Il me rend mon sourire immédiatement, et je le rejoins tandis que le chœur se scinde en petits groupes.
Nos mains se nouent ensemble naturellement, et je fais un petit regard alentour:

"Tu ne crains pas qu'on nous vois ensemble? Je n'ai pas vraiment l'apparat de la parfaite chrétienne avec mon sari!"

Je lui souris de nouveau, et répond avec enthousiasme, me rapprochant doucement de lui mais en gardant une distance correcte:

"Je suis contente de te voir aussi, je vais bien et toi? Merci pour le spectacle, tu diriges leur voix d'une main de maître!"

Je suis son regard et remarque que nous ne sommes effectivement pas seuls.

"Je n'y avais pas pensé..." je dis sur un air d'excuse. "Merci pour les compliments mais tout le mérite leur revient." je precise.

"Tu m'accompagne à ma chambre ? Je dois aller me changer et nous serons plus tranquilles pour discuter."

Personne ne semble prendre ombrage de sa présence malgré quelques regards curieux. Sur le chemin, mes mains sagement placées dans mon dos, je demande à Preeti :

"Tu as passé une bonne journée ? Qu'aimerais tu manger ce midi ?"

"Pas de soucis, c'est plus toi que ça dérange..."

Mon amour, toujours humble... Je souris en agréant.

Sa chambre? Je rougit puis hoche doucement la tête: c'est la première fois que je vais voir où il vit!

Pendant que nous marchons dans les couloirs, sa posture ne montre rien de notre relation, et je garde une distance raisonnable, en répondant doucement pour ne troubler personne, et surtout qu'on ne comprenne pas notre conversation:

"Une matinée calme, en vérité. Je me suis reposée de ma soirée de travail! Et à toi de choisir pour notre repas cette fois!"

Nous arrivons à ma chambre dont j'ouvre la porte. Juste avant de laisser passer Preeti, je lui dit en souriant :

"Tu te souviens de la première fois que je suis venu chez toi ? Tu t'es excusée de la petitesse de ton appartement..."

J'ouvre finalement la porte sur ma chambre et en allume la lumière qui dévoile la petite pièce parfaitement rangée.

"Je t'en prie, installe toi." dis-je en désignant le lit. "Je n'en ai pas pour longtemps."

Je retire ma soutane pour la ranger soigneusement et me décide à changer également de chemise.

La chambre est petite, et je souris à l'allusion sur mon appartement, si grand finalement. L'endroit est propre et entretenu, et ce point commun me rassure aussi dans un certain sens, bien que ce n'est pas pour les mêmes raisons.

"Ainsi donc, tu es un homme perfectionniste jusqu'au bout des ongles. C'est drôle..."

Je m'assois sur le lit, ne sachant pas très bien la suite des évènements, et cherche une porte pour une salle de bain, en vain, jusqu'à ce que Kyan se dénude juste ici, avec moi...

Est ce que je reste?

"Perfectionniste, je ne sais pas... Mais ce n'est pas vraiment dur de garder cet endroit propre et rangé."

Une fois mon vêtement retiré, je remarque le regard embarrassé de Preeti sur moi dans le miroir. Je tourne juste la tête pour lui dire :

"Désolé, je ne pensais pas que ... Enfin, je n'en ai pas pour longtemps."

J'attrape rapidement une nouvelle chemise blanche et la passe en la boutonnant rapidement. Après nos étreintes plus qu'impudiques, cette gêne est étrange

Etait-ce seulement de l'embarras ?

"Il est tôt, tu veux aller manger dès maintenant ?"

"D'autres pourrait en faire un placard mal rangé. Mais je te reconnaît un peu dans cette pièce. C'est dommage, c'est si ... impersonnel."

Certes, l'endroit était une chambre, rien de plus, le strict minimum pour un homme qui avait tout donné à Dieu... Sauf que Kyan était plus que cela.

Lorsqu'il s'excuse je m'écris précipitamment:

"Non, ne t'excuses pas! C'est juste que... Je t'aime. Et tu me plaît beaucoup... Et je ne devrais pas avoir ce genre de pensées ici... Et si tu n'as pas faim, on peut... se balader?"

"C'est juste pour dormir et prier. Je n'ai pas besoin de plus ici."

Quand ses mots viennent précipitamment, j'ai le dos tourné et je ne peux réprimer un sourire pour moi-même. Voilà la Preeti que je connais.

Ce qu'elle dit me touche mais un mot me fait arrêter mon geste, je me retourne, les sourcils froncés et demande :

"Attends, de quelles genre de pensés tu parles ?"

Je m'asseois à côté de Preeti, dans le lit pour lui prendre la main.

"Il y a quelque chose dont tu souhaites me parler ?'

Mes mots ont trop exprimés ma pensée, et impossible de les effacés. Pire, Kyan se tourne vers moi et pointe directement ce que j'aurais du occulter le plus en cet instant.

