuis si peu de temps, rien de comparable à celui qui me faisait rêver le jour, rêver la nuit...
" Tu ne m'as pas vexé, c'est typique des religions monothéistes de penser que les autres religions sont fausses..Je ne juge pas tes croyances."
Je profite que le prêtre reprenne un halwa pour boire son thé. Le thé noir, si fort, se marie avec le gingembre comme un beau combat, et je soupire d'aise.
"Le pire mon père, c'est que je suis très contente des péchés que je commet! J'adore ton thé, et je suis contente de goûter avec vous. Je suis tout aussi contente de te contaminer! Mais le pire... C'est l'envie. J'envie votre Dieu de vous avoir à ses côtés, tandis que je vous ai provisoirement..."
Je plonge mes yeux dans ceux que l'homme convoité, avant de les perdre dans le thé pécheur, trop troublée pour tenter de voir l'incompréhension dans ses yeux.
"C'était des chevaux de travail. Me voilà donc au bas de l'échelle, une échelle que je ne peux que monter."
J'aurais énormément de questions à poser à propos des mariages arrangés. Savoir comment on se sent avant de rencontrer son futur, comment prendre une telle décision de refuser ou d'accepter, s'il y a des regrets, et surtout, comment l'affection fini-t-elle par venir ? Preeti a eu un enfant avec cet homme, le fait qu'elle appelle cette relation une "tendresse amicale" me fait presque mal. Comment s'unir avec quelqu'un sans passion ?
Très franchement, je ne suis absolument pas le mieux placer pour juger. Pour ma part, je ne connaitrais jamais cette proximité, cette intimité et la crainte qui va avec. Mais je reste véritablement curieux surtout en ce qui concerne Preeti, je dois bien l'avouer.
Par la suite, elle dit quelque chose que je ne peux pas passer sous silence.
"C'est typique, effectivement. Mais en aucun cas je crois que ta religion est fausse. Je pense que l'important, pour moi, est de croire en quelque chose. Toi, tu crois véritablement avec ton âme. Jamais je ne me sentirai supérieur en quoi que ce soit. D'autant qu'avec nos castes, c'est plus où moins le contraire, Déesse."
Par la suite, Preeti se remet à m’appeler "mon père". Décidément, je ne pourrais jamais m'y faire, cela m'arrache un petit rire. Ensuite, elle passe du tutoiement au vouvoiement comme d'aucuns passeraient d'un thé au gingembre au gâteau indien.
C'est alors que je me fige d'un coup.
Preeti vient de me faire la plus belle déclaration d'amour que jamais je ne pensais possible.
Je ne me rend compte que maintenant à quel point nous sommes restés proches, physiquement proches. Je sens mon cœur qui s'emballe et j'avoue ne pas savoir la marche à suivre. L'amour est l'un des sentiments qui m'anime le plus et qui m'a toujours animé et voilà que je suis totalement démuni face à Preeti.
Cette dernière baisse les yeux. Comme à notre première rencontre, je pose doucement ma main sur son poignet. La première fois était audacieuse mais instinctive. Ce contact-là n'a rien de naturel pour moi, je sens le feu me monter aux joues et mon souffle devenir plus rapide.
"Preeti, c'est la plus belle chose qu'on m'ait jamais dite. Je pense être totalement indigne de l'envie qui t'anime mais je passerai ma vie à faire en sorte d'être le plus méritant possible de cette affection."
Sans doute qu'elle plaisantait. Peut-être même qu'elle fait naturellement ce genre de déclaration à beaucoup de monde, après tout, cela est toujours plaisant à entendre. Pour ma part, à cet instant, j'ai simplement envie de croire que ces mots me sont adressés à moi seul.
Je commence à avoir vraiment très chaud tout à coup...
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Mon ton se fait joueur, et je lui répond, d'un air faussement navré :
"Alors, te voilà Shudras. la caste ne change jamais, il est à vie. Le mariage arrangé est encore possible... Tu as de l'or?"
Sa façon de parler de la religion me rassure, et je lui répond doucement avec un sourire:
"Je sais que tu ne disais pas ça sérieusement. Moi non plus d'ailleurs. Et même si on a déterminé ta probable caste, tu n'es pas indien. Alors ça ne compte pas. De toute évidence... nous sommes égaux. C'est bien comme cela."
De toute évidence je t'aimerais même Shudras, même catholique. Les mots avaient failli sortir ainsi, et je les rattrapèrent de justesse.
Le fond de la tasse est bruni par la boisson, et je bois ma dernière goutte de ma tasse. Quel ridicule. Comment je pourrais le regarder de nouveau ?
Ses doigts touchent mon poignet, et ma peau se couvre de frissons. Je ne comprend pas sa réponse. A-t-il compris les mots?
Une citation me revient en mémoire :
"Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous voulez entendre, ce que vous entendez, ce que vous croyez en comprendre, ce que vous voulez comprendre, et ce que vous comprenez, Il y a au moins neuf possibilités de ne pas se comprendre."
Pourtant, le pas est fait, alors puisque nous ne pouvons pas reculer... Autant se faire comprendre.
Je retourne mon poignet, prend ses doigts dans les miens, tire sur le bras, déplaçant le corps de Kyan en avant, ses yeux remplis de surprise, et effleure ses lèvres des miennes si doucement que si mon visage ne me brûlait pas autant, je croirait n'avoir que rêvé cette seconde.
"Mon père. Maintenant viens l'avarice. Je veux garder ce que j'ai volé à quelqu'un qui m'es cher. Comment me faire pardonner?
Je reste un instant sans voix, sans penser, sans ... rien.