Je baisse les yeux malgré moi: Mes pensées n'avaient rien de sale ou de répréhensibles... Mais ici et maintenant, j'en avait presque honte.

"Oh... simplement du désir, parfois... Des sentiments humains que je ne devraient pas avoir dans ton lieu de culte."

Je murmure calmement:

"Rien de plus que cela: Je t'aime entièrement, et j'attends que notre relation s'épanouisse, que tu sois prêt..."

Elle me prive de son regard, aussi, je m'accroupis face à elle pour essayer de cerner au mieux ce qu'elle essaie de me dire.

"Preeti... mon amour. Ce n'est que ma chambre ici. Pas un lieu de culte. Tu peux avoir les pensées que tu veux."

Un instant, je suis rassuré de savoir que ses pensées ne vont pas à l'encontre de ma religion. Mais la fin de sa phrase me donne un goût amer.

"Je suis désolé. Je n'avais pas réalisé. Je trouve notre relation très satisfaisante ainsi. C'est si important pour toi ?"

Mon chéri s'accroupit pour capter de nouveau mon regard. Je le lui donne, désemparer, et murmure après un long moment à méditer sur sa réponse:

"Tu veux me dire que physiquement tu ne ressens rien?"

Je laisse un silence puis hausse les épaules, presque désespérée:

"Je ne suis qu'une femme ordinaire, avec des désirs ordinaires. J'ai des sentiments pour toi, Tu ne me déplaît clairement pas, et un jour ou une autre j'aurais envie de toi. De fusionner avec toi. Mais je sais être patiente, je t'attendrais... Cela n'empêche que ça arrivera un jour."

J'écoute toutes ses pensées sans l'interrompre.
Finalement, dans un soupir, je dis :

"D'accord..."

Il me faut un peu de courage...

"Alors déjà, je ne ressens pas rien envers toi physiquement, cela me trouble et m'obsède mais surtout, cela me terrifie. A présent que je sais combien c'est important pour toi, c'est pire."

Jamais je ne serais à la hauteur de ses espérances, et plus j'attends, pire ce sera.

"Quand tu auras envie de moi, de... de fusionner. Dis le moi s'il te plaît. J'aurais quelque chose à te proposer."

J'écoute mortifiée ses soupirs et ses hésitations, jonglant entre l'envie de m'en aller pour ne pas faire face à ma honte et la gifle mentale que cela me procure, et mon amour quand même présent pour lui.

Alors je reste, écoutant sans un mot, sans un geste, les mains posées sur mes genoux et le regard fixé sur le bas du mur opposé.

cependant, je tique à sa "proposition", et relève des yeux plutôt inquiets sur lui.

"Quelque chose? C'est quoi ce quelque chose? ça ne me met pas du tout en confiance dit comme ça..."

À nouveau, son regard me fuit et, pire encore, sa confiance aussi. Finalement, ses yeux me retrouvent et j'ai le courage de proposer :

"Preeti, je serai toujours infiniment moins courageux que toi et à moins d'y être forcé, jamais je ne sauterai le pas."

Bon, quand il faut y aller...

"Je te propose donc sept rendez-vous. Pendant ces rendez-vous, je m'engage à aller toujours plus loin ... hors de ma zone de confort. Au septième, je serai prêt. Pour ma part, je ne demanderai que ta patience et m'aider à me dépasser. Est-ce que ça te va ?"

Sept rendez vous? L'idée est plutôt pas mal, et beaucoup moins effrayante que j'aurais pu l'imaginer. Je me détend donc un peu, et déclare, les yeux toujours baissés mais tournés vers mon amour:

"Soit. Sept rendez vous, ça t'ira? Je ne veux pas te forcer la main, et jamais je ne voudrais aller contre ta volonté... Comment tu vas procéder, quelles sont les étages à franchir avant le septième? Il y a-t-il tant de choses qui t'effraient en moi, ou en toi-même?"

Je prend sa main doucement, encore plongée dans mes pensées.

Sa main vient dans la mienne et je la place  contre ma joue pour m'y perdre un instant en fermant les yeux.

"Si je ne me force pas la main, ce sera de toutes façons de pire en pire. Je suppose que ce sera des rendez-vous normaux suivit de moments d'intimités mais si tu as des idées, je suis preneur."

J'ouvre les yeux sur elle et cherche son regard.

"J'ai énormément de blocages. En marler librement, comprendre ce désir totalement étranger, ta nudité, la mienne, des caresses plus poussées à celles plus intimes, et enfin... tu vois."

Mon contact a l'air de le rassurer, mais ses paroles ne le sont pas.

"Je ferais de mon mieux pour te mettre à l'aise... Mais il faudra que tu me dises si je vais trop loin, ou si je fait quelque chose qui ne te plait pas."

Il cherche à capter mon regard et je le lui donne, légèrement inquiet mais pas assez pour que ça soit évident.

"Je vois... Bon, je suppose que ça viendra, avec du temps et de la motivation... Enfin j'espère. Tu es bientôt prêt ou tu as besoin de plus de temps?"

"Je te remercie. Je t'aime Preeti. Je suis ravi de faire cette expérience avec toi. Je te fais confiance et je te dirai tout. "

Sa question me laisse pensif un instant puis je passe ma main sur sa joue. La réponse est "jamais".

"Je veux juste vérifier quelque chose avant..."

Je me penche vers elle pour l'embrasser, me basculant sur.les genoux pour être plus proche. C'est alors que je remarque qu'elle est sur mon lit. Cela me fait instantanément un peu peur.

Je baisse les yeux et demande timidement :

"Tu es libre ce soir ?"

"Je t'aime aussi Kyan. Et j'espère ne pas te décevoir en aucune façon..."

Je hausse un sourcil devant sa demande de "vérification" mais laisse faire. Nos lèvres se lient, et je détend rapidement, profitant de ce contact si doux, oubliant où nous sommes et pourquoi nous sommes là.

Son attitude change et il a l'air...intimidé. Ma main se déplace lentement contre sa joue, portant toute la tendresse du monde, et répond tout bas:

"Je suis là... C'est pour ça que tu fais cette tête?"

Qu'est ce qu'il a encore dans la tête?

Je me redresse et regarde Preeti.

"Désolé. J'ai juste du mal à me laisser aller et j'ai peur de te décevoir. Tu serais disponible à partir de quelle heure et surtout, tu voudrais qu'on fasse quoi ?"

Je remarque qu'il est d'ailleurs plus que temps pour nous d'aller manger.

"Il y a une brasserie dans le quartier. Ça te va ? Nous pourrions discuter."

Être en public pour ne plus ressentir l'étau de l'intimité qui se resserre autour de moi. Maintenant que je sais qu'elle éprouve du désir, c'est palpable à chaque fois que nous sommes seuls ensemble.

"Pourquoi je serais déçue? Je t'aime, et je n'ai jamais ressenti ça pour personne. Je n'ai pas l'impression que tu pourrais me décevoir un jour, surtout pour ça."

Je réfléchis pour ajoute:

"Je suis là jusqu'à 22 heures à peu près. Ensuite je dois aller travailler... et je reviens vers 2 heures. Je te laisse choisir le programme, si ça te met à l'aise..."

Mon estomac crie famine et je le gratifie d'un sourire:

"Ce sera parfait, merci!"

J'en oublie presque la discussion si étrange que nous venons juste d'avoir ensemble.

Pourquoi déçue ? Je suppose que vu à quel point ça semble important pour elle et à quel point je suis mal à l'aise, cela risque de ne pas être une expérience très agréable pour Preeti.

Ses mots d'amour me rassurent un peu.

"Tu préfères manger après, toi ? Je pense que je pourrais venir vers 20h... ça t'ennuie si je reste pour te regarder une fois encore ? On passera le reste de la soirée ensemble."

Je prend délicatement ses poignets pour la lever. Mes lèvres viennent à nouveau à la rencontre des siennes.

"Je te demande pardon pour toutes ces concessions."

Je reprend le sourire: il veut revenir me voir danser!

"ça me ferait un immense plaisir de te voir en coulisse ou en salle! On peut manger avant ensemble, et revenir à la fin du service à la maison. Sauf si ça te fait trop de temps?"

Le contact de sa bouche me calme instantanément, et tandis que mes mains joignent les siennes je murmure:

"Ce n'est pas grave, mon amour. C'est moi qui suis désolée, je t'en demande trop... J'espère juste que tu ne te fera pas violence pour qu'on vive pleinement notre histoire."

"La soirée qui se profile me semble impeccable. Nous ferons ... ce dont nous avons parler chez toi alors."

Après l'avoir vue danser une nouvelle fois, je pense que je serai plus dans l'état d'esprit.
Sa phrase finie, je dis songeusement :

"Si je dois me faire violence pour te garder, c'est nécessaire. J'espère juste que tout se passera bien, et que je ne manquerai pas de courage au moment venu. Mais pour le moment, tout va bien, ne t'inquiètes pas."

Nous sortons finalement de la chambre pour se diriger vers notre objectif : nous restaurer.

J'acquiesce malgré le ton teinté de crainte qu'il utilise. Si cela n'entamait pas encore ma volonté, cela heurtait quelque peu mon estime: étais je si peu désirable?

Je suis de nouveau mon chéri dans le couloir austère, gardant une distance raisonnable entre lui et moi, tout en ruminant mes pensées et ses craintes.
L'humain était objet de désirs... Et ce n'était pas son cas. Au moins, il n'était attiré par personne... Mais quand même, mon self estime en prenais un coup.

Pourtant, je ne pourrai pas le forcer.
J'attendrais s'il le faut.