Ma raison voudrait que j'explique tout de suite à Preeti à quel point ce ne sera pas possible, nous deux. Je ne suis pas pour elle, ma religion comme ma fonction m'interdit de faire ce genre de chose. Je lui expliquerais que l'on peut rester amis, que jamais je ne l'abandonnerai, que je comprend ses besoins comme ses envies mais que je ne peux absolument pas y répondre ...
Ais-je seulement envie d'écouter ma raison à ce moment là ?
Mais vient-il de se passer ce que je crois qu'il vient de se passer ? Ses yeux répondent pour ses actes.
Mon cœur bat tellement fort et mes sentiments sont si confus que je me sens trembler de partout. Pour peu, j'en aurai les larmes qui me monteraient aux yeux.
Pourquoi est-ce tout à la fois si compliqué, et si simple ?
Mes mains se posent de part et d'autre du visage de la Déesse. Je ne sais pas faire ça. Je m'approche très doucement de Preeti. Elle va me repousser. Et, dans une lenteur presque douloureuse, je pose mes lèvres sur le côté de sa bouche.
Des frissons me parcourent tout le corps, j'ai presque l'impression d'être né pour cet instant précis. J'approche alors ma bouche de son oreille et murmure :
"Tu n'as rien à te faire pardonner, c'est moi qui te remercie..."
Sans même véritablement y penser, me voilà à nouveau qui me penche sur elle et ... Oh ...
Une réaction primale physique vient de m'arriver. Quelque chose qui ne m'était pas arrivé depuis mon adolescence. Vu sa position, et la mienne, c'est impossible qu'elle ne l'ait pas senti. Moi qui ait toujours eu une telle retenue sur moi-même, me voilà honteux.
"Je ... Je suis navré."
Pour éviter d'être tout contre elle, je viens m'asseoir à côté de Preeti sur le canapé. Je pense que je vais avoir besoin d'une petite minute pour me calmer. Je remarque alors que j'ai encore une main autour de la nuque de la jeune femme.
"Ce matin, je me met à genoux devant toi. A présent ... ça. On aura vraiment tout fait dans le désordre."
Le problème est que, loin d'essayer de me calmer, j'ai encore envie d'embrasser Preeti.
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Son esprit à l'air sur orbite. Pas de joie extérieure, rien qui ne montre aucune émotion, aucun sentiment.
Que dois-je en conclure ?
Ses mains se posent sur moi et doucement, si doucement, ses lèvres se posent timidement sur la commissure de mes lèvres. Je n'ai pas le temps de savoir ce que je ressent qu'il me murmure un remerciement à l'oreille.
Merci? Mais ... Merci pourquoi?
Je réfléchis à ce que veux dire son merci, mais rien de positif ne me vient.
Je sens qu'il se rapproche de nouveau, ses mains toujours sur ma peau, son corps se penchant vers le mien ...
Kyan s'arrête. J'ai le cerveau dans la naphtaline, je ne comprend plus se qu'il se passe. Tout est instinctif.
"Je...Je suis navré."
Les mots sonnent comme une gifle, et la honte s'empare de moi.
Je n'aurait jamais dû tenter quoi que se soit.
Il s'assoit à côté de moi, et je prie mes dieux et le sien pour que le canapé m'avale et me cache définitivement du monde. J'aimerais m'enfuir de la situation, mais il n'y a aucun endroit pour sortir de la honte. Alors je reste là, la main de mon sentiment déchu sur la nuque, oubliée par son propriétaire.
Un jour, quand Nisha sera grande, et qu'elle me demandera si j'ai été amoureuse un jour, je lui dirait "oui. Mais ça n'a pas marché."
Je murmure:
"Je suis vraiment désolée... Je n'aurait pas dû avoir les sentiments que j'ai à ton égard. Je te promet de ne plus essayer quoi que ce soit. Juste... Ne m'en veux pas... D'accord ?"
Preeti s'excuse. Pour le coup, c'est moi qui ne comprends plus. Pourquoi ne devrait-elle pas avoir ce genre de sentiments envers moi, je pensais qu'elle était libre. Je la regarde dans les yeux et n'y voit que de la honte. Que s'est-il passé ? Aurait-elle simplement mal compris mes intentions, ou simplement, n'aurait-elle pas senti que je prenais simplement une minute pour essayer de calmer mes ardeurs ?
"Non, Preeti, je t'en prie. Ne t'excuses pas. C'est juste que ..."
Comment je vais dire ça ? Moi qui suis si à l'aise avec les choses charnelles.
"Je ne voulais pas te gêner... Je suis ... j'étais en train de ..."
Je me mords les lèvres, ferme les yeux un instant et passe mon autre main sur mon visage. Voilà, ça au moins, c'est refroidi.
"C'est juste que si tu as éprouvé de la gourmandise, de l'envie et de l'avarice, mon corps me démontrait à quel point la luxure pouvait être aussi présente. Mais c'est passé à présent."
Mon cœur bat toujours beaucoup trop vite, mais au moins, je ne tremble plus comme une feuille. Je souris à Preeti d'un sourire que j'espère tendre. De mon bras encore autour de ses épaules, je la serre tout contre moi.
Nous voilà à nouveau si proches à présent. Je n'ai pas envie de laisser passer l'instant, comme une envie de ne plus gâcher de temps. Je caresse les douces lèvres de Preeti du bout de mes doigts. Voilà que je tremble à nouveau. Je sais que je vais certainement aller en enfer pour ça, mais à cet instant, j'ai vraiment envie que ça vaille le coup.
J'attrape alors son visage et après avoir doucement frôlé mes lèvres contre les siennes, je resserre mon étreinte et joint directement nos bouches. Encore une fois, il me faut une seconde pour absorber le frisson que cela me procure. A travers notre baiser, je sens notre respiration rapide à tous les deux.
"Tu veux vraiment te lancer dans ce genre de relation... avec moi ?"
